Le parti bourgeois « de gauche » EELV qui gère depuis juin 2020 la ville est devenue trop respectable pour appeler à des manifestations de rue, même s’il a conquis la mairie avec le soutien électoral du PS, de LFI, du PCF, du NPA…
Les exactions des fascistes à Lyon
Les fascistes ne sont pas en mesure de prendre le pouvoir en France. Mais, comme dans le reste du monde, ils relèvent la tête et sévissent contre les organisations ouvrières et des minorités ethniques ou religieuses pour se préparer aux crises inévitables du capitalisme en déclin. Les ex-GI, les AF et compagnie sont encouragés par la politique migratoire et policière du gouvernement, par les succès politiques des politiciens et des partis xénophobes qui, tout en restant légaux, diffusent le poison du nationalisme, du chauvinisme, du racisme, du complotisme, comme la mouvance autour de Zemmour-Bolloré et le RN des Le Pen.
Interrogé sur le plateau de BFM, le 11 novembre, sur le fait de savoir s’il fallait laisser mourir de froid 2 000 migrants derrière les barbelés de la frontière polonaise, Julien Odoul, l’un des porte-parole du Rassemblement national a répondu à deux reprises : « Mais bien sûr que oui ». (Le Monde, 16 novembre)
Les candidats à la candidature de LR désignent aussi les étrangers, du moins les pauvres, comme boucs émissaires. Montebourg, ancien dirigeant du PS, a envisagé de bloquer les transferts de fonds des résidents étrangers (RTL & LFI, 7 novembre).
La vague réactionnaire est facilitée par l’impuissance et les trahisons des directions syndicales et la faillite des partis « réformistes », leur pacifisme, leur nationalisme, leur soutien à la police et à l’armée.
Le 20 mars, par exemple, c’est la librairie anarchiste La Plume noire sur les pentes de la Croix-Rousse qui avait été ciblée par une bande de nervis de la mouvance fasciste, en pleine journée et en toute impunité, malgré l’important dispositif de vidéo-surveillance de Lyon. La librairie avait dû son salut à la mobilisation immédiate des habitants du quartier qui avaient fortement réagi. (Voir)
Le 24 avril, le rassemblement pour la fierté lesbienne avait été attaqué par une cinquantaine de fascistes, place Louis-Pradel, à Lyon. Fin juin, après la défaite de la France face à la Suisse à l’Euro de football, des nazillons avaient agressé en presqu’île des militants antifascistes qui regardaient le match dans un bar.
Plusieurs locaux du PCF ou de la CGT ont aussi été l’objet d’attaques dans l’agglomération. (Voir)
Toutes ces agissements avaient été revendiquées sur les réseaux sociaux par des groupuscules fascistes.
La complaisance de l’État bourgeois
En outre, le 21 septembre 2021, sept militants antifascistes du Groupe antifasciste Lyon et environs (GALE) ont été interpellés et placés en garde à vue par la police. L’enquête se réfère aux événements survenus lors de la manifestation libertarienne et obscurantiste contre le passe-sanitaire et contre la vaccination du 28 août, où a eu lieu une confrontation entre des anarchistes du GALE et des intégristes chrétiens de Civitas. Aucune plainte n’avait été déposée par ces derniers mais le procureur de la république a diligenté cette enquête d’initiative après l’exploitation d’une vidéo et un travail de surveillance et de traçage des militants. Quatre d’entre eux ont d’ailleurs été placés en détention provisoire en attendant leur jugement. Début novembre, faute de preuves ils ont été relaxés ou condamnés à de très faibles amendes pour la forme.
Depuis dix ans, les fascistes sévissent à Lyon en jouissant de la mansuétude des pouvoirs publics. Ainsi, les revendications sur les réseaux sociaux ne font pas l’objet, à la différence des militants du GALE, de poursuites.
Le samedi on descend dans la rue, le dimanche on vote Macron ?
L’appel à manifester de ceux qui appelèrent à voter Macron et Chirac pour faire « barrage à l’extrême-droite » ne pointe jamais la responsabilité du gouvernement Macron-Castex-Darmanin à travers sa politique, anti-ouvrière et anti-migrantes ses lois liberticides, ses violences policières, le renforcement incessant des services secrets et de la police. De même, cet appel n’évoque pas le terreau social et politique, lié au pourrissement du système capitaliste et aux trahisons des directions actuelles des travailleurs, qui permet aux fascistes de recruter et d’attaquer physiquement les minorités et le mouvement ouvrier.
Pire, les réformistes détournent les antifascistes vers la supplique que ce même gouvernement « ferme les locaux fascistes ». C’est du vent ! Ils ne tirent aucune leçon du fait que malgré la dissolution de GI en mars 2021, le bar La Traboule, ancien siège du mouvement, et la salle de boxe L’Agogé sont toujours ouverts.
Toute l’histoire prouve que les mesures juridiques réclamées par les dirigeants des partis « réformistes » et des syndicats, des lois « contre les extrêmes » dont l’application est confiée aux institutions répressives de l’État bourgeois, n’ont jamais empêché les exactions par les bandes fascistes, ni la prise du pouvoir par des partis fascistes. (Voir notamment)
En effet, les fascistes sont financés par une fraction de la bourgeoisie, ils sont liés d’un côté à la pègre et de l’autre aux multiples entreprises de « sécurité privée », ils jouissent de l’indulgence de magistrats, de complicités dans la police, les services secrets, l’armée.
Par contre, ces lois et décrets ont été systématiquement retournés contre les organisations des peuples colonisés et de la classe ouvrière. Par exemple, en France, la loi du 10 janvier 1936 a servi au gouvernement de Front populaire à interdire en 1937 l’Étoile nord-africaine, au gouvernement du Parti radical à interdire en 1939 le PCF et au gouvernement de Gaulle à dissoudre en 1968 la JCR, VO, la FER, l’OCI, le PCI, l’UJCML, le PCMLF…
Pour le font unique ouvrier contre les flics et les nervis
L’organisation LO, qui raisonne comme les réformistes en termes bourgeois (« la gauche », « la droite », « l’extrême droite »), fait la leçon aux jeunes :
La seule voie pour combattre sérieusement l’extrême droite, consiste à agir pour que les travailleurs retrouvent la conscience qu’ils sont une force et qu’ils ont des intérêts communs, quelles que soient leurs origines ou leur nationalité. En mettant en avant ses propres solutions politiques face à la crise, en défendant ses intérêts, en contestant la dictature des capitalistes, la classe ouvrière mobilisée pourra faire reculer l’extrême droite. (Lutte ouvrière, 29 octobre)
Certes, LO n’avait pas appelé à la manifestation de Lyon mais elle n’est pas toujours aussi difficile pour signer des appels à des initiatives front-populistes (la campagne « révolution fiscale » du Front de gauche en 2013) ou pour participer à des listes avec des organisations politiques de la bourgeoisie (PRG, MRC, Verts… lors des élections municipales de 2008).
Certes, une manifestation pacifiste et canalisée vers Macron ne fera pas « reculer l’extrême-droite » . Certes, il faut que la classe ouvrière « défende ses intérêts » et « conteste la dictature des capitalistes ».
Mais faut-il attendre un avenir hypothétique pour protéger les grèves, les manifestations des travailleurs, les locaux et les librairies ouvrières, les travailleurs étrangers, les homosexuels ?
Il ne s’agit pas seulement de « faire reculer l’extrême-droite », sans dire comment, mais d’écraser la vermine fasciste. Il ne s’agit pas de « contester » éternellement le capitalisme mais de le renverser définitivement et de construire le socialisme mondial, ce qui extirpera le fascisme à tout jamais.
Comment la classe ouvrière peut-elle « retrouver sa conscience » si LO, s’alignant sur le PCF, le PS, LFI, fait passer les policiers comme des travailleurs et demande plus de moyens pour la police ?
Les policiers, ce que je vois, c’est qu’on leur demande vraiment de faire un travail difficile mais le gouvernement ne se donne même pas les moyens effectivement de leur donner de quoi travailler. (Nathalie Arthaud, France Info, 15 septembre)
Ce n’est pas une bourde mais toute une orientation opportuniste. (Voir nos articles [1] et [2])
Comment la classe ouvrière peut-elle défendre ses intérêts et contester la dictature des capitalistes, alors que LO, avec le PCF, LFI, le NPA, sa scission RP, le POID, l’UCL et compagnie, protège les chefs syndicaux qui négocient toutes les attaques et les aide, à chaque mouvement prolétarien d’envergure, à empêcher la grève générale ?
Les travailleurs, comme le succès de la manifestation du 23 octobre le prouve, sont disponibles pour combattre les nervis fascistes. Les syndicats (CFDT, CGT, FSU, FO, Solidaires, UNSA…) et les partis issus de la classe ouvrière (PS, PCF, LFI, etc.) doivent s’unir dans le front unique ouvrier pour défendre systématiquement les locaux ouvriers, les manifestations, les grèves, les quartiers populaires contre les nervis et les flics.
À toutes les organisations ouvrières, nous offrons un programme concret d’action sur la base du front unique prolétarien. Nous posons au centre des tâches d’aujourd’hui l’auto-défense active du prolétariat. La force contre la force ! La milice ouvrière est la seule arme pour lutter contre les bandes fascistes auxquelles la police officielle viendra inévitablement en aide. (Trotsky, Manifeste des communistes internationalistes au prolétariat mondial, 9 mars 1934)