Pour une solution radicale à la question du logement (IKC/État espagnol)

1 L’urbanisation du monde après la Seconde Guerre mondiale

Ce que l’on entend aujourd’hui par pénurie de logements, c’est surtout l’aggravation des conditions de logement des travailleurs en raison de l’afflux prolongé de la population vers les grandes villes ; c’est la formidable hausse des loyers, une plus grande concentration de personnes dans un même logement et, pour certains, l’impossibilité totale de trouver un hébergement. Et cette pénurie de logements est si importante qu’elle affecte non seulement la classe ouvrière, mais aussi la petite bourgeoisie. Comment donc résoudre la question du logement ? Dans notre société actuelle, comme toute autre question sociale : en établissant graduellement un équilibre économique entra l’offre et la demande ; cette solution, qui n’empêche pas le problème de se reposer sans cesse, n’en est donc pas une. […] Ce qui est certain, c’est qu’il y a dans les grandes villes déjà suffisamment d’immeubles à usage d’habitation pour remédier sans délai par leur emploi rationnel à toute véritable « crise du logement ». Ceci ne peut naturellement se faire que par l’expropriation des propriétaires actuels, par l’occupation de leurs immeubles par des travailleurs sans abri ou immodérément entassés dans leurs logis ; et dès que le prolétariat aura conquis le pouvoir politique, cette mesure exigée par le bien public sera aussi facile à réaliser que le sont aujourd’hui les expropriations et réquisitions de logements par l’État. (F. Engels, La Question du logement, 1872, ch. 1)

En 2007, pour la première fois dans l’histoire, la population urbaine mondiale a dépassé la population rurale. L’accélération de la croissance démographique mondiale après la Seconde Guerre mondiale s’est accompagnée d’une forte diminution du pourcentage de la population rurale au profit de la population urbaine. Ainsi, selon les données de l’ONU, la population mondiale, entre 1960 et 2017, a augmenté de 4,57 milliards (de 2,98 à 7,55 milliards). Mais au cours de la même période, la population urbaine est passée de 1,00 Mrd -33,6 % de la population mondiale en 1960- à 4,17 Mrd, 55,3 % du total en 2017.

En résumé, au cours des 57 dernières années, la population urbaine a quadruplé, passant ainsi à 4,17 milliards de personnes. En outre, cet important phénomène d’urbanisation s’est concentré dans quelques villes de chaque pays, ce qui ajoute à leur croissance naturelle un flux migratoire ininterrompu (national et international) de la population des campagnes et des petites villes, en quête de travail et de meilleurs services.

En 2017, un quart de la population mondiale vivait concentrée dans seulement 600 villes, autour desquelles est produit 55 % du PIB mondial.

Les mégapoles et leurs zones métropolitaines comme Guangzhou (Canton), Tokyo, Shanghai, Jakarta et Delhi comptent chacune environ 40 millions d’habitants. Et entre 20 et 30 millions on trouve : sur le continent américain, New-York, Sao-Paulo, Mexico et Los Angeles ; en Europe, Moscou, Londres, Paris, Istanbul et, en Afrique, Lagos et Le Caire.

L’urbanisation et la concentration démographique de plus en plus rapides sont des phénomènes connus de longue date, fruits de l’extension des relations de production capitalistes et de ses tendances à concentrer la production et donc la population. En 1900, la plus grande ville du monde et la seule de plus de 5 millions d’habitants était Londres, le centre névralgique du développement capitaliste. Aujourd’hui, au XXIe siècle, le capitalisme contrôle la quasi-totalité de la production mondiale, rend pratiquement impossible le maintien des économies de subsistance des vieilles populations paysannes et a absorbé les économies planifiées de l’URSS, de la Chine et de presque tous les pays où la propriété privée des moyens de production avait été abolie.

Il en résulte une urbanisation presque totale de continents entiers comme l’Amérique et d’une bonne partie de l’Europe et un développement colossal des grandes villes des pays capitalistes les plus dynamiques, notamment la Chine, mais aussi de quelques villes des régions les plus développées des autres pays.

2 La dimension actuelle du problème du logement

Comme l’explique Engels dans la citation précédente, la bourgeoisie envisage la question du logement des milliards de personnes qu’elle domine de la même manière que les autres problèmes sociaux : comme une affaire de plus dont le marché assurera progressivement le nivellement économique lorsque l’offre et la demande s’équilibreront. Cela signifie que la bourgeoisie ne se préoccupe pas du tout du problème, sauf quand la lutte des classes l’y contraint.

Des logements vacants corrects existent partout, mais la logique inhérente au marché fera qu’il offrira toujours les pires logements dans les pires quartiers avec les pires services aux travailleurs les plus précaires et aux nouveaux venus en quête d’emploi. Des logements hors de prix lorsque la demande est très forte et que la ville empêche de fait la formation de nouvelles zones d’habitat informel ou l’extension de celles qui existent déjà. Dans ces cas, aujourd’hui très répandus dans les grands pays capitalistes, le marché « résout » le problème en contraignant les individus à s’entasser jusqu’à l’inhumain dans ces soi-disant logements.

Le logement, comme la nourriture et l’eau, est l’un des besoins les plus fondamentaux qui existent. Si le marché formel ne le couvre pas, même dans de mauvaises conditions, la population précaire le résout du mieux qu’elle peut. C’est pourquoi, dans de nombreuses grandes villes, d’immenses « quartiers » de bidonvilles sont apparus et se sont développés avec à peine, ou même pas, de services minimum comme, l’assainissement, l’eau courante, l’éclairage, etc. Appeler ces campements « quartiers » est un héritage du passé, car ils peuvent devenir de véritables grandes villes, qui dépassent souvent les 2 millions d’habitants (Mexique, Rio de Janeiro, Nairobi, Le Caire, Mumbai, Jakarta, etc.).

2.1 Les logements insalubres dans les villes du monde

L’ONU estime qu’en 1950, la population totale vivant dans les bidonvilles était d’environ 35 millions de personnes. Aujourd’hui, dans son Rapport sur les villes du monde de 2016, l’ONU-Habitat estime que 881,1 millions de personnes vivaient dans des taudis en 2014, soit 11,7 % de la population mondiale totale de cette année-là.

Cette étude de l’ONU souffre de limites importantes. Elle se cantonne au bidonvilles urbains (population de plus de 2 000 personnes) des pays « en développement » (selon sa terminologie). Autrement dit, le problème du logement insalubre des zones rurales du monde entier est négligé, de même que celui des pays considérés comme « développés ».

Mais, aussi limités qu’ils soient, ces résultats sont très significatifs. En Afrique subsaharienne, 55,9 % des citadins vivent dans des bidonvilles. En Asie, ce pourcentage varie de 24 % à 31 % et en Amérique latine, il atteint 21,1 %. La relative amélioration de ces pourcentages au cours des 25 dernières années ne peut masquer l’énorme ampleur du problème.

Est-ce à dire qu’il n’y a pas de bidonvilles aux États-Unis, au Canada, en Europe ou au Japon ? Il n’y a aucune statistique, du moins globale. Dans tous les pays impérialistes, il y a des villes avec des zones urbaines informelles, plus ou moins importantes selon la pression de l’immigration ou de la population expulsée de ses foyers en raison de son insolvabilité économique. Dans ces pays, il y a une grande répression policière des installations illégales, qui pousse la population précaire à la surpopulation et à l’habitat insalubre légal, à l’occupation illégale d’appartements vides, à la vie sous tente ou en caravane regroupés en camps, voire à adopter comme domicile les vieilles voitures, les tunnels du métro ou simplement la rue, lorsque le temps le permet.

Aux États-Unis, les bidonvilles légaux portent le nom de « trailer parks » (parc à caravanes) et sont un objet commercial comme les autres. Selon le dernier recensement américain sur le logement, plus de 20 millions de personnes vivent dans quelque 100 000 parcs de « mobil-home » appartenant à de grandes entreprises. Par ailleurs, dans ce même pays, le recensement de 2018 fait état de 552 830 sans-abri, dont 79 000 errent à New York et 50 000 à Los Angeles.

Certes, dans les pays capitalistes où il y a, ou du moins il y a eu, un mouvement ouvrier suffisamment organisé pour arracher quelques améliorations à sa bourgeoisie (et ne pas les perdre), le problème du logement est souvent amorti par des parcs de logements sociaux dont les loyers sont bien inférieurs à ceux du marché et accessibles aux familles de travailleurs.

La plupart des villes américaines ont déjà démoli ou privatisé leur parc de logements sociaux, mais la New York City Housing Authority abrite encore dans 181 581 appartements plus de 400 000 personnes à faible revenu, soit 5,2 % des habitants recensés. Le deuxième gestionnaire de logements sociaux en importance en Amérique est situé à Toronto (Canada) et gère 58 000 logements sociaux avec 164 000 locataires. Et dans les pays de l’UE, selon Eurostat, 10,7 % de la population vit dans ce type de logement « à loyer modéré ». En réalité, ce chiffre varie considérablement d’un pays à l’autre et va des maximums de 15 à 19 % de la population en Slovénie, au Royaume-Uni, en France, en Irlande ou en Autriche aux minimums proches de 0 en Slovaquie ou en Roumanie. En Allemagne et en Espagne, environ 8,5 % de la population vit dans des logements sociaux.

Le Japon, pour sa part, dispose d’un stock important de 2,17 millions de logements sociaux que les autorités laissent vieillir et disparaître progressivement. Ceci malgré le fait qu’il existe une forte demande sociale, qui pour le Grand Tokyo atteint 20 candidats par logement disponible.

2.2 Surpeuplement dans l’UE

L’agence de l’UE, Eurostat, publie une statistique du logement qui inclut le calcul d’un taux de surpeuplement. Ce taux mesure la part de la population totale qui vit dans des logements surpeuplés, en fonction du nombre de pièces disponibles dans le logement, de la taille du logement et de l’âge et de la situation familiale de ses occupants. Les statistiques comportent en plus des données des pays de l’UE, celles de certains autres pays européens, tels que ceux de l’ex-Yougoslavie et de la Turquie.

En 2017, une personne sur six dans l’UE, soit 15,7 % de la population, vivait dans des logements surpeuplés. Parmi les pays étudiés, les taux les plus élevés de surpeuplement (environ 50 % de la population) se situent en Serbie, Roumanie, Macédoine du Nord et Turquie, suivis de près par la plupart des pays de l’ex-URSS, ainsi que la Grèce et l’Italie.

Ces données, quoique très sérieuses, ne donnent pas la mesure réelle du problème du logement en Europe, dramatique et croissant dans les grandes villes et leurs zones métropolitaines, car cela n’apparaît guère dans une moyenne statistique nationale.

Un exemple est donné par l’Espagne. En 2018, un important taux de logements surpeuplé a été relevé dans 6,7 % des ménages en Espagne, mais en Catalogne et à Madrid, ce chiffre double (respectivement 12,6 % et 11,6 %) et touche 1 million de personnes dans chacune des zones métropolitaines des villes de Barcelone et Madrid. Un autre exemple se trouve au Royaume-Uni. Londres, en 2015-2016, comptait 7,5 % de ménages vivant dans un logement surpeuplé, plus de deux fois le taux moyen du pays entier (3,4 %).

Eurostat utilise un autre indicateur de la qualité du logement, le taux d’insalubrité grave du logement, qui est défini comme le pourcentage de la population vivant dans des logements considérés comme surpeuplés, mais qui présentent également au moins un des éléments d’insalubrité suivants dans le logement : fuites au plafond, absence de salle de bains/douche, absence de toilettes intérieures, logement considéré trop sombre. D’après ce rapport, dans l’ensemble des 28 pays de l’UE, 4,0 % de la population subirait un logement insalubre en 2017. Les taux les plus élevés ont été observés en Turquie (25,1 %), en Roumanie (16,5 %), en Lettonie (15,2 %) et en Hongrie (16,2 %).

Toutes ces données imposent une conclusion : dans aucun pays au monde, même dans les pays les plus riches, ni à long terme, la loi du marché capitaliste n’est capable de couvrir les besoins en logement de toute la population dans des conditions décentes.

La question est de savoir si cela est dû à des capacités de production limitées ou à l’insuffisante « richesse » des nations à un moment donné ? Faut-il être patient et croire qu’un développement économique progressif permettra d’améliorer la situation ? La réponse, comme nous le verrons plus loin, est non : les capacités productives sont suffisantes pour résoudre le problème immédiatement. Mais ce qui se passe dans le secteur de la construction, comme dans tout autre, c’est que le système économique capitaliste oriente les ressources productives disponibles exclusivement là où il pense qu’il y aura du profit privé. Pour cette raison, la production de logements est anarchique, étrangère aux besoins de la population dans son ensemble et concentrée sur la demande et les caprices de la population à pouvoir d’achat.

En outre, le cycle économique du capital prend fin lorsque le produit (le logement) est vendu et que la plus-value est réalisée, de sorte qu’il peut rester indéfiniment sans utilisation, destiné à constituer une valeur de réserve si son propriétaire privé en décide ainsi. De plus, lorsque les années de crise récurrente arrivent, le grand paradoxe capitaliste se produit : un phénomène de surproduction apparaît (des milliers de nouveaux appartements impossibles à vendre sur le marché) alors que la pénurie de logements de la population active s’aggrave. L’Espagne en est une fois de plus un bon exemple. Dans ce pays, il y a encore 500 000 logements neufs datant de l’ère de la bulle immobilière d’il y a dix ans à vendre. Dans le même temps, en 2018, les expulsions pour non-paiement de loyers ou de crédits ont touché 56 000 familles et on estime que 500 000 ont été expulsées de leur logement au cours des huit dernières années.

2.3 Logements inoccupés et bâtiments parasitaires

Partout dans le monde, les bidonvilles, la surpopulation et l’habitat insalubre auxquels le capitalisme condamne les populations les plus démunies se combinent au gaspillage que représentent des millions de logements vides et à l’existence de somptueux bâtiments à usage parasitaire.

En plus des logements de luxe habitées par les élites sociales, face aux bidonvilles de Johannesburg, Rio de Janeiro, Lagos, Manille, Delhi ou tout autre bidonville de la planète, d’imposants gratte-ciels dédiés exclusivement à des fins commerciales, tels que des bureaux de grandes entreprises ou des hôtels hyper luxueux, sont construits. Le nombre d’étages de ces gratte-ciels peut dépasser de loin la centaine et leurs surfaces habitable et non-habitable se mesurent en millions de m². Pour ces quartiers d’affaires, qui sont généralement vides tous les soirs, il n’y a pas de problèmes d’assainissement ou d’approvisionnement en eau courante et en électricité pour maintenir une température intérieure confortable. Sans compter que leurs excellents calculs architecturaux les protègent contre tout risque naturel (typhons, glissements de terrain, tremblements de terre…) du genre de ceux qui, dans les bidonvilles, causent parfois des milliers de morts.

Par ailleurs, en plus de ces types de bâtiments, il y a toujours, dans toutes les villes, une proportion significative de logements utilisables mais vides. En 2014, le journal Guardian a compilé des statistiques nationales européennes, trouvant un total de 11 millions de logements vacants pour l’ensemble de l’UE : 3,4 millions en Espagne, 2 millions en Italie et en France, 1,8 million en Allemagne et 0,7 million au Royaume-Uni. En Chine, au milieu de la plus grande bulle immobilière jamais vue, on estime qu’il y a 50 millions de maisons vides qui représentent 22 % du parc de logements urbains.

3 Le logement comme cible du capital fictif du XXIe siècle

Comme l’a résumé Engels dans sa critique des propositions de Proudhon, le prix de location (et de vente) d’un logement est régi par les « les lois économiques qui règlent la vente des marchandises en général et, en particulier, celle de cette marchandise qu’est la propriété foncière. Les frais de construction et d’entretien de la maison, ou de la partie de cette maison qui est en question entrent d’abord en ligne de compte; la valeur du terrain déterminée par l’emplacement plus ou moins favorable de l’immeuble, vient ensuite; le rapport entre l’offre et la demande, tel qu’il existe au moment envisagé, décide en dernier ressort. » (La Question du logement, 1872, ch. 1)

En termes de théorie de la valeur, dans un marché libre et concurrentiel, les prix moyens tendent à être égaux à la valeur du nombre moyen d’heures socialement nécessaires pour produire un logement plus la part correspondant au revenu foncier. Mais cette tendance est à tout moment faussée de manière décisive par le rapport entre l’offre et la demande.

3.1 Les bulles immobilières dans un contexte de hausse générale des prix réels

Au cours des dernières décennies, la construction a considérablement accentué l’intégration de la technologie, ce qui a entraîné une augmentation de la productivité et une baisse des coûts. Aujourd’hui, il est possible de construire de grands bâtiments en un temps record avec des matériaux préfabriqués de haute technologie. Par conséquent, la valeur d’échange des nouveaux bâtiments (sans compter les terrains) devrait avoir tendance à diminuer, bien que la valeur d’usage augmente (en cas de qualité supérieure et de meilleur équipement, etc.)

Le deuxième élément du prix du logement est le prix de la part proportionnelle du terrain qu’il occupe dans le bâtiment dont il fait partie.

Il ne faut pas confondre la rente foncière avec le prix du terrain. Comme Marx l’explique dans la section « La transformation d’une partie du profit en rente foncière », volume III du Capital, le revenu foncier trouve son origine dans la propriété territoriale, qui est le monopole de certaines personnes qui leur donne le droit de disposer d’une certaine partie de la planète comme une sphère privée de leur volonté privée. Son montant est strictement déterminé par les lois économiques et provient en fin de compte du travail humain non rémunéré au prolétariat, des profits extraordinaires du capital investi dans la terre. Marx démontre que, selon les diverses circonstances économiques, le revenu de la terre peut ne pas augmenter bien que le prix du sol augmente ou peut augmenter parce que le prix du sol augmente.

Le prix de la terre, en revanche, est la capitalisation de ses revenus au taux d’intérêt moyen, qui à son tour est régulé par le taux de profit. Le Capital l’explique ainsi :

La rente foncière se présente sous forme d’une somme déterminée d’argent, que le propriétaire foncier reçoit annuellement comme fermage d’un lopin de terre. Or tout revenu touché en argent peut être capitalisé et considéré comme l’intérêt d’un capital fictif. Le taux de l’intérêt étant de 5 %, par exemple, une rente de 200 £ peut être considérée comme l’intérêt d’un capital de 4 000 £. C’est la rente ainsi capitalisée qui fixe le prix d’achat ou la valeur de la terre […]. Il résulte de là, la rente étant donnée d’avance comme une quantité constante, que le prix des terres peut varier en raison inverse du taux de l’intérêt. Pareille variation du prix de la terre est donc déterminée par le taux de l’intérêt, indépendamment du mouvement de la rente foncière. Il en résulte que si l’on fait abstraction de ce mouvement ainsi que de la variation des prix des produits du sol, dont la rente est une partie, le prix de la terre a une tendance à hausser, étant donné : qu’à mesure que la société progresse, le taux du profit et avec lui le taux de l’intérêt, pour autant que celui-ci se règle d’après celui-là, ont une tendance à baisser ; que même indépendamment du mouvement du taux du profit, le taux de l’intérêt diminue par suite de l’accroissement de la masse de capital empruntable. (K. Marx, Le Capital, volume III, section 6, « Introduction »)

En résumé, à la base de la croissance générale des prix des terrains urbains, indépendamment des autres circonstances qui, dans chaque ville ou pays, affectent à la fois la rente et le prix des terrains, se trouve la baisse du taux de profit, qui a conduit actuellement à des taux d’intérêt réels très proches de zéro dans le monde.

D’autre part, cette augmentation générale des prix par m² de surface au sol ne doit pas être automatiquement répercutée dans la même proportion dans le prix du logement individuel. Deux facteurs liés au niveau technologique du moment ont une incidence sur ce point : les systèmes de transport modernes qui permettent une extension horizontale importante des villes (croissance sur des terrains moins chers que la moyenne) et la croissance verticale des nouveaux bâtiments avec un grand nombre de logements sur le même terrain (de sorte que chaque logement correspond à une plus petite partie du terrain occupé par le bâtiment). Cependant, il ne fait aucun doute que la proportion du coût du terrain par rapport au prix du logement devient sensiblement plus élevée lorsqu’il existe de fortes restrictions géographiques ou des lois d’urbanisme qui limitent la possibilité d’extension et la hauteur de construction ou selon la structure de la propriété (s’il y a une forte concentration de propriété sur les terrains constructibles).

Toutefois, les études internationales montrent une tendance générale et constante depuis les années 1970 à la hausse des prix des logements dans le monde entier. Les prix de l’immobilier, en particulier dans les grandes villes, augmentent bien au-dessus des coûts de construction et génèrent des hausses du taux de profit et des rentes foncières à mesure que se développent, l’une après l’autre, des bulles immobilières toujours plus importantes qui éclatent de façon similaire et parallèle aux krachs boursiers.

Les bulles financières sont caractérisées par une spirale de production croissante alimentée par une demande qui semble n’avoir aucune limite et qui communique sa tension inflationniste à tous les bâtiments existants, d’abord sur le marché de l’achat et de la vente et rapidement à la location. Cette demande ne provient pas de l’épargne des classes populaires dont les limites sont évidentes. Son carburant provient de la masse de capitaux qui recherche une rentabilité face à la baisse du taux de profit dans la production en général. La perspective de la revente d’un bien immobilier avec de gros profits amorce le processus de spéculation et se nourrit du crédit facile et bon marché des institutions financières, créant à son tour une bulle d’endettement. Lorsque finalement la tension du marché atteint sa limite et que l’immobilier commence à ne plus pouvoir être vendu, les crédits cessent d’être amortissables et le système financier lui-même est mis en péril avec la dévaluation de l’immobilier et le défaut de paiement de la dette immobilière.

Ce fut le cas de la bulle immobilière des années 1980 au Japon, à l’époque la plus importante de l’histoire, probablement dépassée aujourd’hui par celle de la Chine. Pour avoir une idée de sa taille, on peut rappeler, à titre de comparaison, qu’en 1989 la valeur atteinte par les immeubles de l’aire métropolitaine de Tokyo était équivalente à celle de l’ensemble des immeubles aux États-Unis. La bulle du Japon a éclaté au début de la grande crise des années 1990 et a perturbé l’ensemble de son système financier, qui a dû être soutenu par l’État. Après cette crise, le Japon a perdu sa position de deuxième puissance mondiale et a vu son énorme supériorité sur l’Allemagne réduite.

La bulle immobilière américaine qui a précédé la grande crise internationale de 2008 a étendu ses effets à l’ensemble du système financier mondial, tout en affectant gravement sa propre population. Au cours de son développement, dans une spirale bien connue, le capital spéculatif d’investissement direct a atteint des niveaux jamais vus, avec la création de produits financiers dérivés qui ont été vendus dans toutes les bourses du monde et qui à leur tour ont fait partie d’autres produits financiers… qui ont représenté des masses énormes de capitaux fictifs s’appuyant sur des masses énormes de dette, avec des mouvements spéculatifs rapides partout dans le monde. Quand, en fin de compte, la base réelle du processus s’est effondrée à son maillon le plus faible, les prêts immobiliers à risque trop facilement accordés à des familles américaines, l’écroulement du château de cartes a entraîné la majorité des grandes banques du monde dans une faillite de fait. Seule une énorme injection de fonds publics de la part des États les plus puissants a permis d’éviter la disparition de la plupart des sociétés de crédit, considérées comme « trop systémiques » pour être abandonnés.

Dans le cycle économique précédent, la bulle américaine s’était accompagnée d’autres effets dramatiques comme ceux qui se sont développés en Grèce, en Espagne, en Irlande et en Lettonie ou dans les grandes villes du Royaume-Uni, de Russie ou du Brésil. Mais le phénomène de la hausse des prix réels des logements a été mondial et de caractère historique en raison de son ampleur.

Le prix réel du logement a grimpé en flèche. Au cours du récent boom, le prix des maisons a augmenté en moyenne de 120 %. L’augmentation moyenne des prix réels au cours des expansions/booms précédentes avait été d’environ 45 % » (N. Girouard, M. Kennedy, P. Van Den Noord et C. André, Le Rôle des fondamentaux dans l’évolution récente des prix des logements, OCDE, janvier 2006)

3.2 Les prix des maisons dépassent déjà les sommets historiques du cycle précédent

L’OCDE, qui utilise comme indice 100 les prix moyens de chaque pays en 2015, a calculé que dans tous ses pays membres, les prix réels du logement ont connu une hausse continue, passant de l’indice 82,2 en 2000 à 106,5 en 2007, année à partir de laquelle ils ont chuté suite à la dépression économique internationale. Dans le cycle présent, les prix sont partis de 90,4 en 2011 pour atteindre l’indice 110,9 en 2018. En bref, cela signifie qu’aujourd’hui, les prix réels des maisons sont déjà plus élevés que ceux du point culminant du cycle précédent. En général, tous les pays se situent au-dessus de ce niveau. Parmi les exceptions les plus notoires figurent les États-Unis, l’Espagne et l’Irlande, qui n’ont pas encore atteint les prix exorbitants de 2007, mais cela ne signifie pas qu’ils échappent au nouveau processus inflationniste (voir graphiques ci-dessous).

En fait, les États-Unis et l’Espagne sont après la Chine, l’Allemagne et le Canada parmi les cinq pays où les prix ont le plus augmenté au cours des trois dernières années.

3.3 « Pour connaître les prix de l’immobilier à Londres, consultez les cotations de la Bourse de Tokyo »

Le titre de cette section est tiré d’un résumé explicatif d’un Rapport sur la stabilité financière dans le monde de 2018 du FMI. Celui-ci est très préoccupé par l’évolution des prix des logements dans le monde. Pas en raison de son niveau très élevé, mais pour éviter qu’il ne tombe trop bas et ne mette à nouveau le système financier mondial en danger.

Notre étude portant sur 44 villes de 40 économies de marché avancées et émergentes indique que l’intégration croissante des marchés financiers est un facteur très important. […] Le comportement des prix de l’immobilier commence à ressembler de plus en plus aux prix des actifs financiers, tels que les actions et les obligations, qui sont influencés par les investisseurs d’autres parties du monde. Dans les pays qui sont plus ouverts aux flux internationaux de capitaux, les prix des maisons et des actions ont tendance à évoluer plus en phase avec les marchés mondiaux. Il est à noter que le synchronisme des prix de l’immobilier s’est globalement amplifié dans 40 pays et 44 grandes villes de pays avancés ou émergents. L’exposition des pays et des villes aux conditions financières mondiales pourrait expliquer ce phénomène. En outre, les villes de pays avancés seraient particulièrement exposées aux conditions financières mondiales, peut-être en raison de leur intégration dans les marchés financiers mondiaux ou de leur attractivité aux yeux des investisseurs à la recherche de rendements élevés ou d’actifs sûrs. (https://www.imf.org/fr/Publications/GFSR/Issues/2018/04/02/Global-Financial-Stability-Report-April-2018)

L’étude du FMI identifie comme principale cause du phénomène « les investisseurs institutionnels, les sociétés de capital-investissement et les fonds d’investissement immobilier [qui] recherchent de plus en plus activement des rendements supérieurs dans les grandes villes ».

En Espagne, certains de ces vautours capitalistes sont bien connus, qui ont acheté des milliers d’appartements publics privatisés par la mairie de Madrid, des dizaines de milliers de crédits immobiliers difficiles à payer et des centaines de milliers d’appartements appartenant à des banques en faillite et à des propriétaires insolvables. Un de ces fonds qui n’est même pas le plus grand, Blackstone, possède à lui tout seul en Espagne plus de 50 000 logements dédiés à la location et achetés au cours des 5 dernières années. Au cours de ces mêmes années, les loyers, selon les calculs de la Banque d’Espagne, ont augmenté de 50 %. Les expulsions pour non-paiement des loyers sont également en augmentation constante. Et face aux expulsions les suicides par désespoir se poursuivent comme dans les pires années de la crise.

Il n’existe pas de statistiques sur le poids de ces investissements à l’échelle mondiale, mais le dernier rapport du cabinet américain CBRE Consulting, qui se veut le plus important de ces fonds internationaux, nous donne une bonne indication de leur développement actuel dans la zone européenne.

La France, les Pays-Bas, la Pologne, l’Espagne et le Portugal ont enregistré des niveaux d’investissement record en 2018, ces deux derniers pays étant les seuls à avoir connu une croissance supérieure à 50 % (respectivement 56,9 % et 51,4 % par rapport à 2017)… Par ailleurs, en Allemagne, 2018 a été la deuxième année où l’investissement immobilier a été le plus élevé, avec 77 000 millions d’euros, soit 5,9 % de plus qu’en 2017. Alors que l’investissement total au Royaume-Uni a diminué de 6,5 % en 2018, en raison d’une plus grande prudence de la part des investisseurs face à une situation géopolitique incertaine, l’activité au centre de Londres a augmenté de 10 % par rapport à 2017. (CBRE, 2018, Record Year of Investment in the European Real Estate Sector, 1er février 2019)

En résumé, ce qui ressort des études du FMI et de l’OCDE, c’est que les hausses de prix historiques du cycle précédent comme du cycle actuel viennent d’une grande concentration du pouvoir de ces capitaux spéculatifs sur les marchés, de la conversion du logement en une simple niche d’investissement, à rentabiliser au maximum et le plus rapidement possible.

Il est évident que ce cycle prendra fin et qu’une baisse des prix accompagnera la récession économique qui s’annonce. Mais ce qui ne changera plus, c’est la prépondérance du gros capital sur le marché immobilier, comme c’est le cas sur presque tous les marchés. Et si rien ne l’empêche, le cycle se répétera, avec des prix toujours plus élevés et, par conséquent, davantage de personnes expulsées et privées de logement décent et abordable.

4 La recherche d’une solution réelle exige de rompre avec la bourgeoisie

Les organisations bourgeoises chargées de maintenir un certain ordre dans le chaos de l’économie capitaliste au niveau national, comme les gouvernements et les banques centrales, ou au niveau international, comme le FMI, voient une de leurs principales sources d’inquiétude dans l’inflation du marché immobilier, avant la survenue d’un krach qui multiplierait les effets de la prochaine récession. Comme nous l’avons expliqué plus haut, leur préoccupation en tant que gestionnaires de la classe parasitaire se concentre sur les risques à la baisse des prix des logements et donc leurs propositions visent à ralentir la croissance pour éviter autant que possible leur chute. Le FMI l’explique clairement et donne le ton avec les prescriptions à appliquer par les gouvernements.

Quelle devrait être la réaction des pouvoirs publics face à l’augmentation du risque pour les prix des logements ? […] L’une consiste à resserrer les politiques dites macroprudentielles lorsque l’économie est solide et que le marché du logement est en plein essor ; par exemple, limiter le montant des crédits immobiliers à un pourcentage de la valeur de la propriété et limiter le montant des charges financières mensuelles à un pourcentage du revenu du ménage. [..] Bien que notre analyse soit concentrée sur les facteurs cycliques, nous pouvons également envisager l’utilisation d’autres instruments, comme les politiques structurelles à long terme : accroître l’offre de logements ou imposer des restrictions urbaines ou des mesures fiscales, comme les impôts fonciers. (https://www.imf.org/fr/Publications/GFSR/Issues/2018/04/02/Global-Financial-Stability-Report-April-2018)

Tous les gouvernements des pays les plus touchés par la flambée des prix, à commencer par la Chine, appliquent ou vont appliquer la plupart de ces mesures, qui n’ont rien à voir avec la résolution ou même l’atténuation du grave problème matériel que cette hausse a créé pour la majorité de la population. Il n’y a pas de solution bourgeoise au problème du logement, parce que le problème de la bourgeoisie n’est pas le logement mais d’éviter la dévaluation de ses investissements.

4.1 Les politiques réformistes respectent le maintien des prix courants

D’autre part, toutes les propositions pour s’attaquer au problème des partis sociaux-démocrates ou réformistes, traditionnels ou nouvellement créés, partent du même respect religieux de la grande propriété privée et du niveau actuel des prix qui lui sont si favorables. Ces partis semblent n’avoir qu’un seul livre de recettes qu’ils appliquent ou veulent appliquer dans les municipalités qu’ils contrôlent comme Berlin (SPD), Paris (PS) ou Barcelone (En Comú-Podemos). Fondamentalement, la formule magique consiste en la création d’indices de référence des prix de location par zones, pour récompenser par des avantages fiscaux les propriétaires qui volontairement ne les dépassent pas trop. De plus, lorsque leur « radicalité » le permet, ils imposent des taxes spéciales aux propriétaires de logements vides, allant (dans de très rares cas) jusqu’à leur réquisition temporaire pour les mettre sur le marché locatif en lieu et place du propriétaire.

Il convient de souligner que toutes ces politiques sont des mesures fiscales ou des mesures visant à accroître l’offre de logements, conformément aux recommandations du FMI et que leur effet majeur a été de ralentir pendant une courte période la hausse des loyers. L’échec de sa mise en œuvre à Berlin est démontré par le projet de loi présenté en juin 2019 au parlement régional par la coalition SPD-Die Grünen-Die Linke, selon lequel les loyers des logements seraient gelés, au niveau des prix actuels, pour les cinq années à venir ! Sans sortir de leur ligne de respect des profits bourgeois, nos réformistes veulent magnifier les prix actuels, même s’ils reconnaissent que leur niveau inaccessible a provoqué une « situation d’urgence du logement » !

La même adaptation à la propriété privée, à ce qui est admissible dans le contexte des rapports capitalistes de production, se retrouve aussi parmi les partis et organisations qui se réclament (frauduleusement) de l’anticapitalisme et de la révolution. Par exemple, le PO argentin, sans son programme propre, le même que celui de sa coalition électorale avec le PTS, se limite à réclamer des impôts progressifs sur la propriété du sol, un « système de crédit à taux zéro pour le logement et une plan énergique d’urbanisation ». Le PSOL du Brésil, dans son programme de coalition de 2018, ne demande guère que « l’urbanisation des favelas » et « l’expropriation des terrains pour le logement d’intérêt social ». De même, aux États-Unis, l’organisation du CIO, Socialist Alternative, qui a une élue dans le conseil municipal de Seattle, limite sa solution à la grave crise du logement dans cette ville, à la création d’un impôt pour financer le logement public.

4.2 Un programme de classe pour résoudre le problème du logement

Pour la classe ouvrière mondiale, le problème du logement est une question prioritaire. C’est à elle de résoudre la contradiction entre le fait d’être la productrice de tous les biens immobiliers et le fait de n’avoir accès qu’aux pires et de plus en plus difficilement.

Un programme de classe doit partir non de ce que la classe dirigeante est prête à concéder, mais des besoins réels des masses populaires dans chaque localité et chaque pays. Le niveau actuel de développement des forces productives permettrait la disparition des problèmes de logement si les ressources étaient planifiées pour la satisfaction des besoins sociaux et non pour le profit du capital.

Cela signifie que le problème du logement des travailleurs peut être résolu efficacement et définitivement, à condition de partir de la vision opposée à celle de la bourgeoisie et de ses acolytes réformistes : proclamer que le logement (y compris les services de base) est un véritable droit social fondamental, tout comme la santé, l’éducation et la retraite. Et que les organisations de classe elles-mêmes doivent contrôler son application.

Le principe est simple : au lieu de donner de bons conseils au capital pour qu’il se comporte mieux sur le marché du logement de la classe ouvrière, il faut éliminer le capital de ce marché et le marché lui-même.

Le programme à développer doit être adapté aux réalités nationales mais, en général, il comporte les revendications suivantes :

  • Interdiction de toutes les expulsions de familles de travailleurs,
  • Gel de tous les loyers au niveau le plus bas des 20 dernières années,
  • Municipalisation de tous les terrains urbains,
  • Expropriation sans indemnité de tous les logements aux mains des grands propriétaires et intégration de ceux-ci dans le parc social locatif public, à des prix adaptés au revenu familial,
  • Incorporation au parc public de toute logement vide depuis plus de deux ans,
  • Plan d’urgence de construction de logements sociaux partout où les mesures précédentes ne sont pas suffisantes pour garantir un logement digne à toute la population.

De plus, il est important que notre programme intègre dans sa revendication de « logement décent » non seulement le foyer lui-même, avec les normes de surfaces en fonction du nombre d’habitants et les exigences d’hygiène et de qualité, etc., mais également la qualité et la salubrité du quartier dans son ensemble, bien au-delà du minimum requis, l’assainissement, les chaussées goudronnées et les fournitures d’eau et d’électricité :

  • Un air et un environnement propres, sans pollution ni bruit, des espaces paysagers, des transports publics efficaces, des services locaux d’éducation et de santé, des équipements culturels et de socialisation pour les jeunes et les moins jeunes, des zones sportives, etc. doivent cesser d’être le privilège de la classe capitaliste, ils doivent être exigés pour le plaisir de la classe ouvrière et du reste de la population active.

La dégradation de la sécurité des quartiers pauvres est une autre question pertinente. De nombreux quartiers populaires citadins, sans parler de nombreux bidonvilles dans le monde, souffrent d’un fléau supplémentaire en sus de la pauvreté : la violence liée au trafic de drogue, au vol et à la prostitution. Une violence à laquelle s’ajoute souvent celle des forces de police militarisées, voire de l’armée, qui utilisent les quartiers comme terrain d’entraînement à la guerre. C’est le cas, par exemple, au Brésil et aux Philippines. Face à cela, un programme ouvrier doit intégrer des slogans spécifiques appelant à l’auto-organisation de masse et à l’autodéfense pour expulser les trafiquants de drogue et d’êtres humains des quartiers et pour imposer des politiques publiques de choc contre l’abandon scolaire et le chômage. Mais aussi pour chasser du territoire les forces officielles de répression, qui partout font partie des mêmes réseaux de trafiquants (quand ils n’en sont pas à l’origine) et aggravent encore le problème.

Ce programme devrait être la base de la lutte commune de toutes les organisations du mouvement ouvrier qui prétendent défendre le droit au logement. Syndicats et partis politiques, organisations de migrants, organisations d’entraide contre les expulsions, voisins, jeunes, syndicats de locataires… si tout le monde frappait ensemble pour exiger ce dont nous avons besoin, au lieu de nous accommoder de la perte du peu que nous avons, la lutte serait difficile, mais la victoire serait assurée.

août 2019, Irene Font (IKC)