La guerre au Haut-Karabakh et les tâches révolutionnaires internationales (PD/Turquie)

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Introduction

La réalité de la guerre a encore une fois éclaté au Haut-Karabakh en tant que produit des États bourgeois fondés sur l’État-nation qui ont vu le jour avec l’intégration de l’URSS au capitalisme. Alors que l’Arménie a affirmé avoir 16 morts et plus de 100 blessés, l’Azerbaïdjan a reconnu de lourdes pertes sans donner des détails. Il ne s’agit pas là d’une simple guerre frontalière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Le conflit a pris depuis longtemps une dimension impérialiste internationale. La guerre entre ces deux pays se mue en l’ouverture du front caucasien du partage impérialiste en Irak, Syrie et Libye. Afin d’analyser correctement cet affrontement et pour produire des résultats politiques justes, il faut descendre aux racines historiques de la question du Haut-Karabakh. Dans cet article, nous nous efforcerons de concrétiser les racines historiques de la question du Haut-Karabakh, de la nature de la guerre, de l’attitude et des buts des parties prenantes dans ce conflit et enfin les tâches internationales des révolutionnaires de Turquie, d’Azerbaïdjan et d’Arménie.

Les racines historiques de la question du Haut-Karabakh

Dans la Russie tsariste que Lénine avait qualifié de prison des peuples, tous les peuples connaissaient une répression sévère. Avec la Révolution d’octobre, ces peuples ont recouvré la liberté, toutes les oppressions nationales ont pris fin et ils ont obtenu le droit de déterminer librement leur avenir. Avec cette révolution, se sont formés les États et les régions autonomes de tous les peuples opprimés sous l’autocratie tsariste. Avec la Révolution d’octobre, les travailleurs d’Arménie et d’Azerbaïdjan aussi avaient fraternisé. Mais avec la trahison de la révolution d’Octobre par la bureaucratie et l’étouffement de la révolution mondiale, le destin des peuples des soviets s’est trouvé entraîné vers un tout autre avenir. L’utopie réactionnaire de la bureaucratie stalinienne de « socialisme dans un seul pays » s’est noué, en pratique, dans le « grand chauvinisme russe ». Le résultat de cette politique a préparé le terrain au retour des vieux préjugés entre les peuples. La bureaucratie dominante a utilisé ces anciens préjugés dans le sens de ses propres intérêts, voire les a alimentés en fonction de la situation. Elle a ainsi pavé la voie aux processus sanglants qui allaient voir le jour à la suite des années 1980. La région appelée Haut-Karabakh est en fait comme un îlot au sein des frontières de l’Azerbaïdjan. Et c’est pour cette raison qu’elle a obtenu une autonomie en 1923. À la fin des années 1980 qui ont vu l’URSS s’intégrer au capitalisme, le nationalisme a atteint des sommets. Le Conseil national qui constituait la direction du Haut-Karabakh a décidé de se rattacher à l’Arménie. Cette décision a été saluée par des manifestations de masse de soutien à la fois au Haut-Karabakh et en Arménie. Face à cette décision, des agressions racistes ont été organisées contre les Arméniens vivant dans la ville de Soumgaït située au nord de Bakou. 32 personnes ont perdu la vie pendant ces agressions, et des centaines de personnes ont été blessées. Dans les régions où les Arméniens vivaient en nombre, les maisons et les quartiers ont été pillés. Toutes ces agressions racistes ont été menées par l’armée azerbaïdjanaise. Quant à Moscou, il n’a pas accepté ce changement et a réprimé les masses qui le soutenaient. Dans certaines zones entre les deux pays, des transferts forcés de population ont eu lieu. En 1989, le Haut-Karabakh a été rattaché directement à Moscou. Peu de temps après, l’Azerbaïdjan a procédé à une opération militaire pour déclarer sa souveraineté sur la région. Suite à cette opération, Moscou a transféré la région à l’Azerbaïdjan. En 1991, le processus d’achèvement de l’effondrement de l’URSS avait débuté. Durant cette année, avec un mois d’écart, l’Azerbaïdjan et l’Arménie ont déclaré qu’ils quittaient l’URSS et qu’ils devenaient des États capitalistes indépendants. Durant ce processus, la direction du Haut-Karabakh a organisé un référendum sur l’autonomie, puis a déclaré son indépendance. Bien que l’indépendance de tous les pays ayant quitté l’URSS ait été reconnu, le pays dont l’indépendance n’a été reconnue par aucun autre est le Haut-Karabakh. L’Azerbaïdjan et l’Arménie qui n’ont pas reconnu la déclaration d’indépendance du Haut-Karabakh ont ouvert la voie a des affrontements, massacres et guerres qui allaient durer de nombreuses années en prétendant avoir des droits sur cette région. Le massacre de Khodjaly qui ne cesse de revenir sur le devant de la scène a également eu lieu durant ces années. Durant la guerre, l’Arménie a envahi le corridor qui servait de zone tampon entre le Haut-Karabakh et ses propres frontières. Durant cette guerre qui a eu lieu entre les années 1988 et 1993, un million d’Azéris ont été obligés de quitter les terres où ils vivaient. Le bilan de la guerre a été de 30 mille morts. Même si un cessez-le-feu a été déclaré en 1994, celui-ci a été violé de nombreuses fois, et maintes fois la guerre a été évitée de justesse. Aucune des alternatives bourgeoises existantes n’ont la capacité d’instaurer une paix durable. Car les propositions de solution tentent de savoir sous quelle hégémonie se retrouvera le Haut-Karabakh. L’État bourgeois d’Azerbaïdjan déclare que cette région qui était autonome sous l’URSS se trouvait alors au sein de ses frontières et explique que c’est à lui qu’il revient de droit. Pourtant, le peuple du Haut-Karabakh a, par deux fois, décidé de se séparer de l’Azerbaïdjan et a déclaré son indépendance suite à un référendum. Quant à l’État bourgeois d’Arménie, il déclare que le Haut-Karabakh lui appartient puisque la majorité de sa population est constituée par des Arméniens. Pourtant, même si la majorité de la population de la région est constituée d’Arméniens, d’autres peuples y existent, à commencer par les Azéris. L’État bourgeois d’Arménie a expulsé environ un million d’Azéris du Haut-Karabakh de leurs propres terres. Toutes les alternatives bourgeoises constituent un obstacle au droit à l’autodétermination des peuples du Caucase vivant dans le Haut-Karabakh. Lorsque cette question est mise sur la table, il existe une réalité que l’on essaye de faire oublier, de ranger sur les étagères poussiéreuses de l’histoire. Et cette réalité est que l’un des peuples les plus anciens du Haut-Karabakh est le peuple kurde. La première direction nationale des Kurdes au XXe siècle, à savoir le Kurdistan rouge de Lénine se trouvait dans le Haut-Karabakh où des combats ont lieu aujourd’hui. Tant que cette réalité historique n’est pas prise en compte, aucune solution durable à la question du Karabakh ne peut être apportée.

Une histoire oubliée : le Kurdistan rouge de Lénine

Une partie des terres qui connaissent des combats depuis des années entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan sont à la fois la cinquième partie du Kurdistan et la région où, pendant le XXe siècle, la première direction nationale kurde a existé. Dans la Russie tsariste que Lénine décrivait comme une prison pour les peuples, l’un des peuples opprimés était le peuple kurde. Suite à la victoire de la Révolution d’octobre, l’oppression nationale a pris fin et un processus d’émancipation a débuté. Et le peuple kurde aussi a participé, même si c’était pour une courte période, à ce processus. À l’Ouest du Haut-Karabakh et à la frontière Est de l’Arménie, s’est constitué le soviet autonome du Kurdistan rouge qui fut la première direction nationale des Kurdes au XXe siècle. Suite à la proposition du premier secrétaire du Parti communiste d’Azerbaïdjan Sergueï Kriov et à l’approbation de Lénine, le Kurdistan rouge a vu le jour en juillet 1923. Cette région a été constituée en tant que sous-soviet local des soviets autonomes du Haut-Karabakh. Sous la direction tsariste, les Kurdes avaient été victimes d’une politique d’assimilation forcenée. Leur langue et leur culture étaient en danger de disparition. Avec le Kurdistan rouge, il a été tenté d’effacer les dommages causés par l’assimilation grâce a des journaux, radios, écoles et activités artistiques en langue kurde. Selon le recensement de 1926, la population de la région s’élevait à 51 mille personnes. 72 % de cette population était kurde, 26 % était azéri et 0,07 % arménien. Mais la majorité utilisait la langue azérie à 92 %. Le Caucase qui abrite de nombreux groupes ethniques a été une région où les affrontements et les guerres ne manquaient pas durant le régime tsariste. Les courants nationalistes et réactionnaires bénéficiaient d’un long passé enraciné et d’une influence notable. Malgré la Révolution d’octobre, les équilibres nationalistes fragiles subsistaient. Afin de briser ces équilibres, le modèle des soviets transcaucasiens a été proposé. Mais, animé par des préjugés nationalistes, le parti communiste géorgien s’est vivement opposé à ce modèle. Pour cette raison, le projet transcaucasien s’est divisé en trois directions distinctes. Quant à la population du Haut-Karabakh, elle se composait d’Arméniens, d’Azéris et de Kurdes. Les soviets du Haut-Karabakh avaient été déclarés région autonome rattaché à l’Azerbaïdjan. L’idée dominante était qu’une direction kurde près des zones frontalières avec l’Arménie pouvait empêcher d’éventuelles tensions qui pourraient apparaître entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. À la suite de Lénine, lorsque la bureaucratie stalinienne a confisqué tout le pouvoir, le but d’une révolution mondiale a été abandonnée et une dictature bureaucratique bâtie sur des fondements nationalistes a été constituée. Cette caste bureaucratique avait entrepris de détruire les idéaux universels de la Révolution d’octobre et de liquider les militants bolcheviques qui s’y opposaient. La vague contre-révolutionnaire a également touché le Kurdistan rouge. En 1929, Staline a dissous sa direction et l’a rattaché au Haut-Karabakh. La direction bureaucratique stalinienne a exilé de nombreux Kurdes du Kurdistan rouge vers l’Asie centrale, en particulier au Kazakhstan du Sud. Ceux qui restaient ont été exilés en Azerbaïdjan et en Arménie. Après la liquidation du Kurdistan rouge, les Kurdes du Caucase ont été victimes, là où ils avaient été exilés, de politiques d’assimilation rappelant celles du régime tsariste. La raison fondamentale pour laquelle Staline avait liquidé le Kurdistan rouge et avait exilé les Kurdes est la préservation des relations diplomatiques avec la Turquie et l’Iran. L’existence du Kurdistan rouge portait en lui le potentiel de créer des agitations nationales et révolutionnaires entre les Kurdes de Turquie et d’Iran. Et cela pouvait dégrader les relations entre Staline et les États bourgeois de Turquie et d’Iran. Un seul but existait pour Staline, c’était la survie du pouvoir bureaucratique. La dissolution du Kurdistan rouge n’avait donc aucune importance pour lui. Cependant, malgré les exils d’après 1929, il existait toujours une population kurde dans la région du Kurdistan rouge. En 1992, lorsque l’Arménie a envahi le Haut-Karabakh, le Kurdistan rouge s’est retrouvé au milieu des affrontements. La destruction causée par la guerre a également touché les Kurdes. Suite à l’occupation du Haut-Karabakh par l’État arménien, tout comme les Azéris vivant dans la région, les Kurdes ont également été victimes d’exil forcé. Ceux qui ont sauvé leur peau de la guerre et ont été exilé en Azerbaïdjan vivent aujourd’hui sans aucun droit national, pris en étau entre des politiques racistes et assimilationnistes.

La guerre du Haut-Karabakh n’est pas une simple guerre frontalière ! Il s’agit du front caucasien du partage impérialiste

Les tensions et affrontements qui continuent depuis 30 ans entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie se sont transformées en guerre de fait avec les initiatives provocantes que le régime Erdoğan a organisé en juillet et avec les manœuvres militaires communs du mois d’août. Le gouvernement d’Erdoğan, mettant toute son énergie à pousser pour la guerre, se comporte comme s’il était l’interlocuteur du gouvernement arménien. Avec les provocations d’Erdoğan, la guerre entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie a rapidement échappé à tout contrôle et avance vers un partage impérialiste impliquant la Russie, la Turquie, les pays européens, les États-Unis et les autres pays de l’OTAN ; préparant ainsi, en tant que résultat inévitable de ce processus, le terrain pour la proche-orientalisation du Caucase. Les parties prenantes au partage impérialiste au Proche-Orient et en Méditerranée orientale se positionnent à nouveau à travers la guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. L’Europe et la Russie lancent des appels à un cessez-le-feu et à une résolution du conflit par la voie des négociations. L’Arménie est l’alliée historique de la Russie, voire son arrière-cour. La Russie a par le passé soutenu l’Arménie face à l’Azerbaïdjan. L’Iran a annoncé son soutien à l’Arménie. La Turquie est passée tout près d’une guerre de nombreuses fois contre la Russie en Syrie. Les avancées d’Erdoğan ont été, à chaque fois, perturbées par la Russie. En Libye également, les intérêts de la Russie et ceux de la Turquie s’opposent. La Russie mène en Libye une guerre contre les forces appuyées par la Turquie. La France soutient, quant à elle, la Grèce en Méditerranée orientale face à l’accord sur l’énergie. Toutes les avancées du régime d’Erdoğan qui tente de créer de la légitimité à ses buts impérialistes avec un discours de « zone sécurisée » en Syrie, de « patrie bleue » en Libye, d’une « souche commune » en Azerbaïdjan se trouvent perturbées par l’impérialisme russe. Il est inévitable qu’une fois de plus, l’appétit impérialiste d’Erdoğan dans le Caucase fasse face à la Russie. Avec la guerre de Syrie, la réalité suivante apparaît à nouveau clairement : aucune guerre locale ne se contente de le rester et se transforme en une guerre mondiale avec les interventions des forces impérialistes. La guerre du Haut-Karabakh aussi, bien au-delà d’une simple guerre frontalière entre deux pays, évolue vers la représentation du front caucasien du partage impérialiste.

La nature de la guerre

Selon l’expression de Lénine, la guerre est la poursuite de la politique par d’autres moyens (à savoir la violence). Les marxistes révolutionnaires s’opposent fermement aux guerres entre les peuples pour l’intérêt des États bourgeois, ce qui ne manque pas de créer de l’inimité entre ces peuples. Il existe des divergences notables entre l’attitude des marxistes révolutionnaires contre la guerre et celle des libéraux pacifistes. L’attitude des marxistes révolutionnaires opposés la guerre, à la différence des pacifistes libéraux qui expliquent que la guerre est une mauvaise chose et qui tentent de convaincre les parties belligérantes à signer la paix, est de livrer une guerre de classe contre l’ordre qui engendre la guerre. Car les marxistes révolutionnaires ont conscience qu’il existe un lien inséparable entre la guerre et la guerre entre les classes au sein d’un pays et que les guerres ne cesseront pas tant que l’ordre capitaliste qui engendre les guerres ne sera pas détruit et que le socialisme ne sera pas construit à sa place à l’échelle planétaire. C’est pourquoi, ils bâtissent la totalité de leur attitude opposée à la guerre en fonction de cette perspective. Les révolutionnaires marxistes ne considèrent pas la question en généralisant un raisonnement qui soutiendrait que toutes les guerres seraient injustes et mauvaises. Ils font une distinction entre les guerres justes et injustes. Les guerres de classe livrées contre l’ordre capitaliste qui engendre les guerres, les guerres révolutionnaires livrées pour détruire les États bourgeois sont des guerres justes. De même, celles qui sont menées par des peuples colonisés afin de gagner leur liberté nationale sont également justes et légitimes. Les guerres d’hégémonie impérialistes, celles qui sont livrées par deux États bourgeois pour leurs intérêts sont injustes et il faut les combattre sans merci. La guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est entièrement injuste. Il s’agit avant tout de savoir sous quelle hégémonie se trouvera le Haut-Karabakh. L’Azerbaïdjan déclare que le Haut-Karabakh qui était autonome sous l’URSS tout en étant dépendant de la direction des soviets d’Azerbaïdjan lui appartient et livre une guerre afin de s’en emparer avec le soutien de la Turquie. Le peuple du Haut-Karabakh a décidé en 1988 de se séparer de l’Azerbaïdjan et de se rattacher à l’Arménie. Cette décision n’a été respectée ni par l’Azerbaïdjan, ni par l’URSS qui est intervenue militairement pour d’abord rattacher le Haut-Karabakh à son autorité, puis le restituer à l’Azerbaïdjan. Lorsque l’URSS s’est effondrée, tous les pays rattachés à cette union ont déclaré leur indépendance suite à de référendums. Le Haut-Karabakh aussi a déclaré son indépendance suite au référendum de 1991 mais cela n’a été reconnu par aucun pays. Le peuple de cette région a décidé, par référendum, de devenir un pays indépendant. Les premiers à s’opposer à cette décision furent l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Le Haut-Karabakh n’est pas une terre azérie. Sous l’URSS, il était une région autonome dépendant du gouvernement de l’Azerbaïdjan. Le peuple du Haut-Karabakh a déclaré, comme les anciens pays de l’URSS, son indépendance. L’Arménie et l’Azerbaïdjan ont déclaré la guerre à cette déclaration d’indépendance. À la suite de la guerre qui a duré jusqu’en 1994 pour savoir sous quelle hégémonie se trouverait le Haut-Karabakh, la région est passée de facto sous hégémonie arménienne. L’Arménie a forcé la population azérie et kurde du Haut-Karabakh à l’exil. Elle a établi sa propre hégémonie sur la région et a constitué sa zone tampon. Aujourd’hui, l’Arménie est l’occupant, mais contrairement à ce qui est avancé, elle n’occupe pas les terres de l’Azerbaïdjan mais celles du Haut-Karabakh et du Kurdistan rouge. Si le Haut-Karabakh reste sous le contrôle de l’État bourgeois arménien, cela signifiera que les guerres et les affrontements perdureront. Cela signifiera que les Azéris exilés du Haut-Karabakh ne pourront jamais revenir chez eux, que les Kurdes exilés seront obligés de vivre en Azerbaïdjan sous une politique d’assimilation et d’oppression nationale. Cela signifiera que les peuples du Haut-Karabakh ne pourront déterminer leur avenir. Si le Haut-Karabakh passe sous contrôle de l’État bourgeois d’Azerbaïdjan, cela signifiera qu’un nouveau génocide arménien aura lieu dans la région par le régime d’Erdoğan et par les groupes djihadistes qu’il pousse sur le terrain lors des guerres de partage impérialistes. Cela signifiera la construction d’une nouvelle base militaire contre l’Arménie dans le Haut-Karabakh et le pillage complet de la région. Et cela voudra dire qu’il y aura des guerres de religion sectaires sans fin comme au Proche-Orient. Toutes les parties prenantes de cette guerre sont réactionnaires. Elles préparent le terrain pour de nouvelles guerres, de nouvelles destructions, de nouvelles inimitiés entre les peuples, la pauvreté, l’exploitation et la misère.

Les parties prenantes dans cette guerre et leurs attitudes

L’Azerbaïdjan. L’Azerbaïdjan tente, avec le soutien sans limite de la Turquie, d’obtenir la revanche de 1991 et d’agrandir ses espaces d’hégémonie. En ne tenant pas compte du statut du peuple du Haut-Karabakh, il tente, avec le soutien militaire et logistique du régime d’Erdoğan et de ses bandes djihadistes, de piller la région. Ce faisant, il essaye également d’assiéger l’Arménie qui est sous l’étau d’un embargo et de le soumettre. Il annule complètement les droits et libertés qui étaient déjà très limités en renforçant la vague ultranationaliste et l’oppression de l’État autoritaire. Le parlement d’Azerbaïdjan a voté un paquet de mesures limitant les droits et libertés constitutionnels et de propriété des citoyens d’Azerbaïdjan et des étrangers résidents tant que l’état de guerre perdurera. Avant la guerre, il était déjà question dans le pays d’augmentation de la pauvreté et d’oppression de l’État. Les opposants à Aliyev se renforçaient de jour en jour. Avec la vague nationaliste créée par cette guerre, l’opposition est muselée, l’oppression de l’État atteint des sommets et Aliyev est présenté comme un héros national. En 2019, les dépenses militaires de l’Azerbaïdjan ont atteint des sommets et ont battu leur propre record avec l’équivalent de 5 % du PIB. Ces investissements de guerre reviennent à la population laborieuse sous forme de chômage, de pauvreté et de misère. L’État bourgeois d’Azerbaïdjan tire toute sa force du régime d’Erdoğan qui se comporte comme l’interlocuteur de l’Arménie et fait des déclarations à la place du gouvernement d’Azerbaïdjan. Celui qui a fait entrer en guerre ce dernier n’est autre que le régime d’Erdoğan. Si celui-ci retirait son soutien ou faisait ne serait-ce qu’un pas de recul, cela ne manquerait pas de briser les ailes du gouvernement d’Azerbaïdjan. Pourtant, la région où a lieu cette guerre est l’arrière-cour de l’impérialisme russe. Erdoğan qui a tenté de nombreuses fois de se mesurer à l’impérialisme russe a, à chaque fois, connu de grandes frustrations. Si cela devait se reproduire, il est fort probable que le régime d’Erdoğan abandonne à mi-chemin le gouvernement d’Azerbaïdjan. L’attitude qu’adoptera Erdoğan face à l’impérialisme russe déterminera le destin de l’État bourgeois d’Azerbaïdjan.

L’Arménie. L’Arménie a assuré son hégémonie sur le Haut-Karabakh avec le soutien de la Russie lorsque la guerre a éclaté suite à la dislocation de l’URSS. Elle continue de l’assurer depuis plus de 30 ans, toujours avec le soutien de la Russie. Depuis 1993, la Turquie et l’Azerbaïdjan imposent un embargo à l’Arménie en mettant en avant la question du Haut-Karabakh. Comme ses frontières avec l’Azerbaïdjan sont fermées, l’Arménie se trouve assiégée. Cette dernière n’a aucune voie d’accès vers l’Ouest en raison de la fermeture de ses frontières avec la Turquie. Elle s’ouvre au monde en passant par la Russie. Cela la rend encore plus dépendante de la Russie. L’Arménie est l’un des pays de la Communauté des États Indépendants où la Russie est la plus influente. Il existe de nombreuses bases militaires russes sur son territoire. L’Arménie n’a pas la force de résister seule à la Turquie et à l’Azerbaïdjan. Elle tente d’obtenir un soutien diplomatique et logistique de la part des pays européens dont les relations avec la Turquie et l’Iran sont dégradées. Avec ces soutiens, elle tente de se créer de la légitimité dans l’arène internationale et briser l’isolement dans lequel elle se trouve. Les États-Unis, la France et la Russie ont lancé des appels communs au cessez-le-feu. Quant à Erdoğan, il a répondu que pour qu’il y ait un cessez-le-feu il fallait que l’armée arménienne se retire. Macron qui était à Bruxelles pour un sommet des dirigeants européens a déclaré qu’il « possédait des preuves très nettes selon lesquelles des djihadistes syriens étaient partis de Gaziantep [Sud-est de la Turquie] pour rallier le Haut-Karabakh ». L’Arménie, afin de maintenir son hégémonie sur le Haut-Karabakh, prépare le terrain pour que se forme le front caucasien du partage impérialiste en tentant d’impliquer toutes les puissances impérialistes et régionales dans le conflit. Elle souffle sur les braises de l’inimitié entre les travailleurs arméniens et azéris et travaille de toutes ses forces pour laisser le Haut-Karabakh sans statut.

Contre le chauvinisme, redressons le drapeau du communisme international

Toutes les parties prenantes de cette guerre sont réactionnaires, guerre qui a pour but de déterminer qui aura le droit de coloniser le Haut-Karabakh. Quel que soit le vainqueur de ce conflit, il ne pourra non seulement pas apporter une paix durable, mais étendra la guerre à tous le Caucase. Quel que soit le vainqueur, il entreprendra un génocide et l’exil des habitants du Haut-Karabakh qui ne seront pas de sa nation. Dans cette guerre, soutenir un État bourgeois ou un autre ou bien se contenter d’une opposition pacifiste à la guerre reviendra à porter de l’eau au moulin du chauvinisme et à devenir complice des crimes de guerre. La tâche historique des révolutionnaires de Turquie, d’Azerbaïdjan et d’Arménie est de militer pour le défaitisme révolutionnaire contre leur État bourgeois. C’est de répondre avec le drapeau rouge du communisme internationaliste au chauvinisme qui fait s’entre-tuer les peuples. C’est d’entrer dans une guerre de classe internationale contre l’ordre du capital qui engendre la guerre. Erdoğan qui a soufflé sur les braises du conflit, qui s’est posé en protecteur du gouvernement azéri, qui a envoyé les bandes djihadistes de Syrie au Haut-Karabakh est le principal instigateur de la guerre. Défendre le droit à l’autodétermination du peuple du Haut-Karabakh, faire front contre les États bourgeois qui sont parties prenantes dans cette guerre, mener une lutte sans merci contre le chauvinisme, livrer une lutte militante contre la pression de l’État créée par la guerre et contre les destructions sociales dont le peuple travailleur est victime sont les tâches historiques des révolutionnaires de Turquie, d’Arménie et d’Azerbaïdjan. La paix ne sera possible que si l’ordre impérialiste-capitaliste qui se nourrit des crises, de l’exploitation, de la pauvreté, de la guerre et des destructions est renversé et un ordre socialiste est bâti pour le remplacer. Et pour cela, l’humanité a besoin d’un parti révolutionnaire international comme elle a besoin d’air et d’eau.

  • Non à la guerre entre les peuples et à la paix entre les classes !
  • Toutes les puissances occupantes, hors du Haut-Karabakh !
  • Droit à l’autodétermination du peuple du Haut-Karabakh !
  • Droit au retour à tous les peuples qui ont été exilés du Haut-Karabakh !
  • La raison de la guerre est l’ordre capitaliste !
  • Ton principal ennemi est ton propre État bourgeois. Retourne ta colère et tes armes contre celui-ci !
  • Reconnaissance du génocide arménien de 1915 !
  • Jugement devant des tribunaux internationaux de guerre des responsables du pogrom anti-arménien de Soumgaït et du massacre de Khodjaly !
  • Vive les soviets du Haut-Karabakh !
  • Vive les soviets du Caucase !

4 octobre 2020

Patronsuz Dünya