Macron candidat de la bourgeoisie, candidat de la guerre sociale
Le 28 février, Castex flanqué de Le Drian et de Parly avait convié les candidats à l’élection présidentielle ayant à ce jour obtenu au moins 300 parrainages (Poutou, pour le NPA, n’était donc pas convoqué) à une concertation d’unité nationale sur la guerre en Ukraine. Tous ceux qui remplissaient ces conditions y sont allés, à l’exception de Mélenchon pour LFI et de Arthaud pour LO (qui affectent la neutralité face à l’invasion impérialiste russe). « Nous avons tous appelé à un cessez-le-feu », a déclaré Roussel. Pour Jadot, « il faut de l’unité nationale, de l’unité européenne si on veut avoir la plus grande fermeté pour combattre Vladimir Poutine ». « Je soutiens très fortement les initiatives européennes de sanctions pour peser sur les décisions de Vladimir Poutine », a indiqué Hidalgo… Ce qui a permis à Attal, porte-parole du gouvernement, de souligner ensuite une « réunion de bonne tenue dans un esprit de grande responsabilité ».
Ainsi, quand Macron en appelle à l’union nationale, tous ou presque serrent les rangs autour du chef des armées. Lequel consent à distraire quelques minutes de son auguste emploi du temps pour annoncer sa candidature à un deuxième mandat. Toutes les premières mesures de son futur programme confirment qu’il mènera une politique anti-ouvrière brutale au service du capitalisme français.
Il souhaite relancer sa contreréforme des retraites en fixant l’âge de départ à 65 ans, supprimer les régimes spéciaux, mettre sous condition l’obtention du RSA, procéder à de nouvelles attaques contre l’enseignement supérieur avec des facs payantes et une concurrence accrue, continuer les attaques contre l’assurance maladie et le secteur public de la santé, relancer la casse des statuts des fonctionnaires, individualiser le salaire des enseignants dans le cadre de l’autonomie des établissements, etc.
Il prépare une augmentation substantielle du budget des armées à 50 milliards d’euros pour renforcer l’impérialisme français, tout en militarisant la société par différentes mesures pour empêcher toute révolution sociale. En matière d’immigration, le projet de Macron n’a rien à envier à celui du RN. Il s’appuie sur deux axes : d’un côté, plus de police et de contrôles aux frontières, de l’autre, des expulsions plus nombreuses et plus rapides.
Macron repart gagnant
Macron joue sur du velours. Il est le candidat préféré de la bourgeoisie. Les autres candidats des partis bourgeois ne font pas le poids. Jadot qui veut faire croire à la vertu d’un capitalisme vert plafonne. Pécresse pour LR en est réduite à se plaindre jour après jour que Macron lui vole son programme. Le Pen pour le RN se voit sévèrement concurrencée par le fasciste Zemmour qui lui reproche d’avoir mis trop d’eau dans son vin, l’un l’autre totalisant ensemble autour de 30 % des intentions de votes mais risquant de s’éliminer réciproquement pour le deuxième tour.
Quant aux candidats de partis issus de la classe ouvrière, le spectacle est désolant. Par expérience, une partie des travailleurs ne croit plus guère aux promesses creuses qui lui sont faites à chaque élection présidentielle par les candidats. Comme si l’élection d’un homme ou d’une femme providentielle pouvait inverser la tendance alors qu’elle sent confusément que seul un combat acharné, mettant en cause l’ordre social et l’État bourgeois lui-même peut faire reculer les exigences des capitalistes, peut arracher temporairement quelque revendication sérieuse.
Mais comment faire, quand toutes les directions syndicales participent aux concertations et négocient toutes les attaques, comme elles l’ont fait pour la contreréforme des retraites, pour la contreréforme de l’assurance chômage, pour la soi-disant modernisation de la fonction publique, pour la mascarade du Ségur de la santé, etc. ? Comment faire quand chaque fois qu’elle cherche à se mobiliser, comme pour la défense des retraites en 2019, la classe ouvrière se heurte à la dislocation des journées d’action à répétition, aux mots d’ordre de grève reconductible site par site, bref, à tout un dispositif savamment organisé par les bureaucraties syndicales. Un dispositif qui est soutenu par le PS, le PCF, LFI, LO, le NPA, le CCR-RP, le POID, l’UCL… pour empêcher que la grève générale ne dresse tout le prolétariat, une partie de la jeunesse, dans un seul et même mouvement contre le gouvernement ?
Dans ces conditions, c’est l’abstention qui dominera dans de larges secteurs de la classe ouvrière, désorientée par l’absence d’une perspective politique ouvrière révolutionnaire. Hidalgo, Roussel, Mélenchon, Arthaud et Poutou ne représentent guère plus de 20 % des intentions de votes dans les différents sondages.
Lors du rassemblement Union populaire du 20 mars, le chef suprême de LFI a affirmé devant les drapeaux tricolores : « Pas besoin de faire grève ou de manifester pour avoir la retraite à 60 ans, il suffit de voter ». C’est ridicule. Outre qu’il a peu de chances de devenir président, toute conquête sociale sérieuse a été arrachée par la lutte de classe.
Comment pourrait-on utiliser ces élections pour ouvrir une perspective révolutionnaire ?
Si le Groupe marxiste internationaliste en avait les moyens, il aurait présenté une candidate ou un candidat, mais pour faire de ces élections bourgeoises une tribune pour ouvrir au prolétariat, à la jeunesse travailleuse et étudiante, aux travailleurs paysans, aux cadres inférieurs, une perspective collectiviste, radicale et internationaliste. Il y défendrait l’autodéfense des travailleurs pour protéger leurs mouvements et leurs organisations contre la police bourgeoise et les bandes fascistes, il y défendrait le combat pour imposer la grève générale pour faire plier les patrons et le gouvernement. Il expliquerait la nécessité de la prise du pouvoir par la classe ouvrière, la mise en place d’un gouvernement ouvrier constitué des délégués élus et révocables des assemblées de travailleurs (des villes, des campagnes ; ayant un emploi, chômeurs, en formation ; étrangers ou pas…), pour exproprier le grand capital et commencer à organiser la société, la production et la répartition sur la base de la satisfaction des besoins et non plus la recherche du profit.
Il ouvrirait la perspective des États-Unis socialistes d’Europe, seule à même de mettre fin au spectre de la guerre. Il appellerait du haut de cette tribune à la construction d’un véritable parti communiste dans le cadre de l’internationale ouvrière révolutionnaire ! Au rassemblement de tous les militants, fractions, groupes, noyaux lutte de classe pour constituer au plus vite une organisation communiste, premier pas vers un parti ouvrier révolutionnaire de masse, avec pour programme immédiat :
- L’augmentation des salaires et l’échelle mobile des salaires contre l’inflation,
- L’interdiction des licenciements collectifs et la réduction du temps de travail jusqu’à disparition du chômage,
- La suppression des impôts sur la consommation populaire, des cotisations sociales des salariés, de la CSG sur les salaires et les pensions,
- Le financement de la sécurité sociale à la charge exclusive des patrons,
- La gratuité des soins, l’expropriation des groupes pharmaceutiques et de matériel médical, des cliniques privées et des EHPAD capitalistes,
- Le recrutement pérenne de travailleurs dans l’enseignement public et la santé publique,
- Des logements de qualité bon marché pour tous,
- L’expropriation des groupes capitalistes sous contrôle des travailleurs,
- Le respect, l’extension et la gratuité du droit à la contraception et à l’avortement,
- Le développement de sources d’énergies (nucléaire, renouvelables, hydrogène…) sous le contrôle des travailleurs,
- Le droit d’entrée des réfugiés, des travailleurs étrangers, des étudiants étrangers, les mêmes droits pour tous les travailleurs,
- La suppression de l’enseignement privé, la fin de toute subvention aux clergés,
- La sortie de l’OTAN, l’arrêt des interventions militaires et la fermeture des bases militaires françaises à l’étranger, la dissolution de l’armée de métier et des corps de répression,
- La suppression de la présidence et du sénat, la révocabilité des élus, leur rémunération au niveau d’une travailleuse qualifiée…
Mais cette orientation n’est celle d’aucun candidat se réclamant du mouvement ouvrier, pas même celle de LO ou du NPA.
Notre position
Dans ces conditions, pour cette élection, terrain très défavorable à la classe ouvrière et sans perspective politique, les communistes internationalistes se prononcent pour qu’aucune voix ouvrière ne se porte sur les candidats de la bourgeoisie Macron, Jadot, Pécresse, Zemmour, Dupont-Aignan, Le Pen, Lassalle. Les communistes internationalistes condamnent toute opération de ralliement à Macron au second tour dans le cas d’un duel Macron Le Pen ou Macron Zemmour, comme cela avait déjà eu lieu en 2002 avec Chirac et en 2017 avec Macron à l’appel des partis « de gauche » et des directions syndicales. Pas une voix ouvrière pour le candidat de la bourgeoisie au prétexte de combattre le fascisme !
De la même manière, aucune voix ouvrière pour les candidats des partis bourgeois aux élections législatives qui suivront !