Ne pas entendre la révolution, ne pas voir la révolution, ne pas faire la révolution
En défense de la révolution permanente en Syrie
Deux représentants du CLC étaient présents à la 3e conférence du CoReP à Paris 25-27 mars 2016.
Importants accords politiques entre nos organisations, en particulier sur le développement de l’impérialisme russe et chinois.
Deux différences politiques majeures :
- Caractérisation de l’islamisme clérical réactionnaire comme un islamo-fascisme
- Révolution syrienne que le CLC considère toujours vivante et que le CoReP considère détruite. = La question la + sérieuse
3e différence apparue pendant la conférence (espoir qu’elle ne constitue pas un problème méthodologique) : le CoReP estime que le capitalisme mondial s’est stabilisé depuis la crise de 2008, à part dans quelques pays.
Vendredi 25 : Rencontre internationale informelle de trois heures avec les membres du bureau international du CoReP
Samedi 26 : Réponse à la position du CoReP sur la Syrie pendant la discussion internationale à la conférence.
La CLC veut secouer le CoReP : nous sommes venus
- en raison de notre accord sur l’impérialisme russe-chinois
- parce que le CoReP ne soutient pas la position russophile ou robertsoniste que la Chine est toujours un État ouvrier déformé
Espoir d’un accord méthodologique avec l’analyse du CoReP sur la Libye et leu polémique avec Downing.
– La non-reconnaissance par le CoReP de la révolution en Syrie fut un énorme choc.
Il serait malhonnête de former une internationale dont la ligne officielle nierait l’existence d’une révolution syrienne.
Une tendance révolutionnaire qui ne reconnaît pas une révolution en cours est en faillite.
La révolution syrienne combat quatre fronts : Assad, l’impérialisme, les diverses milices, et la gauche impérialiste (dans laquelle s’inscrit le CoReP).
Existence d’une résistance armée et d’une auto-organisation populaire à Alep (commune d’Alep toujours vivante).
Le CoReP a demandé au CLC, pour pouvoir poursuivre la discussion, de renoncer à son affirmation que sa position sur la Syrie le place dans la catégorie de la « gauche impérialiste », qu’il a qualifié d’accusation de « social-impérialisme ». La discussion politique a dégénéré en un « nous pensons, alors que vous pensez… montrez-nous la preuve ». Le CLC pense qu’il est difficile de discuter avec une organisation qui vante les médias bourgeois, tout en niant les sources indépendantes et légitimes sur la révolution syrienne.
Il existe des différences dans le CoReP, puisqu’un camarade avait une position plus proche de la notre => l’existence d’une telle position dans ses rangs devrait faire réfléchir la direction du CoReP. Nier la révolution syrienne est une expression concrète du social-impérialisme. Avoir une position fausse sur la Syrie n’est pas conjoncturel ou tactique, c’est méthodologiquement empiriste. Dire que la Révolution permanente est « confirmée par la négative » revient à nier la Révolution permanente.
Pour le CLC la révolution syrienne est palpable, elle est l’avant-garde de la Révolution permanente au Moyen-Orient et en Afrique du nord, un soulèvement populaire armé. Si le CoReP constate la même chose et maintient que la Révolution permanente en Syrie est morte, alors elle est également morte au Moyen-Orient et en Afrique du nord, nous concluons que le CoReP est une couverture social impérialiste ultra-gauche pour l’impérialisme car ils exigent qu’une révolution satisfasse un test de vérification une révolution n’en est pas une que si elle n’est pas immédiatement une révolution socialiste. Si c’est le cas, ce n’est que l’envers ultra-gauche de la position stalinienne centriste de droite selon laquelle une révolution doit démarrer comme révolution démocratique bourgeoise à une étape historiquement séparée. Quand le CoReP parle de stabilisation économique du système capitaliste, on peut se demander s’ils signifient stabilisation politique.
Historiquement les organisations qui ne défendent pas les gains des travailleurs finissent par capituler face à « leur » classe dominante. Le renoncement par Shachtmann à défendre l’État ouvrier soviétique l’a inexorablement conduit à un socialisme de département d’État.
Si la poursuite des discussions nous rapproche, alors nous l’aurons. Le CLC est d’accord avec une grande partie du projet programmatique du CoReP.
La révolution syrienne
La Révolution en Syrie est dans un processus avancé. Elle est liée par des milliers de connexions à la révolution nationale arabe inachevée dont elle est le dernier développement conjoncturel. Les révolutionnaires syriens doivent défendre la révolution contre la « gauche impérialiste » tout autant que contre la « gauche » occidentale qui soit se positionne directement avec la contre-révolution soit ne reconnaît simplement pas la révolution, ce qui revient au même.
Dans sa réponse au CLC, le CoReP critique ceux qui défendent la révolution syrienne comme des opportunistes engagés dans la collaboration de classe.
Ainsi le CoReP n’avance pas le soutien militaire aux milices voisines, aux combattants locaux ou aux éléments démocratiques qui s’opposent au régime en Syrie. Or, s’il n’existe pas de parti révolutionnaire en Syrie, s’il n’existe pas de conseils ouvriers, les travailleurs se sont bien unis sur des lignes de classe, comme les soviets. Les Comités de coordination locaux sont plus que des petits-bourgeois intellectuels, la conscience de classe peut changer rapidement.
Soutien militaire contre soutien politique
Le soutien politique est la position que l’établissement d’un gouvernement pro-impérialiste ou islamiste serait une première étape dans la lutte révolutionnaire. À l’inverse le soutien militaire correspond à une tentative de coordination militaire entre les forces luttant contre l’armée syrienne, sans cesser une lutte politique contre les directions, le but étant la prise du pouvoir par la classe ouvrière
Diverses forces de classe dans la Révolution nationale, ou Comment prennent forme les révolutions réelles ?
Lénine à propos de l’insurrection irlandaise en 1916 : « Croire que la révolution sociale soit concevable sans insurrections des petites nations dans les colonies et en Europe, sans explosions révolutionnaires d’une partie de la petite bourgeoisie avec tous ses préjugés, sans mouvement des masses prolétariennes et semi-prolétariennes politiquement inconscientes contre le joug seigneurial, clérical, monarchique, national, etc., c’est répudier la révolution sociale. C’est s’imaginer qu’une armée prendra position en un lieu donné et dira « Nous sommes pour le socialisme », et qu’une autre, en un autre lieu, dira « Nous sommes pour l’impérialisme », et que ce sera alors la révolution sociale ! C’est seulement en procédant de ce point de vue pédantesque et ridicule qu’on pouvait qualifier injurieusement de « putsch » l’insurrection irlandaise. Quiconque attend une révolution sociale « pure » ne vivra jamais assez longtemps pour la voir. Il n’est qu’un révolutionnaire en paroles qui ne comprend rien à ce qu’est une véritable révolution. »
La révolution irlandaise montre que la révolution n’est pas linéaire.
Nos camarades de Nouvelle-Zélande ont écrit : la majorité de la gauche occidentale nie l’existence d’une guerre civile… Aujourd’hui les crypto-staliniens disent qu’il n’y a pas d’insurrection populaire en Syrie… pour eux seule Russie est capable de vaincre ISIS… D’autres soutiennent les négociations… La troisième alternative est le soutien au soulèvement populaire contre Assad.
Nos opposants : le non-internationalisme rejetant la dialectique
Pour l’IBT et le Groupe internationaliste de Norden il n’existe pas de processus en Syrie. Ils ont une théorie campiste et pas dialectique = méthode robertsoniste apprise chez Shachtmann.
Le CoReP affirme-t-il qu’il existe une branche de la bourgeoisie dotée de la force militaire pour lutter contre Assad pendant cinq ans sans qu’il existe une lutte de la classe ouvrière et des masses opprimées ? Une telle conclusion défie le fondement de la théorie de la Révolution permanente de Trosky.
En défense de la révolution syrienne
2011 la révolution a émergé au Moyen-Orient et en Afrique du nord sur de larges revendications qui unissent les masses. Les masses sont face à une révolution démocratique inachevée et soulèvent les revendications minimales et démocratiques sans l’expérience pour les satisfaire = crise de direction. La classe ouvrière n’est pas préparée, faute des outils et de l’expérience pour affronter les forces capitalistes.
Pour soutenir son pouvoir, Assad dépend d’un bloc impérialiste. La révolution anti-impérialiste des masses s’exprime dans les soulèvements contre Assad. Elles sont coincées entre deux blocs impérialistes. Leurs aspirations et actions révolutionnaires en 2011 étaient objectivement anti-impérialistes.
D’un côté des islamistes réactionnaires avec propagande anti-impérialiste ; de l’autre des secteurs de la bourgeoise « démocratique » compradore (Armée syrienne libre, Conseil national syrien), lié au bloc impérialiste occidental.
L’argument que la révolution a été vaincue en 2012 ignore à la fois la dynamique internationale de la Syrie et la fluidité de la fabrication historique des États et frontières par l’impérialisme en 1919.
Il existe de 400 à 700 comités locaux de coordination, qui sont à la fois fluides et hétérogènes. Ils sont l’expression vivante de la révolution démocratique ; ils sont l’expression démocratique des masses dans leur tentative de satisfaire leurs besoins élémentaires et de s’opposer à la dictature.
Sur la méthode marxiste
La méthode marxiste est toujours concrète. Lorsque la direction du CoReP nie la révolution en utilisant une comparaison avec les événements révolutionnaires de 1936-1937 en Espagne, nous répondons que la révolution prend du temps pour se développer. En 1932, Trotsky parlait d’un retrait partiel de la révolution, qualifiait de traîtres ceux qui parlaient de liquidation de la révolution.