Iran : ni ayatollah, ni chah ! Pour un gouvernement ouvrier et paysan !

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Le soulèvement contre le régime islamiste

Le 13 septembre, Masha Jina Amini, 22 ans, en visite à Téhéran avec sa famille, est morte à l’hôpital Kassra, quelques heures après avoir été arrêtée par la police des moeurs pour avoir laissé dépasser une mèche de cheveux de son hijab (voile).

sur la carte, en rouge le nombre de morts, en bleu les lieux de manifestation sans mort, graphique bleu le nombre de manifestations en aout, septembre, octobre et novembre / source : The Economist, 10 décembre 2022


Le meurtre de Jina a provoqué un soulèvement populaire qui menace le régime issu de la contrerévolution islamo-fasciste de 1979. Les protestations ont débuté dans le Rojhilat (Kurdistan de l’État iranien) où elle vivait et se sont étendues rapidement à 140 villes, dans tout le pays. Au total, plusieurs millions de personnes ont manifesté contre l’obligation faite aux femmes de se couvrir les membres et la tête. Les manifestants ont crié « Femme, vie, liberté ! », un slogan du Parti des travailleurs du Kurdistan de Turquie (PKK) et « Mort au dictateur ! », ce qui vise le Guide suprême, l’ayatollah (le titre des hauts dignitaires du clergé musulman chiite) Ali Khamenei, 85 ans.

Les jeunes travailleuses et les étudiantes sont à l’origine de la révolte. Malgré les risques, beaucoup ont ôté leur voile, se sont coupé les cheveux. C’est une revanche historique, après la première protestation face à la contrerévolution islamiste en mars 1979, celle des femmes travailleuses et étudiantes. C’est un coup porté à toute la réaction mondiale, qu’elle soit d’inspiration chrétienne, musulmane ou hindoue, qui discrimine juridiquement les femmes, leur impose un code vestimentaire, les empêche d’avorter, les soumet à la domination masculine et aux violences machistes…


Les manifestations sont particulièrement massives au Kurdistan (ouest de l’Iran) et au Baloutchistan (sud-est). Le 18 novembre, le musée consacré à l’ayatollah Khomeini, le fondateur du régime, a été incendié. Tous les jours, des mollahs (prêtres chiites) se font arracher leur turban dans la rue. Les ouvriers et les petits commerçants se joignent de plus en plus à la protestation. Toutes les universités sont touchées.

Comme souvent en cas de révolte populaire, le pouvoir en place et les médias ont mis en cause l’étranger. Le guide suprême, le président Ebrahim Raïssi, les chaines de télévision et les journaux (qui sont tous islamistes) ont dénoncé un complot d’Israël et des puissances impérialistes occidentales.

Ces émeutes et l’insécurité sont l’oeuvre des États-Unis, du régime sioniste usurpateur, leurs mercenaires et certains Iraniens traitres qui les ont aidés à l’étranger… Dans ces évènements, les organisations de la police, les bassidjis et le peuple ont subi des injustices plus que tout le monde. (Ali Khamenei, 4 octobre 2022)

Les pasdarans (gardiens de la révolution), les bassidjis (volontaires), certains corps de l’armée (dont la 65e brigade aéroportée) et des miliciens islamistes venus du Liban (Hezbollah) ou d’Irak (Hashd Al-Sha’bi), qui se qualifient de « fouet de Dieu », ont matraqué, arrêté, tiré de la grenaille de plomb, mais aussi des balles. 18 000 manifestants, journalistes, blogueurs, chanteurs ont été arrêtés, certains torturés et contraints à des aveux publics.

Les forces de sécurité iraniennes ciblent les femmes lors des manifestations contre le régime. Elles leur tirent au visage, à la poitrine et au bas-ventre… Alors que la fermeture d’Internet a camouflé une grande partie de la répression sanglante, les photos fournies par des médecins montrent des blessures terribles sur tout le corps, causées par de la grenaille de plomb que les forces de sécurité ont tirée, à bout portant, sur les personnes… Les tirs dans les yeux sont particulièrement fréquents. (The Guardian, 8 décembre 2022)

Machhad, 12 décembre 2022, Majidreza Rahnavard est pendu en public


Dans la nuit du 15 au 16 octobre, la prison Evin à Téhéran où sont détenus les prisonniers politiques a brulé, causant 4 décès selon les autorités. Le 19 novembre, à Mahabad, au Kurdistan, les forces de répression sont entrées avec des chars et ont tiré à la mitrailleuse sur tout ce qui bougeait. À cette date, la répression étatique a causé au moins 510 morts et des milliers de blessés (Reuters). 18 000 personnes ont été arrêtées. Les minorités nationales ont payé un lourd tribut : outre les Kurdes, il y a plus de 100 Baloutches parmi les assassinés. Les tribunaux islamiques ont condamné à mort plusieurs manifestants pour « inimitié à l’égard de Dieu ». Le 8 décembre, le gouvernement Khamenei-Raïssi a fait pendre Mohsen Shekari (23 ans), le 12 décembre, Majidreza Rahnavard (23 ans aussi), le 7 janvier 2023, Mohammad Mahdi Karami (22 ans) et Seyed Mohammad Hosseini (39 ans).

Le 28 septembre, les 14 et 21 novembre, les pasdarans ont bombardé en Irak les locaux du Parti démocratique du Kurdistan d’Iran (PDKI) et du Parti communiste d’Iran (CPI) dont le bras armé est désormais le Komala. Au même moment, l’État turc dirigé par Erdogan et reposant sur le bloc de l’AKP islamiste et du MHP chauvin déclenchait une offensive contre le Rojava, le territoire kurde de Syrie contrôlé par le Parti de l’union démocratique (PYD) et sa branche militaire YPG, liés au PKK.

Mais le mouvement populaire n’a pas cessé. 44 ans après son instauration, les masses se mobilisent pour renverser la République islamique d’Iran.

Depuis 1979, un régime despotique, patriarcal et colonial

La contrerévolution menée de 1979 à 1983 par le clergé et ses milices islamo-fascistes ont préservé l’essentiel, l’armée du chah, et officialisé de nouveaux corps de répression, ont instauré la censure, ont réprimé le mouvement des femmes, ont interdit les organisations ouvrières et en ont exterminé les militants, ont écrasé la résistance kurded0, ont liquidé les conseils ouvriers (shoras)…

Wikipedia


Depuis, le clergé chiite impose son monopole politique, son immixtion dans la vie privée, la charia (droit islamique). Depuis le référendum de décembre 1979, la constitution officialise la domination sur les institutions du guide désigné à vie par une « assemblée d’experts » composée de 86 religieux élus. Un « conseil des gardiens » choisis par le guide vérifie la conformité des lois à la religion islamique et trie les candidatures aux élections des « experts », aux élections législatives et à l’élection présidentielle. Le président élu au suffrage universel pour 4 ans est chargé de gouverner sous l’autorité du guide. Le Majlis (assemblée islamique) composé de 285 députés élus (parmi des candidats tous islamistes) vote le budget et les autres lois sous le contrôle du conseil des gardiens. L’État sépare les hommes et les femmes dans l’espace public, fixe des tenues vestimentaires, condamne l’homosexualité (du fouet à la peine de mort). Le code civil accorde moins de droits aux femmes qu’aux hommes, il permet aux pères de marier leurs filles à 13 ans. En 2021, le gouvernement de Raïssi a mis fin à la distribution de contraceptifs gratuits et a restreint de droit à l’avortement. Le code pénal comprend des peines de flagellation, d’aveuglement, d’amputation… Même des mineurs sont exécutés. La torture est la règle durant les interrogatoires.

Pour faire face à la conscription massive des hommes lors de la guerre contre l’Irak, les femmes furent réinsérées dans l’activité salariée. Pour assurer l’accumulation du capital, la bourgeoisie a maintenu l’enseignement du plus grand nombre. Sur la lancée de l’effort amorcé sous la monarchie, l’enseignement supérieur s’est développé, y compris pour les jeunes femmes. L’État finance aussi un clergé parasitaire qui encadre la population et un appareil d’État pléthorique offrant des emplois de fonctionnaires civils ou de corps paramilitaires et militaires à une partie des déclassés urbains et des paysans ruinés. L’appareil répressif (pasdarans, armée, police, police des moeurs, bassidjis, juges, gardiens de prison…) et l’appareil idéologique (clergé, télévision…) de l’État absorbent une large partie de la survaleur sociale, ce qui entrave l’accumulation du capital.

Les institutions religieuses étaient du temps du chah déjà des grands propriétaires terriens, au nom de la charité qui tient lieu de sécurité sociale. De nouveaux acteurs capitalistes sont apparus, en particulier les fondations religieuses subventionnées par l’État et échappant à tout impôt (Fondation des déshérités, Fondation des martyrs, etc.). Les institutions islamistes (fondations religieuses, sociétés écrans des pasdarans…) sont devenues de véritables groupes capitalistes qui produisent et vendent des armements, de l’énergie, des télécommunications, des produits chimiques et pharmaceutiques, des aliments. Selon les données officielles, les entreprises des pasdarans contrôlent un tiers de l’économie iranienne (bâtiment, télécommunications, mines…). Par contre, la tentative de supplanter les banques capitalistes par des « caisses islamiques de crédit » gérées par le bazar et pratiquant des taux d’intérêt de 10 à 20 % a échoué.

Grâce à la rente pétrolière qu’il se procure sur le marché mondial, l’État subventionne l’énergie domestique (carburant, chauffage) et des produits alimentaires de base. Mais, même dans les phases de prix du baril élevé, cette manne ne peut satisfaire une population bien plus importante qu’en Arabie saoudite.

Depuis 1979, la république islamique assume une totale continuité avec la monarchie perse dans son attitude envers les minorités de type iranien (Kurdes, Baloutches…), turc (Azéris, Turkmènes…), arabe, etc. qui, au total, représentent presque la moitié de la population.

En 1984, Khomeini relance le programme nucléaire du chah. Cela déchaine l’ire du gouvernement américain qui n’est pas gêné de sa détention par Israël, l’Inde et le Pakistan en dépit des règles internationales, sans parler de l’arsenal des puissances impérialistes (États-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne). L’État bourgeois perse se pose en puissance régionale jouant un rôle en Irak, au Liban, à Gaza, en Syrie, au Yémen, au Soudan…

Un capitalisme dépendant du système impérialiste mondial

L’économie iranienne est la 3e de la région, derrière la Turquie et l’Arabie saoudite. La reproduction élargie du capital reste rabougrie, l’inflation est récurrente, le chômage important, le négoce et l’immobilier sont préférés à l’industrie manufacturière par la bourgeoisie, l’agriculture souffre du dérèglement climatique et de l’incompétence de l’administration. Si l’économie iranienne demeure la deuxième du Proche-Orient, elle s’avère 2,4 fois plus petite que celle de la Turquie, qui lui était inférieure de 26 % en 1978.

Depuis 1979, les États-Unis, suivis parfois de l’Union européenne, sanctionnent économiquement l’Iran, de manière quasi-permanente, sous différents prétextes : occupation de l’ambassade, guerre avec l’Irak, attentats, marche à l’arme nucléaire. Même si l’effet est atténué grâce à la complicité de plusieurs États voisins ou d’autres puissances impérialistes (Oman, Tadjikistan, Syrie, Irak, Pakistan, Afghanistan, Émirats, Turquie, Russie, Chine…), la principale victime de cette pression économique est, comme toujours en pareil cas, la classe ouvrière. Par contre, le secteur parapublic (fondations, entreprises des gardiens) s’enrichit de la contrebande, du marché noir et du trafic de devises. Les inégalités de revenu et de patrimoine se sont accrues à partir de 2013. En outre, le régime des ayatollahs se sert des sanctions pour expliquer le sous-développement, attiser le nationalisme, justifier la répression. Bruler ostensiblement des drapeaux américains devant les caméras n’empêche pas la République islamique de coopérer en 2001 avec les États-Unis quand ils envahissent l’Afghanistan.

Pour compenser l’hostilité des États-Unis, l’Iran joue la carte des autres puissances impérialistes, surtout la Russie et la Chine devenues capitalistes depuis le début des années 1990, mais la concurrence entre les exportations de gaz et de pétrole limite les échanges avec la Russie. La République islamique et la RPC signent en mars 2021 un partenariat stratégique sur 25 ans. En 2023, l’Iran entrera dans l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) sous le patronage de Pékin. D’un côté, l’Iran représente le seul pays exportateur de pétrole échappant aux pressions américaines en cas de confrontation ouverte entre Pékin et Washington. De l’autre, les tensions irano-américaines représentent une opportunité pour la Chine, afin notamment d’acquérir des entreprises iraniennes à bas prix et afin d’exporter ses produits, des biens de consommation aux nouvelles technologies (5G, intelligence artificielle, etc.). Évidemment, la relation entre les deux États reste fondamentalement asymétrique. L’isolement diplomatique de l’Iran, combiné aux sanctions américaines et à une forte crise économique, contraint le pays à rechercher le parrainage d’une grande puissance. Côté chinois, l’Iran n’est qu’une option parmi d’autres.

Comme dans la plupart des pays capitalistes dominés, la corruption de l’appareil d’État n’est pas l’exception mais la règle. Depuis 1989, comme les autres gouvernements capitalistes américains, européens, africains et asiatiques, l’État des ayatollahs privatise, réduit les subventions aux produits de première nécessité, facilite la flexibilité de l’emploi. Par exemple, dans la branche du gaz et de l’électricité, il y aurait 90 000 travailleurs sous contrat à durée indéterminée alors que les travailleurs en contrat à durée déterminée ou temporaires seraient 160 000 (soit 64 % du total). Entre 40 et 50 % de la force de travail est occupée dans le secteur informel, comme travailleurs plus ou moins indépendants ou salariés sans aucun contrat. En outre, l’État bourgeois a réprimé systématiquement les grévistes et les militants des syndicats qui ont émergé.

Avec 130 000 morts, l’Iran est le pays du Proche-Orient le plus touché par la pandémie du covid. Si l’exportation de pétrole bénéficie de la guerre en Ukraine et de la hausse des prix de l’énergie, si la croissance économique est de 3 %, le chômage est officiellement de 9,4 % de la population active et les prix à la consommation ont augmenté officiellement de 40 % sur un an, sans doute bien plus. Les salaires et les pensions n’ont pas suivi. La majorité des 82 millions d’Iraniens vit sous le seuil de pauvreté défini par l’ONU, un quart de la population est mal logé.

La jeunesse est plus instruite que dans bien d’autres pays de la région mais peine à trouver un emploi, si bien qu’une partie notable des diplômés émigre, rejoignant une diaspora politique et économique de 2 à 3 millions de personnes. Des petits commerçants sont ruinés par les nouveaux centres commerciaux (400 créés de 2010 à 2015). Après avoir été autosuffisant sur le plan alimentaire jusque dans les années 1960, l’Iran est devenu un des plus grands importateurs mondiaux de produits agricoles (de 30 à 50 % de ses besoins). L’agriculture est de plus en plus capitaliste, avec de grandes fermes privées de 100 à 200 hectares qui deviennent des pôles locaux de production où sont embauchés les paysans-travailleurs des villages voisins en complément de leur petite exploitation familiale. D’autres tentent leur chance dans les villes à cause de la concentration des terres et des sècheresses répétées.

Aux difficultés pandémiques et économiques, il faut ajouter une crise de l’environnement. La pollution de l’air, causée entre autres par 3 millions de voitures (il y en a 1,2 million à Berlin et 1,4 à New-York), nuit à la santé des habitants de la capitale. La pénurie d’eau relève du dérèglement climatique mais est aggravée par la mauvaise gestion de la ressource naturelle, gaspillée par l’agriculture capitaliste. Par exemple, le lac salé d’Oroumieh a perdu la moitié de sa superficie.

Taux d’inflation


Le déficit public serait de 7 % du PIB, ce qui pose la question de l’ampleur des dépenses militaires et de l’aide accordée à d’autres gouvernement de la région, d’autant que l’Iran tire moins de gains économiques que la Russie de son aide militaire et financière à la Syrie (une exception est l’acquisition de la majorité des actions de Wafa Telecom par une société malaisienne aux mains des pasdarans d’Iran).

Pour que la classe ouvrière prenne la tête du mouvement


Les minorités nationales haïssent le joug de l’État perse. Une partie significative de la classe ouvrière est kurde, azérie, arabe.

La jeunesse aspire à la liberté : en 1999, des émeutes étudiantes sont violemment réprimées par les bassidjis dans plusieurs villes.

En 2009, la proclamation des résultats de l’élection présidentielle conduit à une mobilisation des classes petites-bourgeoises des villes pour appuyer une aile de l’islamisme qui ne met pas en cause le régime, mais en fait partie et en vit. 150 manifestants sont tués. Les multiples viols des bassidjis sont dénoncés. Mais cette protestation en prépare d’autres, nettement plus plébéiennes.

En 2017-2018, la fraction la plus autoritaire déclenche des manifestations contre l’aile dite libérale, mais se fait déborder par des travailleurs qui s’en prennent au régime tout entier. Le pouvoir accuse les États-Unis. La répression cause environ 20 morts.

En 2019, des hausses de prix entrainent des manifestations de grande ampleur, écrasées au prix de plusieurs centaines de morts, particulièrement au Kurdistan. Comme de coutume dans les régimes totalitaires, les manifestants arrêtés sont torturés pour leur extorquer des aveux publics. En 2021, des ouvriers et des paysans manifestent dans la province du Khouzistan, au moins 8 sont tués.

Depuis le début du siècle, des grèves ont lieu. Même des syndicats indépendants du régime apparaissent dans les transports publics et les raffineries, malgré la répression féroce.

Depuis plusieurs mois, la spontanéité des masses iraniennes est formidable et attire l’admiration des exploités et des opprimés du monde entier. Malgré tout, le régime assassin est toujours en place. La bourgeoisie iranienne n’a rien perdu d’essentiel et les ayatollahs ne sont pas renversés. Ils tiennent toujours l’État bourgeois, ses finances, son armement, ses tribunaux, la centralisation des informations, des moyens de communication, des forces d’espionnage et de répression face à des travailleurs et des étudiants qui restent sans stratégie, sans programme, sans direction. C’est pourquoi il faut des mots d’ordre au-delà des slogans de la première vague. C’est pourquoi il faut identifier la classe capable de renverser l’ordre ancien et d’en créer un nouveau. C’est pourquoi il faut des organismes d’autodéfense et d’auto-organisation. C’est pourquoi il faut une stratégie de révolution permanente. C’est pourquoi il faut un parti.

Sinon, le terrain sera occupé par des « réformateurs » du régime, par des monarchistes, par des bourgeois « démocratiques », des djihadistes baloutches qui veulent imiter les Talibans, des nationalistes bourgeois kurdes qui veulent imiter le clan Barzani d’Irak, des faux communistes qui veulent aménager le régime islamiste, des faux communistes qui donnent la parole aux monarchistes dans les manifestations des exilés ou qui font appel aux États impérialistes qui sont les pires ennemis non seulement de leur prolétariat mais de ceux du monde entier…

La priorité est de répondre de manière positive aux slogans lancés par les masses : « Femme, vie, liberté !» et « Mort au dictateur ! ».

  • Comment empêcher le formidable appareil de répression de tuer, d’arracher la vie à la jeunesse, aux femmes et aux minorités nationales opprimées ?
  • Comment arracher l’égalité pour les femmes ?
  • Comment obtenir la liberté ?
  • Par quoi remplacer le dictateur ?

Pour l’hégémonie du prolétariat

Afin de vaincre la répression d’un État qui n’est pas disloqué, afin de déjouer les tentatives de rafistoler le régime de la part de sa fraction pro-occidentale, afin de porter le coup de grâce au régime islamiste, afin d’éviter le rétablissement de la monarchie, afin de déjouer les manoeuvres de l’opposition « démocratique » pour sauver le capitalisme iranien, il faut que le prolétariat fasse irruption en tant que classe dans la lutte. Il ne peut le faire que par un parti regroupant l’avant-garde et la reliant à ses frères et soeurs du monde entier, dans la tradition de la Ligue des communistes, de l’Association internationale des travailleurs, de l’Internationale ouvrière, de l’Internationale communiste, de la 4e Internationale.

Sans tarder, toutes les organisations ouvrières doivent constituer un front unique afin d’organiser la grève générale, pour se défendre en armant les travailleuses et les travailleurs, pour créer des shoras dans les entreprises, les administrations, les universités, les quartiers, les campagnes, les centraliser.

Une manière décisive pour donner confiance à la classe ouvrière et ouvrir une perspective politique révolutionnaire à la société est la grève générale . Les forces révolutionnaires iraniennes ne doivent pas agir avec une perspective économiste ou pour obtenir des concessions du régime mais avec la perspective de faire arriver la classe ouvrière au pouvoir. La destruction de l’État bourgeois islamiste, la dispersion de ses forces de répression, la constitution d’un gouvernement ouvrier et paysan appuyé sur les conseils ouvriers doivent être l’objectif central de la révolution.

Une grève générale montre la force des travailleurs, issue de leur position dans la production. Au-delà des revendications immédiates, la grève de masse avec occupation remet en cause la sacrosainte propriété capitaliste, l’appropriation par une minorité de la société des moyens de production créés par les producteurs qui en fait du capital et transforme les producteurs eux-mêmes en exploités. La grève générale ne peut pas durer longtemps mais elle pose pratiquement la question de savoir quelle classe doit diriger la société.

De l’aspiration à la liberté, de l’autodéfense, de la grève générale et du contrôle ouvrier, renaitront inévitablement les shoras. Les comités de grève, les conseils ouvriers ne doivent pas se limiter aux lieux de travail et doivent s’étendre aux lieux de formation, aux lieux de vie pour souder tous les travailleurs entre eux, les souder aux futurs et aux anciens travailleurs, aux chômeurs. Ils doivent instaurer une démocratie directe. Chaque parti, chaque courant pourra présenter son analyse et faire ses propositions. Les shoras trancheront.

Pour une république fédérale, ouvrière et paysanne

Les communistes sont, sans restriction, pour les libertés démocratiques. Leur conquête s’est esquissée en Iran en 1905-1906 et de nouveau en 1979. Sachant que jamais, même en 1906, il n’y a eu d’assemblée élue au suffrage universel, les communistes sont partisans d’élections libres pour une assemblée nationale ou constituante, une fois supprimés le monopole politique des ayatollahs, les institutions de la république islamique, la censure…

Mais les communistes ne cachent pas que leur but est bien plus qu’un régime faussement démocratique où les groupes capitalistes gouvernent dans l’ombre des chambres parlementaires et où des appareils de menteurs professionnels les servent en se remplissant les poches au passage. Ils sont partisans d’une démocratie bien supérieure, du type de la Commune de Paris de 1871 ou des soviets de la Russie de 1917, qui est la forme adéquate de la dictature du prolétariat.

La généralisation et la centralisation des conseils exigent l’armement des masses, préparent leur prise du pouvoir et l’expropriation des groupes capitalistes nationaux et étrangers. Toute la richesse de la société vient de la nature à partir du travail collectif des producteurs, les travailleurs doivent prendre le contrôle de la richesse sociale tout en ménageant la nature.

Face aux pasdarans, aux bassidjis, aux policiers et aux militaires professionnels, l’autodéfense des manifestants, la création des milices ouvrières, leur armement sont des tâches urgentes. La classe ouvrière produit des armes, les transporte ; elle gère les comptes bancaires, la paye des policiers et des militaires. Elle doit désarmer les mercenaires de la bourgeoisie. Au sein de l’armée, il faut mener un travail systématique d’agitation et de propagande pour gagner les conscrits à la révolution, pour qu’ils retournent leurs armes contre les généraux et les dirigeants politiques qui sont les bourreaux des femmes, des travailleurs et des minorités nationales.

Protestation aux raffineries d’Assalouyeh (province de Bouchehr), mi-décembre 2022


L’activité des milices ouvrières commercera par l’autodéfense. Mais elle devra passer, comme en 1979, à l’offensive : prendre d’assaut les postes de police où sont détenus et torturés les militants afin de les libérer, les casernes pour s’armer, le ministère du renseignement pour le paralyser, les sièges du pouvoir islamiste pour les disperser et les détruire, les tribunaux islamiques pour punir les bourreaux.

  • Solidarité internationaliste des organisations ouvrières et féminines de tous les pays avec la lutte des masses iraniennes !
  • Grève générale ! Autodéfense des manifestations ! Création de shoras sur les lieux de travail, de vie et d’étude, dans les casernes !
  • Liberté des femmes de porter ou non le voile et de s’habiller comme elles veulent ! Pour l’égalité des hommes et des femmes !
  • À bas la dictature islamiste ! Abolition du guide suprême, de l’assemblée des experts, du conseil de discernement ! Assemblée constituante !
  • Dissolution des corps de répression ! Libertés démocratiques pour les conscrits ! Élection des officiers !
  • Pour la liberté des relations entre jeunes ! Pour le respect des homosexuels et lesbiennes !
  • Pour le respect des minorités religieuses et des athées ! Pour la laïcité ! Séparation de l’État et du clergé chiite ! Aucune subvention de l’État à une quelconque religion !
  • Pour la libération des prisonniers politiques ! Pour toutes les libertés démocratiques (liberté d’expression liberté d’organisation, droit de grève, droit de manifester…) ! Pour des élections libres !
  • Droit à l’autodétermination des minorités nationales ! Droit pour les Kurdes d’Iran, de Syrie, d’Irak, de Turquie de constituer, s’ils le désirent, leur propre État !
  • Blocage des loyers, indexation immédiate des salaires sur le cout de la vie !
  • Expropriation des terres des grandes fermes capitalistes et des fondations religieuses ! Gestion collective de l’eau ! Coopératives basées sur le volontariat !
  • Contrôle ouvrier sur la production, la distribution ! Expropriation des grandes entreprises et des fondations ! Une seule banque publique !
  • Protection sociale ! Gratuité de l’enseignement et de la santé !
  • Levée de toutes les sanctions américaines et fin des assassinats sionistes !
  • Fermeture de toutes les bases militaires (française, chinoise, russe, britanniques, américaines) au Proche-Orient et en Méditerranée, départ de la flotte américaine du golfe Arabo-persique, de l’océan Indien et de la mer Méditerranée !
  • Gouvernement ouvrier et paysan ! Fédération socialiste du Proche-Orient !

13 janvier 2023