Bloquer l’offensive réactionnaire du gouvernement

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Assurance chômage : le gouvernement est parvenu à ses fins

Quiconque visite le site du ministère du travail pour s’informer sur l’assurance chômage tombe sur la phrase placée en exergue :

Suite à la concertation qui s’est ouverte avec les partenaires sociaux de septembre 2020 à mars 2021, dont l’objectif était d’adapter la réforme de l’assurance chômage de 2019 au nouveau contexte économique et social, le décret n° 2021-346 du 30 mars 2021, publié au Journal officiel du 31 mars 2021, a aménagé les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi et rétabli les dispositions relatives au bonus-malus. (https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/nouvelles-regles-d-assurance-chomage/)

Les directions syndicales ont toujours défendu leur participation à la concertation contre l’assurance chômage au motif qu’elles ne pratiquaient pas la politique de la chaise vide, qu’elles avaient des contre-propositions pour améliorer le système, etc. En fait d’améliorations, le gouvernement en attendait 1 milliard d’euros d’économies par an sur le dos des chômeurs. Et c’est bien là où la concertation a abouti. Une série d’attaques contre les droits des chômeurs devaient donc être mises en place au printemps 2021, mais elles ont été différées pour cause de pandémie. Cependant, à partir du 1er juillet a été enclenché le décompte de 9 mois d’indemnisation après lesquels s’appliquera une dégressivité de 30 % des allocations pour les chômeurs ayant eu des revenus antérieurs supérieurs à 4 500 euros bruts. Puis les 9 mois d’indemnisation à taux plein seront réduits à 7 mois. Mais les cadres ne seront pas les seuls touchés. En effet, le président l’avait réaffirmé, toute la réforme se ferait.

En France, on doit toujours bien mieux gagner sa vie en travaillant qu’en restant chez soi, ce qui n’est actuellement pas toujours le cas. (Emmanuel Macron, Allocution télévisée, 12 juillet)

Pour la pointe avancée des réactionnaires, en général eux-mêmes confortablement nantis et dont Macron se fait le porte-parole, les chômeurs sont d’éternels profiteurs. À l’issue du séminaire gouvernemental de rentrée, le premier ministre et la ministre du travail ont enfoncé le clou.

La réforme de l’assurance chômage vise à remettre de l’ordre dans un système qui conduisait certains salariés à une précarité de l’emploi où les périodes chômées étaient autant rémunérées que les périodes travaillées (…) Tout doit être mis en œuvre pour inciter au travail (…). Les conditions sont aujourd’hui différentes. Nous avons présenté aux partenaires sociaux un dispositif d’application entre le 1er octobre et le mois de décembre. (Jean Castex, Déclaration, 8 septembre)

Que ceux qui peuvent travailler davantage le fassent ! (Elisabeth Borne, Le Parisien, 16 septembre)

Il s’agit de réduire les prétentions tant de ceux qui cherchent un emploi que de ceux qui en ont un.

La condition d’une partie de la classe salariée à l’oisiveté forcée, non seulement impose à l’autre un excès de travail qui enrichit des capitalistes individuels mais, du même coup, au bénéfice de la classe capitaliste entière, elle maintient l’armée industrielle de réserve en équilibre avec le progrès de l’accumulation. (Karl Marx, Le Capital, I, 1867, ch. 25)

Selon le projet de décret envoyé aux « partenaires sociaux » le 16 septembre, copie conforme de celui du 30 mars, la durée d’affiliation nécessaire pour ouvrir ou recharger un droit, auparavant fixée à 4 mois, passera à 6 mois et les nouvelles règles de calcul de l’assurance chômage entraineront une baisse moyenne de 22 % des allocations.

D’après l’Unedic, 840 000 chômeurs, soit 38 % des allocataires seront touchés. Le ministère lui-même donne le calcul suivant en exemple : un chômeur ayant travaillé 8 mois payé au SMIC sur les 24 derniers mois percevait 985 euros d’allocations pendant 8 mois, ce qui le plaçait déjà sous le seuil de pauvreté fixé à 1 063 euros pour une personne seule, ne touchera plus désormais que 667 euros (mais, qu’on se rassure, qui lui seront versés pendant 14 mois). Déjà vivre avec 985 euros par mois est très difficile, mais comment faire avec 667 ?

Les capitalistes tirent les marrons du feu

Le Medef a réuni son université d’été à la fin août. Les patrons n’ont que des sujets de satisfaction. La politique de Macron leur a beaucoup apporté : ordonnances sur le Code du travail rognant les protections des salariés, suppression de l’ISF, « flat tax » sur les revenus du capital à partir de 2018, baisse de l’impôt de production à raison de 10 milliards d’euros par an à partir de 2021, baisse de moitié de la taxe foncière sur les locaux industriels, soutien massif aux entreprises pendant la pandémie de Covid pour 80 milliards d’aides directes et 160 milliards de prêts garantis, prolongation des aides aux patrons pour l’embauche d’apprentis… Et maintenant réductions des allocations chômage ! De plus, les affaires reprennent. Les bénéfices dégagés par les sociétés du CAC 40 au premier semestre 2021 atteignent déjà 57 milliards ! À juste titre, le porte-parole de LREM peut commenter :

Dans l’ensemble, les chefs d’entreprise nous reconnaissent d’avoir fait le job, à la fois depuis dix-huit mois et avant la crise. La volonté réformatrice du président est perçue comme réelle. (Roland Lescure, Le Monde, 25 août)

En effet, la reprise est là, avec une perspective de croissance économique de 6 % pour 2021. La quatrième vague de contamination au Covid semble reculer, éloignant les risques de reconfinement et de rétraction de la production et des échanges. Sur le plan mondial, la situation pour les capitalistes s’est également éclaircie et les prévisions du FMI tablent sur une croissance de 6 %, même si cette moyenne cache de grandes inégalités entre les principaux pays impérialistes d’une part et la plupart des pays dominés d’autre part, souvent en décalque des avancées ou des retards de la vaccination.

Certes, il reste des goulots d’étranglement dans la production et les échanges mondiaux, aussi bien du fait de la reprise rapide de la production que des rivalités inter-impérialistes, comme pour les composants électroniques, qui vont jusqu’à entrainer des mises au chômage partiel dans les usines automobiles Renault, Toyota ou Stellantis (ex-PSA). Certes, tous les secteurs n’ont pas retrouvé leur niveau d’activité et de profit d’avant la pandémie et globalement, c’est en début 2022 que le PIB devrait rattraper totalement la baisse de 2020. Mais c’est en parfaite harmonie que le président du Medef et le ministre de l’économie sont convenus le 25 août devant les patrons de la fin du « quoi qu’il en coûte ».

Nous n’avons pas compté l’argent public parce que c’était responsable de le faire. Mais maintenant que l’économie française redémarre, que nous avons des perspectives de croissance à 6 %, le quoi qu’il en coûte, c’est fini (…) Nous sommes passés au sur-mesure, nous continuerons à soutenir ceux qui en ont besoin. (Bruno Le Maire, Université du Medef, 25 août)

Nous ne sommes pas des entrepreneurs pour vivre des aides de l’État (…) Il est temps que l’État revienne à sa juste place. (Geoffroy Roux de Bézieux)

Mais jusqu’où ne pas aller trop loin ?

Pour Macron, il faut aller encore plus loin pour rester sans conteste le meilleur candidat pour la bourgeoisie à la prochaine présidentielle, lui dont le parti LREM, triomphant en 2017, s’est usé les semelles dans sa fonction de godillot, a subi nombre de déconvenues électorales et peine désormais à exister. C’est pourquoi le 12 juillet dernier, Macron avertissait sur les retraites :

J’ai entendu les débats sur le moment : faut-il faire cette réforme dès ce mois de juillet, à la rentrée, ou bien plus tard ? Alors, si je demande au gouvernement de Jean Castex de travailler avec les partenaires sociaux sur ce sujet dès la rentrée, je ne lancerai pas cette réforme tant que l’épidémie ne sera pas sous contrôle et la reprise bien assurée.

Le dossier reste cependant explosif et divise la bourgeoisie, non sur le fond consistant à allonger la durée de cotisations et à diminuer le montant des retraites, mais sur la capacité du gouvernement à imposer à la classe ouvrière un recul majeur sans risques. Déjà le Medef avait exprimé sa méfiance dès le 9 juin dernier. Pour son président, il était urgent de différer :

Pour faire cette réforme, il faut un capital politique. Le temps est passé depuis 2017. Pour moi, c’est un débat de la présidentielle, il faut que tous les candidats se positionnent. (Geoffroy Roux de Bézieux, AFP, 9 juin)

Castex a donc convié patronat et syndicats le 2 septembre. Tous les chefs syndicaux, persuadés que la position du Medef les dispensait cette fois de l’obligation qu’ils se sont faites de participer toujours aux concertations sur les attaques du gouvernement, y sont allés d’une seule voix : « Ce n’est pas notre rôle de faire le programme d’un candidat à la présidentielle, fût-il à l’Elysée »(Berger, CFDT)… « Nous n’irons pas… Je ne vais pas aller bâtir le programme de qui que ce soit » (Veyrier, FO)… « Pas question de se concerter »(Martinez, CGT). Moyennant quoi Castex déclarait le 8 septembre après le séminaire gouvernemental que les conditions sanitaires et économiques n’étaient toujours pas réunies pour un tel projet. En réalité, ce sont les conditions politiques qui manquent de visibilité pour le gouvernement. En effet, malgré le dialogue social, la concertation tous azimuts, rien ne garantit au gouvernement que le risque d’une mobilisation ouvrière pouvant le mettre en difficulté soit totalement écarté.

Les directions syndicales avaient réussi à empêcher le surgissement de la grève générale qui affleurait lors des dernières grèves de fin 2019 en multipliant les journées d’action, soutenues par le PCF, LO et LFI, tandis que le NPA appuyait d’une main la tactique dislocatrice des chefs syndicaux et de l’autre main substituait au mot d’ordre politique centralisateur de grève générale pour vaincre le gouvernement l’appel à l’extension des luttes. Mais toute mobilisation importante repose à chaque fois la question de l’auto-organisation de la classe ouvrière en comités de grève, de sa centralisation politique, du contrôle de son mouvement pour échapper aux manœuvres délétères des directions syndicales et de leurs adjoints.

Et rien ne garantit jamais par avance que la classe ouvrière, instruite de ses précédents échecs, ne parvienne à surmonter les obstacles et à déborder les appareils. Voilà en filigrane ce qui explique les hésitations de la bourgeoisie sur les retraites. Et pourtant les mêmes intérêts capitalistes commandent au gouvernement d’avancer, car, comme l’avait rappelé à sa façon le ministre de l’économie Le Maire le 29 juin sur Cnews, « c’est l’intérêt des Français et l’intérêt de la France que tout le monde, globalement, que notre pays, travaille davantage ». C’est pourquoi, à peine sortie par la porte le 8 septembre, la remise en cause des retraites rentrait par la fenêtre dès le 11 septembre par la voix d’Attal, porte-parole du gouvernement. Où donc ? À la fête de l’Humanité, où il était invité à débattre avec Martinez de la CGT, tandis que Roussel pour le PCF échangeait courtoisement avec Pécresse. Tout cela en dit long sur la conception de la lutte des classes par les organisateurs, comme s’il s’agissait d’une question de points de vue et non pas d’intérêts de classes irréconciliables… Lequel Attal a précisé que si « le projet, vu le temps qu’il reste d’ici la fin du quinquennat, ne pourrait pas être repris en l’état de 2019 », certaines parties du projet pourraient être mises en œuvre. En clair, il s’agirait d’en finir avec ce qui reste des régimes spéciaux qui survivent, notamment celui de la RATP. Mais il a ajouté aux conditions économique et sanitaire une troisième réserve :

C’est la question de l’unité de notre pays dans ce contexte. Aujourd’hui (…) les conditions ne sont pas réunies. Je ne peux pas vous dire qu’elles ne le seront pas d’ici à la fin du quinquennat.

La menace demeure donc. Et Macron saisira l’occasion s’il sent qu’elle se présente.

L’incurie des organisations ouvrières sur la vaccination conforte Macron

Car il est vrai que Macron se sent pousser des ailes. Pourtant sa gestion de la pandémie de coronavirus a été calamiteuse de bout en bout, depuis l’absence de masques des débuts jusqu’à la vaccination sélective qui prévaut aujourd’hui. Mais, faute d’une opposition cohérente du mouvement ouvrier sur cette question, il bénéficie cependant, à en croire les sondages, d’un capital de confiance car il apparait au bout du compte comme un défenseur rationnel de la vaccination, ce qu’il n’est pas ! En effet, sa politique de vaccination n’étant imposée qu’à certaines professions au lieu d’être généralisée aboutit à la stigmatisation des travailleurs de la santé qui vient s’ajouter au manque d’effectif des hôpitaux publics, à leurs conditions de travail et de rémunération catastrophiques. Elle alimente un refus de certains de se soumettre à l’obligation vaccinale qui s’additionne à ceux, certes marginaux, qui tombent dans l’irrationnel et le complotisme, au risque de perdre leur salaire, voire leur poste à partir du 15 septembre. Parmi ces réfractaires, l’incompréhension du « pourquoi nous et pas les autres » domine.

Mais que dit la CGT Santé, dans le tract qui a appelé le 14 septembre à des rassemblements, à juste titre contre toutes sanctions et suspension de rémunération ? « La CGT n’est pas opposée à la vaccination car c’est une des réponses à la crise sanitaire ». Non ! La seule position correcte pour tous syndicats ou partis se réclamant des travailleurs ne peut consister à ne « pas être opposé », à la vaccination ! Au contraire, toutes les organisations ouvrières doivent résolument mener campagne pour la vaccination complète, universelle, le plus vite possible, de toute la population, au lieu de laisser croire qu’il ne s’agirait que d’une option laissée à la libre appréciation de chacun ! Cela seul peut entrainer les hésitants, faire pièce aux campagnes obscurantistes et réactionnaires et damer le pion à Macron qui est loin de la mettre en place. C’est sur la vaccination universelle et l’expropriation des groupes capitalistes de la santé que le mouvement ouvrier devrait appeler les travailleurs et les jeunes à se rassembler contre Macron et son gouvernement, au lieu de cautionner les manifestations des samedis, voire d’y participer, qui défilent à la fois contre le passe sanitaire et contre la vaccination, et dont le centre de gravité politique est la réaction fasciste et fascisante.

« Plus de bleu sur le terrain » (Macron, Le Figaro, 18 avril)

Plus il y a d’exploitation, plus il y a d’inégalité, plus il faut de corps de répression, plus il faut de boucs émissaires. D’où la violence incroyable contre les gilets jaunes, d’où la surenchère « sécuritaire » et anti-immigrée de tous les candidats de la bourgeoisie, de Le Pen à Macron en passant par Pécresse et Bertrand. Ainsi Macron, clôturant le « Beauvau de la sécurité » le 14 septembre, a-t-il rappelé que, s’il avait toujours eu pour la police les yeux de Chimène, son amour était sonnant et trébuchant : les crédits du ministère de l’intérieur qui avaient déjà progressé de 1,7 milliard d’euros depuis le début du quinquennat, devraient encore augmenter de 1,5 milliard en 2022. Le ministre de l’intérieur Darmanin a pu déclarer au congrès SGP Police FO, le 30 juin : « Je ne suis pas venu les mains vides ».

Le président aura respecté les promesses du candidat, recruter 10 000 policiers et gendarmes durant son mandat. Il promet en plus de doubler les effectifs de policiers sur le terrain dans les 10 prochaines années (ce qui contraste avec l’attitude envers l’hôpital public). Le parc automobile a été renouvelé, les commissariats sont rénovés, les équipements modernisés…

Les directions syndicales, y compris celles (CFDT, CGT, FO, UNSA, CFTC…) qui syndiquent principalement des travailleurs, apprécient l’effort, tout en trouvant que c’est insuffisant. Leurs adjoints politiques veulent aussi pour la police et la gendarmerie, toujours plus de flics, de matraques, de lanceurs de balle en caoutchouc, d’hélicoptères, etc.

Les annonces manquent d’engagements concrets dans la lutte contre la souffrance au travail et pour la revalorisation du métier et des carrières de policier et de gendarme. (Olivier Faure et David Habib, PS, Un quinquennat de perdu, 15 septembre)

Il convient d’engager les moyens budgétaires nécessaires. Nous proposons une loi de programmation budgétaire… Nous proposons la création d’une nouvelle direction dédiée à la police de proximité et dotée de 30 000 postes statutaires supplémentaires. (PCF, Communiqué sur le Beauvau de la sécurité, 16 septembre)

Les policiers, ce que je vois, c’est qu’on leur demande vraiment de faire un travail difficile mais le gouvernement ne se donne même pas les moyens effectivement de leur donner de quoi travailler. (Nathalie Arthaud, LO, France Info, 15 septembre)

Voilà ce dont Macron profite aujourd’hui pour multiplier les initiatives contre les travailleurs. Ainsi, le 16 août, intervenant après la prise de Kaboul par les talibans, Macron, fidèle à sa ligne constante contre les réfugiés et les migrants, se permet-il d’appeler cyniquement à « anticiper et nous protéger contre les flux migratoires irréguliers importants » alors que des milliers d’Afghans, avec femmes et enfants, tentent de s’échapper.

À Marseille, il a tranquillement annoncé qu’à la rentrée 2022, les directeurs de 50 écoles dites pilotes pourraient choisir leurs enseignants « pour être sûr qu’ils sont pleinement motivés », au mépris de toutes les règles statutaires protégeant les travailleurs de la fonction publique.

Le combat central pour l’échelle mobile des salaires

Selon le journal patronal Valeurs actuelles du 16 août, la rémunération des dirigeants des grandes entreprises du CAC 40 devrait augmenter de 40 % en 2021, après il est vrai une baisse funeste de 20 % en 2020, ce qui ne devrait les amener seulement qu’à 12 % de mieux qu’en 2019 ! Quant aux salariés, l’affaire se présente sous des auspices moins favorables. Le salaire minimum net mensuel, celui de nombreux travailleurs dont la société a pu vérifier l’utilité sociale durant les confinements, est aux environs de 1 231 euros, après avoir été revalorisé en net de moins de 12 euros le 1er janvier 2021. Rappelons que le seuil de pauvreté établi par l’Insee pour 2018, dernier chiffre publié, s’établissait alors à un revenu mensuel inférieur à 1 063 euros.

Depuis, l’inflation a repris et la dernière publication de l’Insee du 15 septembre établit que les prix à la consommation ont augmenté de 2,2 % depuis novembre 2020, mois de référence pour la dernière revalorisation. Comme la loi impose une revalorisation automatique du SMIC si l’inflation annuelle dépasse 2 %, la ministre du travail Borne a annoncé le 15 septembre que le SMIC augmenterait au 1er octobre de 2,2 %, 35 euros en brut, soit environ 27,50 en net. Pas plus, pas de « coup de pouce », ce serait « donner un coup de canif au redressement de l’emploi » (Le Maire, 6 septembre). Selon le ministre de l’économie ce n’est pas le capitalisme qui cause le chômage, mais les exigences excessives des salariés !




Le gouvernement augmente le niveau de vie des militaires et les policiers par de multiples primes (qui souvent échappent à l’impôt sur le revenu) ou par la prise en charge de leurs déplacements en train (professionnels en 2022, plus les loisirs en 2023).

Les policiers pourront voyager gratuitement dans les trains du réseau SNCF à partir du 1er janvier 2022, selon un accord conclu cette semaine avec l’entreprise, a annoncé, vendredi 3 septembre, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin. (Le Monde, 4 septembre)

Mais pour les autres fonctionnaires, les travailleurs d’État, de collectivités locales ou hospitaliers, c’est vite vu, les syndicats ont calculé que la valeur du point d’indice qui sert au calcul des salaires a décroché de 20 % du coût de la vie depuis 2000 et cette valeur reste gelée, la dernière augmentation de 0,6% remontant à janvier 2017. De plus, le gouvernement a d’ores et déjà écarté tout dégel dans le projet de budget 2022.

La revendication du rattrapage des salaires, de leur ajustement automatique avec l’augmentation du coût de la vie jointe à celle de l’augmentation générale des salaires va redevenir centrale à mesure que les prix augmentent, d’autant plus que les affaires des capitalistes reprennent des couleurs. La bourgeoisie le sait bien et cherche à anticiper. S’agissant des fonctionnaires, la vieille recette de la concertation pour noyer le poisson et le dépecer si possible est encore à l’œuvre. Le gouvernement a annoncé le 6 juillet la tenue d’une conférence sur les perspectives salariales qui doit se dérouler jusqu’en… février 2022 non pas pour une augmentation générale qui est exclue, mais pour « repenser le système des carrières et des rémunérations, lequel est à bout de souffle » et pour « formuler collectivement des propositions ». Faut-il préciser que toutes les directions syndicales ont jugé utile de s’y rendre ? Quant aux salariés des entreprises, le ministre de l’économie suggère quelques dérivatifs.

Il faut se reposer la question de la meilleure rémunération afin que la croissance profite à tout le monde, sans exception, même les plus faibles, même les moins qualifiés, tous ceux qui ont été aux avant-postes de la crise. Ça peut passer par les salaires, par les primes, par l’intéressement, la participation, l’actionnariat salarié que nous avons défendu massivement depuis le début de ce quinquennat. (Bruno Le Maire, France 2, 23 août)

Le patronat prévient immédiatement que, selon lui, la hausse des salaires est cause d’inflation. « Pour autant on est bien conscient qu’il y a des problèmes de rémunération qui se traduisent d’ailleurs par des difficultés de recrutement dans un certain nombre de cas » indique le numéro 2 du Medef Martin le 25 août sur RFI. Les capitalistes ont toujours des solutions : une hausse des salaires nets « doit passer par des réductions de charges sans pour autant creuser les déficits des régimes sociaux » propose le même Martin. D’où les attaques contre l’assurance chômage, les retraites, la branche maladie de la sécu…

Repartir dans les « journées d’action » ou préparer la grève générale ?

Dans le cadre du capitalisme, Mélenchon (LFI), Hidalgo (PS) et Roussel (PCF) promettent tous monts et merveilles aux travailleurs… en avril 2022. Outre qu’il est douteux qu’une élection nationale, quelle qu’elle soit, résolve les problèmes de nature mondiale (les crises économiques récurrentes, le réchauffement climatique, les guerres incessantes, le sous-développement, les pandémies, le chômage, la montée de l’intégrisme religieux et la réapparition du fascisme…), faut-il que les travailleurs de ce pays, qu’ils aient la nationalité française ou pas, attendent la présidentielle ?

Certes, les directions de la CGT, de FO, de la FSU, de Solidaires, etc. appellent à une journée d’action dans l’éducation le 23 septembre, des retraités le 1er octobre, à une interprofessionnelle le 5 octobre… Le tract intersyndical se prononce pour l’augmentation des salaires, l’abandon définitif des contre-réformes des retraites et de l’assurance chômage, l’arrêt des licenciements, de la précarisation de l’emploi, des fermetures de services, des suppressions d’emplois et des démantèlements dans les services publics, une réforme ambitieuse des bourses pour les jeunes en formation, etc. Fort bien, mais qui va croire qu’une journée d’action peut permettre d’emporter une seule de ces revendications ? Alors de quoi s’agit-il pour les chefs syndicaux, s’il ne s’agit pas de l’emporter ? De préparer la mobilisation « dans la durée », selon leur formule consacrée ? L’intersyndicale prévient déjà « qu’elle doit se revoir » à l’issue de cette échéance. Pour quoi faire ? Appeler à une autre journée d’action ? Puis encore une autre, tout en continuant à légitimer le gouvernement et ses attaques en participant à toutes les concertations pour les justifier, les mettre au point puis les appliquer… Jusqu’à l’épuisement comme les mobilisations précédentes ?

Pour obtenir l’échelle mobile des salaires, l’arrêt des licenciements, les postes nécessaires dans les hôpitaux et toutes les revendications légitimes des travailleurs et des jeunes, il faut rompre avec le gouvernement, préparer l’affrontement décisif contre lui et le patronat, il faut préparer la grève générale et l’autodéfense qui permettront de l’emporter. Les travailleurs, les jeunes, qui cherchent une issue à la lutte, qui cherchent à s’affranchir des obstacles bureaucratiques, doivent s’organiser sur cet axe.

16 septembre 2021