Le chemin de la révolution prolétarienne, la voie vers le socialisme se trouvent partout encombrés par la politique opportuniste et traitresse des IIe et IIIe Internationales, qui conduisent le prolétariat de défaite en défaite, et par le manque d’une véritable direction révolutionnaire liée aux masses. C’est là la cause profonde du fait que les énormes possibilités révolutionnaires de ces dernières années sont restées inutilisées tandis que l’énergie révolutionnaire des masses était dépensée en vain. Les défaites démoralisantes de ces dernières années ont, d’autre part, conduit à ce qu’aujourd’hui des parties de la jeunesse prolétarienne perdent la foi dans la révolution, s’éloignent et se tiennent à l’écart de leur propre classe ou, même, fournissent du matériel à l’ennemi mortel du prolétariat, le fascisme, pour la formation de ses troupes de choc.
La politique de l’Internationale des jeunesses socialistes (ISJ) n’est pas moins fatale que celle de la IIe Internationale, dont elle forme la section de jeunes. La bureaucratie de l’ISJ continue à prêcher la confiance dans la Société des nations (capitalistes), dont le rôle misérable est, aujourd’hui, manifeste même pour les petits-bourgeois arriérés. L’ISJ n’a pas honte de réclamer de cette SdN prostituée l’organisation d’une paix impossible en régime capitaliste ni de préconiser le mot d’ordre trompeur du désarmement alors que les armements de tous les pays, même là où les représentants de la IIe Internationale participent ou dirigent le gouvernement, croissent à un rythme fébrile. La bureaucratie de l’ISJ réclame de la classe ouvrière l’abandon de l’emploi de la violence dans la lutte des classes (et l’abandon de la lutte des classes en général) à un moment où, partout, la bourgeoisie organise et lance les bandes terroristes fascistes contre le mouvement ouvrier.
Dans ces conditions, un rôle extrêmement funeste est joué par ces dirigeants de « gauche » de l’ISJ (Godefroid, Chochoy, etc.), qui, aujourd’hui, sous la pression du puissant mouvement des masses dans les pays d’Europe occidentale, adoptent une phraséologie révolutionnaire, mais, en réalité, soutiennent absolument, en ne la démasquant point, la politique contre-révolutionnaire des partis réformistes de leur pays. En paroles, ces dirigeants de « gauche » de l’Internationale des jeunesses socialistes sont pour « la révolution », « l’insurrection armée », « la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile », etc. Mais, en même temps, par leur politique quotidienne, ils poussent ou appellent les jeunes prolétaires à mettre leur confiance dans les ministres socialistes qui, comme Vandervelde, utilisent les gaz lacrymogènes contre les ouvriers en grève ou, comme Léon Blum, utilisent l’appareil policier bourgeois de répression pour poursuivre les révolutionnaires prolétariens. Que dans la différence entre les dirigeants de « droite » et de « gauche » de l’ISJ, il n’y ait point une opposition inconciliable, mais des escarmouches entre opportunistes de différentes nuances nationales, cela apparaît dans le plan niais (aujourd’hui d’ailleurs quasi abandonné !) de Godefroid et compagnie de diviser l’ISJ en un secteur « politique » et un secteur « culturel », c’est-à-dire de trancher les divergences d’une manière purement bureaucratique et administrative. Pour la jeunesse ouvrière, il ne s’agit pas de distinguer « travail politique » et « action culturelle », mais de l’opposition irréductible entre la politique de trahison sociale et celle de la révolution sociale. Telle est la seule façon de poser et de résoudre la question et elle exclut tout compromis. Mais à cela, les Godefroid et Chochoy ne peuvent consentir, car ils ne veulent à aucun prix rompre avec les sociaux-patriotes, les sociaux-traîtres, les Vandervelde et De Man, les Blum et Salengro. La tâche des jeunes révolutionnaires prolétariens est de démontrer le véritable rôle des dirigeants de « gauche » de l’ISJ, qui usent de formules à allure révolutionnaire, mais en dernière instance couvrent de leur autorité « révolutionnaire » le social-patriotisme des Blum et Vandervelde, la politique contre-révolutionnaire de la IIe Internationale.
Sans aucun doute, aujourd’hui, parmi les générations montantes, l’influence la plus funeste et la plus démoralisante est-elle exercée par l’Internationale communiste des jeunes (ICJ) dont l’opportunisme a atteint un tel degré qu’il permet même à l’aile gauche de l’ISJ de se réclamer impunément de Lénine et de Luxemburg. La bureaucratie stalinienne est arrivée aujourd’hui à tuer définitivement l’esprit et l’enthousiasme révolutionnaires qui animaient l’ICJ dans ses premières années. Le dernier congrès mondial de l’ICJ qui eut lieu au moment du 7e congrès de l’IC (août 1935), assigna à toutes ses sections la tâche de se « dépolitiser » et de créer de larges organisations de jeunes se tenant au-dessus des partis, au-dessus des classes. L’ICJ reçut la mission de réconcilier la jeunesse prolétarienne des pays liés en politique extérieure à l’Union soviétique (et des pays dont la politique extérieure est dirigée, de quelque manière que ce soit, contre le Japon et l’Allemagne) avec la jeunesse bourgeoise du pays correspondant et d’assurer, ainsi, l’union sacrée dans la guerre à venir. En France, ou, en ce moment, sur la base de l’exacerbation extraordinaire des oppositions de classes tous les processus politiques apparaissent de la façon la plus claire, l’ICJ pousse l’ignominie jusqu’à tendre la main aux organisations fascistes et à dénoncer la guerre civile comme le pire de tous les maux. La trahison stalinienne trouve son point culminant dans l’organisation du Mouvement mondial de la jeunesse pour la paix, la liberté et le progrès. Ici, les staliniens s’unissent avec des associations de jeunesse nationalistes et religieuses pour tenir des congrès de parade « pour la paix » (Bruxelles, Genève), sous la protection de prêtres réactionnaires et de politiciens impérialistes faillis comme lord Cecil, etc. Le but et le résultat de ces congrès de paix staliniens sont non pas l’organisation de la paix entre les peuples (ce qui à l’intérieur du capitalisme est une utopie réactionnaire), mais au contraire l’organisation de la paix civile entre les classes des nations impérialistes (ce qui rendra possible la guerre). L’Internationale communiste des jeunes -surgie dans la lutte contre le social-impérialisme (socialisme en paroles, impérialisme en fait) de la IIe Internationale pendant la dernière guerre mondiale- se prépare aujourd’hui à mener la jeune génération prolétarienne à la boucherie impérialiste. À l’intérieur de ses propres rangs, le mouvement prolétarien de jeunesse n’a pas de pire ennemi que le stalinisme.
Le « Bureau international des organisations révolutionnaires de jeunesse » est sans importance pratique notable. C’est la section de jeunesse du Bureau de Londres, une édition en miniature de l’Internationale II 1/2 (SAP, ILP, etc.). Ce bureau voit sa tâche dans le fait de rendre des services au stalinisme. Dans des appels communs « à la jeunesse ouvrière allemande » la section allemande de ce bureau de jeunesse (la jeunesse du SAP) reconnaît que les staliniens (qui ont fait plus pour la victoire de Hitler que Hitler lui-même) ont éclairé à temps le prolétariat allemand sur « la forme, l’essence et la tâche du fascisme ». Du reste, la section de jeunesse du Bureau de Londres -autant que ses moyens modestes le lui permettent- soutient la tromperie des congrès staliniens de paix civile pour la préparation de la guerre impérialiste.
L’organisation des jeunes de la IVe Internationale ne peut être édifiée que dans la lutte la plus vive contre les tendances et conceptions esquissées ci-dessus dans le camp du mouvement prolétarien des jeunes et qui ne peuvent, en fin de compte, que vouer pieds et poings liés les nouvelles générations aux mains du capitalisme international, au fascisme et à la guerre. Seule une politique révolutionnaire inconciliable, condamnant de la façon la plus catégorique toute concession au social-pacifisme et au social-impérialisme et poursuivant partout avec hardiesse et décision le but de la révolution prolétarienne, seule une telle politique, défendue et propagée par une participation active et directe au sein de la jeunesse ouvrière et de ses organisations, permettra de rassembler les masses de la jeunesse prolétarienne autour du drapeau rouge de la révolution sociale. Seules les organisations de la IVe Internationale, en regroupant autour d’elles les révolutionnaires, peuvent et veulent suivre ce chemin, seules elles réussiront à délivrer la classe ouvrière du marais de l’opportunisme, de la trahison et de la stratégie de défaites des IIe et IIIe Internationales.
La dégénérescence des IIe et IIIe Internationales a gaspillé en grande partie les énergies politiques des générations prolétariennes aînées. L’édification de la IVe Internationale est indissolublement liée à l’éveil politique de nouvelles couches prolétariennes et, avant tout, de la jeune génération. C’est pourquoi il est d’une grande importance que les cadres de la IVe Internationale à l’intérieur du mouvement prolétarien de jeunesse soient en croissance constante. En France et aux Pays-Bas, existent déjà des organisations de jeunesse indépendantes qui sont pour la IVe Internationale. En Belgique, par les menées de Vandervelde et compagnie et avec la collaboration directe de Godefroid (qui prouva à cette occasion qu’il préfère l’unité avec les socialistes d’union sacrée), l’aile vraiment révolutionnaire, qui se groupe autour du journal L’Action socialiste révolutionnaire, vient d’être exclue des Jeunes gardes socialistes et œuvre actuellement à sa constitution indépendante. À l’intérieur de l’organisation unique de jeunesse d’Espagne (résultant de l’unification de l’organisation de jeunesse socialiste avec l’organisation stalinienne), à l’intérieur de la Labour League of Youth d’Angleterre, de l’organisation de jeunesse Zukunft de Pologne, de la Young People Socialist League d’Amérique, en Suisse, en Autriche, au Canada et dans une série d’autres pays existent des fractions, des groupes et des courants pour la IVe Internationale. Tous ces éléments du mouvement prolétarien de jeunesse qui se tiennent sur le terrain de la IVe Internationale trouveront les voies et les moyens -sans contrevenir aux conditions particulières de leur pays et de leur travail- d’échanger leurs expériences, d’apprendre les uns des autres et de marcher en commun vers de nouveaux succès.
En avant, vers la création de l’organisation de jeunes de la IVe Internationale !