LETTRE A LA DIRECTION DE LA TCI.
La lecture du n° 14 de l’Internationale transforme pour moi la quantité en qualité. Commençons par le commencement ou presque… Nous savons depuis longtemps à quelles fins démobilisatrices servent les journées d’action. En 2017 la dislocation de la mobilisation contre la loi El Khomri en 13 journées d’action couronnées par une grotesque parodie de manifestation autour du bassin de l’Arsenal, a permis aux directions syndicales de faire passer la loi.
Or la TT du 6 février 2019 a publié en page 16 sous le titre Journée d’action du avril 5 février ,sous titré Par dizaines de milliers avec les syndicats un article à la gloire de cette initiative de la CGT, magnifiée comme moyen d’affirmer le caractère syndical de la journée indépendamment des gilets jaunes sous le titre:Par dizaines de milliers avec les syndicats . « Les médias aux ordres tenteront certes de le minimiser. Mais il reste que, ce 5 février, les travailleurs sont, en semaine, descendus par dizaines de milliers dans la rue à l’appel des syndicats. »…deux jours avant une journée d’action appelée par FO qui a rassemblé 4.000 manifestants à Paris . L’article rappelait « La commission exécutive de FO avait soutenu ses organisations participantes » au 5 février .L’article signale qu’ici et là on voyait « des banderoles contre les licenciements pour la défense des retraites, pour les salaires ,sans en montrer une seule et sans citer une seule revendication, ni u n seul slogan !E revanche il citait une militante CGT déclarant « ça fait du bien ,le syndicat est là, nous sortons dans la rue sur notre terrain. »Ce serait donc une journée d’action existentielle non revendicative ?L’auteur concluait : « .La question centrale est bien celle de l’unité pour l’action sur le terrain de classe ».L’article n’émettant pas la moindre réserve sur le dispositif des journées d’action, tout lecteur devait en conclure qu’elles sont un tremplin vers cette unité pour l’action de classe .L’auteur de l’article a sans doute oublié la critique portée dans l’Internationale n° 6 contre les membres du « centre révisionniste » qui « de glissement en glissement finiront par magnifier les journées d’action »-(p 33) et cite à cet effet une phrase d’I-O du 23-29 2003 affirmant : « Les appareils font une journée d’action par mois pour accompagner la politique du gouvernement parfois deux ». Cette réalité aurait donc changé ?
L’internationale n° 14 si j’ose dire boucle la boucle. La revue étudie la politique du PT algérien(PTA)…à partir de décembre 2018…. alors qu’on a le droit avant à deux pages sur le Pérou en 1978. Pourquoi si tard ?Pourquoi cette étonnante discrétion sur les années précédentes sans l’examen desquelles on ne peut rien comprendre à l’évolution du PTA? Est-ce parce que les membres du COSI, auteurs de l’article sur l’Algérie publié dans la TT du 1er mai 2019 stigmatisent « ceux qui ont été rejetés par le peuple parce qu’ils ont bâti une durant des décennies une société sans droits. ». DURANT DES DECENNIES (et pas seulement ces dernières années !)et saluent « les structures libérées » de l’UGTA …libérées de qui et de quoi ? De la direction de Sidi Saïd, son secrétaire général et pilier du clan Bouteflika, qui avait accueilli et salué Alger la conférence de l’EIT et du Parti des Travailleurs algériens(PTA)en 2010 ( il y a moins d’une décennie)et avec lequel des relations politiques cordiales ont été maintenues plusieurs années. L’Internationale dénonce une déclaration de Lucien Gauthier affirmant en 2018 : « l’élection en 1999 du président Bouteflika(…)avait répondu à cette attente du peuple algérien à la paix, à la sécurité ».Tous les dirigeants du CCI l’ont longtemps répété.
Trois ans plus tard, en 2013 le congrès de la « IV » prétendument « reproclamée » en 1993 a voté à l’unanimité la résolution finale (jamais appliquée) centrée sur la défense de l’indépendance de l’Algérie face aux menaces de l’impérialisme américain et ne contenant pas la moindre réserve sur la politique du clan Bouteflika, alors que pour les trotskystes la défense de l’URSS n’a jamais signifié le soutien à la bureaucratie ,à son gouvernement et à sa politique .
Pendant plusieurs années le CORQI a fait le silence sur l’Algérie et sur la politique du PTA . Sa conférence de novembre 2017 n’en dit mot ! Sa réunion de novembre 2018 est tout aussi muette ( juste avant le soulèvement du peuple algérien !) .
L’Internationale 14 affirme : « Dans l ’Assemblée populaire nationale( APN « élue » en 2017, – dont la composition, cela est de notoriété publique,a été décidée par le pouvoir siégeaient 11 députés du PT » (p 27) dont la secrétaire générale. Mais l’Internationale oublie de signaler que si le gouvernement Bouteflika a béni voire choisi 11 députés du PT…c’est parce que le PT l’avait largement soutenu au cours des années précédentes, soutien sur lequel la direction de la TCI a gardé le silence. Il s’agissait d’un remerciement pour services rendus ..et à rendre encore.
Dans un communiqué du 4 février 2016, la direction de la TCI répondait à une campagne lancée contre elle par le CCI sur l’Algérie en s’appuyant sur deux « documents »( ???)dont elle écrivait : « Les deux documents cités(…)l’intervention d’un adhérent dans une réunion du POI et l’extrait d’un courrier privé adressé par un militant à un autre militant n’engagent que leurs auteurs » et ajoutait « Les opinions exprimées dans ce courrier privé (…)ne reflètent pas la position de la TCI » que le dit communiqué ne définissait en rien, se contentant d ’ affirmer la « solidarité inconditionnelle avec le PTA, ses dirigeants et ses militants ». Que pensait sur le fond la direction de la TCI. ? Elle n’en dit pas un mot…
Que disait donc l’extrait du courrier privé adressé par moi à un militant qui me chantait la gloire du CCI ?J’y critiquais modestement la politique d’adaptation aux appareils de son parti et de son « Internationale » fantôme en y posant la question innocente : fallait-il donc crier au Brésil « Dilma Réveille-toi ! » et en Algérie « Louisa Réveille-toi ! » . La direction de la TCI trouvait donc exagérément critique de la politique pro-Bouteflika de L Hanoune cette très modeste apostrophe, qui me valut un communiqué du CCI me qualifiant pour ces trois mots de « nostalgique du colonialisme français »( tous les fous ne sont pas à Charenton)et préféra garder un silence complaisant sur la politique du PT englué jusqu’au cou dans le soutien au clan pillard Bouteflika …Selon la sagesse des peuples, qui ne dit mot consent…
De l’ellipse algérienne passons à l’ellipse française.Le n° 6 de ‘l’Internationale fait remonter le début de la cerise qui va faire exploser le CCI à 2002.Or j’ai rerouvé dans mes papiers une note du 13 décembre 2000, destinée « aux membres du CP et du Secrétariat International », signée Seldjouk alors secrétaire national du CCI. Il y écrivait « J’ai tourné dans plusieurs régions du parti . Dans toutes j’ai été confronté à des cellules qui ne se réunissent pas ou irrégulièrement, à des cadres qui ne sont jamais en cellule. Le pire n’est pas ce processus de dissolution du CCI, le pire, c’est que dans chaque cas le membre de la Direction nationale était au courant et ,dans les faits, tolérait le problème ou le contournait. Il s’’agit ici de quatre membres différents de la DN ,dont trois du CP » Et il s’interrogeait : « Mais comment peut-on( …)recruter à la IV e Internationale(..)en acceptant que le CCI soit- tout ou partie, mais cela ne change rien quant au fond – dissout ? » . La principale « section de la IVe » reproclamée » en 1993, sans être le moins du monde reconstruite était donc dès 2000,avant que la « fraction liquidatrice »et « révisionniste » y ait imposé son orientation , en « tout ou partie dissoute » et déjà sur la voie de la décomposition.
Le texte de Seldjouk présentait cette désertion massive comme un ensemble de défaillances individuelles. Mais si quatre dirigeants du parti et des cadres « ne sont jamais en cellule», si « des cellules ne se réunissent pas ou irrégulièrement », cela exprimait une crise politique dissimulée dans le texte de Seldjouk par des accents de triomphe : il concluait en effet sa note en affirmant: « L’accélération de la crise de décomposition de la Ve république et des appareils [ affirmation inlassablement répétée d’année en année, conjuguée avec les affirmations qu’elle ne tient qu’avec le soutien des appareils…et aussi que «les lois de l’histoire sont plus fortes que les appareils » !]nous ouvre d’immenses possibilités de construction.2001 peut être l’année du Parti des Travailleurs». Et il prévoyait « une reprise en avant significative dans le nombre de cartes et de timbres (oui, de nouveau, le parti des 10.000 est à l’ordre du jour.) » Suivra la lente désintégration du PT avec ses « 4 courants – dont 3 fantomatiques ….
Pourquoi des militants, voire des cadres, d’une organisation militant pour la révolution mondiale, décident-ils de sécher leur cellule comme une corvée ? Leur désertion n’était-elle pas due à la fastidieuse subordination totale de la discussion politique et de la vie des cellules à la définition des objectifs et à la vérification méticuleuse des résultats obtenus( plus d’une fois bidon), opération hebdomadaire qui occupait la première moitié de la réunion au nom de la méthode, prétendument « bolchevique », objectif –résultats, dont je n’ai jamais trouvé la formulation dans les textes bolcheviks (l’inspirateur de cette méthode propre à tout chef d’entreprise …non plus d’ailleurs !) Cette méthode, qui rythmait hier l’activité du CCI, rythme aujourd’hui celle de la TCI, au détriment de toute discussion politique qui ne lui est pas étroitement subordonnée, et se conjugue fort bien avec le bluff ,transforme l’organisation politique en caisse enregistreuse de résultats .« Toute l’histoire du bolchevisme a été celle d’un libre combat de tendances et de fractions. » a écrit un jour Trotsky. La prétendue« section française de la IV » « reproclamée » y a ,avant comme après la scission, substitué les votes unanimes et la comptabilité des signatures , journaux vendus, abonnements collectés, et des cartes placées (mais pas celle des adhérents réellement réunis, le seul chiffre significatif !.)
Les chiffres posent d’ailleurs problème .Début novembre 2018 nous étions une centaine au rassemblement tenu sur un coin de la place Gambetta contre la venue de Trump.La Tribune des Travailleurs suivante a annoncé « 400 participants », près de quatre fois plus que le nombre réel, bluff qui pousse à s’interroger sur la véracité d’autres chiffres et affirmations. On lit dans le projet de programme du POID qu’à Mumbaï en 2017 se sont réunis « des délégués venus de toute l’Europe ».Qui dit délégué dit représentant d’un groupe constitué. Dans combien des quinze pays cités existe réellement une organisation militante ayant une intervention régulière dans la lutte de classe dont les « délégués » seraient les représentants ? Que représentent réellement les « forces organisées et les liens » dont dispose le CORQI « dans 47 pays » ? (L’Internationale n° 6 p55 ?).Mystère.
Sur quoi tout cela débouche-t-il ? Quatre camarades de ma cellule( désormais ancienne) déploient chaque semaine une activité intense pour recueillir des signatures sur la défense des retraites , vendre le journal, placer des abonnements voire des cartes ….etc.. Mais jamais en quatre ans, aucun des signataires ou des acheteurs, pourtant régulièrement invités, n’a participé à une réunion du comité POID. De plus un quart des acheteurs de cartes ne sont jamais venus à une seule de ses réunions . A une récente réunion d’une section du POID de Paris sont venus 17 adhérents sur 51,à une autre 12 sur 44 ! Quelle vie politique bouillonnante !!! L’annonce de la prise de 71 cartes au POID a donc peu de portée réelle.
Considérant la pseudo « reproclamation »de la IV en 1993 et la présentation de la TCI comme « section française de la IV e Internationale »( !!!)comme du vent, constatant que la méthode objectifs-résultats poussée à son maximum éteint toute réflexion et discussion politiques qui ne lui sont pas subordonnées et débouche toujours sur des textes votés à l’unanimité , comme les 18 résolutions votées en un jour et demi au congrès de la TCI de décembre 2018,sans qu’à la différence des congrès bolcheviques aux discussions publiées avec le nom des intervenants, le compte-rendu publie la moindre ligne de la moindre discussion éventuelle, considérant comme un leurre et donc encore comme du vent la présentation rituelle du gouvernement ouvrier comme une perspective quasi–immédiate, appuyée à ce jour uniquement sur un parti d’environ 2000 cartes, et privée de toute formulation concrète puisqu’il n’existe plus que des partis ouvriers fantômes et, en dehors de rares comités de grève, pas le moindre organisme ouvrier autonome(comité d’action, de lutte, d’usines, comité populaire, sans parler de comités et de conseils ouvriers ) ; goûtant peu les ruses complaisantes comme le bilan de la question algérienne , je ne peux plus rester dans la TCI. Donc je la quitte…
NB . Vous faites ce que vous voulez de ma préface actualisée à Défense du marxisme.