La reine est morte, à bas le roi !

Le produit de siècles de pillages et de massacres

La monarchie britannique a accompagné des siècles de conquêtes coloniales, d’assujettissement de peuples autochtones, de captation de richesses, d’exploitation de la main d’œuvre, de développement du mode de production capitaliste. Quand, après la première guerre mondiale, l’irrémédiable déclin de l’empire s’est manifesté, l’impérialisme britannique a continué à miser sur la royauté pour tenter de stabiliser les possessions restantes, pour afficher la continuité de la domination anglaise sur une partie du monde.

Elisabeth Windsor trônait encore sur 16 États et était à la tête du Commonwealth qui réunit 56 pays, en Europe, en Afrique, en Amérique, en Asie, en Océanie. Un rappel succinct des prouesses des classes dominantes britanniques au fil des siècles est très utile pour vider les wagons de louanges, respects, admirations qu’on nous a infligés mi-septembre.

En Amérique

Les premières colonies ont été établies à Jamestown, en Amérique du Nord, en 1607. La rébellion de la tribu des Powhatans qui ont refusé le travail forcé pour nourrir les colonisateurs a été matée : la population autochtone a été divisée par 8.

Les capitalistes négriers sous pavillon de la couronne furent responsables du transport de 3,5 millions d’esclaves africains vers les Amériques, un tiers de tous ceux transportés à travers l’océan Atlantique. Entre 1761 et 1807, la vente d’esclaves a rapporté environ 9 milliards d’euros d’aujourd’hui aux ports britanniques. Les propriétaires accumulaient un capital considérable grâce à l’exploitation de cette main d’œuvre gratuite trimant dans les plantations de coton, de tabac, de canne à sucre. Les colonies antillaises les plus rentables, comme la Barbade et la Jamaïque, intégrées à l’empire britannique, avaient des « codes d’esclaves » impitoyables qui restreignaient le droit de se déplacer, de se marier, de cueillir, de produire, vendre ou acheter des biens propres, d’apprendre à lire, une législation qui légitimait les punitions barbares et les meurtres commis par les propriétaires. La dureté des conditions de travail et d’existence explique que le tiers des esclaves mourait dans les trois ans suivant leur arrivée.

En 1982, l’État britannique déploie une force de frappe considérable pour garder la main sur les Malouines, possession britannique depuis 1833, revendiquées par l’Argentine, prouvant que Windsor et Thatcher sont irrémédiablement liées aux anciens propriétaires esclavagistes.

En Afrique

L’armée britannique dont la tête couronnée est le chef a mené sur ce continent des guerres d’une extrême férocité pour que la classe capitaliste accapare ressources, territoires et main d’œuvre. Elle s’est emparée de la colonie du Cap en Afrique du Sud en 1806 et les colons anglais et écossais ont chassé les rivaux d’origine néerlandaise (Boers ou Afrikaners). Ses tentatives pour s’approprier les industries de l’or et du diamant ont conduit en 1899 à la seconde guerre des Boers. Au moins 25 000 Afrikaners sont morts, principalement dans des camps de concentration mis en place par les Britanniques. Les Noirs massacrés n’ont même pas été comptés. Entre 1880 et 1900, la Grande-Bretagne opprimait directement 30 % de la population africaine. (voir Révolution communiste 20)

En 1890, les colonisateurs britanniques prennent le contrôle du Kenya. Quand en 1952, les Kenyans d’origine revendiquent leur indépendance, la Windsor en vedette ces dernières semaines vient d’accéder au trône. Pendant les 8 ans que dure la « rébellion Mau-Mau », militaires et colons ont tranché les oreilles, fouetté, castré, brûlé vif ceux qui luttaient pour l’indépendance. Ils ont parqué les résistants (300 000) dans des camps de concentration. Le bilan s’élève à 100 000 morts.

Si la mise sous tutelle britannique de ce qui deviendra le Nigeria commence en 1840, ce qui ne peut être imputé directement à Elisabeth Windsor, elle porte par contre la responsabilité du soutien appuyé au gouvernement génocidaire nigérien qui a fait 2 millions de morts Igbos au Biafra entre 1967 et 1970.

Afin de sécuriser les routes commerciales vers l’Inde, l’empire britannique a entrepris de coloniser l’Afrique australe et l’Égypte, envahie en 1882, accaparant 44 % du canal de Suez aussitôt après son ouverture.

En Asie

La Société britannique des Indes orientales a commencé à commercer (textiles et épices) dans cette partie du continent dès 1600. Au milieu du 18e siècle, elle prend le contrôle des ports et des villes et expédie en Angleterre les richesses pillées. En 1857, des milliers de soldats indiens se mutinent et refusent de continuer à servir le colonialisme britannique. L’armée de sa très grâcieuse majesté les massacre au canon et cette dernière se proclame « impératrice des Indes ». Avant la Première guerre mondiale, la Grande Bretagne s’est appropriée les trois quarts du pays. Le chaos économique que l’Empire a créé, en limitant les cultures vivrières, en exportant massivement les produits agricoles vers le Royaume Uni, a conduit à des famines répétées faisant des millions de morts.

En rose les appropriations britanniques en 1920

La résistance à la colonisation, l’affaiblissement général de l’impérialisme britannique l’ont forcé à quitter finalement l’Inde en 1947, non sans avoir coupé le pays en deux (partition Inde à majorité hindoue, Pakistan à majorité musulmane) : entre 12 et 15 millions de déplacés, 1 à 2 millions de morts.

Depuis 1773, le Royaume-Uni disposait du monopole de la vente d’opium en Chine. Il chercha alors à forcer la dynastie Qing en place à ouvrir le pays aux puissances étrangères. En réponse, en 1800, le gouvernement interdit la culture du pavot pour réduire l’hégémonie britannique sur le marché chinois, mais le Royaume-Uni importa alors, en contrebande, le pavot d’Inde, tout en tentant d’imposer un troc entre l’opium importé et les marchandises chinoises (thé, soie, porcelaine) convoitées. Deux guerres en résultèrent, qui virent chacune les bombardements de villes (Canton) par la marine britannique, les pillages gigantesques, le massacre de milliers de soldats chinois et de civils (prise de Pékin). Victorieuse, la couronne anglaise a reçu Hongkong et des droits commerciaux dans les ports de Canton et de Shanghaï.

En 1973, dans l’océan Indien, l’armée britannique a expulsé de force la population des îles Chagos pour permettre l’installation de la plus grande base militaire américaine hors États Unis. Pendant 10 ans, elle a organisé la pénurie de nourriture, les intimidations, l’interdiction de retour de ceux qui s’absentaient pour travailler ou voir leur famille ailleurs, jusqu’à finalement charger ceux qui ont résisté, plus de 2 000 personnes, sur des navires anglais, direction Maurice, les Seychelles. La puissance coloniale les a décrétés « travailleurs détachés » et n’a versé aucun dédommagement. Le Royaume-Uni s’est permis de louer leur archipel aux États-Unis comme base militaires jusqu’en 2036.

Dès la première guerre mondiale, concurrencée par l’impérialisme américain en pleine ascension, par l’impérialisme français affaibli mais présent lui aussi en Afrique et au Proche-Orient, peinant à régner sans partage sur les terres riches en pétrole qu’elle s’était appropriées, la classe dirigeante britannique a sciemment opposé entre eux groupes ethniques et religieux, soutenant certaines factions et divisant pour maintenir sa domination et affaiblir les résistances. Le plus célèbre des plans secrets de transformation de la région –l’accord Sykes-Picot de mai 1916, du nom des représentants britanniques et français qui l’ont rédigé– a partagé les territoires arabes de l’empire ottoman en deux sphères d’influence. La Grande-Bretagne s’est attribué la majeure partie de l’Irak, de la Jordanie et certaines parties de la Palestine, tandis que la France s’est arrogé le sud-est de la Turquie, la Syrie et le Liban, sacrifiant dès lors Palestiniens et Kurdes. Le colonel Lawrence (« Lawrence d’Arabie » à Hollywood…) écrit :

Les Arabes sont encore moins stables que les Turcs. S’ils étaient manipulés adroitement, ils resteraient dans un état de mosaïque politique, un tissu de petites principautés jalouses, incapables de cohésion. (cité par Mark Curtis, Secret Affairs: Britain’s Collusion with Radical Islam, Serpent’s Tail, 2010)

Le gouvernement britannique de l’Inde reconnaissait lui aussi le bénéfice d’une Arabie divisée.

Ce que nous voulons, ce n’est pas une Arabie unie, c’est une Arabie faible et désunie, divisée autant que possible en petites principautés sous notre suzeraineté, mais incapables d’une action coordonnée contre nous, formant un tampon contre les puissances occidentales. (David Fomkin, A Peace to End All Peace: The Fall of the Ottoman Empire and the Creation of the Modern Middle East, Deutsch, 1989)

Plusieurs décennies plus tard, les guerres de déstabilisation et de conquête menées sous égide américaine en Irak (1990 et 2003) ont obtenu la participation active de l’État britannique avec la Windsor à sa tête.

C’est encore avec la bénédiction de la monarchie que l’impérialisme anglais donne une impulsion décisive au sionisme avec la déclaration Balfour de 1917 en faveur de l’installation en Palestine d’un « foyer national juif » dans le but de morceler la région pour empêcher la création d’un État arabe indépendant et pour constituer un État tampon dont il aurait été le protecteur pour prévenir toute expansion de l’impérialisme français vers l’Égypte.

En Océanie

Les Australiens indigènes habitaient le continent depuis 65 000 ans lorsque les troupes britanniques ont débarqué au début du 17e siècle. Entre 1788 et 1934, au moins 40 000 autochtones ont été assassinés par des colons anglais et écossais lors de 270 massacres recensés. La volonté de les éradiquer était approuvée par la couronne. L’État bourgeois lui-même a organisé la rafle d’un enfant australien aborigène sur trois, entre 1910 et 1970, placés dans des familles « blanches » anglophones pour faire disparaitre leur langue, leur culture, leur histoire personnelle et celle de leur peuple. La Windsor a bien supporté vingt ans cette ignominie.

Dans cette partie du monde, dernière à être colonisée par les grandes puissances, l’impérialisme britannique et l’impérialisme français, avec leur soldatesque, leurs prêtres de diverses obédiences, leurs pillages, leurs épidémies ont décimé les populations. (voir Révolution communiste 42)

Transformées en bagne, en colonies de peuplement, fouillées pour exploiter les minerais, volées et regroupées pour créer des exploitations agricoles capitalistes, les terres de toutes ces fractions de l’humanité ont subi le rouleau compresseur du capital : faire vite plus d’argent.

En Europe

Dès le 12e siècle, la royauté britannique décide d’envahir l’Irlande, s’approprie les meilleures terres, installe ses obligés sur la côte est, impose un protectorat ; quatre siècles plus tard le roi anglais se proclame roi d’Irlande et la colonisation pleine et entière est entreprise. Les Irlandais sont discriminés dans les faits et les lois. L’Irlande devient « le panier à provisions » de Londres.

En 1845, l’arrivée du mildiou ravage les cultures de pommes de terre qui sont la base de l’alimentation de la masse de la population. Très vite, la nourriture manque. Le gouvernement britannique appelé à l’aide par le parlement de Dublin parle d’« exagération », assure qu’il faut « laisser faire le libre marché ». Par contre, il se montre tout à fait interventionniste pour continuer à charger les bateaux (4 000 en 1847, la pire année où 400 000 personnes meurent) de denrées alimentaires qui partent en Angleterre. Il s’en suit quatre années de famine qui déciment la population. Quand la situation des Irlandais est telle que la non-assistance anglaise fait scandale en Europe et provoque des rébellions dans l’Empire, l’oppresseur octroie au compte-goutte des céréales de mauvaise qualité, les confréries religieuses anglicanes organisent des distributions de soupe où le bol est donné contre une conversion au protestantisme. Les « maisons de travail » rassemblent des centaines de milliers d’hommes, de femmes, d’enfants réduits aux travaux forcés pour un peu de pain. Le bilan est de 500 000 à 1 million de morts, 2 millions de réfugiés et 1 million d’exilés.

Le 20e siècle est traversé en Irlande de combats pour l’indépendance et pour la république, contre l’occupation, puis contre la partition (1920). (voir Révolution communiste 17)

À la fin des années 1960, l’armée britannique mène une véritable guerre contre le mouvement émancipateur que le gouvernement appelle « troubles » (comme Poutine parle d’« opération spéciale », comme l’État français parlait d’« événements » en Algérie). Le 30 janvier 1972 (Bloody Sunday), l’armée ouvre le feu sur des militants des droits civiques qui manifestent pacifiquement à Derry, tuant 14 personnes dont 7 adolescents et en blessant une centaine. La Windsor et les gouvernements qui ont servi l’impérialisme britannique, entre 1969 et 1998, portent la responsabilité de 3 500 morts, dont les prisonniers politiques en grève de la faim à Long Kesh qui refusaient de porter l’uniforme des droits communs, de 47 500 blessés, de 19 600 emprisonnés sans jugement.

Et comment oublier la terrible répression qui s’est abattue dans tout le Royaume Uni sur les mineurs en grève et leurs familles, tandis qu’Elisabeth Windsor occupait le trône, en 1953, en 1974 et en 1984-1985 ? Les migrants livrés à la mort parce que la marine de sa majesté refuse de porter secours ? La législation anti-pauvres qui n’a cessé de se renforcer ?

La pourriture sous les dorures

La famille Windsor, encore plus antisémite que Churchill, n’a pas caché ses sympathies pour Hitler, le champion de la mise au pas du mouvement ouvrier allemand et de la guerre contre l’USS. Edward VIII n’a régné quelques mois avant d’être écarté parce qu’encombrant pour la majorité de la bourgeoisie britannique qui avait opté pour une autre stratégie. Il s’est précipité après son abdication, avec sa femme elle-même pronazie, à Berchtesgaden pour rencontrer Hitler en 1937.

Edward avait beaucoup de sympathie et d’amitié pour les dirigeants nazis. Lui et Goebbels, le ministre de la propagande, s’étaient très bien entendus lors de la visite à Berchtesgaden. Il admirait la modernité du parti nazi, il était d’accord avec ses méthodes dictatoriales, du point de vue de leur efficacité. Il pensait que Hitler allait écraser les Américains. (Andrew Morton, 17 carnations: The royals, the nazis and the biggest cover-up in history, O’Mara, 2015)


Photos ABACA

Une photo montrant tonton apprenant à sa nièce Elisabeth le salut nazi a fait grincer quelques dentiers à sa publication par The Sun, en juillet 2015. Comme le cliché de Harry, fils de l’actuel locataire de Buckingham, portant un uniforme nazi pendant une soirée déguisée de la haute : ces gens-là savent s’amuser.



Le deuxième fils de la reine morte, Andrew, copinait avec Epstein le milliardaire américain dirigeant un réseau international de prostitution. Accusé d’agression sexuelle sur mineure, il a payé pour éviter un procès public.

Décidément, la protection des mineur(e)s n’a pas été le fort d’Elisabeth Windsor : cheffe de l’église anglicane, elle a participé à la loi du silence. Son fils, maintenant roi, a même soutenu un évêque violeur.

Dans un rapport publié jeudi 9 mai, une commission d’enquête britannique indépendante sur les agressions sexuelles contre les mineurs accuse l’Église d’Angleterre d’avoir fait passer sa « réputation » avant les victimes du clergé et critique le prince Charles pour avoir soutenu un évêque reconnu coupable d’abus sexuels sur 18 jeunes garçons… Ami proche du prélat, il a usé de son influence pour intervenir en sa faveur. Il a également acheté via son duché une propriété pour que l’évêque puisse s’y installer après avoir été déchu de ses fonctions. Le fils aîné de la reine Elisabeth II a conservé des liens d’amitié avec le pédophile pendant de longues années et la commission d’enquête ne se prive pas de reprocher au prince de Galles un « soutien malavisé ». (RFI, 10 mai 2019)

Une caste de parasites

Elisabeth Windsor est morte à 96 ans, quand la moyenne des femmes qui ont eu à travailler pour vivre est de 74 ans. La Bayes Business School a publié le 31 décembre 2021 une étude démontrant que les membres de la famille royale vivaient 26 % plus longtemps que le reste de la population, toutes catégories sociales confondues, alors que l’espérance de vie diminue depuis 2011 au Royaume Uni. Elle a réchappé au covid quand 200 000 personnes ont succombé au « Royaume-Uni ». Les parasites savent se ménager.

Le patrimoine de la couronne est estimé à 8,2 milliards d’euros. Cela ne gênait évidemment pas feue la reine de rafler en plus chaque année plus de 96 millions d’euros de « subvention souveraine » sur fonds publics, plus une autre subvention pour « maintenir les palais occupés ». Elle possédait des centres commerciaux, des centres d’affaires, des biens immobiliers résidentiels, des châteaux, des domaines agricoles (150 000 hectares au moins), des forêts, des zones de pêches, des mines, des chevaux de courses, des œuvres d’art… qui lui ont rapporté 57,8 millions d’euros cette année. Elle a placé quelque 12,5 millions d’euros dans des paradis fiscaux (Caïman, Bermudes), opération dévoilée par la BBC et The Gardian qui ont enquêté sur le scandale des Paradise Papers. Le magazine Forbes chiffre à 500 millions d’euros sa fortune personnelle.

Toute la famille Windsor, mari, frères et sœurs, enfants et épouses, petits-enfants, est arrosée des fonds publics refusés aux chômeurs, aux hôpitaux, aux écoles, à la construction de logements, à l’entretien des routes, des rails, etc.

L’union nationale

Elisabeth Windsor, ses conseillers, sa famille, avaient décidé qu’elle jouerait sa mort en Écosse, orchestrant par avance la traversée du pays, la multiplication des rites archaïques, occupant le terrain pendant 10 jours. La presse nationale et internationale a relayé sans interruption, pour forger le mythe d’un culte partagé par tous.

Peu ont commenté les rangs clairsemés en Écosse, les concerts de klaxons à Derry, à Belfast, à Dublin, les arrestations à Edimbourg pour avoir levé des pancartes exigeant l’abrogation de la monarchie, à Oxford (« Qui l’a élu ? ») et Londres (« Pas mon roi ») ; celles et ceux qui en Jamaïque ou en Australie ont déclaré qu’il était grand temps de ne plus être des « sujets de la couronne britannique » ; les voix qui depuis l’Afrique ou l’Inde (voir par exemple Le Monde, 11 et 12 septembre 2022) ont exprimé leur compassion pour les victimes innombrables de la royauté britannique plutôt que pour une privilégiée qui n’a jamais autant payé de sa personne que depuis sa mort.

Loin de soutenir ces manifestations progressistes, le droit à la libre expression, l’opposition à l’archaïsme, le Parti travailliste et les directions des syndicats se sont vautrés dans l’union nationale autour de la défense de la monarchie.

Rappelons d’ailleurs que le Parti travailliste ne se prononce pas pour la république et que ses députés prêtent serment d’allégeance au roi. Son chef a commis un hommage répugnant.

Au-dessus des luttes politiques, elle se tenait non sur ce qui nous divisait mais sur ce qui nous rassemblait. Dans les crises, elle nous rassurait. Nous rappelant que nous sommes tous une part de quelque chose qui perdure au fil du temps. (Keir Starmer, 8 septembre 2022)

Un chroniqueur du Guardian et membre du Parti travailliste a fait état de directives envoyées aux députés par la direction du parti.

Elles leur interdisent de publier quoi que ce soit sur les réseaux sociaux, à l’exception d’hommages à la reine ou de ce que le parti leur demandera, et leur interdisant de parler aux médias »…Toutes les campagnes et activités du parti doivent rester suspendues jusqu’à nouvel ordre. Toutes les communications politiques, y compris les mises à jour et bulletins d’information des députés, doivent être reportées pendant cette période. Lorsqu’ils sont en public, continuer à suivre le code vestimentaire : couleurs sombres et noires. (Owen Jones, Twitter, 13 septembre 2022)

Londres, 10 septembre : le nouveau roi avec les dirigeants des partis « d’opposition »dont Starmer du Parti travailliste au centre / photo Jonathan Bradys

Dans l’heure qui a suivi la mort de la reine, les syndicats des postes et des chemins de fer ont annulé les journées d’action nationales en cours et à venir. La direction confédérale (TUC) a reporté son congrès. Le président du RMT (syndicat des transports, considéré comme radical), Mick Linch, s’est joint à « toute la nation dans la présentation de ses respects à la Reine Elisabeth II » et « a offert les plus sincères condoléances du syndicat à sa famille, ses amis et au pays » (cité par Weekly Worker, 15 septembre 2022).

Le Parti travailliste, en Angleterre, dans ce pays classique des syndicats, est la simple transposition de la même bureaucratie trade‑unioniste… Le Parti travailliste, les syndicats, ce n’est pas deux principes, mais une division technique du travail. S’il n’y avait pas la bureaucratie, la police, l’armée, les tribunaux, les lords, la monarchie n’apparaitraient que comme des jouets pitoyables et ridicules devant les masses prolétariennes. (Léon Trotsky, « Les fautes fondamentales du syndicalisme », octobre 1929)

Les partis nationalistes irlandais et écossais se sont également prosternés devant la figure majeure de l’oppression anglaise.

Tous les députés de l’Assemblée d’Irlande du Nord lui ont rendu hommage, y compris ceux du Sinn Fein, le parti républicain, autrefois l’aile politique de l’IRA. « Je veux dire ici la valeur que représente la contribution significative de la reine Elisabeth à l’avancée pour la paix et le respect que j’ai pour cela », a notamment souligné Michelle O’Neill, la leader du Sinn Fein en Irlande du Nord. (Le Monde, 15 septembre 2022)

La cheffe du SNP Nicola Sturgeon définit la mort d’Elisabeth Windsor comme « une immense perte et un moment de profonde tristesse au Royaume Uni et dans le monde. (…) Elle nous inspirait, à l’occasion nous réconfortait et toujours incarnait les valeurs auxquelles nous tenons. L’Écosse l’aimait, la respectait et l’admirait ». (Weekly Worker, 15 septembre 2022)

République ouvrière !

En Europe, 10 États sont encore des monarchies héréditaires : Belgique, Danemark, Espagne, Liechtenstein, Luxembourg, Monaco, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède. La bourgeoisie décadente s’est accommodée du système monarchique qui donne à croire que la classe dominante et ses institutions sont inamovibles. Le mot d’ordre de république est la première des exigences démocratiques en Grande-Bretagne où l’état-major de l’armée prête serment de fidélité au monarque, pas au gouvernement, au parlement ou à la constitution. Le fait que tous les membres de la famille Windsor étaient en uniforme militaire pendant leurs multiples défilés morbides témoigne du lien étroit entre ces piliers des institutions réactionnaires et répressives, la monarchie et l’armée bourgeoise. Les deux se sont dressées contre les luttes des opprimés au fil des siècles, mystifient aujourd’hui et resserviront demain contre les exploités. Les deux doivent être liquidées. C’est au prolétariat qu’incombe désormais cette tâche dans son combat pour abolir l’exploitation, pour la république des conseils ouvriers, pour le socialisme.

Les propriétaires fonciers et les capitalistes se pressent pour exalter le roi, il est des leurs. Il incarne l’idée de caste et de classe, ils célèbrent son importance afin de familiariser l’esprit public avec la conception de l’inégalité politique, sachant bien qu’un peuple mentalement empoisonné par l’adulation de la royauté ne pourra jamais atteindre cet esprit de démocratie autonome nécessaire à la réalisation de la liberté sociale. (James Connolly, juillet 1911)

20 septembre 2022