Dans cet article, nous approfondissons la question et expliquons pourquoi la seule solution pour juguler la pandémie est la vaccination universelle, c’est-à-dire vacciner dans chaque pays plus de 90 % de la population, ce qui signifie rendre la vaccination obligatoire pour tous, sauf contre-indication médicale. De plus, tant que cet objectif n’est pas atteint, les gestes barrières devront être maintenus par tous, y compris par les vaccinés. C’est pourquoi les communistes ne peuvent soutenir le mouvement obscurantiste contre la vaccination, même s’il se drape dans la « liberté » et semble s’opposer au gouvernement en place.
Vaccination et immunité collective
Le principe de la vaccination est d’immuniser un humain ou un animal contre une maladie causée par un agent pathogène (virus, bactérie…) en lui inoculant une version atténuée ou une partie (par exemple, une protéine) de cet agent, ce qui stimulera le système immunitaire qui préparera ses défenses contre l’éventuelle infection. Le vaccin se constitue d’un agent antigénique (bactérie ou virus tué ou atténué, protéine de celui-ci, etc.) qui stimulera les défenses immunitaires, et d’un adjuvant ou immunomodulateur qui régule le fonctionnement de celui-ci.
Pour une brève histoire de la vaccination, en particulier des vaccins contre le covid-19, nous renvoyons le lecteur à notre article « Confinements et vaccinations en régime capitaliste » du 12 janvier 2021.
L’efficacité des vaccins est variable (environ 60 % chez un adulte en bonne santé pour celui, annuel, contre la grippe dont le virus mute rapidement, plus de 90 % pour le « DTP » contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite). Des effets secondaires temporaires et sans gravité, dus à la réponse immunitaire, peuvent fréquemment apparaître : fatigue, fièvre, céphalée, courbatures, rougeur… Des effets secondaires plus graves peuvent apparaître rarement, généralement dus à un dérèglement immunitaire ou à une intolérance à l’adjuvant. Comparés aux traitements médicamenteux qui reposent sur l’ingestion répétée de molécules dont l’efficacité va souvent de pair avec la toxicité, les vaccins sont bon marché et ont peu d’effets secondaires prolongés. Dans l’histoire des vaccins, il n’y a jamais eu d’effet secondaire apparaissant pour la première fois plus de trois mois après l’injection.
La vaccination de masse, jointe aux réseaux d’eau potable, a permis d’éliminer de nombreuses maladies qui décimaient l’humanité, grâce à l’immunité collective. Des affections ont aussi diminué ou ont disparu dans les élevages également : par exemple, la peste bovine a disparu en 2011. Même si les agents pathogènes ne se transmettent pas, en général, d’une espèce à l’autre, la vaccination d’animaux a parfois des conséquences positives sur la santé humaine : la vaccination contre la salmonellose des volailles a fait baisser de moitié les cas humains depuis 2004.
Pour qu’une épidémie s’éteigne, il faut qu’en moyenne chaque individu infecté contamine moins d’une personne autour d’elle. Tout virus a un nombre de reproduction R qui représente le nombre moyen de personnes à qui une personne infectée transmet le virus. Donc, pour que l’épidémie s’éteigne, il faut que parmi ces R personnes, en moyenne plus de R – 1 d’entre elles doivent être immunisées (par la vaccination ou en ayant eu la maladie auparavant), par conséquent le taux d’immunisation de la population doit dépasser 1 – 1/R. Par exemple, le virus de la rougeole est extrêmement contagieux, avec un R d’environ 16, donc pour éviter une épidémie de rougeole, il faut que pratiquement 95 % de la population soit vaccinée ; ainsi, quand la couverture vaccinale de la population diminue, on constate l’apparition de foyers épidémiques, faisant des victimes parmi les personnes les plus fragiles. La vaccination universelle à l’échelle de la planète a permis d’éradiquer la variole. En France, la vaccination obligatoire contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite a permis d’obtenir l’immunité collective, ainsi les cas sont extrêmement rares (souvent des personnes âgées non ou mal vaccinées). L’éradication de la poliomyélite, qui ne reste au stade épidémique dans deux pays seulement, reste un objectif de l’OMS.
Les nouveaux vaccins contre le covid-19 sont fiables et efficaces
Si certains vaccins développés contre le covid-19 se basent sur la technique traditionnelle du virus atténué ou inactivé, ceux utilisés en France se basent sur deux technologies récentes. Ceux d’AstraZeneca (ou Vaxzevria) et de Johnson & Johnson utilisent un vecteur viral : un adénovirus inoffensif pour l’être humain amène aux cellules la protéine S (Spike) du virus, l’antigène qui doit déclencher la production d’anticorps. Ceux de Pfizer-BioNTech et de Moderna utilisent l’ARN messager (ARNm) : les brins d’ARNm injectés transmettent aux cellules l’instruction de synthétiser cette protéine S. Ainsi l’antigène entre en contact avec le système immunitaire qui produit alors les anticorps. Ensuite, pour tous ces vaccins, le système immunitaire reconnaîtra la protéine S du virus comme intrus et développera des défenses contre celui-ci.
La propagande antivaccins soulève de nombreuses objections aux vaccins contre le Covid en invoquant leur nouveauté et le caractère innovant de la technologie utilisée. Mais celles-ci ont toutes été réfutées par les spécialistes.
Risque de thrombose : Quelques cas de thrombose survenues chez des patients vaccinés par AstraZeneca ont conduit le gouvernement français à suspendre son utilisation, puis à le restreindre aux personnes âgées de plus de 55 ans. Ces cas sont très rares, on dénombrait fin mars 62 cas de thrombose veineuse cérébrale dans le monde, dont 44 dans les 30 pays de l’Espace économique européen pour 9,2 millions de doses de administrées. Une étude de chercheurs de l’Université d’Oxford (« Risk of rare blood clotting higher for COVID-19 than for vaccines », 15 avril 2021) a comparé le risque de thrombose avec les vaccins et avec le covid-19. Il en ressort qu’il y a 39 cas de thrombose par million pour les patients infectés par le covid-19, 4 cas par million pour les vaccins Pfizer et Moderna, et 5 cas par million après la première dose du vaccin AstraZeneca. Rappelons également qu’avec les pilules contraceptives de troisième et quatrième génération, le risque est d’environ 6 pour 10 000 femmes par an, même si ce type thrombose est mieux connu, donc mieux maîtrisé, que celui provoqué par le vaccin.
« Ces vaccins ont été développés trop rapidement » : Traditionnellement, le développement d’un vaccin prenait une dizaine d’années, mais ici on n’a mis qu’un an. En fait, vu l’urgence, dans un contexte de course au vaccin, les États ont investi massivement dans les labos pharmaceutiques et les labos eux-mêmes ont investi massivement en matériel et personnels. Certains tests qui se faisaient auparavant dans une séquence ont été menés en parallèle. Les procédures administratives ont été améliorées pour limiter les retards. De plus, les progrès de la technologie permettent d’accélérer les processus. Et si les multinationales mettaient du temps pour développer les vaccins, c’est aussi parce qu’ils sont coûteux en fabrication (recherches, tests, validations, productions) et ne rapportent que peu de profits surtout si une seule injection est nécessaire avec très peu de piqures de rappels au cours de la vie.
« C’est une nouvelle technologie qu’on ne maîtrise pas » : L’ARN messager a été découvert en 1961, et il fait l’objet d’expérimentations pendant plusieurs décennies. En particulier, depuis 2009 des vaccins à ARNm sont développés, notamment contre Ébola. Depuis 2015, dans le domaine vétérinaire, un vaccin à ARN limite la propagation de la grippe aviaire, un autre celui du coronavirus de la diarrhée épidémique porcine.
« On n’a pas de recul sur ces vaccins » : Les tests des vaccins ayant commencé au milieu de l’année 2020, cela fait donc plus d’un an qu’on les examine sur le terrain. Cinq milliards de doses ont été injectées, et tous les cas d’effets secondaires sérieux sont remontés et analysés. Il n’y a jamais eu dans l’histoire un vaccin autant surveillé.
« On ne connaît pas les effets secondaires à long terme » : L’ARNm injecté dans le corps ne survit pas, il est rapidement détruit (en quelques heures ou un jour), donc tout effet secondaire est provoqué par son action juste après l’injection. De plus, comme cet ARNm est en quelque sorte un morceau du virus, tout effet secondaire devrait également être provoqué par le virus lui-même, cf. plus haut sur le risque de thrombose. Comme dit plus haut, dans l’histoire des vaccins, tous les effets secondaires ont été constatés dans les trois mois suivant l’injection. L’idée d’un effet secondaire qui se manifesterait après plusieurs années, sans signe annonciateur à court terme, est une chimère. La comparaison avec les effets secondaires à long terme de médicaments comme le Levothyrox (que le patient prend chaque jour pendant le reste de sa vie) ne tient pas debout.
« Le vaccin peut modifier mon ADN » : Les vaccins n’utilisent pas d’ADN, mais de l’ARNm, qui ne pénètre pas dans le noyau de la cellule.
« Ce vaccin n’est pas naturel » : Un aspect du progrès médical est d’implanter des prothèses à la place de de segments d’artères détériorées, d’os abimés, de dents manquantes, etc. qui n’ont rien de « naturel », pas plus que la plupart des médicaments qu’absorbent en cas de besoin la plupart des obscurantistes et des complotistes. Les vaccins traditionnels à virus atténué ou inactivé contiennent un adjuvant chimique, qui peut causer des effets secondaires ; au contraire, les vaccins à ARNm n’ont pas d’adjuvant, mais un solvant lipidique, qui risque bien moins de causer des problèmes. Sinon, l’ARNm est une substance naturelle, on a mis dans le vaccin uniquement un petit morceau de l’ARN du virus.
La réalité sur le terrain montre que ces vaccins protègent à environ 90 % contre les formes graves et l’hospitalisation, même avec le variant Delta. Ils diminuent aussi le risque d’infection et celui de transmission. La comparaison entre les pays suivant leur taux de vaccination le montre, comme les statistiques nationales.
Sur la base des patients entrés à l’hôpital entre le 9 et le 15 août dont un test positif a pu être identifié dans SI-DEP, 80 % des admissions en soins critiques et 76 % des admissions en hospitalisation conventionnelle sont le fait de personnes non-vaccinées, tandis que les patients complètement vaccinés représentent respectivement 13 % des admissions en soins critiques et 17 % des admissions en hospitalisation conventionnelle. Rappelons qu’à cette date, en population générale, la part des personnes non vaccinées est de 35 % et celle des personnes complètement vaccinées de 51 %. (DREES, Communiqué de presse, 27 août 2021)
La vaccination universelle est nécessaire
Les campagnes de vaccination ont débuté en ciblant les personnes les plus vulnérables, afin de désengorger les hôpitaux, en particulier les services de soins intensifs. Mais cela ne signifie pas que la vaccination n’est qu’un problème de personnes dites « à risques » ; c’est une grave erreur que de le penser, pour trois raisons.
Tout d’abord, ne pas être dans une catégorie classée « à risques » ne signifie pas qu’il n’y a aucun risque. Une personne relativement jeune (moins de 40 ans), apparemment en bonne santé, peut faire une forme grave du covid, aller en réanimation, ou même en décéder. Même sans faire de forme grave, environ 10 % des patients peuvent faire un covid long, souffrant pendant plusieurs mois et se trouvant dans l’incapacité de travailler ; le patient typique est une femme jeune et active. Les enfants et adolescents contaminés peuvent faire un syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (PIMS), une maladie sérieuse qui a envoyé des enfants en service de soins intensifs. En France, l’incidence cumulée des PIMS en lien avec le covid-19 entre le 1er mars 2020 et le 25 juillet 2021 a été estimée à 38,3 cas par million d’habitants dans la population des moins de 18 ans ; l’âge médian des patients est de 7 ans.
Ensuite, le vaccin n’est pas efficace à 100 %, des personnes vaccinées peuvent être contaminées et tomber malade ; en particulier, des personnes très fragiles, par exemple des vieillards, peuvent mourir du covid-19 tout en étant vaccinées. Par ailleurs, certaines personnes ne peuvent pas recevoir le vaccin à cause de contre-indications médicales, et certains patients sont très mal protégées par le vaccin à cause de l’insuffisance de leurs défenses immunitaires : les immunodéprimés, ou les transplantés qui prennent un traitement immunosuppresseur pour empêcher leur système immunitaire de rejeter l’organe greffé. Pour toutes ces personnes, la seule protection est de ne pas être infectées par leur entourage.
Enfin, une personne non-vaccinée aura, en cas de contamination, une charge virale plus importante, sera plus contagieuse et augmentera la circulation du virus. C’est particulièrement le cas des jeunes, qui ont une vie sociale plus intense et peuvent, par sentiment de sécurité, relâcher les gestes barrière. Cette circulation accrue du virus augmente le nombre de mutations, donc accélère l’émergence de nouveaux variants.
La vaccination d’une majorité de la population, mais à un niveau inférieur à celui de l’immunité collective, peut conduire à l’émergence puis à la domination d’un variant résistant à la vaccination : la circulation du virus parmi les non-vaccinés engendre le variant, puis celui-ci devient dominant en contaminant massivement les vaccinés. Une étude récente (Rella, Kulikova, Dermitzakis et al., « Rates of SARS-CoV-2 transmission and vaccination impact the fate of vaccine-resistant strains », Scientific Reports 11, 15729 (2021)) a fait une modélisation mathématique de ce phénomène. Elle confirme qu’une vaccination rapide de la population réduit le risque d’un tel variant. Sinon, le moment critique est celui où 60 % de la population est vaccinée ; alors, un relâchement des gestes barrières maximiserait la probabilité de dominance d’un variant résistant à la vaccination.
Axer la vaccination uniquement sur les personnes les plus vulnérables relève de la conception de « vivre avec le virus », c’est-à-dire de continuer à subir sans fin la pandémie tout en maintenant à un niveau gérable les cas graves et les hospitalisations. Au contraire, il faut se placer dans la perspective de juguler la pandémie et traiter le virus du covid-19 comme celui de la rougeole, donc obtenir l’immunité collective par la vaccination universelle. Avec le R du variant Delta estimé à environ 10, et vu le fait que les vaccins ne protègent que partiellement contre l’infection, cela signifie que dans chaque pays, bien plus de 90 % de la population devra être immunisée, donc vaccinée (la contamination donnant une immunité inférieure, une dose de vaccin reste nécessaire). Et pour éviter de nouveaux variants plus contagieux ou résistant à la vaccination, les gestes barrière devront être maintenus par tous tant que cet objectif ne sera pas atteint.
Le « passe sanitaire » du gouvernement : inefficace, incohérent et stigmatisant
Dès la mi-juin, on pouvait constater que le nombre de premières injections du vaccin baissait, tandis que le variant Delta s’installait. On pouvait donc prévoir que la situation en Catalogne et au Royaume Uni préfigurait ce qui pouvait se passer en France, et la faible vaccination dans les Antilles devait laisser présager la catastrophe à venir. Pendant la seconde moitié de juin, plusieurs spécialistes alertèrent sur le rythme insuffisant de la vaccination. Le 9 juillet l’Académie nationale de médecine réclama la vaccination obligatoire à partir de 12 ans, après l’avoir demandée pour certaines activités professionnelles le 25 mai. Ce n’est qu’à ce moment que le gouvernement réagit ; loin de mettre en œuvre la vaccination universelle préconisée par l’Académie, il bricola un « passe sanitaire » bien différent.
Tout d’abord, l’obligation vaccinale est imposée uniquement à certaines professions. Les pompiers doivent se vacciner, mais pas les policiers qui souvent les accompagnent. Les soignants le doivent, mais pas les personnes les plus âgées qui sont le plus à risque de formes graves du covid. Dès lors ces professions se sentent stigmatisées, ce qui pousse certains à refuser la vaccination, qui est pourtant nécessaire. Une véritable politique de vaccination universelle commencerait par mettre en œuvre l’obligation vaccinale pour un nombre plus grand de professions en contact avec le public (enseignants, commerciaux, livreurs, routiers, policiers, douaniers…) ainsi que pour certaines catégories de la population (par exemple, les plus de 80 ans) ; ensuite, au rythme des vaccinations réalisées, cette obligation s’étendrait à d’autres catégories. Une telle obligation, planifiée et largement partagée ne créerait pas ce sentiment d’injustice et de stigmatisation.
De même, dans les lycées et collèges, la proposition de Blanquer, qu’en cas de covid dans une classe les élèves non-vaccinés soient « évincés », suscite la division et le sentiment de discrimination, alors que l’obligation de vaccination pour tous les lycéens et collégiens à partir de 12 ans ne discriminerait personne.
Ensuite, le passe exigé des clients de divers lieux accueillant le public (cafés, restaurants, cinémas, musées, parcs de loisir, etc.) ou des voyageurs des trains à longue distance est présenté comme l’incitant à la vaccination. Outre la surcharge de travail imposée aux entreprises et professions concernées, ce n’est pas leur rôle de vérifier la vaccination. Une véritable politique d’incitation à la vaccination devrait partir des autorités sanitaires et de la Sécurité sociale. Il y a une large frange de population marginalisée dans la société capitaliste pour diverses raisons (âge, handicap, isolement géographique, désert médical, mauvaise maîtrise de la langue française, illettrisme, fracture numérique, etc.) qui n’est pas allée à la vaccination, et qui ne fréquente pas toujours les lieux où le passe est exigé. Il est donc nécessaire que des équipes de vaccination aillent vers ces populations. On peut ainsi remarquer qu’à la mi-août, la vaccination complète des plus de 80 ans monte extrêmement lentement, s’approchant des 80 %, tandis que celle des 60–69 ans dépasse déjà 80 % et celle des 70–79 ans 90 %.
Il n’y a eu aucune campagne pour expliquer scientifiquement l’utilité de la vaccination et le fonctionnement des nouveaux vaccins, en particulier aucun des spots gouvernementaux inondant la télévision ne donne la moindre explication, et une grande partie de la population n’y comprend rien. Au contraire, le gouvernement a alimenté la défiance envers les vaccins, tout d’abord au début de la campagne en conditionnant la vaccination à un entretien pré-vaccinal et à la signature d’un formulaire de consentement éclairé, donnant l’impression que c’était quelque chose de dangereux, et en refusant d’ouvrir des centres de vaccination, au prétexte que les gens n’y viendraient pas ; plus tard, en suspendant le vaccin AstraZeneca dès les premiers cas de thrombose.
Enfin, le « passe sanitaire » du gouvernement français n’est pas si sanitaire que cela. Le 29 avril, l’Académie nationale de médecine proposait un « passe vaccinal » : l’accès à certaines activités serait conditionnée par la présentation d’un certificat de vaccination ; par contre, les tests virologiques ou sérologiques ne suffiraient pas, à cause de leur « caractère incertain ou éphémère ». Au contraire, le passe du gouvernement pose l’équivalence entre la vaccination complète et un test PCR ou antigénique négatif ; ensuite l’équivalence a été étendue à un autotest réalisé sous la surveillance d’un professionnel, et la validité des tests a été étendue de 48 h à 72 h. Or la contagion par le variant Delta est très rapide, un patient peut se révéler contagieux moins de 72 h après la contamination. De ce point de vue, la proposition du ministre de la santé Véran de ne pas rendre le masque obligatoire dans les lieux soumis au passe sanitaire est totalement irresponsable. On a vu plusieurs fêtes avec passe à l’entrée et de nombreuses contaminations à la sortie, et les serveurs de boîtes de nuit ont aussi été largement contaminés. Ce qui fait dire à certains spécialistes que le passe sanitaire, en donnant un faux sentiment de sécurité, a favorisé la contamination.
L’exigence absurde du passe sanitaire pour les patients admis à l’hôpital hors urgences risque de conduire à des retards et suspensions de soins et à une surcharge des services d’urgence.
Un gouvernement ouvrier saurait motiver la population en vue de la vaccination en mobilisant les soignants et la communauté scientifique. Mais ce gouvernement qui a, à la suite des précédents, soumis le système de santé au profit et organisé la casse de l’hôpital public ne le peut pas. Il ne lui reste que les menaces de licenciement ou de suspension sans salaire à l’encontre des soignants ou pompiers réfractaires, la condescendance ou la moquerie à l’encontre du « loisir de faire grève ».
Le discours de Macron du 12 juillet a pu mobiliser les retardataires de la vaccination, mais pas les réfractaires : après une remontée des premières injections pendant deux semaines, celles-ci baissent de nouveau depuis le 1er août. Par contre, les tests de confort (pour pouvoir accéder aux lieux soumis au passe) explosent.
La liberté, c’est de passer au feu rouge ?
Suite au discours de Macron, s’est rassemblée une protestation hétéroclite s’opposant au passe sanitaire qui convoque chaque samedi des manifestations sur le slogan de « liberté » où les gestes barrière (masque, distanciation physique) ne sont pas respectés.
Le noyau dur de ce mouvement agrège plusieurs secteurs de la réaction. Tout d’abord les arriérés antivaccins, dont les plus déterminés sont à l’origine d’insultes et de menaces à l’encontre de pharmaciens, de dégradations de tentes de tests et d’actes de vandalisme sur des centres de vaccination. Ensuite des partis « souverainistes » qui concurrencent LR sur sa droite : DLF (Dupont-Aignan), UPR (Asselineau), et surtout « les Patriotes » de Philippot, un ancien chef du RN hostile de longue date aux mesures sanitaires ; toute honte bue, le petit chef xénophobe et fascisant dénonce « l’apartheid » et « la dictature ». Enfin, des antisémites, notamment portant des pancartes avec « Mais qui ? », en référence aux propos antisémites tenus sur CNews par le général Delawarde, un des cosignataires de la tribune des militaires menaçant d’un coup d’État.
On y voit aussi des imbéciles assimilant le passe sanitaire, voire le vaccin, au nazisme et au génocide des Juifs et des Tziganes, en particulier certains portaient une étoile jaune avec « non-vacciné » le 17 juillet, jour où l’on commémorait le 79e anniversaire de la rafle du Vélodrome d’hiver par la police française.
S’y associent certains « gilets jaunes » devenus incapables de mobiliser en leur propre nom, cristallisant leur colère sur la personnalité de Macron, quelques soignants et pompiers réfractaires à la vaccination, des militants de l’écologie qui trouvent qu’il y a trop d’humains (les autres, pas eux), des dupes de « médecines alternatives », des individualistes forcenés proclamant leur liberté de vivre et mourir à leur guise sans se soucier des autres, et surtout une grande masse de personnes non politisées, souvent venues en famille, victimes de diverses craintes irrationnelles à l’encontre de la vaccination, affirmant vouloir « protéger nos enfants »… du vaccin, pas de la maladie !
Ces manifestations du samedi ont un caractère nationaliste marqué, avec les nombreux drapeaux tricolores qui sévissaient déjà chez les gilets jaunes, et dans une moindre mesure « citoyenniste », de type libertarien ou anarchiste, sans exclure des opportunistes congénitaux qui croient que, puisque Macron est un représentant du grand capital (exact), tout ce qui s’oppose à Macron est bon à prendre (faux).
Les manifestants affirment vouloir défendre la « liberté » contre la « dictature sanitaire ». Quand, à la suite des attentats islamistes, le gouvernement avait instauré l’état d’urgence, interdit des manifestations pour le climat et encouragé les perquisitions arbitraires, Dupont-Aignant, Philippot et les antivaccins n’hurlaient pas à la « dictature ». Il ne s’agit pas non plus du droit à aller au café, restaurant ou cinéma : lors des confinements et du couvre-feu ceux-ci étaient fermés, ce qui ne suscitait pas de manifestations de masse. Il s’agit donc bien de la prétendue liberté de ne pas se vacciner et de contaminer les autres.
Ce sont les réactionnaires qui situent la liberté vraie dans l’individualité, dans le particularisme des individus, des localités, des provinces… (Friedrich Engels & Karl Marx, L’Idéologie allemande, 1845, III)
En matière de santé publique, la règle n’est pas la liberté individuelle, mais la norme obligatoire. Un travailleur salarié ne choisit pas librement d’être affilié ou non à la Sécurité sociale, cette affiliation est obligatoire. Les parents ne choisissent pas librement de battre ou non leurs enfants, de les instruire ou non, de les soigner ou non. Dans l’intérêt de toute la population et des enfants eux-mêmes, certains vaccins sont obligatoires. En France, leur nombre est passé de 3 à 11 en 2018 (rougeole, tétanos, diphtérie, poliomyélite, hépatite B, coqueluche, oreillons, rubéole, méningocoque C, pneumocoque, influenza B) permettant d’augmenter la couverture vaccinale contre ces maladies. Sur les lieux de travail et dans les villes, les règles de sécurité et d’hygiène ne sont pas optionnelles, elles s’imposent. La limitation de vitesse des véhicules n’est pas une option ; le port de la ceinture de sécurité est obligatoire pour tous les occupants d’un véhicule. Il est interdit de fumer dans les lieux publics fermés. On n’est pas libre d’épandre n’importe quel pesticide sur un champ ou un parterre de fleurs, certains sont interdits à cause de leur nocivité. Et l’utilisation de l’amiante dans les bâtiments est proscrite.
La « liberté individuelle » en matière de santé, en particulier quand le comportement individuel peut affecter les autres, relève de l’idéologie spontanée des grands bourgeois habitués à violer les règles sociales, de petits bourgeois dont la vie sociale dépend de la capacité à faire face à la concurrence, ainsi que du « lumpenprolétariat » asocial qui vit d’expédients ou de la délinquance. Elle s’oppose au combat séculaire du mouvement ouvrier pour protéger la santé des travailleurs.
Historiquement, la liberté individuelle a été celle de vivre comme on veut sa vie privée à condition de ne pas nuire aux autres, et, face à la tyrannie des clergés et des monarques, d’afficher et défendre librement ses opinions en matière de religion et de politique, de pratiquer le culte de son choix ou de n’en pratiquer aucun. C’est aussi la liberté des chercheurs, écrivains et artistes, de travailler, créer et publier librement, même si leurs œuvres peuvent choquer les préjugés, comme le physicien Galilée condamné en 1633 par l’Église catholique pour avoir défendu le système héliocentrique de Copernic, ou le poète Charles Baudelaire et ses éditeurs condamnés par la justice française en 1857 pour « outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs » lors la publication des Fleurs du mal.
Rien à voir avec la liberté de contaminer son entourage ou de servir de bouillon de culture à un nouveau variant.
Si c’est contre Macron, c’est bon ?
Aucune confédération syndicale ne s’est placée sur le terrain de la vaccination universelle. Cette position leur aurait permis de mener une campagne vigoureuse pour une vaccination massive sur les lieux de travail, en exigeant du patronat et des administrations la mise en place d’unités de vaccination mobiles allant dans les entreprises et les services. Elles se sont trouvées démunies quand Macron a exigé la vaccination obligatoire de tous les travailleurs de la santé et des services de secours et menacé de sanctions les réfractaires. Elles n’ont alors mené qu’une lutte défensive contre ces sanctions. Les syndicats SUD ont tenté de lancer des grèves contre la vaccination obligatoire de ces deux catégories, mais le refus de l’obligation vaccinale dans des secteurs particuliers prend le problème à l’envers, et ne peut pas unifier la classe ouvrière. Ce sont les travailleurs de la santé qui devraient convaincre toute la population, y compris les réfractaires dans leurs rangs, de la nécessité de vacciner tout le monde.
Le PS se contente de menacer le gouvernement de saisir le Conseil d’État (Communiqué, 19 juillet). Le PCF met en cause la « gestion libérale » (13 juillet) et, comme le PS, se garde de se compromettre avec la réaction (Christian Picquet & Maryse Montangon, 25 août).
Par contre, le parti populiste et souverainiste de gauche LFI soutient les manifestations des samedis mêlant antivaccins et antipasse sanitaire et y participe. En effet Mélenchon, loin de défendre l’obligation vaccinale, s’est au contraire placé sur le terrain de l’individualisme bourgeois en invoquant une figure anticommuniste, une disciple de Kant restée liée toute sa vie au philosophe nazi Heidegger.
À présent, vous prenez une pente, plus hasardeuse encore, quand vous entrez dans l’intime du corps sain ou malade, souffrant ou mourant, pour y établir le règne de vos lois et règlements absurdes. Allez lire chez Hannah Arendt où mènent inéluctablement les effractions du politique dans l’intime. (Jean-Luc Mélenchon, Assemblée nationale, 25 juillet)
Dès lors, pour Mélenchon, qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse :
Ces marches du samedi sont hors norme en plein été. Elles procèdent de la logique caractéristique des révolutions citoyennes observées dans le monde. Ce qui compte c’est la volonté d’autocontrôle des gens sur leur vie et sur les décisions prises à leur sujet. Je ne fais pas le tri du détail des mots d’ordre de toute sortes qui fleurissent au fil des cortèges. Cependant beaucoup de gens ont compris qu’il ne faut laisser des isolés donner des prétextes aux observateurs malveillants. Sachons-le : un tel mouvement ne peut pas être « récupéré » par qui que ce soit. Il est sa propre fin politique. Comme nombre de mes amis Insoumis je lui porte considération et compréhension. (Jean-Luc Mélenchon, Facebook, 1er août)
LO dénonce à juste titre les menaces de licenciement ou de suspension sans salaire des soignants et pompiers non vaccinés, affirmant qu’un tel nouveau motif de licenciement est une attaque contre les travailleurs. Mais elle s’oppose à l’obligation vaccinale de ces deux professions sans défendre la vaccination universelle, parlant de « vaccination contrainte et forcée » (Nathalie Artaud, 19 juillet), sans se rendre compte que si la population n’est pas globalement vaccinée, les travailleurs de la santé publique, même en nombre accru, seront bientôt submergés. LO sympathise aussi avec les manifestations antipasse, « il n’y a pas que des antivaccins dans ces manifestations, il y a une colère aussi qui s’exprime contre Macron » (Nathalie Artaud, 19 juillet). À Chaumont, le 31 juillet, un conseiller municipal LO est intervenu lors de la manifestation. Pour séparer sa « colère » de celle des antivaccins et de Philippot, LO critique le slogan abstrait de liberté mais elle n’ose pas dénoncer la « liberté » de contaminer.
Pour le NPA et son variant RP, il s’agit de ne jamais aller à contrecourant. Le NPA s’est prononcé le 12 juillet pour « une vaccination universelle sans laquelle la répétition de « vagues », de plus en plus contagieuses et virulentes, est inéluctable », car « la vaccination est bien un enjeu décisif pour sortir de cette pandémie, et tout doit donc être fait pour la faciliter, en allant au-devant de celles et ceux qui ne peuvent pas se vacciner ou ne sont pas encore convaincuEs. » Il veut aussi « imposer à ceux qui gouvernent le monde la levée des brevets et la réquisition des entreprises pharmaceutiques », ce qui va un peu plus loin que LO, sans toutefois parler de l’expropriation des groupes capitalistes de la santé.
Pour le NPA, le problème avec Macron, c’est « l’autoritarisme », il veut « vaincre au lieu de convaincre ». Le refrain anarchiste de l’autoritarisme revient dans son communiqué du 28 juillet. La notion d’autoritarisme sanitaire n’a pas de contenu de classe. La législation sanitaire impose de façon « autoritaire » toute une série de mesures pour protéger la santé de la population. L’autoritarisme de Macron n’est qu’une manifestation du bonapartisme inhérent à la 5e République, exacerbé par la crise, et cet autoritarisme n’est pas « sanitaire » ou « libéral », mais bien capitaliste : maintenir à flot « coûte que coûte » le capitalisme français.
Le NPA se montre favorable aux manifestations antivaccins et antipasse, « la gauche sociale et politique ne peut rester l’arme au pied », d’ailleurs « les dizaines de milliers de personnes qui se mobilisent ne sont pas une meute d’affreux réactionnaires antivaccins. » Le NPA se propose de défendre ses revendications, « y compris en nous joignant, partout où il est possible de porter une telle politique, aux initiatives de mobilisation » (Communiqué, 28 juillet) et soutenir « la candidature anticapitaliste et révolutionnaire de Philippe Poutou à l’élection présidentielle » (Communiqué, 12 juillet).
Mais comment défendre une politique « révolutionnaire » (sic), ou simplement une position rationnelle, dans des rassemblements interclassistes fourretout, où la vaccination est au mieux un choix individuel ou pire un « complot des élites » ?
Le CCR-RP, la dernière scission du NPA, a fait de la lutte contre le passe sanitaire un point fort de son apparition indépendante, lui consacrant de très nombreux articles, souvent répétitifs. Il faut dire que CCR-RP partage avec son organisation d’origine un opportunisme congénital. En particulier, les chefs du NPA, de LO, de CCR-RP… se gardent bien de combattre pour la grève générale quand les conditions en sont réunies par crainte d’affronter les bureaucraties syndicales de la CGT, de SUD et de la FSU.
La seule manière pour les chefs de CCR-RP de justifier leur scission du NPA et la création d’un groupe supplémentaire est d’avoir collé plus que tout autre aux gilets jaunes, d’avoir abandonné toute réserve vis-vis-à-vis de ses chefs non élus et non contrôlés. Les gilets jaunes furent en 2018-2019 un mouvement très confus, axé par ses animateurs autodésignés contre la taxation du carburant, contre la limitation de vitesse et pour le référendum (cher à Louis Bonaparte et au général de Gaulle) plutôt que sur les revendications des salariés et le socialisme. D’où l’omniprésence des drapeaux tricolores, la complaisance envers le complotisme, l’homophobie, d’où le style poujadiste des actions : blocage des zones commerciales ou industrielles, occupation des ronds-points routiers, dégradations d’équipements publics et de radars, affrontements stériles avec la police…. (voir nos articles [1], [2] et [3])
Du moins, ce mouvement entrainait-il au départ quelques dizaines de milliers de travailleurs salariés venant des petites villes et des petites entreprises. Rien de tel avec les antipasse et antivaccins. Certes, tout mouvement social de grande ampleur commence dans une certaine confusion, mais la nature politique des manifestations antivaccins et antipasse est réactionnaire. Leur centre de gravité est dans la petite-bourgeoisie traditionnelle, pas dans la classe ouvrière. Selon un sondage IFOP réalisé du 20 au 21 juillet pour le Journal du dimanche sur les premières manifestations du samedi, 39 % des salariés étaient favorables mais 42 % déjà défavorables ; 50 % des artisans ou commerçants étaient favorables et 39 % défavorables (IFOP, Le Regard des Français sur le mouvement de protestation contre le pass sanitaire, 26 juillet, p. 8). 32 % des habitants de la région parisienne étaient favorables, 36 % des autres grandes agglomérations, 41 % des petites villes (p. 8). 47 % des électeurs de Le Pen de 2017 étaient favorables, 39 % de ceux de Mélenchon, 38 % de ceux de Hamon (p. 9).
79 % de ceux qui ne voulaient pas se faire vacciner fin juillet étaient favorables aux manifestations antivaccins et antipasse, 68 % des vaccinés leur étaient hostiles (p. 9). Depuis, la mortalité des non-vaccinés à l’hôpital, le reconfinement aux Antilles ont fait réfléchir probablement nombre de salariés qui font partie par nature d’un collectif de travail, dont l’activité quotidienne repose sur la collaboration.
Un sondage récent d’Elabe pour BFMTV, réalisé les 20 et 21 août et publié le 23, conforte cette hypothèse. 54 % des sondés se déclarent opposés ou hostiles au mouvement antivaccins et antipasse, soit 6 % de plus que lors de son enquête du 3 août. Le passe sanitaire est approuvé par 77 % des sondés dans les transports (avions, trains ou cars longues distances), 72 % des sondés pour l’accès aux lieux de loisirs et de culture, 64 % dans les bars, cafés et restaurants. La seule désapprobation qui monte, à juste titre, est envers l’exigence du passe à l’hôpital : 65 % l’approuvent, soit 5 % de moins.
Le CCR-RP donne dans la surenchère en reprenant le slogan absurde de « loi liberticide ». Il appelle les organisations syndicales à se joindre massivement aux manifestations antivaccins et antipasse ! Quand la direction de la CGT prend une position raisonnable le 21 juillet, le CCR-RP l’accuse… de trahison : « un abstentionnisme qui sonne comme une trahison, et qui constitue une erreur profonde » (Djibril Ichen, 22 juillet). Puis le CCR-RP se réjouit d’un communiqué de Solidaires appelant à y participer (Paul Morao, 24 juillet).
Pour dissimuler son adaptation et son suivisme, le CCR-RP est bien obligée de dénoncer « la participation de l’extrême droite » (Paul Morao, 6 août).
Si, d’un côté, Florian Philippot, Nicolas Dupont Aignan, et autres personnalités covidosceptiques ont cherché à canaliser la colère sur le terrain de l’extrême-droite et des idées racistes, et confusionnistes, de l’autre, des secteurs des Gilets jaunes, dont Jérôme Rodrigues, ont joué un rôle progressiste, en appelant à une manifestation indépendante. (RP, Résolution, 8 août)
Le CCR-RP prétend même que le mouvement antipasse et antivaccin doit expulser les éléments fascisants et fascistes : « dégageons l’extrême-droite et défendons une stratégie sanitaire ouvrière ! » (Paul Morao, 6 août).
L’indépendance de la classe ouvrière est nécessaire pour une véritable solution
La politique de Solidaires, de LFI, de LO, du NPA, du CCR-RP, du POID, du POI, du PCOF et compagnie revient à investir un mouvement interclassiste à domination petit bourgeoise, obscurantiste et réactionnaire, pour le redresser, pour en faire un mouvement progressiste. Pourquoi pas transformer l’eau en vin ou le plomb en or ?
Les manifestations antipasse et antivaccins ne relèvent pas du mouvement ouvrier, les démagogues fascisants donnent le ton et la petite bourgeoisie fournit les troupes. Personne ne saurait en expulser les complotistes, les antisémites et les fascistes. Malgré leurs rodomontades, les populistes de gauche sont bien incapables de chasser « l’extrême-droite » de la rue. Tout au plus, ils manifestent séparément à Paris, tout en restant généralement mêlés à eux en province.
C’est la même logique stupide qui conduisit une aile du mouvement socialiste et une partie de l’anarchisme à soutenir en 1887 le général Boulanger, massacreur des communards en mai 1871, au nom de la lutte contre la 3e république anti-ouvrière. C’est la même logique criminelle qui poussa le PCF stalinisé à faire manifester l’Association républicaine des anciens combattants avec les organisations fascistes en 1934 contre l’assemblée nationale. C’est la même logique qui a conduit le PS, le PCF, LFI et toutes les directions syndicales sauf Solidaires à soutenir les manifestations de policiers contre Macron début 2021 (voir nos articles [1] et [2]).
Un gouvernement ouvrier serait amené à prendre face à la pandémie des mesures sanitaires obligatoires basées sur la science et dans l’intérêt de la population laborieuse. La politique du gouvernement, ce n’est pas « l’autoritarisme sanitaire », mais bien de subordonner la santé au capital, et de tourner le dos à la science quand cela l’arrange.
Les organisations ouvrières doivent tracer une autre voie que celles des Macron, Jadot, Bertrand, Le Pen, Zemmour, Philippot :
- Vaccination de toute la population mondiale, fin des brevets sur les vaccins, collaboration internationale pour produire les vaccins et mettre au point les traitements curatifs !
- Recrutement de travailleurs dans la santé publique, augmentation des salaires, titularisation des précaires !
- Expropriation des grandes firmes capitalistes du médicament, des équipements médicaux, des cliniques et des maisons de retraite privées !
- Gouvernement des travailleurs, Etats-Unis socialistes d’Europe !
Pour s’orienter et prendre la tête des autres exploitées et des opprimés, la classe ouvrière a besoin de son propre parti, révolutionnaire et internationaliste.
Le communisme est l’avant-garde de la classe ouvrière unie par le programme de la révolution socialiste. Une organisation de ce type n’existe pas en France… Quiconque ose assurer aux travailleurs qu’une telle organisation n’est pas nécessaire est un vil flatteur. Il est criminel d’enjoliver la réalité. (Léon Trotsky, Qu’est-ce que le centrisme ?, 28 mai 1930)