Fermeture de l’usine General Motors à Oshawa au Canada : une attaque contre la classe ouvrière

À la fin du mois de novembre 2018, le géant américain de l’automobile General Motors a annoncé la fermeture de son usine située à Oshawa dans la province de l’Ontario au Canada. Plus de 2 600 travailleur-euses sont concerné-es par cette annonce dramatique qui est prévue pour décembre 2019. Quatre autres usines seront également touchées aux États-Unis, dont celle de Détroit, une ancienne citadelle du mouvement ouvrier aujourd’hui exsangue. Il y aurait 12 000 pertes d’emplois au total dans les secteurs de la production et de l’administration. GM invoque une volonté de restructuration de ses activités en se concentrant sur la fabrication de voitures autonomes et électriques alors que l’usine d’Oshawa fabrique des berlines.

Au mois de mai, GM a annoncé que 300 emplois (sur 2 600, sans compter ceux des fournisseurs comme Syncreon, Ceva Logistics…) seraient conservés à l’usine d’Oshawa (Radio-Canada, 8 mai 2019). Mais ceci n’a pas miné la détermination des travailleur-euses à se battre pour tenter de sauver tous leurs emplois et tous leurs acquis sociaux.

GM a longtemps été le premier groupe automobile du monde. Un des signes du déclin des États-Unis comme puissance hégémonique est que GM est supplanté aujourd’hui par les groupes Toyota (qui produit au Canada), Volkswagen et Daimler (qui n’ont que des activités commerciales au Canada).

En 2002, GM avait fermé son usine située à Boisbriand au nord de Montréal, après avoir reçu 15 ans plus tôt un prêt de 220 millions sans intérêts de la part des gouvernements canadien et québécois. Ce prêt a été remboursé en 2017 par la multinationale (Le Devoir, 5 avril 2017). Entretemps, GM a reçu l’aide de l’État américain en 2008-2009 (39,5 milliards de dollars américains) mais aussi de l’État canadien.

Le déclin de l’industrie automobile en 2008-2010 conduit le gouvernement fédéral et le gouvernement de l’Ontario à apporter des milliards de dollars pour soutenir GM et Chrysler; toutefois, lorsque ces entreprises réussissent à émerger du marasme dans lequel elles se trouvaient, le volume de leur activité au Canada s’est considérablement réduit. (L’Encyclopédie canadienne, 7 octobre 2017)

La stratégie des syndicats qui représentent les travailleur-euses de l’automobile en Amérique du Nord, United Automobile Workers (UAW) aux États-Unis et TCA-Union for Canada (Unifor) au Canada, mène tout droit à une défaite majeure pour la classe ouvrière.

La bureaucratie de l’UAW qui, au moment de l’apogée de l’impérialisme américain (et de l’apogée de GM dans l’industrie automobile mondiale), justifiait sa corruption en obtenant des augmentations de salaire et d’autres avantages. Actuellement, elle ne sert qu’à négocier des reculs.

Avec la crise économique de 2008-2009, la politique des différents niveaux de salaires et d’avantages par entreprise s’est étendue à GM, Chrysler et Ford. Dans le cas du renflouement de GM et de Chrysler par le gouvernement fédéral, les dirigeants de l’UAW ont accepté les demandes du gouvernement à plus de sacrifices pour les travailleurs au motif que c’étaient les contribuables qui “sauvaient” l’entreprise. C’est ainsi que l’acceptation par l’UAW des différents niveaux de salaires a été négociée afin de sauver des emplois. Et bien sûr, Ford qui, pourtant n’avait pas fait faillite, a réclamé qu’il avait aussi besoin de ces concessions. Le Président de l’UAW Gary Jones a indiqué que les négociations contractuelles de 2019 étaient sur le point de commencer et il a laissé entendre que l’UAW était prête à faire des concessions pour que GM revienne sur sa décision de fermeture de plusieurs usines. (Dianne Feeley, « Aux États Unis les travailleurs de l’automobile face aux offensives patronales », NPA Auto Critique, 6 août 2019)

En plus, la direction de l’UAW refuse toute unité d’action avec Unifor. Si celui-ci organise des manifestations contre les licenciements collectifs, son appareil ne se situe pas sur un terrain très différent, sauf que son social-chauvinisme est canadien au lieu d’être étatsunien. En janvier, le président d’Unifor, Jerry Dias, a demandé aux consommateurs de boycotter les véhicules construits au Mexique, ce qui est une diversion réactionnaire par rapport aux décision des capitalistes de GM.

Sur le site web d’Unifor, il y a depuis juin une campagne pour promouvoir l’achat canadien.

En réponse à l’escalade d’une guerre commerciale avec les États-Unis, Unifor, le plus grand syndicat du secteur privé au Canada, a lancé la campagne « J’achète canadien » pour offrir une plateforme afin de partager des informations sur les produits qui soutiennent la fabrication locale et les emplois indirects qui y sont associés. (Unifor, 29 juin 2019)
La bureaucratie de l’Unifor fait donc la promotion du nationalisme canadien réactionnaire au détriment de la lutte des classes. La solidarité nationale entre le classes (contre la solidarité internationale entre exploités) aboutit toujours à des concessions des salariés pour assurer la rentabilité du capital qui, en l’occurrence, n’est même pas canadien.

Lors des négociations avec la direction de GM, les responsables syndicaux de l’Unifor tentent de convaincre leurs maîtres qu’ils se trompent sur la gestion.

La société a déclaré que les options suggérées par le syndicat, notamment la prolongation de la durée de vie des véhicules Chevrolet Impala et Cadillac XTS produits à l’usine ou le transfert de la production prévue pour le Mexique vers l’usine, ne sont pas économiques. David Paterson, vice-président des affaires générales chez GM Canada, a déclaré que le syndicat devrait plutôt collaborer avec l’entreprise sur des plans de transition pour les quelque 3 000 emplois touchés. (Presse Canada, 9 janvier 2019)

C’est une recette idéale pour une autre défaite ouvrière face à l’offensive patronale pour les restructurations et la destruction des acquis sociaux.

Pour gagner, il faut s’orienter vers des assemblées communes Unifor-UAW contre tout licenciement, vers la grève générale de tous les travailleurs canadiens de GM et de ses équipementiers avec ceux des États-Unis et de tous les pays, vers des organismes de lutte désignés par les assemblées communes. Cela posera le problème de l’expropriation de GM et des autres grands groupes capitalistes, de la réorganisation de l’économie pour supprimer le chômage et l’orienter vers la satisfaction des besoins, ce qui remettra en cause les frontières du Canada, des États-Unis et du Mexique.

Il ne s’agit pas de rejeter les syndicats, ce qui revient à laisser les mains libres aux agents de la bourgeoisie qui en ont pris le contrôle, mais il faut y combattre la politique erronée et traîtresse de leur bureaucratie corrompue qui conduit les luttes ouvrières à l’impasse et la défaite. La nécessité d’un parti ouvrier révolutionnaire et internationaliste basé sur l’exemple du Parti bolchevik dirigé par Lénine et Trotsky lors de la Révolution russe de 1917 est plus criante que jamais et c’est le but du Collectif révolution permanente (CoReP).