Attaque contre les retraites : dirigeants syndicaux, quittez toutes les concertations !

Pour son deuxième mandat, Macron promet de s’en prendre aux retraites après sa tentative de 2020 qui n’a pas abouti. A l’époque, le dispositif gouvernemental associe les représentants syndicaux à la négociation de la « réforme ». Ces derniers complètent la manœuvre en multipliant les « temps forts » et les « journées d’action » alors que la grève générale est nécessaire pour bloquer l’attaque. Les chefs syndicaux reproduisent ainsi le dispositif des défaites de 1993, 1995, 2003, 2010, 2014. Mais la pandémie Covid gèle la mise en place de la contre-réforme. Or l’enjeu des retraites est de taille : les dizaines de milliards d’euros de cotisations patronales pèsent sur les profits capitalistes. Pour les exploiteurs, il faut remettre la main dessus et faire financer les pensions par l’impôt (CSG par exemple) ou par les salariés eux-mêmes (hausse de leurs cotisations, retraites complémentaires…). Macron est aussi réélu pour cela.

24 mai 2022 : Martinez (CGT), Roux de Bézieux (Medef), Homeril (CGC) et Veyrier (FO)

L’échec relatif du CNR n’empêche pas l’offensive contre les retraites

Entre la présidentielle et les législatives, les chefs syndicaux défilent dans les ministères au côté des organisations patronales. Le but est toujours d’associer les directions syndicales aux attaques afin de museler toute réplique des travailleurs. Fin juin, la perte de sa majorité à l’assemblée nationale n’y change rien. La première ministre Borne doit maintenir le cap. Concernant les retraites, Macron explique le 14 juillet qu’il faut « décaler l’âge de départ légal jusqu’à 65 ans » car on doit « travailler plus et plus longtemps ». Il précise que pour aboutir à une régression de nos droits à l’été 2023 « la discussion doit commencer à la rentrée » et qu’il y aura « un travail avec les forces syndicales et patronales. ». Alors que la crise énergétique et l’inflation s’installent durablement, Macron modifie légèrement sa méthode.

Le 8 septembre, il préside le nouveau Conseil national de la refondation (CNR). Voulu comme un outil de collaboration de classe plus direct autour du président avec quelques « citoyens tirés au sort », le CNR doit établir des diagnostics partagés contre l’emploi, l’école, la santé, le climat et le « bien vieillir ». Mais patatras… Les partis bourgeois LR et RN et la coalition de front populaire Nupes refusent de s’y rendre comme les directions CGT et FO, Solidaires, FSU. Chez ces dernières, on se justifie en invoquant les nombreuses instances déjà existantes tout en réaffirmant sa disponibilité pour la concertation… Seules la CFDT, la CFTC et l’Unsa accompagnent le Medef au CNR. C’est le couac de la rentrée.

Le 12 septembre, Macron affirme que les mesures contre les retraites pourraient faire l’objet d’un amendement au projet de loi de finances sur la sécurité sociale (PLFSS) en octobre prochain. La mesure éviterait un projet de loi et permettrait d’aller vite vers l’allongement du temps de cotisations et de l’âge de départ. Mais elle crispe le parti présidentiel Renaissance et les alliés du Modem et d’Horizons comme le secrétaire de la CFDT, Laurent Berger. Pour poursuivre, Dussopt ministre du travail, invite à nouveau les « partenaires sociaux » autour du rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites (COR). Le 27 septembre, Macron laisse filtrer une information sur une modification éventuelle du PFLSS en janvier prochain afin de laisser plus de temps aux concertations.

Rapport du COR : les « déficits » à venir justifient les mesures de Macron

Fondé par Jospin en 2000, le COR dépend du premier ministre et remet un rapport annuel depuis 2014. Organisme de collaboration de classe, ses 42 membres sont désignés par le Medef, l’U2P, la CGPME mais aussi par la CFDT (2), FO (2), la CGT (2), l’UNSA, la FSU, la CFTC ainsi que 4 députés (non désignés pour l’instant) et 4 sénateurs (1 PS, 1 LR, 1 Modem, 1 PR). Le COR est présidé par Pierre Louis Bras, inspecteur général des affaires sociales passé par HEC et l’ENA, ancien conseiller dans les gouvernements Rocard et Jospin. L’attelage est destiné à justifier chaque nouvelle charge.

Paru le 15 septembre, le rapport 2022 de 342 pages fourmille d’indicateurs et de projections jusqu’en 2070. Le texte omet sciemment l’exploitation capitaliste et les inégalités, de plus en plus marquées, du « modèle français ». Celui-ci prélève sur les salaires bruts au lieu d’être intégralement payé par les employeurs, les cadres versent une partie moindre de leur salaire brut grâce à un système de plafond, ils touchent plus longtemps car ils vivent plus longtemps, les femmes sont pénalisées quand elles suspendent leur carrière pour élever des enfants, comme le sont les victimes du chômage.

Le « constat partagé » du COR nourrit la campagne actuelle pour « travailler plus longtemps ». Le rapport explique que depuis 2008, « l’espérance de vie sans incapacité à 65 ans a crû plus vite que l’espérance de vie. » (p. 30). Le rapport entre nombre d’actifs (20-59 ans) et 60 ans et plus est passé de 2,5 en 2006 à « 1,83 en 2021 » et en 2070, il n’y aurait plus environ qu’1,3 actif de 20-59 ans pour 1 personne de 60 ans et plus. Les auteurs voient d’un bon œil que « les réformes passées des retraites continuent de contribuer à augmenter les taux d’activité des seniors de 60 à 69 ans. » (p. 34).

Or la productivité augmente régulièrement, malgré l’évolution du rapport actifs/inactifs. Cela devrait soulager les travailleurs en octroyant du temps de loisirs par le partage du temps de travail. Le rapport le nie et se projette pour contenir les dépenses de retraites entre 13 à 14 % du PIB.

Sans ces réformes et avec une hypothèse d’évolution de la productivité de 1,3 %, la part des dépenses se situerait à 18,9 % du PIB en 2070. L’indexation sur les prix (et non plus sur les salaires) aurait réduit cette part de 4,2 points, tandis que les mesures relatives à l’âge la réduiraient de 2,7 points environ. Il s’agit principalement de l’augmentation de l’âge départ à la retraite suite à l’augmentation de la durée d’assurance nécessaire au taux plein prévue par les réformes de 1993, 2003 et 2014 et du recul de l’âge d’ouverture des droits et de l’âge d’annulation de la décote prévu par la réforme de 2010. (p. 69)


Augmentation de l’espérance de vie devrait donc, pour le COR, rimer avec la réduction des dépenses de retraites. En réalité, pour le COR, ce sont les dépenses des capitalistes qu’il faut réduire. C’est un processus déjà engagé avec « les allègements de cotisations employeurs sur les bas salaires » (p. 83) et « l’augmentation de la part des impôts et taxes affectés » (p. 84) à la protection sociale (ITAF) dont la CSG fait partie. Dans tous les cas de figure de croissance économique, le COR prévoit des déficits de 12 milliards d’euros d’ici 2032. Il justifie la politique du gouvernement Macron-Borne.

Aucun représentant syndical aux concertations ! Préparons la grève générale !

C’est sur cette base que les responsables syndicaux (CGT, FO, CFDT, FSU, UNSA, CFDT) rencontrent le ministre du travail. Malgré les plaintes feintes de ses visiteurs, Dussopt promet d’autres concertations et cadre le travail de trahison : « A charge pour les syndicats de « dire ce qu’ils veulent comme améliorations », mais « aussi comment c’est financé » (AFP, 20 septembre). Voilà à quoi sert de participer à la concertation du gouvernement.

Le 21 septembre, le président maintient le cap en sous-entendant que les économies sur les retraites pourraient financer les dettes contractées pendant la pandémie et pour le « bouclier fiscal ».

« Nous ne pouvons financer cela qu’en travaillant davantage et en produisant plus de richesses », a poursuivi le président de la République. Avant de citer pour y parvenir « la réforme du lycée professionnel, la réforme de l’apprentissage, la réforme de l’assurance chômage, la réforme de la formation professionnelle (…) ». « Et c’est travailler plus longtemps, donc oui, c’est la réforme des retraites ». « Nous connaissons le débat. Le conseil d’orientation des retraites a dit il y a quelques jours que notre régime était en déficit. » (Macron, bfmtv.fr, 21 septembre)

Les travailleurs sont prévenus. Le gouvernement Macron-Borne, s’appuyant sur la trahison des directions syndicales, engage une nouvelle attaque. Pour le contrer le mouvement ouvrier doit défendre ses revendications :

  • Augmentation des cotisations patronales ! Suppression des cotisations des salariés !
  • Abrogation des lois antérieures contre les retraites !
  • Retour aux 37,5 années de cotisation et à 60 ans d’âge de la retraite !
  • Calcul du montant de la pension sur les 6 meilleurs mois pour tous !
  • Maintien des compensations pour les femmes et les travaux pénibles !
  • Taux de remplacement à 75 % (sauf pour les PDG qui touchent déjà des « retraites chapeau ») !
  • Pas de pension au-dessous du Smic !
  • Intégration des régimes de retraite complémentaires au régime général !
  • Une seule caisse pour tous les salariés, gérée par leurs seuls représentants !

Le capitalisme en déclin détruit toutes les conquêtes sociales antérieures. Le rôle des partis issus de la classe ouvrière et des syndicats de salariés n’est pas d’accompagner cette régression, cette réaction.

  • Boycott de la concertation ! Dirigeants syndicaux, sortez du Conseil d’orientation des retraites !
  • Assez des journées d’action impuissantes ! Préparation de la grève générale pour interdire toute attaque !