Le niveau de vie de la classe ouvrière s’effrite
Le regain d’inflation mondiale fin 2021 a surpris et effrayé les gouvernements et les banques centrales des États impérialistes. L’affrontement grandissant entre la Chine et les États-Unis contribuera à la hausse des prix mondiaux. La fragmentation de l’économie mondiale et le protectionnisme capitaliste, le repli sur des frontières obsolètes (défendus par LFI et le PCF) qui annoncent toujours la guerre, ne servent pas plus les intérêts des prolétaires que le libre-échange et la mondialisation capitaliste (défendus par le PS).
Si l’inflation ralentit dans le monde et en France, cela ne signifie pas que les prix baissent, seulement qu’ils augmentent moins vite. Les prix à la consommation ont augmenté en moyenne de 4,9 % depuis un an contre 5,8 % il y a un an. Parmi eux, ceux des produits de grande consommation vendus dans la grande distribution ont crû de 10,9 % selon l’INSEE.
Les salaires ont augmenté durant deux ans moins vite que les prix. Par conséquent, les travailleurs ont vu leur salaire réel diminuer. Ils ont perdu du pouvoir d’achat, leur niveau de vie s’est détérioré. Des centaines de milliers de salariés à temps partiel ou en contrat précaire, leurs enfants étudiants, les retraités à maigre pension de retraite, etc. passent de la pauvreté à la misère. D’où les appels des organisations de charité, qui sont débordées, à l’État et à la bonté des grands capitalistes.
La classe ouvrière a subi une défaite sur les retraites
Les pensions de retraite des anciens travailleurs salariés, les remboursements de soins, les allocations chômage, etc. sont du salaire indirect, socialisé. La classe ouvrière avait les moyens d’empêcher les attaques gouvernementales de l’hiver contre les chômeurs et du printemps contre le droit à la retraite parce c’est elle qui fait vivre la société actuelle et qui produit les marchandises. Sa force sociale pouvait s’exprimer par la grève générale.
La loi repoussant l’âge de la retraite à 64 ans a été préparée par le rapport annuel du « Conseil d’orientation des retraites » (où siègent des représentants CFDT, CGT, FO, UNSA, FSU) et par des concertations à Matignon auxquelles se sont rendus tous les chefs syndicaux convoqués par le gouvernement.
Puis le bloc des chefs CFDT-CGT-FO-CFE-UNSA-CFTC-SUD n’a jamais proposé aux travailleurs la grève générale, la grève illimitée et simultanée jusqu’au retrait. Il ne les a jamais consultés. Avec le renfort du PCF, du PS, de LFI, l’Intersyndicale a décrété 14 « journées d’action ». La CGT, SUD et FO ont complété le sabotage par des grèves reconductibles.
La grève reconductible que vous avez construite depuis plus d’un mois est déterminante pour l’issue victorieuse du mouvement, donc bravo à toutes et tous. (Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, discours à Gournay-sur-Aronde, 6 avril)
Grâce à l’appel de la CGT, les salariés de l’énergie, de la gestion des déchets, de l’industrie du verre et de la céramique, des ports et d’une partie des transports ont fait jusqu’à quarante jours de grève reconductible. (Sophie Binet, tribune dans Le Monde, 16 juin)
Soit les grèves reconductibles étaient symboliques et ultra minoritaires, à l’opposé de la grève de masse qu’ont toujours défendue les communistes, soit elles isolaient des secteurs combattifs (raffineries, collecte de déchets, etc.).
Contre la lutte de classe, l’Intersyndicale a aussi fait diversion par des simulacres : pétition, projet de référendum, occupation de ronds-points par une poignée de permanents syndicaux et une minorité de la jeunesse scolarisée, casserolades, nouveau projet de référendum…
L’Intersyndicale, tout le printemps, a fait appel au président pour « éviter une crise au pays ». Les bureaucrates syndicaux et les partis qui se disent réformistes demandaient aux travailleurs de s’en remettre au Conseil constitutionnel, puis aux députés EELV, LIOT, LR et RN. Le 12 juillet, toute l’Intersyndicale s’est rendue à la convocation de la cheffe du gouvernement à Matignon. Résultat : depuis le 1er septembre, il faut travailler jusqu’à 64 ans pour une pension à taux plein si on a cotisé 43 ans, sinon à 67 ans.
Hélicoptères, blindés, GIGN et RAID dans les quartiers populaires
À l’occasion des manifestations massives contre le projet de loi Macron-Borne-Dussopt, les « blacks blocs » détruisent gratuitement des commerces et des équipements publics, ce qui facilite la répression policière des manifestants et des grévistes, légitime la position du gouvernement Macron-Borne-Darmanin. LR et le RN soutiennent la police.
Le 25 mai, la gendarmerie et la police nationale, équipées de blindés et d’hélicoptères, ratissent les bidonvilles de Mayotte. LIOT, LR et RN approuvent.
Le 27 juin, la police assassine le jeune Nahel dans la banlieue de Paris, une manifestation de masse rassemble des milliers de travailleurs à Nanterre puis des émeutes éclatent dans tout le pays dans les quartiers qui subissent le plus le chômage, l’emploi précaire et l’échec scolaire, parfois le délabrement de l’habitat. Faute d’hégémonie de la classe ouvrière, le soulèvement a dégénéré, sous la direction d’une infime minorité de trafiquants, en pillages de magasins, en incendies de véhicules de travailleurs, d’écoles, de postes, etc.
Le gouvernement emploie un degré sans précédent de répression pour rétablir l’ordre : interventions de véhicules blindés de la gendarmerie, envoi d’unités officiellement destinées à la lutte contre le grand banditisme et le terrorisme (GIGN de la gendarmerie, BRI et RAID de la police nationale), usage systématique de LBD classés par l’État lui-même comme arme de guerre (Code de la sécurité intérieure, art. R311-2), condamnations sévères des jeunes arrêtés lors des vols ou dans la rue. LR et RN approuvent.
Depuis, les travailleurs qui vivent dans ces quartiers restent coincés entre, d’une part, les comportements asociaux et l’intimidation des habitants par les réseaux mafieux et, d’autre part, la « guerre à la drogue » qui a prouvé partout son inefficacité, les contrôles au faciès des polices nationale et municipale.
Dans ces conditions, la religion apparait comme une consolation illusoire à une partie de la population des ghettos. Les associations contrôlées par les Frères musulmans, les imams salafistes ou les pasteurs évangéliques servent, moyennant concessions et subventions de la part des municipalités, de couvercle posé sur la marmite du chômage et de la discrimination.
Le droit au savoir et à la qualification est-il menacé par l’abaya ou par Macron & Attal ?
Dans les quartiers populaires, les islamistes de toutes obédiences exercent une pression permanente sur les menus de cantine, pour le port du voile et de l’abaya, contre le sport des filles, contre les cours qui leur déplaisent (l’évolution biologique, l’éducation sexuelle, le nu en art, la tolérance d’autres religions ou de la satire…). Un sinistre exemple a été l’assassinat d’un professeur, Samuel Patty, le 16 octobre 2020, à la suite d’une campagne mensongère sur les réseaux sociaux.
Contrairement à ce que prétendent les islamistes relayés par LFI, le voile et l’abaya sont des vêtements religieux et des outils de l’oppression des femmes, comme les Iraniennes le savent parfaitement. Mais les travailleurs de l’enseignement et les parents travailleurs ne peuvent pas se ranger derrière un gouvernement qui consulte les chefs religieux pour fixer les règles de la fin de vie, un gouvernement dont la police discrimine les Noirs et les Arabes, un gouvernement qui s’allie avec les monarchies du Golfe arabo-persique qui répandent le salafisme, le frérisme et le wahhabisme dans le monde entier, un gouvernement qui tolère les « établissements privés hors contrat » des intégristes chrétiens, juifs et musulmans, un gouvernement qui donne 9 milliards d’euros par an à « l’enseignement privé sous contrat » où abondent les signes religieux de l’Église catholique, un gouvernement qui paye le clergé dans plusieurs départements de l’Est.
Quand 2 000 enfants dont ¼ a moins de 3 ans dorment dans la rue (20 % de plus que l’an dernier), Macron ouvre une « collecte nationale pour restaurer les édifices religieux en perdition » (c’est-à-dire des lieux du culte catholique) et versé immédiatement 2 millions d’euros. Il annonce le même jour sa décision de participer « en tant que président de la République française » à la cérémonie catholique organisée à Marseille le 23 septembre, avec en vedette le chef de cette institution qui a combattu au fil des siècles la science et les luttes des exploités. Un exemple de plus de son attachement à la laïcité !
En outre, le gouvernement Macron-Borne-Darmanin restreint l’accès des enfants de travailleurs à l’enseignement (diminution des heures de cours en lycée professionnel, maintien de Parcoursup pour trier les bacheliers, suppression des postes de remplaçants dans le primaire et le secondaire …) et il refuse d’augmenter les salaires et l’effectif des professeurs (« pacte » de division et remise en cause des statuts au lieu de l’augmentation de salaires et de la baisse des effectifs d’élèves…).
Non content d’augmenter sans cesse l’effectif, l’équipement et la rétribution des corps de répression (armée, police, douanes…), il veut soumettre tous les adolescents à l’armée par le biais de la généralisation du service national universel.
Pour lutter contre les cléricalismes, il faut miser sur les filles et fils d’ouvriers et d’employés, leur faire confiance, et ouvrir la perspective de la lutte unie contre l’inégalité sociale, contre le racisme, contre l’oppression des femmes, contre l’homophobie, pour l’emploi et un habitat décent, contre la colonisation sioniste et la persécution des Kurdes ou des Berbères, pour le socialisme mondial.
Conseiller le gouvernement au service du capital ou l’affronter ?
Le 29 aout, la secrétaire générale de la CGT se rend, à l’invitation du président, au palais de l’Élysée. On voit en quoi cela sert Macron mais il est difficile de voir en quoi cela sert les intérêts des travailleurs. En fait, après avoir soutenu au printemps un bloc parlementaire (qui incluait le RN) contre Macron, Binet lui donne maintenant des conseils contre le parti fascisant.
La situation dans le pays me parait très inquiétante… on peut parler de rupture, avec de possibles conséquences électorales au profit de l’extrême droite… A force de ne pas tenir compte de l’avis des organisations de salariés et de l’opinion, beaucoup de femmes et d’hommes vont considérer qu’il n’y a pas d’autre alternative que Marine Le Pen… il n’existe qu’une seule voie pour apaiser la colère et tourner la page : la tenue d’un référendum sur les retraites. (Sophie Binet, citée par Le Monde, 1er septembre)
Macron convoque le 30 aout, à Saint-Denis, les dirigeants de tous les partis politiques ayant des élus au parlement. On voit en quoi la présence de LFI, du PS et du PCF est utile à Macron, mais les travailleurs en tirent-ils le moindre avantage ? Comme la secrétaire générale de la CGT, les chefs réformistes n’ont pas demandé l’abrogation de la loi contre les retraites, mais seulement un référendum sur cette question. Ciotti (LR) et Bardella (RN), eux, demandent un référendum contre l’immigration.
Les chefs réformistes qui mangent avec Macron, avec LR et le RN, demandent à ce qu’il n’y ait ni photo ni vidéo. Ce jour-là, pas de casserolade ! Le représentant d’un petit parti satellite de LR déclare en sortant : « Le climat était détendu, respectueux, libre et tout le monde est resté » (Hervé Marseille, UDI, 31 aout). Tous ont décidé de renouveler l’opération.
Depuis, la collaboration de classes ne cesse pas. Des députés PCF et PS signent avec des députés de trois partis bourgeois (EELV, MoDem, Renaissance) une tribune commune (Libération, 12 septembre) pour préserver plusieurs articles du projet de loi contre l’immigration du gouvernement Macron-Borne-Darmanin qui leur semblent utiles au capitalisme français. Le secrétaire national du PCF, qui a tout fait, y compris l’alliance avec le RN, pour éviter la grève générale au printemps, lance maintenant une parodie de gilets jaunes (sans gêner les bureaucraties syndicales) qui aurait pour but de persuader Macron de mieux faire.
J’appelle aux rassemblements devant les préfectures, les supermarchés, les stations-service. Les colères de la faim menacent. Le PCF appelle le président de la République à les entendre et à y répondre d’urgence. (Fabien Roussel, Franceinfo, 14 septembre)
Les militants du PCF et des JC ne se sont pas précipités, jusqu’à présent, pour occuper les préfectures.
Le 7 septembre, Macron écrit aux partis présents au parlement pour leur annoncer qu’il les consultera à nouveau et qu’il convoquera aussi une « conférence sociale » en octobre sur la « question des branches où la rémunération est inférieure au salaire minimum » et « l’évolution des salaires et des revenus ».
Boycott de la conférence sociale !
Qui peut croire que la « conférence sociale » déboucherait sur un autre genre de résultat que les concertations de l’automne 2022 sur le régime des retraites ? Les chefs syndicaux qui ont empêché la grève générale au printemps vont-ils faire encore des « propositions » au gouvernement de la grande bourgeoisie française qui s’en prend aux travailleurs et étudiants étrangers (même si ce n’est jamais assez pour LIOT, LR et le RN), qui refuse d’augmenter le smic au-delà de l’inflation moyenne (avec le soutien de LR et du RN), qui exempte largement de cotisations sociales les patrons (avec le soutien de LR et du RN) ?
Sur les lieux de travail, de vie et d’étude, dans les syndicats, il faut s’organiser pour exiger :
- Boycott de la conférence sociale !
- Augmentation immédiate de 400 euros pour tous les salariés !
- Indexation des salaires, des allocations chômage, des pensions de retraite, des minimums sociaux, des allocations familiales et des bourses d’études sur les prix !
- Gratuité des études, annulation de toutes les dettes bancaires contractées pour les études, allocation d’études pour tous les étudiants !
- Blocage des loyers, des prix alimentaires et de l’énergie !
- Suppression des impôts sur la consommation des travailleurs !
- Suppression des cotisations sociales à la charge des salariés !
- Interdiction des LBD, autodéfense des manifestations et des grèves contre les flics et les casseurs !
- Gouvernement ouvrier, États-Unis socialistes d’Europe !