Celle-ci vient donc de s’achever le 20 novembre à Charm El-Cheikh en Égypte. Parrainée par Coca-Cola, bien connu pour son action en faveur de l’environnement et de la santé publique, elle s’est tenue dans un pays, l’Égypte, dont la dictature d’Al Sissi tire avantage de l’exploitation de l’immense gisement gazier en mer de Zohr avec un consortium de multinationales ENI, Rosfneft, BP… Il s’est agi, comme pour les COP précédentes, d’une cérémonie rassemblant quelques 35 000 participants, mobilisant le même nombre de 400 jets privés, le moyen de transport le plus polluant par passager, que lors de la COP 26 de Glasgow en 2021, mais établissant le nouveau record de 636 lobbyistes pour les seules entreprises du pétrole, du charbon et du gaz, soit 25 % de plus qu’à Glasgow ! Par exemple, Total n’avait pas moins de 4 représentants, dont son PDG, au titre de l’association « Entreprises pour l’environnement » qui est présidée par… Total. Le nombre de ces lobbyistes des énergies fossiles dépasse même le nombre des représentants des 10 pays les plus touchés par le changement climatique, comme Haïti, le Bengladesh, le Pakistan… Dans son discours d’ouverture, le secrétaire général de l’ONU a prononcé comme à son habitude des paroles inoubliables autant qu’elles resteront totalement vaines.
Notre planète approche à grands pas de points de basculement qui rendront le chaos climatique irréversible. Nous sommes sur une autoroute vers l’enfer climatique, avec le pied toujours sur l’accélérateur […] L’activité humaine est la cause du problème climatique. L’action humaine doit donc être la solution. La science est claire : tout espoir de limiter la hausse de la température à 1,5 degré signifie atteindre zéro émission mondiale nette d’ici 2050. Mais cet objectif de 1,5 degré est sous assistance respiratoire – et cette machine a des ratés. Nous nous rapprochons dangereusement du point de non-retour. (Antonio Gutterres, 7 novembre)
En effet, aussitôt dit, tout ce petit monde de dirigeants des principaux impérialismes (la Chine étant toutefois absente cette fois-ci), d’Etats capitalistes, de gouvernements corrompus et de multinationales diverses a œuvré pour qu’aucune entrave ne vienne perturber le déroulement habituel des affaires, le plus difficile restant de préserver, non pas la planète, mais l’emballage des discours, pour tenter de convaincre de la pertinence de leurs efforts. Car nombre d’ONG, d’écologistes participent également, voulant croire par naïveté ou faire croire par calcul, qu’il est possible d’y trouver des avancées.
Car la COP 27 a décidé à peu près que tout devait continuer comme avant, aucune mesure précise et surtout contraignante n’étant prise pour renverser la tendance actuelle, mais les exhortations à faire plus et mieux n’ayant en revanche pas manqué. L’objectif de maintenir le réchauffement à 1,5° a été maintenu par pure forme, pour ne pas afficher le fiasco total de l’entreprise qui aurait fait encore plus mauvais effet. N’ayant abouti à rien sur le réchauffement climatique, l’assemblée s’est consolée en aboutissant in extremis et après de laborieuses tractations à la création d’un fonds pour les pertes et dommages, censé compenser les destructions dues au réchauffement climatique frappant les pays les plus pauvres. Simple détail, la question de savoir qui contribuera à ce fonds et pour quels montants est renvoyée à une date ultérieure. « Ça n’a pas été facile, mais nous avons finalement rempli notre mission », a conclu satisfait le président égyptien de la conférence Sameh Choukri.
Macron a fait mine d’être un peu déçu, il a tweeté le 20 novembre : « plus de solidarité et plus d’ambition ! C’est ainsi qu’il faut agir pour baisser toutes nos émissions de CO2. » De même, la ministre de la transition énergétique, Pannier-Runacher, laquelle a des intérêts dans une entreprise pétrolière, a regretté « qu’aucune avancée n’ait été obtenue sur la nécessité de faire des efforts supplémentaires de réduction des gaz à effet de serre et sur la sortie des énergies fossiles. C’est une vraie déception ». Au petit jeu des plus hypocrites, les représentants de l’impérialisme français ne sont pas les derniers de la classe.
Solidarité ? Mais les réfugiés bangladais qui arrivent au péril de leur vie sur le sol français ne relèvent pas du droit d’asile et sont immédiatement expulsables, alors que le Bengladesh figure parmi les pays les plus touchés par le réchauffement climatique. Réduire les émissions de gaz à effet de serre ? Pourquoi Macron et sa ministre ne disent mot du projet de Total associé à des compagnies chinoises qui doit démarrer en décembre en Ouganda pour l’exploitation d’un gisement pétrolier sous le lac Albert, dans une zone protégée ? La production devrait être exportée ensuite par oléoduc en Tanzanie, qui va émettre 34 millions de tonnes de CO2 par an, soit presque 6 fois le total des émissions annuelles actuelles de l’Ouganda, entrainer la déforestation, l’expulsion de leurs terres de plus de 100 000 habitants, où la vie des opposants au projet est menacée ? Sans doute ont-ils été convaincus par l’argumentaire de Total qui promet qu’il « prend pleinement en considération la sensibilité du contexte environnemental », assurant même vouloir réintroduire le rhinocéros noir en Ouganda, c’est dire.
Je veux être ici très clair, fidèle à ce que j’ai déjà dit : la France soutient l’interdiction de toute exploitation des grands fonds marins. J’assume cette position et la porterai dans les enceintes internationales. (Macron, Discours à l’ouverture de la COP 27, 7 novembre)
Voilà qui est envoyé ! Mais qui croire, le Macron de la COP 27 ou le Macron de 2021, soucieux de faciliter pour l’impérialisme français « l’accès » aux métaux rares dans son très vaste domaine maritime qui est le deuxième du monde après celui des Etats-Unis.
L’exploration des fonds marins est un levier extraordinaire de compréhension du vivant, d’accès à certains métaux rares, de compréhension du fonctionnement de nouveaux écosystèmes d’innovation. (Macron, Présentation du plan France 2030 devant 200 chefs d’entreprises, 12 octobre 2021)
Le sort de centaines de millions de personnes est engagé à court terme par le réchauffement climatique, les dégâts déjà occasionnés sont considérables et les dirigeants du monde capitaliste bavardent et se défaussent tout en voyant très bien la catastrophe arriver. Le maintien du capitalisme à son stade pourrissant de l’impérialisme est organiquement incompatible avec le maintien d’une planète habitable pour tous. Il faut s’en débarrasser. Et le plus vite possible.