La grève générale (5) : 1920

(chapitre 5 : 1920)

(chapitre 4 : 1917-1919)

(chapitre 3 : 1905-1914)

(chapitre 2 : 1850-1905)

(chapitre 1 : 1842-1850)

Votez Mélenchon et vous aurez la retraite à 60 ans. Pas besoin de faire des grèves qui vous coutent cher ou qui sont dangereuses. (Jean-Luc Mélenchon, LFI, 20 mars 2022)

La grève générale, c’est dangereux. (Anasse Kazib au forum de RP, Presles, 29 mai 2022)

La grève générale, comme le sait tout marxiste, est un des moyens de lutte les plus révolutionnaires. (Lev Trotsky, 28 mars 1935)

En 1920, même si la Garde blanche, appuyée par l’armée impérialiste allemande, a écrasé en Finlande la révolution prolétarienne en avril 1918, même si une insurrection prématurée du Parti communiste allemand (KPD, section de l’Internationale communiste) a été réprimée sauvagement en janvier 1919 par le gouvernement SPD-USPD et l’état-major, même si l’armée de la Roumanie capitaliste alliée à l’armée impérialiste française a mis fin à la révolution hongroise en aout 1919 [voir Cahier révolution communiste n° 27], l’Europe capitaliste n’est pas encore stabilisée.

La situation est de nouveau révolutionnaire en Allemagne et elle le devient en Italie. La grève générale est au coeur des affrontements entre les deux classes fondamentales des sociétés capitalistes, dans ces deux pays et en France.

Mars 1920 : la grève générale bloque un coup d’État militaire en Allemagne

En Allemagne, l’Assemblée nationale constituante remplace en février 1919 le gouvernement SPD-USPD par un gouvernement du chancelier Braun du SPD avec deux partis bourgeois, le catholique Zentrum DZP et le libéral DDP. Ce gouvernement de collaboration de classe est contraint d’accepter le traité de Versailles aux conditions des États impérialistes de l’Entente, dont la France.



La signature en juin 1919 tend les rapports entre le SPD et l’état-major de la Reichswehr, hier réunis contre la révolution, car le traité entérine la perte des colonies africaines, ampute à l’ouest et à l’est, prévoit l’occupation temporaire de la Rhénanie, la réduction des effectifs militaires et de l’armement, le jugement de criminels de guerre (uniquement allemands, bien sûr).

Les partis bourgeois comptent se débarrasser pacifiquement du SPD mais une aile de l’armée (menée par le général von Lüttwitz, le capitaine Ehrhardt, le général Ludendorff) est exaspérée. Elle déclenche le 13 mars 1920 un coup d’État. Les généraux loyalistes refusent d’affronter leurs collègues putschistes et de diviser l’armée. Par conséquent, le gouvernement SPD-DZP-DDP fuit à Stuttgart tandis que la junte hisse le drapeau impérial à Berlin et proclame un gouvernement avec à sa tête Kapp, du Alldeutscher Verband (Ligue pangermaniste, un parti fasciste).

Face à l’impuissance du gouvernement et de la direction du SPD, Legien, le chef la principale centrale syndicale des ouvriers (ADGB, 8 millions de syndiqués) comprend que la victoire des putschistes signifierait la destruction de l’appareil syndical et du SPD. Cette crainte sera vérifiée lorsque le parti fasciste prendra le pouvoir en 1933. La direction de l’ADGB cède à la pression de la base et appelle à la grève générale le 13 mars. L’AfA, qui syndique les employés, s’y associe. Les travailleurs se saisissent de l’appel des organisations syndicales.

Pendant que le gouvernement prend la fuite, la résistance s’organise pourtant. Dès le matin [13 mars], Legien réunit la commission générale des syndicats : à 11 heures, celleci lance le mot d’ordre de grève générale. De son côté, Wels, un des rares dirigeants sociauxdémocrates [SPD] à être resté sur place, fait rédiger et imprimer une affiche, qu’il fait suivre des signatures des ministres sociaux-démocrates qu’il n’a évidemment pas consultés et qui appelle à la grève générale sur le thème de l’union contre la contrerévolution et pour la défense de la république. Le Parti socialdémocrate indépendant [USPD] appelle aussi les ouvriers à la grève générale « pour la liberté, pour le socialisme révolutionnaire, contre la dictature militaire et le rétablissement de la monarchie ». (Pierre Broué, La Révolution allemande, Minuit, 1971, p. 342)

Les chefs de la FAUD anarchiste soutiennent la grève générale tout en préconisant stupidement… la non-violence. Le comité central du KPD, dans un premier temps, refuse d’y appeler, suscitant la colère du secrétaire général Levi alors emprisonné. Dans un second temps, tout en y appelant, il n’organise pas l’autodéfense des travailleurs.

Leur désapprobation du coup d’État servit de terrain de développement à une sorte de quiétisme ; de l’impossibilité de conquérir le pouvoir politique en Allemagne ; ils ont conclu en mars 1920 à l’impossibilité d’une manifestation révolutionnaire en général, conclusion qui, au moment de l’aventure de Kapp, était non seulement inexacte, mais objectivement préjudiciable au mouvement révolutionnaire. (Karl Radek, « Le Parti communiste allemand pendant l’aventure de Kapp », juillet 1920, Bulletin communiste n° 44)

Berlin, mars 1920, manifestation des ouvriers et employés contre le putsch


Sur le terrain, la plupart des responsables du KPD réalisent l’unité avec le SPD et l’USPD. Une partie du pays est paralysé dès le 14 mars.

Les ouvriers de l’Allemagne centrale, qui constituaient avant la guerre la composante la plus arriérée, s’élançaient dans la bataille sans se demander si la lutte leur apporterait la victoire, alors les ouvriers de Berlin ou de la Saxe, ayant réussi à acquérir de l’expérience à l’époque des combats révolutionnaires [de 1918-1919] sont devenus plus prudents. (Lev Trotsky, « Rapport au 3e congrès de l’Internationale communiste sur la situation mondiale », 23 juin 1921, Nouvelle étape, Librairie de l’Humanité, 1922, p. 66)

Les travailleurs s’arment et affrontent partout, courageusement et souvent efficacement, les corps francs et les troupes putschistes de la Reichswehr. Des conscrits rompent avec les officiers mutins. La grande bourgeoisie, redoutant la révolution qui s’amorce, abandonne alors Lüttwitz et Kapp.

Le directeur de la Reichsbank refuse de payer les dix millions de marks que lui réclame Kapp. Le 16 mars, à 13 heures, celuici donne l’ordre « de fusiller les meneurs et les ouvriers des piquets de grève à partir de 16 heures ». Cette fois, c’est le grand patronat lui-même qui s’émeut devant une mesure qui risque de déclencher la guerre civile ; à la tête d’une délégation, Ernst von Borsig en personne [capitaliste prussien qui finançait les corps francs et qui financera le NSDAP de Hitler] assure à Kapp qu’il faut renoncer à la force : « L’unanimité est si grande au sein de la classe ouvrière qu’il est impossible de distinguer les meneurs des millions d’ouvriers qui ont cessé le travail ». Les ouvriers de la Ruhr ont repris Dortmund à 6 heures du matin. Dans la nuit du 16 au 17, un régiment de pionniers se mutine à Berlin même, emprisonne ses officiers. Si les putschistes s’obstinent, la guerre civile est inévitable et la victoire ouvrière probable… Le 17 mars, Kapp, qui a pris conscience de sa défaite, choisit la fuite. Pressé par des officiers plus politiques que lui de mettre fin à l’aventure, le général von Lüttwitz l’imite à quelques heures de distance. (Pierre Broué, p. 347)

Les travailleurs l’emportent contre les généraux putschistes. Méfiants envers l’ancien gouvernement, ils poursuivent la grève et gardent les armes.

Tous les partis ouvriers, de celui qui avait soutenu la guerre du Kaiser (SPD) au jeune parti révolutionnaire (KPD) en passant par le parti intermédiaire, centriste (USDP), sont divisés sur la conduite à suivre. La base du SPD vient d’agir aux côtés de ses camarades de l’USPD et du KPD. Une bonne partie de l’USPD se tourne, en vain, vers le KPD pour chercher une solution politique. Le 18 mars, le vieux bureaucrate Liegen envisage un « gouvernement ouvrier », c’est-à-dire sans ministre des partis bourgeois. Le 19 mars, la direction du SPD fait de vagues promesses. Le 20 mars, les directions syndicales de l’ADGB et de l’AfA se prononcent pour la fin de la grève. Le 22 mars, le SPD forme un nouveau gouvernement SPD-DZP-DDP en changeant le chancelier (Müller au lieu de Braun). L’ADGB, l’AfA, le SPD et l’USPD appellent ensemble à reprendre le travail. Le 4 avril, l’aile gauchiste du KPD forme le KAPD crypto-anarchiste (30 000 membres).

La première tâche du gouvernement de coalition SPD-DZP-DDP est de mettre au pas la classe ouvrière de la Ruhr qui est toujours en grève et qui reste armée. Profitant de la confusion de l’USPD et du KPD, de l’isolement de la Ruhr, Müller confie à l’armée, aux ordres du général von Watter, le soin de rétablir l’ordre et d’écraser les travailleurs. Legien ne lève pas le petit doigt. 2 000 travailleurs (inorganisés, USPD, KPD, KAPD) sont assassinés par l’armée.

Le 3 avril, les troupes de von Watter se mettent en marche. Elles ne rencontrent qu’une résistance sporadique, le chaos et la discorde entre dirigeants paralysant toute velléité de coordination de la défense… Bientôt les tribunaux militaires vont frapper de lourdes peines de prison les militants ouvriers accusés de crimes ou de délits de droit commun, en réalité mesures de réquisition ou de combat. Un mois après l’écrasement du putsch par la grève générale, les complices des putschistes prennent dans la Ruhr une bonne revanche. (Pierre Broué, p. 364)

L’aile fasciste de la bourgeoisie allemande va chercher désormais un appui dans les masses et le trouvera quand la crise économique capitaliste mondiale de 1929 touchera de plein fouet non seulement le prolétariat mais la petite bourgeoisie (paysans, commerçants, cadres…). Le front unique ouvrier qui réalise la grève générale et l’armement en mars 1920 montre la voie pour résister à la violence réactionnaire et pour aller à la révolution sociale [voir Trotsky, Contre le fascisme, Syllepse, 2015].

Avril-mai 1920 : la bureaucratie syndicale sabote la grève générale en France

La vague révolutionnaire d’après-guerre est plus faible en France, qui se trouve dans le camp des vainqueurs et qui conserve son empire colonial.

En France, après la démobilisation, la situation devient tendue, mais l’illusion de la victoire et l’espoir de ses fruits d’or sont encore trop puissants. (Lev Trotsky, « Rapport au 3e congrès de l’Internationale communiste sur la situation mondiale », 23 juin 1921, Nouvelle étape, Librairie de l’Humanité, 1922, p. 11)

Cependant, des soldats de la marine de guerre se mutinent en avril 1919 quand Clémenceau (Parti radical) envoie la flotte en appui aux armées blanches contre la révolution russe. Une forte opposition restée syndicaliste révolutionnaire (dont Monmousseau, qui n’a pas encore rejoint le Parti communiste) s’oppose à la direction fédérale « réformiste » liée à la bureaucratie confédérale incarnée par Jouhaux. Contre la poussée révolutionnaire, les syndicats chrétiens, fomentés par l’Église catholique contre l’AIT (1re Internationale) et contre la CGT, se fédèrent en CFTC en novembre 1919. Les cheminots mènent une grève de masse du 1er au 29 mai 1919. Des mouvements de grève se produisent au printemps 1920 dans les banques, les grands magasins, les ports, le bâtiment et, de nouveau, les chemins de fer.

Le dense réseau ferroviaire, alors le principal moyen de transport de marchandises et de déplacement des personnes, est partagé entre plusieurs entreprises : PLM, Réseau de l’État, Compagnie du Nord, Compagnie de l’Est, Compagnie du Midi… [voir Révolution communiste n° 29]. En 1917, les syndicats des différentes entreprises se rassemblent dans la Fédération nationale des travailleurs des chemins de fer de France, des colonies et des pays de protectorat, affiliée à la CGT.

Le 23 février, une grève éclate au PLM à la suite d’une sanction à l’encontre d’un syndicaliste. La compagnie licencie 500 grévistes. La fédération de la CGT riposte par la grève générale du secteur.

À l’appel de grève générale, tous les réseaux, à l’exception de celui du Nord, ont répondu. Au bout de quelques jours, l’arrêt du travail est presque complet sur toutes les lignes… (Édouard Dolléans, Histoire du mouvement ouvrier, t. 2, Colin, 1948, p. 215)

À la tête du gouvernement du Bloc national, Alexandre Millerand (exclu du PS-SFIO en 1904) veut mettre fin au conflit qui paralyse le pays en misant sur la bureaucratie syndicale qui contrôle la CGT.

M. Millerand offre sa médiation. La fédération des cheminots et les compagnies l’acceptent. Le 1er mars, l’accord est signé. Quelles étaient les conditions de l’arbitrage ? La détermination rapide des échelles de salaires, la promesse de fixer le statut des délégués syndicaux. Enfin et surtout, la grève n’entrainera pas de révocations. L’ordre de reprise du travail est lancé. (Édouard Dolléans, p. 215)

Le 18 avril, les patrons s’accordent pour généraliser le « statut », l’emploi à vie qui permet aussi de diminuer la mobilité des travailleurs qualifiés à la recherche d’une augmentation de salaire dans une compagnie concurrente.

Au congrès de la fédération, du 22 au 25 avril, l’ancienne direction est désavouée, d’autant que les patrons refusent de lever toutes les sanctions. Millerand refuse de se prononcer. Le congrès appelle à reprendre la grève illimitée sur l’ensemble des chemins de fer.

Le congrès décide donc la grève immédiate et pose comme revendications : la nationalisation des chemins de fer, la réintégration des cheminots, l’abandon des poursuites judiciaires et la reconnaissance du droit syndical. (Édouard Dolléans, p. 217)

La nouvelle direction fédérale animée par Monmousseau, au lieu de consolider sa position et de sonder les masses, décide de déclencher une série de grèves en s’appuyant sur la confédération.

La décision des cheminots est un appel au concours de l’administration confédérale. Les rédacteurs de l’ordre du jour espèrent pouvoir ainsi entrainer les grandes organisations syndicales, « déclencher les vagues successives d’assaut »… La CGT entend se réserver la direction du mouvement ainsi que ses conclusions… La fédération des cheminots et la CGT réalisent l’accord sur la tactique de la grève, la tactique des vagues successives : mineurs, marins, dockers doivent entrer dans la lutte afin de paralyser la vie économique. (Édouard Dolléans, p. 217-218)

Grévistes de la compagnie Paris-Orléans, mai 1920


La grève est moins suivie qu’en février dans les chemins de fer, en particulier à Paris, dans le Nord et l’Est tandis que, contre la grève générale, la direction confédérale disperse la lutte des quelques secteurs combattifs.

Quelle est cette nouvelle forme de lutte acceptée en partie par Monmousseau ? L’action par vagues d’assaut ! Ainsi la CGT établit un plan consistant à lancer dans la lutte selon les circonstances et les besoins : le 3 mai les mineurs, les inscrits maritimes et dockers, le 10 les métaux, le bâtiment, les moyens de transport et le 16 les postiers, le métro. Mais, ainsi émiettée, présentée par morceaux aux forces de répression prêtes à la riposte, la classe ouvrière ne pourra mener loin son combat. Dès le 3 mai, le gouvernement et les Compagnies de chemin de fer appliquent leur plan longuement et minutieusement préparé ; la perquisition habituelle au nouveau siège de la Fédération des cheminots prélude à l’arrestation de 400 militants inculpés de complot contre la sureté de l’État. (Joseph Jacquet, Les Cheminots dans l’histoire sociale de la France, 1967, Fédération des cheminots CGT, p. 88)



La bureaucratie syndicale se garde bien d’appeler les autres branches à rejoindre la lutte. Au contraire, elle leur conseille de ne pas cesser le travail avec des arguments jésuitiques.

Cette tactique rendait indispensable la continuation du travail par les autres corporations pour deux raisons : la première était la nécessité de fournir des ressources aux camarades qui menaient la grève au nom de tous ; quant aux autres corporations, elles avaient pour rôle de compléter ce vide en consommant ; elles devaient continuer à travailler. Leur travail devait donc avoir pour effet de diminuer les stocks constitués. Par-là, ces corporations devaient participer à la pression exercée sur le patronat et le gouvernement. (Compte-rendu des travaux. 15e Congrès confédéral, CGT, 1920, p. 38-39)

Liée en temps de paix comme en temps de guerre à sa bourgeoisie, la direction confédérale veut empêcher la paralysie du capitalisme national et éviter une crise révolutionnaire.

La direction de la CGT avec Jouhaux et Dumoulin lance toute une série de grèves « tournantes » dont le résultat le plus clair est de faire battre sans résultat chaque profession l’une après l’autre. (André Barjonnet, La CGT, 1968, Seuil, p. 24)

Les patrons s’appuient sur les cadres pour briser la grève et licencient 18 000 grévistes. Le gouvernement réprime et invente un complot de l’étranger (la Russie des soviets). Il menace la confédération du même sort.

Le 19 mai, la direction confédérale appelle à la reprise. Elle attribue l’échec du mouvement à l’insuffisante mobilisation des travailleurs, dont ceux du rail.

La situation était nettement défavorable, même en ce qui concerne les cheminots dont deux grands réseaux ne participaient pas à la grève et dont les autres ne comptaient que 50 % de grévistes. (Compte-rendu des travaux 15e Congrès confédéral, CGT, 1920, p. 43)

Le 28 mai, la fédération elle-même appelle à cesser la grève.

La tentative de grève générale du mois de mai 1920 présente l’exemple classique d’un appel à une action de masse qui n’est pas du tout préparé… L’idée de cette grève a été « soutenue », d’une façon traitresse, par les syndicalistes réformistes. Leur but était de ne pas laisser échapper le mouvement de leurs mains et de lui tordre d’autant plus facilement le cou… Cependant, de leur côté, les syndicalistes révolutionnaires et les communistes n’ont nullement préparé le mouvement… Le résultat : une minorité peu importante seule est entrée en mouvement, les collaborationnistes ont empêché le développement de la grève. (Lev Trotsky, « Une école de stratégie révolutionnaire », juillet 1921, Nouvelle étape, Librairie de l’Humanité, 1922, p. 122-123)

Du 7 au 9 septembre, un congrès extraordinaire de la fédération du rail rejette le bilan de la direction « syndicaliste-révolutionnaire » (dont les membres sont pour la plupart emprisonnés ou clandestins) et restitue la direction à la bureaucratie réformiste. Du 27 septembre au 2 octobre, Jouhaux justifie sa tactique au congrès confédéral. Il plaide pour la présence de la CGT, dans le cadre de la SdN (renommée ONU après 1945), à la conférence internationale du travail de Washington. Celle-ci met en place l’Organisation internationale du travail (OIT où siègera Jouhaux après la 2e guerre mondiale, Blondel ou Thibault au début du 21e siècle). À l’échelle nationale, Jouhaux fait adopter le Conseil économique du travail qui deviendra le Conseil national économique en 1925 (aujourd’hui il s’appelle CESE, où sont stipendiées toutes les bureaucraties syndicales).

La technique de 1920 de la bureaucratie sociale-patriote pour empêcher la grève générale sera reprise en novembre-décembre 1947 par la bureaucratie stalinienne (incluant alors Monmousseau) qui a pris le contrôle de la CGT durant la 2e guerre mondiale.

Une variante a été appliquée par les bureaucraties syndicales en Grande-Bretagne en 2022-2023 [voir Révolution communiste n° 55]. En France, au printemps 2023, les chefs fédéraux et confédéraux de la CGT et de SUD ont encouragé des « grèves reconductibles » avec l’appui du PCF, de LFI, de LO, des NPA et de RP [voir Révolution communiste n° 55, 56]. Avec la défaite des travailleurs comme résultat.

13 mai 2024