Face à ses revers en Ukraine, la fuite en avant de l’impérialisme russe

L’armée russe recule sur tous les fronts

La guerre d’agression de l’impérialisme russe déclenchée contre l’Ukraine le 24 février devait être une guerre éclair. La destruction de l’État ukrainien était au programme de cette invasion. Mais, au bout de sept mois de combats intenses, il n’en est rien. Certes, la Russie a conquis par les armes dans le sud et l’est près de 20 % du territoire de l’Ukraine, soit 100 000 km2, mais l’armée russe subit depuis septembre de sérieux revers sur le terrain, prenant même l’allure d’une débâcle dans la région autour de Kharkiv. La prise de la ville de Lyman par les forces armées ukrainiennes est un tournant majeur dans la guerre et une défaite importante des troupes de la Fédération russe. Selon différentes sources et sans parler des quantités de matériels détruits, entre 40 000 et 80 000 soldats russes sur le corps expéditionnaire initial de 170 000 hommes seraient hors de combats (morts, blessés, prisonniers, déserteurs).

Ce succès doit beaucoup à la détermination de nombreux Ukrainiens de toutes couches sociales qui se sont engagés dans l’armée pour défendre leur pays. Face à eux, une armée de métier en position d’agresseur, épaulée par des mercenaires du groupe Wagner, les uns et les autres motivés principalement par l’argent, d’autant plus que face au manque de volontaires, le Kremlin a fortement augmenté la solde.

Par contre, les succès de la contre-offensive ukrainienne sont également dus au soutien militaire massif des impérialismes occidentaux, en premier lieu des États-Unis, et de leurs alliés. L’armée ukrainienne, que les États-Unis et le Royaume Uni entrainent depuis 2014, reçoit sans arrêt des armes de haute technologie, les milliards de dollars d’aide se succèdent. De plus, les satellites, les vols de surveillance de l’OTAN, les agences de renseignement et officines d’espionnage occidentales lui fournissent de précieux renseignements sur les positions ennemies.

Le prolétariat russe peut arrêter la fuite en avant de Poutine dans la guerre

En catastrophe, fin septembre, Poutine organise des referendums pour rattacher à la Russie les oblasts (districts) de Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporijia, les fusils accompagnant les urnes. Sans surprise, le résultat est un plébiscite avec des scores staliniens pour l’annexion.

Pour tenter d’éviter une défaite qui se dessine jour après jour, Poutine décrète une mobilisation partielle. Au moins 300 000 jeunes et moins jeunes sont appelés à rejoindre l’armée. Dans certaines régions de la Fédération de Russie, cela ressemble beaucoup plus à une mobilisation générale, notamment dans les régions de l’est où résident les peuples colonisés en leur temps par l’empire tsariste (bouriates, kirghizes, daghestanais…). Cette décision de Poutine, qui entérine à sa façon son échec sur le front ukrainien, est une attaque frontale contre le prolétariat russe. Malgré la répression policière omniprésente et les condamnations immédiates, des manifestations encore limitées mais significatives ont lieu dans les grands centres urbains. Les comités de mères de soldats s’activent à nouveau, des élus municipaux ont même demandé la démission de Poutine, tandis que des centres de recrutement sont incendiés, etc. En Bouriatie et au Daghestan, la population affronte directement les autorités en affirmant son refus d’envoyer ses enfants combattre en Ukraine. La fuite de près de 300 000 jeunes russes pour éviter d’être envoyés sur le au front est aussi un symptôme de ce qui se joue actuellement en Russie.

Les territoires annexés appartenant désormais à la Russie grâce au tour de passepasse des référendums, Poutine menace à nouveau d’utiliser tous les moyens militaires, y compris l’arme nucléaire, pour se défendre. Si cette initiative était prise, elle ferait vraisemblablement basculer la guerre dans une nouvelle dimension aux conséquences incalculables. Un des plus va-t-en-guerre, le dictateur tchétchène Kadyrov, presse Poutine d’employer des armes nucléaires de faible puissance pour se dégager militairement. De l’autre côté, la Chine et l’Inde, découvrant les faiblesses militaires de leur allié et peu enclins à accompagner la Russie dans un aventurisme très incertain, la soutiennent de plus en plus mollement et manifestent leur souhait de voir la guerre s’arrêter. Mais seul le prolétariat russe, s’il parvient à s’organiser, tient entre ses mains une issue positive en se dressant contre Poutine pour le renverser.

Les communistes internationalistes en défense de l’Ukraine

L’Ukraine étant un enjeu entre les différents impérialismes, les impérialistes occidentaux, États-Unis en tête, cherchent dans la défaite de l’impérialisme russe l’occasion de renforcer leurs positions, tout comme la victoire de l’impérialisme russe renforcerait sa position au détriment des autres impérialismes. Mais contrairement à ce qu’a prétendu Poutine dans son discours sur la place Rouge le 30 septembre pour sceller l’annexion des districts de Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporijia pris à l’Ukraine, l’impérialisme russe n’a pas déclenché cette guerre en Ukraine en réponse à une guerre menée par les impérialismes occidentaux contre la Russie, mais pour annexer purement et simplement l’Ukraine en niant son droit à l’existence. Malgré le soutien massif indéniable des impérialismes occidentaux à l’Ukraine, la guerre reste encore celle d’un impérialisme, le russe, contre un pays dominé, l’Ukraine, et n’a pas -ou pas encore- basculé dans un affrontement inter impérialiste direct. De ce fait, les communistes internationalistes défendent inconditionnellement l’Ukraine contre l’agression impérialiste russe, sans apporter un quelconque soutien au régime bourgeois réactionnaire et corrompu de Zelensky.

Le gouvernement Zelensky n’est pas du côté du prolétariat ukrainien

Depuis les lois de « décommunisation » de 2015, les partis et organisations « communistes » essentiellement implantées parmi les populations russophones de l’est du pays ont été mises hors la loi, dont le Parti communiste d’Ukraine qui avait obtenu 13 % des voix en 2012. Après avoir dès le début de la guerre placé tous les médias sous le contrôle de l’État, Zelensky a interdit les grèves, suspendu une douzaine d’autres partis politiques d’opposition, dont ceux se réclamant de la « gauche » ou du « socialisme ». L’un d’entre eux, la Plateforme d’opposition pour la vie, était arrivée en deuxième position lors des récentes élections.

Le parti de Zelensky Serviteur du peuple (sic) et ses alliés ont voté une loi concoctée par un cabinet-conseil britannique qui annule les dispositions protectrices des salariés dans les PME et y autorise les contrats « 0 heure ». Ce retour au 19e siècle concerne plus de 90 % des salariés. L’étape suivante est la menace de confisquer les propriétés des syndicats, comme leurs centres de soins ou de loisirs. Les bureaucraties syndicales ukrainiennes ont accepté sans broncher les atteintes à la liberté politique et syndicale, puis elles ont mollement protesté face à la destruction du code du travail et à la menace contre leurs propriétés.

Loin d’avoir extirpé le fascisme ukrainien comme le prétendait Poutine (qui alimente et tolère le fascisme russe, tant dans la fédération de Russie que dans les zones récemment annexées du Donbass, sans parler des mercenaires de Wagner), l’invasion russe a exaspéré le chauvinisme ukrainien. La passivité du mouvement ouvrier officiel laisse le champ libre au nationalisme le plus réactionnaire. De plus en plus de combattants ukrainiens arborent le drapeau rouge et noir (représentant le sang et la terre) de l’OUN-B/UPA, l’organisation fasciste qui pendant la 2e guerre mondiale combattit l’Armée rouge, collabora avec l’impérialisme allemand pour exterminer les Juifs et massacra elle-même 80 000 civils polonais en Volhynie (au nord-est de l’Ukraine). Zelensky et son gouvernement louent sans cesse les « héros de Marioupol », le régiment Azov fondé par des néonazis et soudé par l’ultranationalisme et l’anticommunisme, qui a terrorisé de nombreux habitants russophones de cette ville.

Dans les territoires occupés, l’État colonisateur impose la seule langue russe. Dans ce qui reste de l’Ukraine, l’État bourgeois mène une campagne de « dé-russification » visant à imposer la seule langue ukrainienne et à supprimer tous les symboles de la culture russe ; par exemple des dizaines de statues du grand écrivain russe Alexandre Pouchkine ont été récemment déboulonnées.

Zelenski, qui a toujours considéré le peuple russe tout entier comme « complice » du régime de Poutine, avait proposé cet été d’interdire l’entrée en Europe aux citoyens russes, et plusieurs États de l’Union européenne (Finlande, Pologne, Lituanie, Estonie, Lettonie…) avaient pris de sévères mesures de restriction de l’entrée de Russes sur leur territoire. Maintenant, des milliers d’hommes fuyant la conscription se voient bloqués à ces frontières, notamment celle de la Finlande. Ceci montre que la russophobie, qui a toujours contribué à souder idéologiquement la population russe au régime, représente maintenant une entrave majeure à la lutte contre l’occupation et contre le despote.

Depuis 2014, ceux qui se sentaient ukrainiens ou tatars ont majoritairement fui les deux républiques pro-russes du Donbass et de Crimée, tandis que ceux qui se sentaient russes s’y sont parfois réfugiés. L’invasion du 22 février 2022 a évidemment précipité l’épuration ethnique de part et d’autre, sans qu’il soit possible de le mesurer aujourd’hui.

Les divisions ethniques et linguistiques des populations de ces territoires pourraient facilement se résoudre par la démocratie des conseils de travailleurs, sur la base de l’égalité des langues, du principe d’autodétermination des peuples. Mais ici, il n’y a pas de réelle démocratie, seulement deux armées bourgeoises imposant chacune un État, une identité nationale et une langue. Il y a la négation de la part de l’État impérialiste russe du droit à l’existence d’un État ukrainien.

Les ouvriers, employés, paysans et retraités ukrainiens n’ont rien à attendre des différentes fractions de la bourgeoisie de leur pays, qui ne visent qu’à les asservir à l’un ou l’autre impérialisme et accroitre leur misère. Pour libérer leur pays de l’occupation, ils doivent également se libérer de leurs exploiteurs et prendre eux-mêmes en main la direction des affaires civiles et militaires.

  • Troupes russes hors d’Ukraine ! À bas la mobilisation de conscrits et réservistes russes !
  • Accueil inconditionnel partout en Europe de tous les déserteurs et réfugiés russes !
  • Vive la mobilisation du prolétariat, de la jeunesse, des femmes russes contre Poutine pour arrêter la guerre !
  • Front unique des organisations ouvrières contre l’intervention impérialiste en Ukraine et pour la défense des opposants et manifestants russes opposés à la guerre !
  • Dissolution de l’OTAN et de l’OTSC ! Retrait de toutes les troupes de l’OTAN (françaises, britanniques, allemandes, américaines…) d’Europe centrale !
  • Annulation de la dette extérieure de l’Ukraine ! Expropriation de la clique des milliardaires de Poutine ! Non aux sanctions restreignant les échanges culturels et sportifs, visant l’économie et la population de la Russie !
  • Séparation de l’église orthodoxe et de l’État ! Liberté pour les médias, partis politiques et syndicats en Russie, en Biélorussie et en Ukraine !
  • Restauration immédiate du droit de grève ! Respect du code du travail !
  • À bas les gouvernements capitalistes de Poutine, de Loukachenko et de Zelenski ! Gouvernement des travailleurs !
  • Fédération socialiste d’Europe et de Russie !

1 octobre 2022