La 4e Internationale (1) : 1923-1933

(Chapitre 3 : 1938-1940)

(Chapitre 2 : 1933-1938)

(Chapitre 1 : 1923-1933)

1917-1923 : de la bureaucratisation de l’URSS à la naissance de l’Opposition de gauche russe

Lénine se prononce dès 1914 pour une nouvelle internationale, après la faillite de l’Internationale ouvrière et la trahison de ses principaux partis. Le combat internationaliste de la Gauche de Zimmerwald prépare le Parti bolchevik à la Révolution russe de 1917.

En février 1917, la première phase de la révolution, si elle renverse le tsarisme et instaure les libertés démocratiques, conduit à un gouvernement de front populaire avant la lettre. Il s’agit d’un bloc entre une fraction de la bourgeoisie (Parti constitutionnel démocrate PCD) et les deux partis conciliateurs initialement majoritaires dans les soviets (Parti socialiste révolutionnaire PSR et fraction menchevik du POSDR PM). Sa fonction politique est de préserver le capitalisme russe, de poursuivre la guerre, de refuser la terre aux paysans et le droit de se séparer aux nombreuses minorités nationales de l’ancien empire des Romanov. Il s’ensuit un double pouvoir entre les gouvernements bourgeois successifs et les soviets qui rassemblent dans tout le pays les ouvriers, les paysans et les soldats en lutte.

En octobre 1917, l’insurrection conduite par la fraction bolchevik du POSDR (devenue majoritaire dans les soviets des villes), avec l’aide d’une minorité du PSR et de certains groupes anarchistes, renverse le gouvernement de coalition PCD-PSR-PM et donne le pouvoir aux soviets. En 1919, le projet de nouvelle internationale ouvrière se concrétise avec le 1er congrès de l’Internationale communiste (IC).

Mais le pays est économiquement et culturellement retardé, il est désorganisé par la guerre mondiale. En outre, le pouvoir des soviets est confronté au sabotage des capitalistes, à la guerre civile conduite par les tsaristes, aux multiples interventions impérialistes étrangères, aux nationalismes bourgeois des nations non russes, à des soulèvements paysans… Dans ces conditions, les soviets perdent de leur substance. Les exigences des empires allemand et autrichien (Traité de Brest-Litovsk, mars 1918) conduisent le PSR de gauche à quitter le gouvernement et le PSR tout entier à des attentats contre le gouvernement réduit au Parti communiste (PCR, ex-Parti bolchevik).

Quand, dans ce pays dévasté, le pouvoir se stabilise, il se retrouve seul dans un monde hostile. Faute de parti ouvrier révolutionnaire aguerri, les soulèvements qui ont accompagné ou suivi la révolution russe ont été écrasés de manière sanglante par la bourgeoisie, ses bandes fascistes et son armée (Finlande, Hongrie, Allemagne…). Le gouvernement de l’URSS abandonne le « communisme de guerre » basé sur les réquisitions et fait des concessions aux petits propriétaires (NEP, mars 1921) malgré une fraction du parti (« Opposition ouvrière », 1919-1922, de Chliapnikov, Medvedev et Kollontaï). La couche sociale qui gère l’État (bureaucratie) échappe au contrôle de la classe ouvrière et même à celui de son parti. En fait, elle s’apprête à le conquérir. La santé de Lénine ne lui permet pas de mener le combat contre les déformations bureaucratiques de l’État ouvrier qu’il envisageait en 1923 en alliance avec Trotsky. Celui-ci hésite à se lancer seul et reste prisonnier de la discipline de la direction du Parti communiste russe.

1923-1929 : la lutte interne au Parti communiste russe reflète trois forces sociales

Face à la bureaucratisation du parti lui-même et aux forces pro-capitalistes montantes dans la société (koulaks, nepmen), une fraction du PCR (Opposition de gauche ou « opposition de Moscou », 1923-1924) animée par Rakovsky, Mouralov, Smirnov, Piatakov, Ioffé, Radek… envoie la déclaration des 46 au bureau politique contre la bureaucratisation, pour un plan d’industrialisation, pour mobiliser les paysans pauvres contre les koulaks (les paysans enrichis qui commencent à exploiter les paysans travailleurs). La bureaucratie ne mise pas sur le prolétariat mondial et redoute même sa révolution sociale qui permettrait aux travailleurs de l’URSS de reprendre le contrôle de l’État ouvrier né d’Octobre 1917. L’orientation de l’IC devient la pression sur les gouvernements bourgeois, tant à l’ouest qu’à l’est, pour tenter de contrer les menaces de l’impérialisme sur l’URSS.

En 1923, l’invasion de la Ruhr par l’armée impérialiste française déclenche en Allemagne une crise économique et ouvre une situation révolutionnaire. Le parti communiste KPD, section de l’IC, défend à juste titre une politique de front unique ouvrier envers le parti socialiste SPD dont une aile évolue vers la gauche, mais se berce d’illusions sur un « gouvernement ouvrier » composé du SPD et du KPD. Staline freine de tout son poids en août la direction Brandler du KPD puis, avec le président de l’IC Zinoviev, donne l’ordre en septembre de rejoindre le gouvernement SPD de Saxe. Le KPD propose en octobre une insurrection au SPD qui, évidemment refuse. Les préparatifs sont annulés, mais le message n’atteint pas les communistes de Hambourg qui sont seuls à prendre les armes et se font écraser.

L’échec démoralise les travailleurs avancés en Allemagne mais aussi en Russie. La fraction de gauche est vaincue au sein du parti russe non par la bataille des idées mais par les moyens anti-démocratiques du bloc temporaire de tous les rivaux de Trotsky (le triumvirat Kamenev-Staline-Zinoviev) qui défend la NEP au nom de Lénine.

L’échec en Allemagne est mis en janvier 1924 sur le dos de Brandler et Thalheimer qui se voient interdire de rentrer en Allemagne. Fischer et Maslow sont portés à la tête du KPD. L’Internationale communiste ne connait pas le débat qui a lieu en URSS. Le 5e congrès de l’IC condamne en juin 1924 le « trotskysme » et décrète la « bolchevisation ». Zinoviev, abusant du prestige du PC russe et des moyens matériels et financiers de l’URSS, met les partis communistes au pas sous prétexte de les bolcheviser.

L’histoire de l’Internationale communiste fondée à Moscou en 1919 se divise en deux parties bien distinctes. La première couvre les 5 premières années qui comportent des crises de croissance durant lesquelles les partis sont purgés des éléments accidentellement communistes ou non-communistes. La suivante couvre les 9 dernières années, qui sont une phase de déclin presque ininterrompu, durant laquelle l’aile révolutionnaire a été amputée. (Max Shachtman, The history and principles of the Left Opposition, 1933, New Park, p. 5)

Après la victoire de la « troïka » en 1924, les opposants au sein du parti russe sont destitués et envoyés en Sibérie, au Caucase, etc. Mais un soulèvement national en Géorgie, la différenciation sociale et l’accentuation des pressions des paysans riches et des négociants (Nepmen) poussent Zinoviev et Krupskaia à s’opposer à Staline qui veut maintenir la NEP. Celui-ci a inventé le « socialisme dans un seul pays » qui devient l’idéologie de la bureaucratie privilégiée. Une fraction du parti (« Nouvelle opposition » ou « Opposition de Leningrad », 1925-1926) condamne le « socialisme dans un seul pays » et réclame plus d’égalité sociale. Elle est battue avec les mêmes méthodes que la précédente.

1924 : la stalinisation de l’Internationale

L’IC, qui tenait un congrès annuel du vivant de Lénine, n’en a pas de 1924 à 1928. Les dirigeants des partis communistes précédemment mis en place par Zinoviev sont écartés brutalement par le nouveau président de l’IC, Boukharine, et l’appareil stalinien qui la coiffe. C’est le temps de la recherche de partis larges, de prétendus « partis ouvriers et paysans ». En particulier, le Parti communiste chinois entre dans le parti nationaliste bourgeois Guomindang, censé incarner le « parti ouvrier et paysan » en Chine. En réalité, les chefs mencheviks de l’IC ordonnent aux communistes d’entraver la mobilisation des ouvriers et des paysans travailleurs pour ne pas fâcher la bourgeoisie nationale qui doit conduire, selon Boukharine et Staline, la révolution démocratique.

Les erreurs sont inévitables dans la lutte du prolétariat. C’est à partir de leurs erreurs que les partis s’instruisent, sélectionnent leurs cadres et éduquent leurs dirigeants. Mais, dans l’IC actuelle, il ne s’agit plus d’erreurs mais de l’ensemble d’un système erroné qui rend impossible une politique juste. Les représentants de ce système sont de larges couches de bureaucrates, armées d’énormes moyens matériels et techniques, indépendants en fait des masses, et qui mènent une lutte acharnée pour leur propre conservation au prix de la désorganisation de l’avant-garde. Telle est l’essence du stalinisme. (OGI, « Déclaration », avril 1933, dans Trotsky, OEuvres, EDI, t. 1, p. 91)

En mai 1925, la confédération des syndicats de l’URSS signe un accord avec la direction de la confédération syndicale de Grande-Bretagne (TUC). Le « Comité anglo-russe » est maintenu malgré la trahison par la bureaucratie syndicale et le Parti travailliste de la grève des mineurs en mai 1926. Une fois la grève réprimée par Churchill et dès lors que le « Comité anglo-russe » ne leur est plus utile contre la grève générale et contre le Parti communiste (CPGB), les chefs syndicaux réformistes s’en retirent en 1927. La même année, l’armée du Guomindang écrase les ouvriers de Canton et liquide physiquement le Parti communiste chinois.

Le prolétariat a été affaibli en Allemagne par la capitulation de la direction en 1923 ; il a été trompé et trahi en Angleterre par une direction avec laquelle l’Internationale communiste continuait à faire bloc en 1926 ; en Chine, la politique de l’Internationale communiste l’a jeté dans le traquenard du Guomindang en 1926-1927. Voilà les causes immédiates et indiscutables des défaites. Essayer de montrer que même avec une politique juste les défaites étaient inévitables, c’est verser dans un fatalisme écoeurant et renoncer à la compréhension bolchevique du rôle et de l’importance d’une direction révolutionnaire. (Lev Trotsky, « Et maintenant ? », 12 juillet 1928, L’Internationale communiste après Lénine, PUF, t. 1, p. 26)

Le centre du parti (Staline, Kirov, Molotov…) qui exprime de plus en plus consciemment les intérêts de la bureaucratie de l’État s’allie avec la droite (Boukharine, Rykov, Tomsky…) qui veut approfondir la NEP. Les opposants de gauche se regroupent au compte de la classe ouvrière mais, en avril 1926, Kamenev, Trotsky et Zinoviev sont exclus du bureau politique. Ils forment en juillet 1927 « l’Opposition bolchevik unifiée » (OU) dont la plateforme réclame un plan, l’industrialisation progressive, le retour à la démocratie dans le parti, l’encouragement aux coopératives… Staline et Boukharine ridiculisent l’idée d’un plan. Sur fond de défaite en Chine et de démoralisation ouvrière, l’OU est écrasée en novembre 1927 par la censure, la calomnie, le chantage et la répression. Les opposants de gauche sont matraqués, destitués, expulsés du parti, exilés, emprisonnés…

En septembre 1927, quand un membre d’une délégation des États-Unis réclame la plateforme de l’OU pour se faire son opinion sur les débats en Russie, Staline refuse de la lui communiquer.

Paniqué devant l’audace des koulaks et des nepmen, Staline rompt dès 1928 en coulisse avec la droite. La bureaucratie étatique est contrainte de réquisitionner les récoltes pour pouvoir nourrir les villes en 1928 et 1929. Fin 1929, le gouvernement décrète une collectivisation brutale de l’agriculture et lance une industrialisation forcenée sur le dos des ouvriers affamés. Zinoviev, Kamenev, Piatakov, Radek, Preobrajensky… renient leurs positions pour rentrer à ce qu’ils pensent toujours être le Parti bolchevik ; la majorité de la première opposition de gauche, Trotsky, Rakovsky, Mouralov… s’y refusent. Trotsky est déporté au Kazakhstan en 1928 puis banni d’URSS en janvier 1929 et envoyé en Turquie. Les démocraties bourgeoisies européennes (Allemagne, Grande-Bretagne, France…) lui refusent le droit d’asile.

1929 : l’Opposition de gauche internationale pour redresser l’IC

La bureaucratie de l’URSS décrète la « troisième période » de l’Internationale communiste à son 6e congrès en juillet 1929, avant l’éclatement de la crise économique mondiale. Selon Staline, le capitalisme ne peut pas sortir de la crise, la situation est désormais révolutionnaire, l’offensive est partout à l’ordre du jour, la sociale-démocratie devient l’ennemi principal (« social-fascisme »). Les partis communistes sont de nouveau purgés, Boukharine est remplacé à la présidence de l’IC par Molotov.

Des milliers de militants ont été exclus des partis communistes. Parmi eux, Trotsky s’efforce de regrouper (donc de délimiter) les bolcheviks-léninistes en s’appuyant sur le Biulleten’ oppozitsii de l’opposition de gauche russe (clandestine ou prisonnière dans les camps) et La Vérité, un journal publié en France à partir d’août 1929 par Alfred Rosmer, Raymond Molinier, Pierre Barozine, Jan Van Heijenoort, Pierre Frank, Pierre Naville et Gérard Rosenthal qui fondent la Ligue communiste.

L’Opposition se forme actuellement sur une délimitation dans les idées, sur le terrain des principes et non sur une action de masse… Nous ne pouvons pas nous arracher de la période dans laquelle nous vivons. La délimitation dans les idées, claire, nette, est absolument indispensable. Elle prépare le succès dans l’avenir… Il y a trois questions qui fournissent un critère décisif pour évaluer les tendances dans le communisme mondial : 1) la politique du comité anglo-russe, 2) le cours de la révolution chinoise, 3) la politique économique de l’URSS avec la théorie du socialisme dans un seul pays. (Lev Trotsky, « Critères de différenciation », 31 mars 1929, OEuvres, ILT, t. III, p. 123)

L’OGI de l’IC tient une réunion internationale en avril 1930 à Paris pour constituer un secrétariat international, mais il faut attendre plusieurs mois pour la publication d’une déclaration.

Seul le mouvement révolutionnaire peut, avec le parti prolétarien, conduire le prolétariat à sa libération en créant ainsi les bases de la nouvelle société qui libérera l’humanité entière… La principale contradiction qui existe aujourd’hui dans le mouvement révolutionnaire est la divergence croissante entre les possibilités révolutionnaires et la capacité des partis communistes officiels… L’Internationale a abandonné la politique tracée par les quatre premiers congrès. (« Appel aux prolétaires du monde », août 1930, Les Congrès de la 4e Internationale, La Brèche, t. 1, p. 40-41)

Pour sa part, l’opposition de droite de l’IC fonde un vague rassemblement, l’Opposition communiste internationale, qui regroupe en Allemagne le KPD-O (Parti communiste-Opposition) dirigé par Brandler, Thalheimer et Frölich ; en Espagne, le BOC (Bloc ouvrier et paysan) dirigé par Maurín et Gorkin ; en France, le PUP (Parti d’unité prolétarienne) dirigé par Sellier ; etc.

1929-1933 : la bataille pour le front unique ouvrier

L’axe de l’OGI et de sa section allemande IKD est la bataille pour le front unique ouvrier du PKD et du SPD contre le danger fasciste en Allemagne, ce qui permettrait de redresser le KPD, de détruire l’influence du SPD et de frayer à nouveau la voie à la révolution prolétarienne.

En finir avec les conquêtes arrachées lors d’une lutte héroïque de trois quarts de siècle, détruire vos organisations politiques et syndicales, vous réduire au complet esclavage, voilà la tâche de la dictature fasciste. La victoire contre le fascisme est encore possible, à une seule condition : que toutes les organisations du prolétariat, le Parti communiste, le Parti social-démocrate, les organisations syndicales, etc. entreprennent la lutte commune contre le fascisme. (« Appel aux membres du KPD, aux ouvriers du SPD… », février 1933, Les Congrès de la 4e Internationale, La Brèche, t. 1, p. 55)

Les contributions de Trotsky ont été rassemblées en français dans deux compilations : Comment vaincre le fascisme (1930-1933), Buchet-Chastel, 1973 ; Contre le fascisme (1922-1940), Syllepse, 2015.

En 1931, la monarchie est renversée en Espagne. La direction de la CNT appelle à voter pour les partis bourgeois républicains ; le PSOE et la direction de l’UGT entrent carrément au gouvernement bourgeois ; le BOC de Maurín se rallie à l’indépendance de la Catalogne ; le PCE stalinisé lance la consigne « À bas la République bourgeoise ! » alors que n’existe pas l’ombre d’un soviet.

La phrase gauchiste des staliniens trouble la Gauche communiste italienne que son incompréhension du fascisme, son hostilité aux revendications démocratiques et au front unique ouvrier éloignent de l’OGI.

L’Opposition de gauche a tout fait pour favoriser l’intégration du groupe Prometeo aux bolcheviks-léninistes. Les événements gigantesques durant les dernières années en Chine, en Espagne et en Allemagne ont constitué un test exhaustif des différences d’opinion sur la question des revendications démocratiques et sur la politique de front unique. Chaque coup de la critique de l’OGI contre les staliniens a rebondi également contre les bordiguistes… Dans le cadre d’un parti de masse, il serait possible de coexister avec les bordiguistes, sous condition d’une discipline ferme dans l’action. Mais, dans le cadre d’une fraction, il est absolument inadmissible, particulièrement après toute l’expérience que nous venons de vivre, de soutenir la fiction d’une unité avec un groupe étranger, idéologiquement rigide et isolé de façon sectaire. (« L’Opposition de gauche en Italie », février 1933, Les Congrès de la 4e Internationale, La Brèche, t. 1, p. 68)

En réalité, la « troisième période » camoufle un opportunisme qui n’a pas disparu avec l’éviction de Boukharine. Ainsi, de 1929 à 1933, la direction stalinienne du KPD attend tout des élections, elle refuse de mobiliser contre le parti fasciste NSDAP (même si sa jeunesse et sa milice le font parfois sur le terrain), elle fait parfois bloc avec les hitlériens contre le SPD… Le KPD tente même de concurrencer les fascistes sur le terrain du chauvinisme, comme ses pâles caricatures contemporaines (LFI en France, Aufstehen en Allemagne).

La ligne bolchevique balaiera les fanatiques raciaux car elle prouvera dans l’action que le destin de l’humanité est déterminée par la lutte des classes et non par celle des nations. Combattre le fascisme avec les armes du nationalisme n’est rien d’autre que de l’huile versée sur le feu. (Lev Trotsky, « Qui défend l’URSS ? Qui aide Hitler ? », 29 juillet 1935, Contre le fascisme, Syllepse, p. 495)

L’IC, contre l’action unie des organisations ouvrières, met pour la première fois sur pied en 1932 un organisme pacifiste, le Mouvement Amsterdam-Pleyel, composé d’intellectuels, de syndicalistes et de démocrates bourgeois (Bergery du Parti radical…) dont les bavardages sont impuissants contre la violence des bandes fascistes et les menaces de guerre impérialiste.

Les ouvriers avancés, c’est vrai, apprécient beaucoup la sympathie qu’éprouvent pour leur cause les meilleurs représentants de la science, de la littérature et de l’art. Mais il ne s’en suit nullement que les savants ou les artistes avancés puissent remplacer les organisations de masse ou prendre la direction du prolétariat. (« Déclaration des délégués appartenant à l’OGI de l’IC au congrès de lutte contre le fascisme », avril 1933, dans Trotsky, OEuvres, EDI, t. 1, p. 95)

La préconférence de l’OGI qui se réunit à Paris en février 1933 avec des délégations de 11 pays adopte, entre autres, un appel au prolétariat allemand (citée ci-dessus) et une plateforme intitulée L’Opposition de gauche internationale, ses tâches, ses méthodes dans laquelle figurent « les onze points » :

  • 1. indépendance du parti prolétarien en toutes circonstances,
  • 2. reconnaissance du caractère international et donc permanent de la révolution prolétarienne,
  • 3. reconnaissance de l’URSS comme État ouvrier,
  • 4. condamnation de la politique économique de la fraction stalinienne,
  • 5. travail systématique dans les syndicats de masse,
  • 6. rejet de la formule « dictature démocratique du prolétariat et de la paysannerie »,
  • 7. nécessité de la mobilisation des masses sous des mots d’ordre transitoires,
  • 8. politique de front unique vis-à-vis des organisations ouvrières de masse, aussi bien syndicales que politiques,
  • 9. rejet de la théorie du social-fascisme,
  • 10. distinction dans le champ du communisme de trois groupements : marxiste, centriste, droitier,
  • 11. nécessité de la démocratie dans le parti.

Quelques mois plus tard, tenant compte de leur absence d’autocritique après la victoire sans combat de Hitler, l’OGI abandonnera tout espoir de redresser le KPD et l’IC et s’orientera vers une nouvelle internationale communiste.

(Lire la seconde partie)