18 mois d’attaques contre le droit aux études
Quand l’ancien bras droit de Chatel et de Robien ministres de l’Éducation nationale de Sarkozy entre 2009 et 2012, Jean-Michel Blanquer, parle de réduire les inégalités, de donner la priorité à l’école primaire, de revaloriser les rémunérations des professeurs, d’améliorer le sort des élèves…, il faut entendre exactement le contraire.
Dans les faits, les CP et CE1 à 12 élèves en REP et REP+ (en REP+ pour les CE1 cette année uniquement) ont mobilisé tous les recrutements déjà prévus par le dernier budget sous Hollande, au détriment des classes rurales, des remplacements et des effectifs en collèges et lycées, toujours plus chargés. Les effectifs réduits ne concernent absolument pas les maternelles qui dépassent toujours 25 élèves par classe. Finalement ces dispositions si médiatisées valent pour moins de 17 % des écoles françaises, au CE1 moins de 7 %. Le budget 2019 adopté le 14 novembre ne prévoit aucun recrutement dans le primaire et plus de 1 800 suppressions de postes dans le secondaire. Diviser pour mieux régner, voilà la politique du ministère.
De la maternelle au collège, Blanquer a instauré depuis cet été des « repères annuels » et des « ajustements aux programmes de 2015 » qui s’avèrent en réalité un cadre rigide de réduction des connaissances et des champs disciplinaires : toujours plus d’’éducation morale et civique et toujours moins de sciences. La maternelle prépare à ingurgiter des syllabes, les élèves de CP doivent se débrouiller avec les 4 opérations et La Marseillaise a été découpée pour être apprise, année après année. Les enseignants voient fondre leur liberté pédagogique et sont« invités » à évaluer selon les directives ministérielles en Grande section, CP, CE1, CM2, 6e, en Seconde.
Le rétablissement des classes « bi langues », de l’option latin ou grec renforce les inégalités puisqu’il n’intervient que dans les beaux quartiers, faute de professeurs nommés dans les quartiers populaires. Par contre, c’est patriotisme pour tous : une semaine de service national sera imposée aux élèves avant 16 ans. Encadrés par des militaires, les élèves de 3e subiront une mise au pas sous couvert de « Vivre ensemble » et de « citoyenneté » dont les officiers de l’armée sont les spécialistes en Centrafrique, Mali, Libye, Côte d’Ivoire, Sahel, Liban, Syrie et Irak… comme chacun sait. Dans la même veine, utilisant l’agression dont a été victime un professeur à Créteil, le gouvernement a ouvert la voie à d’éventuelles présences policières dans les collèges et lycées où des policiers pourraient être nommés pour « rétablir l’ordre » selon les termes du ministre. Le budget 2019 refuse la création des postes nécessaires au bon fonctionnement des établissements scolaires mais prévoit 20 nouveaux centres éducatifs fermés, en plus des 51 existants.
Défense des lycées pro, techno et généraux ! À bas les nouveaux programmes ! À bas Parcoursup !
Après 16 ans, la jeunesse accède théoriquement aux lycées technologiques, professionnels ou généraux. Si les métiers manuels sont de la première importance pour l’humanité, ils sont quasiment toujours dénigrés par le système éducatif capitaliste et toujours sous-payés. C’est un des moyens pour diviser la majorité des producteurs et productrices et reproduire les inégalités de classe. En France, cette sélection a lieu en fin de 3e et seulement 56 % des détenteurs d’un brevet des collèges ont accès aux lycées généraux (section L, ES, S). À la rentrée 2019, Blanquer entend passer des 80 secondes professionnelles actuelles à 15. Derrière ce « regroupement par métiers » se cachent l’éviction des professeurs spécialisés (1 500 postes supprimés au budget 2019) et le rapprochement des lycées professionnels avec les entreprises et les centres d’apprentis. Les heures d’enseignement du français sont réduites de 13 %, des mathématiques de 16 %, de 50 % pour la seconde langue. Évidemment, de telles coupes sombres interdiront encore plus définitivement aux bacheliers pro et techno de poursuivre des études supérieures.
En juillet 2018 sont parus les décrets contre le lycée général et le bac. Les programmes d’histoire sont revus dans le sens du « roman national », en clair du nationalisme ; ceux d’économie prêchent le culte du « marché », en clair du capitalisme. Les anciennes filières disparaissent pour soi-disant permettre à chaque lycéen de choisir des options et spécialités « dominantes » : 3 en Première (3 fois 4 heures hebdomadaires) puis 2 en Terminale (2 fois 6 heures). Elles conditionneront leur baccalauréat. Mais comme les établissements ne seront pas dotés égalitairement, les lycéens et lycéennes qui entrent en lutte en ce mois de décembre ont parfaitement raison de dire que la valeur du bac dépendra du lieu où il a été obtenu. La crainte que seul le bac-beau-quartier ouvre la porte de la formation supérieure de son choix est parfaitement justifiée. Les dégâts faits par Parcoursup abondent dans le même sens. Au cours de sa première année de mise en œuvre, Parcousup a fait encore pire que le précédent système. Plus de 160 000 bacheliers ont renoncé à toute formation post-bac. 350 000 bacheliers ne poursuivent pas les études supérieures correspondant à leurs vœux initiaux, sur un total de 840 000 !
Retrait du projet Macron-Blanquer contre l’enseignement public !
Le 12 octobre 2018, le ministre Blanquer a présenté son projet de loi pour « l’école de la confiance » qui complète les coups portés. Il favorise les financements privés (« établissements publics d’enseignement international »), la captation des fonds publics (si le privé « expérimente » bien, l’État paiera ; si les établissements privés préélémentaires signent un contrat avec l’État, il financera). Il faut rappeler que Blanquer a fait sa scolarité chez les cathos et qu’il continue à fréquenter Sens Commun.
Au goupillon, Blanquer ajoute le sabre. Il a nommé cheffe du service de l’instruction publique et de l’action pédagogique à la Dgesco, Rachel-Marie Pradeilles-Duval, ingénieure en chef de l’armement avec grade de colonel, déjà chargée de « la stratégie des formations et de la vie étudiante ». Elle pilotera l’instauration prochaine d’« Instituts nationaux supérieurs du professorat » (INSP) qui remplaceront les ESPE actuelles. Pas d’information claire sur la future formation initiale des enseignants, mais la certitude qu’ils effectueront rapidement des remplacements. Déjà, l’article 13 du projet de loi autorise les « assistants d’éducation » (les surveillants) à assurer des remplacements dans les collèges et lycées même s’ils n’ont pas la licence de la matière concernée ! L’annualisation du temps de travail des personnels, une carte nationale découpée en 13 zones au lieu de 30 pour la nomination des enseignants… le ministre de Macron ne manque pas d’idées contre les conditions de travail des agents du service public.
Contre les journées d’action, contre la concertation avec le gouvernement
Acteurs volontaires du « dialogue social » qui permet au gouvernement de légitimer ses attaques, les directions CFT, FO, UNSA, FSU, Solidaires, CFDT n’ont pas hésité à suivre durant 8 mois les concertations du CAP22 dont l’objectif déclaré est de réduire les services publics et les droits statutaires des fonctionnaires. Résultat : le 29 octobre, Edouard Philippe a indiqué qu’il supprimerait 50 000 postes de fonctionnaires, multiplierait les CDD et constituerait une agence de reconversion pour les fonctionnaires titulaires. Aucune paire de fesses syndicales ne s’est levée quand il s’est agi de « discuter » la rémunération au mérite, la création d’un nouveau corps d’enseignant du secondaire (2 heures de plus hebdomadaires, deux matières à enseigner), le recrutement du personnel par les chefs d’établissement, etc, etc.
Dans l’Éducation nationale comme ailleurs, les dirigeants des syndicats ponctuent leur collaboration avec le gouvernement d’appels à des « journée d’actions » de 24 heures, aussi impuissantes que démoralisantes. La dernière en date, le 12 novembre, n’a évidemment pas interdit le vote du budget qui consacre le gel du point d’indice, l’instauration de la journée de carence et la suppression de 2 600 postes.
Dirigeants des syndicats, rompez avec le gouvernement ! Assez de « concertations » sur ses attaques, place à la défense des revendications des personnels et des élèves !
Assemblées générales pour décider la grève, élection et centralisation des comités de grève pour obtenir satisfaction :
- Réduction massive des effectifs par classe. Ouverture de toutes les filières nécessaires dans les lycées, les IUT, les facultés. Création de tous les postes à hauteur des besoins. Gratuité des inscriptions à l’université.
- Aucune subvention aux « écoles privées » ! Aucun prêtre, patron ou gradé à l’école !
- Titularisation de l’ensemble des travailleurs précaires de l’enseignement! Augmentation générale des salaires !