Choose France : ces étrangers qui sont bien reçus…

La police pour protéger les capitalistes étrangers

À Versailles, une dizaine de jours après la validation par le Conseil constitutionnel de sa loi contre les retraites et l’annonce d’un nouveau projet de loi contre l’immigration de travailleurs, Emmanuel Macron, accompagné de 28 ministres, recevait plus de 200 capitalistes du monde entier en leur demandant de « venir investir en France… un message qu’il adresse depuis 5 ans aux dirigeants d’entreprise du monde entier » (Macron, Twitter, 15 mai). Enfin, pour éviter que ces réjouissances entre amis capitalistes puissent être gâchées par des intrusions imprévues (la CGT des Yvelines appelait à un rassemblement et une manifestation), le gouvernement avait fait le nécessaire pour assurer leur sécurité, avec une protection policière (500 policiers et une dizaine d’unités de forces mobiles) sur un rayon de 500 mètres autour du château de Versailles, un hélicoptère de la gendarmerie et des drones. Et parce que la confiance n’exclut pas le contrôle, les invités ont dû montrer patte blanche en franchissant au moins trois contrôles de sécurité.

Quelques heures plus tard, il recevait plusieurs de ces grands patrons à l’Élysée, dont Elon Musk, une incarnation presque pure de la voracité et de l’inconscience capitalistes.

Un outil pour attirer les capitalistes, pas les travailleurs

Depuis son élection, Macron reçoit une fois par an des grands patrons d’entreprises étrangères pour les inciter à investir en France. Il s’agit de « présenter et expliquer aux grandes entreprises internationales les réformes menées pour favoriser l’activité économique de notre territoire » (site Internet de l’Élysée), en d’autres termes leur montrer comment l’État français est capable de renforcer l’exploitation de la classe ouvrière, autrement dit améliorer les perspectives de rentabilité pour les capitalistes (attaque contre le droit du travail contre les retraités, contre les chômeurs, contre les fonctionnaires, contre les enseignants…) et de mater ceux qui résistent. Comment mieux incarner la politique de Macron et son gouvernement au service du capital ?

Ce gouvernement, comme les gouvernements bourgeois du monde entier sont des serviteurs du capital, contre le travail. Reste qu’il n’est pas anodin que « Choose France » est également le nom anglais donné au dispositif, lancé en 2018, de multiplication par 17 des frais d’inscription à l’université pour les étudiants étrangers hors-Union européenne, dans le but « d’accentuer l’attractivité de la France auprès des étudiants internationaux », enfants de bourgeois faut-il préciser, et donc d’écarter tous les autres. Si Macron veut attirer les capitalistes, s’il veut repousser les étudiants étrangers pauvres, il estime également qu’« on ne doit pas être un pays trop attractif » pour les travailleurs étrangers (Europe 1, 25 septembre 2019), à qui le projet de loi Darmanin propose de réaffirmer l’alternative « expulsé » ou « surexploité ».

Il est vrai que le capitalisme en France n’est plus que l’ombre de ce qu’il était au XIXe siècle, et son déclin se poursuit lentement. Les capitalistes le savent, puisque le 28 avril dernier Fitch, une de leurs agences de notation (ces espèces de jury qui décernent aux gros emprunteurs des notes et qui sont regardés de très près par les gros prêteurs), a abaissé la note de l’État français de (de AA à AA-) ce qui pourrait avoir pour conséquence une hausse du taux auquel il emprunte.

Le ministre de l’économie Bruno Le Maire versait des larmes de crocodile en jugeant cette « appréciation pessimiste » (Le Monde, 28 avril), tout en se vantant des attaques contre le travail, en particulier contre les allocations chômage et les pensions retraite, et des cadeaux au capital avec le CICE (20 milliards), la baisse des impôts de production (10 milliards), la CVAE (au moins 10 milliards), le Crédit impôt recherche (6 milliards), la transformation de l’ISF en IFI (5 milliards), l’impôt forfaitaire sur le capital – flat tax (3 milliards)… sans compter les 413 milliards pour les armées.

Le Maire peut être soulagé, le 4 juin l’agence Standard and Poor’s a maintenu son évaluation à « AA » en arguant en particulier de la « réforme des retraites » dont les directions syndicales et leurs adjoints politiques font semblant de croire qu’elle n’a pas été passée, faute de grève générale.

Des investissements mais peu d’emplois

Macron prétend vouloir réindustrialiser la France. Outre qu’il se soucie peu de l’impact de l’industrie de ses amis capitalistes sur l’environnement, puisqu’il demandait quelques jours avant de les recevoir « une pause réglementaire européenne » (Le Monde, 12 mai) à ce sujet, il est vrai que la part de l’industrie dans l’économie est en France un des plus faibles dans l’Union européenne (11 % du PIB, seuls Chypre, Luxemburg et Malte font moins).

Reste que l’État français se vante d’être la première destination européenne des investissements directs étrangers, mais en regardant de plus près ces projets d’investissement, on constate qu’ils sont peu pourvoyeurs d’emplois, puisqu’un projet d’investissement étranger en France revient à créer 33 emplois (alors que les salaires ont augmenté de 5,2 % en un an), contre 58 en Allemagne (où les salaires ont augmenté en un an de 5,2 % dans l’industrie et de 11 % dans la fonction publique), 64 au Royaume-Uni (où le salaire minimum a augmenté de 9,7 %), 379 en Espagne (où le salaire minimum a augmenté de 8 %).

Contre le repli nationaliste, pour une révolution des travailleurs

Si les réactions politiques à cet événement furent rares, il faut noter celle du député LFI Éric Coquerel affirmant, au secours du capital français, « qu’il faudrait du protectionnisme pour… sécuriser nos entreprises » (France info, 15 mai), et celle de François Ruffin, également député LFI, se disant quant à lui, dans une ferveur patriotique, « très favorable à ce qu’on réinjecte de l’investissement en France » et regrettant que les « grands fleurons français aient été pris par les fonds de pension anglo-saxons » (Ruffin, BFMTV, 15 mai).

Ce n’est pas de tapis rouge qu’a besoin le monde pour survivre au capitalisme, c’est d’un parti ouvrier révolutionnaire et d’une internationale ouvrière révolutionnaire, porteurs d’une révolution ouvrière, de la propriété commune des moyens de production, seule à même d’élaborer un plan de production qui puisse à la fois satisfaire les besoins de tous et préserver l’environnement.