L’autocrate Erdogan a pris prétexte de l’attentat survenu à Istanbul le 13 novembre qu’il a immédiatement attribué au Parti de l’union démocratique (PYD-YPG) et au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Ceux-ci, qui n’ont pas pour habitude d’organiser des attentats contre des civils, ont immédiatement démenti toute implication. Mais cela importe peu à Erdogan, qui cherchait depuis longtemps un prétexte pour intervenir à nouveau militairement contre le PKK et le PYD en Syrie. Déjà le 26 mai dernier, il annonçait son intention d’envoyer son armée pour contrôler toute la partie nord de la Syrie sur une longueur de plus de 400 km et une largeur de 30 km et en refouler les Kurdes qui y résident. L’armée turque est déjà intervenue contre les Kurdes en Syrie en 2016, 2017, 2018, 2019 et 2020. En 2019, en accord étroit avec les Etats-Unis qui retirent leurs troupes, l’armée turque secondée par ses supplétifs islamistes de l’Armée nationale syrienne déclenche l’offensive et occupe une région de 120 km sur 30 autour des villes de Tall Abyad et Ras al-Ain. Il s’agit aujourd’hui pour Erdogan de finir le travail et d’expulser les Kurdes avec le PKK et le PYD de toute la frontière syrienne avec la Turquie.
Depuis le dépeçage de l’Empire ottoman par les puissances impérialistes victorieuses de la première guerre mondiale, en particulier la France et la Grande-Bretagne, le peuple kurde est divisé entre la Turquie, l’Iran, la Syrie et l’Irak, réduit dans chaque pays à n’être qu’une minorité plus ou moins opprimée selon les régimes et les circonstances politiques, mais jamais reconnu comme une nation opprimée ayant droit à se séparer et à fonder son propre État. La revendication d’un seul État kurde est incompatible non seulement avec les manœuvres des impérialismes dominants, mais se heurte aussi de plein fouet aux bourgeoisies de Turquie, d’Iran, de Syrie et d’Irak.
Le nationalisme kurde a toujours choisi de s’appuyer sur un État de la zone ou sur une puissance impérialiste. Ainsi, le Parti de l’union démocratique (PYD) petit-bourgeois de Syrie a passé des accords avec le dictateur Bachar el Assad et s’est allié aux États-Unis qui ont remis l’Irak aux cliques arabes cléricales et qui viennent d’autoriser la dernière offensive militaire de la Turquie. Ainsi, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) bourgeois gère un mini-État en Irak appuyé par la Turquie, ce qui l’amène parfois jusqu’au conflit armé avec le PKK. C’est une impasse. Aucune fraction significative de la bourgeoisie turque, perse, irakienne ou syrienne n’a jamais accepté le droit à l’autodétermination des minorités nationales. Leurs quatre États sont tous responsables de massacres et d’exactions de Kurdes. Et la protection des impérialismes américain comme russe est illusoire. D’ailleurs, les impérialismes occidentaux alliés de la Turquie continuent de considérer le PKK comme une organisation terroriste alors qu’ils se sont appuyés sur sa branche armée en Syrie, les YPG, pour combattre l’État islamique. Ainsi c’est manifestement avec l’accord des gouvernements américain et russe que les avions turcs ont pu sans encombre pénétrer l’espace aérien syrien pour bombarder les populations kurdes le 19 novembre.
Confrontés respectivement à une situation révolutionnaire et à une crise économique, les gouvernements islamistes d’Iran et de Turquie redoublent leurs attaques contre les Kurdes. En Turquie, Erdogan et le bloc gouvernemental AKP-MHP font à nouveau des Kurdes des boucs émissaires pour tenter de se maintenir au pouvoir à l’approche des élections générales de juin 2023. En Iran, le puissant mouvement des masses contre la dictature islamiste a pris naissance dans la région kurde, la plus opprimée et c’est contre elle que la répression se déchaine sans limite puisque les manifestants y sont massacrés par les sbires du régime à la mitrailleuse lourde. De plus l’armée iranienne a bombardé des positions kurdes au nord de l’Irak. Par conséquent, les Kurdes se trouvent aujourd’hui attaqués par le régime turc et par le régime iranien tandis que le dictateur syrien appuyé par la Russie et l’Iran n’attend que l’occasion propice pour récupérer le contrôle du Kurdistan syrien.
L’avenir du peuple kurde n’est pas dans la recherche d’alliances avec telle ou telle puissance impérialiste ou avec tel ou tel État bourgeois de la région. Le droit imprescriptible du peuple kurde à fonder son propre État ne peut aboutir qu’en s’appuyant sur la lutte du prolétariat turc pour se débarrasser d’Erdogan, du prolétariat iranien pour chasser la dictature islamiste, sur l’établissement de gouvernements ouvriers et paysans, sur la fédération socialiste d’Asie de l’ouest.
- Front unique ouvrier en défense des droits des Kurdes !
- Dirigeants des organisations ouvrières, appelez et organisez des manifestations devant les ambassades et consulats turcs pour l’arrêt de l’intervention, le retrait de troupes, la libération des prisonniers !
- Fin immédiate de l’attaque militaire turque, retrait de toutes les troupes turques de Syrie !
- Arrêt immédiate de la répression des masses au Kurdistan iranien et dans tout l’Iran !
- Pour le droit des Kurdes de Turquie, d’Iran, de Syrie et d’Irak à constituer un seul État kurde !