Depuis le 1er août dernier, plus personne n’a de nouvelles de Santiago Maldonado, artisan de 28 ans, et militant acquis à la cause des indigènes Mapuches. Plusieurs manifestants de cette communauté en résistance avaient érigé un barrage à Cushamen dans la province de Chubut, en Patagonie, pour protester contre la détention illégale de leur dirigeant, Facundo Jones Huala. Pour les chasser, une centaine de gendarmes, opérant sous le commandement direct de la ministre de la Sécurité nationale, Patricia Bullrich (ex-Montoneros, aujourd’hui du parti bourgeois PRO), ont chargé violemment leur campement au petit matin, interpellant Maldonado et l’embarquant dans une de leurs camionnettes. Plusieurs indices attestent depuis, de sa disparition, comme ses effets personnels retrouvés sur les lieux de son interpellation.
Concernant les communautés indigènes Mapuches, l’acharnement de l’État bourgeois contemporain se situe dans la lignée du génocide de la « Campagne du Désert » (entre 1878 et 1881). Il n’a cessé de réprimer leurs luttes pour défendre leurs droits à occuper leurs terres originelles. Chez les Mapuches, la propriété collective des terres subsiste. Leur combat contre Benetton, la multinationale du pull, en est un exemple. Ils revendiquent la restitution des 500 hectares que la firme s’est octroyée avec l’aval des autorités du pays, comme cela a été confirmé par une décision de justice de 2004.
Cette parcelle n’est qu’une goutte d’eau comparée aux 340 000 hectares que possède la firme italienne dans cette région de Patagonie, et aux 900 000 autres dans le reste du pays, en en faisant le premier propriétaire foncier. Ces immenses domaines, lui permettent d’élever plus de 250 000 moutons (et 16 000 vaches) comblant 10 % de ses besoins en laine. Il projette d’y planter des milliers de pins à bois lourd, sans égard pour l’écosystème local.
Les méthodes brutales de l’État qui s’abattent sur ces communautés indigènes et sur leurs défenseurs, garantissent les intérêts des capitalistes, nationaux ou étrangers. Pour en donner l’ampleur, selon l’ONG Oxfam, le nombre de meurtres et d’actes de répression visant les défenseurs des droits de l’homme a atteint un niveau historique : rien qu’en 2015, 122 d’entre eux ont été tués en Amérique latine, soit les 2/3 des crimes de ce type commis dans le monde.
La disparition fait grand bruit en Argentine. Si le gouvernement du PRO a offert hypocritement une récompense de 500 000 pesos (24 000 euros), pour tout renseignement sur le sort du manifestant, le président, Mauricio Macri, soutient sa ministre, qui nie toute implication des forces de l’ordre qui sont sous sa responsabilité.
Pourtant, leur implication ne peut faire aucun doute. De nombreux témoignages sur place ont vu les gendarmes nettoyant soigneusement leurs véhicules, les jours suivants. Et que dire de leur présence dans l’estancia de la famille Benetton, la veille de l’enlèvement, en compagnie du chef de cabinet de la ministre de la Sécurité et de Pablo Noceti (avocat d’anciens militaires tortionnaires) ? Pour un gouvernement qui conteste aujourd’hui encore le chiffre de 30 000 victimes disparues sous l’ère Vidella, et n’en admet que 9 000, son peu d’empressement à établir la vérité n’est pas étonnant. Les assassinats et les « disparitions forcées » depuis la fin de la dictature n’ont pas totalement cessé : Julio Lopez, ancien détenu par la dictature militaire, enlevé de nouveau en 2006.
Depuis l’arrivée de Macri (capitaliste lui-même) à la présidence du pays en 2015, la bourgeoisie a de plus en plus de mal à cacher sa vraie nature sous le voile de la démocratie. Sa frange la plus réactionnaire ressort ses vieilles recettes immondes contre les classes opprimées.
Manifestation 1er septembre à Buenos Aires contre la disparition de Santiago Maldonado
Portrait du militant disparu tenu par un manifestant
Affiche « Où es-tu Santiago Maldonado »
Communauté Mapuche en résistance contre l’occupation de leurs terres
Manifestation Mapuche pour retrouver Santiago Maldonado
Carte des territoires d’origine du peuple Mapuche
Manifestant Mapuche arrêté par la police anti-émeutes