Le MHP fasciste participe au pouvoir sous forme d’une coalition qui ne porte pas son nom afin de pourvoir les postes de bureaucrates qui se sont libérées en particulier après le putsch raté de FETÖ du 15 juillet. Le principal facteur qui a poussé le MHP et l’AKP à prendre la décision d’organiser des élections anticipées est la volonté de consolider la base sociale et le potentiel électoral qui s’amenuisent de jour en jour avant que cela ne chute en dessous des résultats voulus par le pouvoir. Le but de l’AKP de créer un climat nationaliste avec l’invasion d’Afrin et de profiter de ce climat n’a pas fonctionné. Le fait que les résultats de l’aggravation de la crise économique qui va de pair avec le soutien faiblissant des métropoles impérialistes se fassent sentir durement par les masses laborieuses inquiète au plus haut point le pouvoir politique. Cette alliance qui se nomme elle-même « l’alliance du peuple » (Cumhur İttifakı) repose sur la représentation directe des fractions monopolistes du capital qui s’incarnent dans la personne d’Erdoğan ainsi que des nouvelles fractions du capital qui ont grossi sous le pouvoir de l’AKP. L’appel selon lequel les membres du capital seront représentés en tant que députés au Parlement avec l’AKP et l’insistance avec laquelle Erdoğan souligne que l’état d’urgence a été déclaré pour les patrons montre le pouvoir du capital sur lequel repose directement l’AKP.
En effet, alors qu’il était possible d’améliorer les conditions de vie de millions de personnes au salaire minimum, le fait d’avoir distribué 135 milliards de livres aux grandes entreprises du capital monopoliste sous prétexte d’incitations n’exprime pas moins sur quelle classe repose l’AKP.
Les partis bourgeois CHP, le Bon parti (İYİ Parti), le Parti de la félicité (Saadet Partisi) et le Parti démocrate (Demokrat Parti) qui ont le soutien de classe capitaliste restée en dehors du bloc de l’AKP, d’une partie de la bureaucratie et des métropoles impérialistes servent, sous le nom de « l’alliance nationale » (Millet İttifakı), à ce que des millions d’ouvriers et de travailleurs placent leur espoir à nouveau dans le Parlement.
Le besoin de juguler la colère des masses laborieuses a donné naissance d’une opposition efficace avec le İYİ parti de Meral Akşener dans le couloir conservateur – de droite de la politique du capital. D’un autre côté, le CHP qui a participé avec sa marche pour la « justice » à la perception et à l’illusion pour des millions d’ouvriers et de travailleurs que l’ordre capitaliste pouvait être changé avec la voie parlementaire vise à maintenir l’ordre du capital.
LES CLIQUES BOURGEOISES N’ONT RIEN À OFFRIR AUX TRAVAILLEURS !
Dans le monde entier la crise économique du pouvoir du capital s’aggrave et quel que soit le parti bourgeois qui arrivera au pouvoir, il n’aura rien d’autre à offrir aux travailleurs qu’une potion amère. Malgré les discours électoraux remplis de promesses, ils ne parviennent pas à proposer de solution concrète aux problèmes économiques. Leurs discours, leurs promesses généreuses ne sont qu’un mensonge digne de celui qui sifflote dans un cimetière. Dans le contexte des élections il n’y a guère de parti de gauche qui aurait la revendication centrale de « faire payer la facture de la crise aux patrons ». Cela montre clairement le rôle des partis qui occupent le terrain électoral en tant que composantes de la classe capitaliste. Alors qu’il est clair qu’un pouvoir capitaliste sans l’AKP ne parviendra pas à sauver les millions de travailleurs et d’exploités opprimés, ce n’est pas la tâche des communistes que de répandre avec insistance l’illusion que ces élections offriront une issue.
LE PARLEMENT ET LES ÉLECTIONS NE PEUVENT CONSTITUER LE CENTRE DE LA LUTTE !
L’attitude à adopter face au Parlement et aux élections qui sont les organes les plus importants de l’État bourgeois pour semer des illusions est un problème tactique important pour le mouvement communiste. Les thèses sur le Parlement et le parlementarisme qui ont trouvé corps dans les 4 premiers congrès de l’Internationale communiste continuent à être une boussole pour nous les révolutionnaires communistes.
« Pour les communistes, de nos jours le parlement ne peut en aucun cas être le théâtre de réformes et de l’amélioration de la condition de la classe ouvrière, alors que dans la période passé, cela avait pu arriver parfois. Aujourd’hui, le centre de la vie politique est définitivement en dehors du Parlement. D’un autre côté, en raison des relations au sein de la classe bourgeoise et de ses relations avec les masses laborieuses la bourgeoisie a besoin de faire approuver certaines choses au Parlement où a lieu entre gens qui se connaissent une lutte pour le pouvoir ; et leurs forces et faiblesses apparaissent avant qu’ils ne se mettent d’accord entre eux. La tâche urgente de la classe ouvrière est d’arracher ces appareils des mains des classes dirigeantes, de les détruire et de les remplacer les nouveaux organes du pouvoir prolétarien. Il est très utile pour les dirigeants révolutionnaires de la classe ouvrière qu’il y ait une avant-garde pouvant faciliter cette tâche de destruction au sein des institutions bourgeoises parlementaires. La principale différence entre la tactique des communistes qui vont au Parlement avec un but révolutionnaire et le socialisme parlementariste qui commence le travail en acceptant que le régime aura une stabilité ainsi qu’un avenir se voit clairement à partir de ce point. Le parlementarisme socialiste considère que c’est sa tâche d’obtenir des réformes coûte que coûte et cherche à inscrire toute conquête des masses à son compte (comme Turati, Longuet, etc.) » ((Lenin Döneminde Komünist Enternasyonal -Belgeler- C.1 S.230, 231 (Internationale Communiste à l’époque de Lénine, Documents, T.1, p 230, 231)).
Comme souligné par le second congrès de l’Internationale Communiste, à l’époque de l’impérialisme les parlements ne sont plus du tout l’organe de direction politique du pouvoir bourgeois. Les parlements qui avaient une fonction constitutive particulièrement durant la période ascendante du capitalisme ne servent plus qu’à créer des illusions chez les masses. En fait cette situation résume l’attitude à adopter vis-à-vis des élections comme l’a exprimé Engels lorsqu’il disait que le suffrage universel … permet seulement de mesurer la maturité politique de la classe ouvrière. Cela ne signifie pas que les communistes doivent rester silencieux durant cette période où la politisation des masses à tant augmenté. À nouveau, comme l’a exprimé l’Internationale communiste dans ses thèses, ils participent aux élections législatives, présentent des candidats ouvriers. Mais leur but, plutôt que semer l’illusion que le pouvoir peut être obtenu par les élections et que cela peut servir à changer quelque chose, est d’exposer politiquement la bourgeoisie et de diffuser la propagande qui affirme qu’il faut détruire les parlements. Ceux qui ont une attitude inverse sont condamnés à rester des opportunistes se comportant de façon hypocrite au sujet de la théorie de l’État. Car alors que l’État est né comme étant le produit des oppositions irréconciliables de classe et qu’il a construit sous le capitalisme un appareil de répression fondé sur les hauts fonctionnaires, les prisons et les forces de police, le fait de prétendre que le Parlement et les élections peuvent les changer signifie d’être serviteur de la bourgeoisie dans la lutte des classes. En effet démocratie veut dire souveraineté d’État. Et l’État correspond à la domination d’une classe. Il existe plusieurs voies pour faire perdurer une domination de classe, et ce que l’on appelle la démocratie est l’une de ces voies, tout comme le fascisme…
La voie pour construire ou pour arrêter un pouvoir qui devient de plus en plus autoritaire comme celui de l’AKP – Erdoğan ne passe pas par le Parlement ni par les élections. Le partage impérialiste du monde a changé et cela a porté l’AKP au pouvoir il y a 16 ans. Dans le processus électoral, même la restauration éventuelle du régime se fera en fonction des besoins du capital turc dans le cadre de l’ordre impérialiste. Pour cette raison, le centre de la lutte n’est pas le Parlement de l’État du capital ; la place des révolutionnaires est dans les usines. Au point où nous tentons la lutte des classes, nous voulons organiser notre volonté révolutionnaire là où se vivent l’exploitation et la pauvreté. Nous luttons pour que la possibilité de révolution prolétarienne soit dans la vie de la classe ouvrière. C’est là l’endroit principal qui permettra à nos revendications de résonner à nouveau dans les rues et les usines et qui permettra à nos actions de se transformer en révolte de masse. Ce qui va permettre de concrétiser tout notre programme est la construction organisée d’une révolte de masse des ouvriers comme celle des ouvriers métallurgistes de 2015 ainsi que des revendications et une organisation révolutionnaire qui permettront de diriger cette révolte vers des objectifs justes.
IL N’Y A PAS D’ALTERNATIVE POUR LES TRAVAILLEURS DANS LES ÉLECTIONS !
Dans les élections où il n’y a pas de sujet révolutionnaire c’est-à-dire la classe ouvrière, tous les partis qui feront partie de ces élections serviront à organiser l’ordre d’exploitation et à renouveler sa légitimité. « Pas de voix pour les réparateurs de l’ordre ! » et « Non à l’opération de blanchiment de l’ordre ! » expriment les mots d’ordre que doivent porter les communistes révolutionnaires contre la dictature de la bourgeoisie appelée système présidentiel ou quel que soit le nom qu’il porte. Aucun des blocs bourgeois que nous avons essayé de décrire ci-dessus ne peut donner des droits supplémentaires aux travailleurs et à la classe ouvrière, ni satisfaire aucune revendication. Car l’ordre du capital ne peut survivre qu’avec une exploitation et une répression renforcées dans le cadre des crises économiques du capitalisme. La seule chose que tous ces partis du capital, face à l’effondrement économique, puissent offrir aux millions d’ouvriers et travailleurs est d’accepter la potion amère et chercher à imposer plus de pauvreté et de faim avec l’excuse qui consiste à dire « nous sommes sur le même bateau ». Tant qu’il n’y aura pas de mouvement axé sur la classe pour déchirer ce tableau et présenter ses candidats, la revendication des révolutionnaires communistes sera « Pas de voix pour les partis et candidats du capital ! ».
NOTE SUR LES ÉLECTIONS ET LE PARTI HDP
Si nous nous plaçons du point de vue des intérêts de la classe ouvrière, nous pouvons résumer la position du HDP comme ci-dessous : en tant que parti bourgeois participant aux élections, le HDP n’a rien de concret à proposer à la classe ouvrière et aux travailleurs, et il suit une politique qui cherche à rester compatible avec les parties libérales du capital. De plus, même si le HDP met en avant sur les réseaux sociaux avec un langage populaire comme #ÇASUFFIT ou #ONENAASSEZ une attitude anti-Erdoğan, au fond il ne parviendra pas à être autre chose que le soutien de l’opposition bourgeoise, car il prend pour cible seulement une partie du capital. Le HDP explique soutenir les opprimés et les discriminés et cherche à adopter une attitude de « parti de Turquie ». Oui mais le parti de quelle Turquie ?
ATTITUDE ET OPTIONS
Avec les conditions de l’état d’urgence, il est impossible que les élections puissent avoir lieu de façon juste et efficace même du point de vue du droit bourgeois dans le contexte d’un régime de non-droit. Les blocs bourgeois cherchent à empêcher une crise de régime et comme dans toutes les initiatives des partis bourgeois, ils essayent de relégitimer le système. Dans une société de classes, il n’y a pas de « nation » en tant que structure sociopolitique homogène, mais plutôt au sein de chaque nation il y a des classes qui ont des intérêts et des droits opposés. En tant que parti de l’ordre du capital, le HDP qui essaye d’être un acteur institutionnel du système bourgeois ne doit pas être soutenu par les communistes révolutionnaires sur cette orientation.
Il faut dire que le programme du HDP, même s’il prétend défendre tous les discriminés, même s’il porte un parfum « de gauche » et de « défense d’opprimés », est, au fond, un programme bourgeois. L’attitude et le comportement dominants en son sein sont ceux de réparer le système, de viser un capitalisme plus « humain ». En effet, le sens spécial qu’ils donnent aux élections et au Parlement fait ressortir la véritable position et l’attitude du HDP en termes de classes. D’un autre côté, la base sociale de ce parti est constituée par les Kurdes pauvres et il porte le soutien de millions de travailleurs. Mais malgré ce soutien de masse, son corps principal et son centre idéologique le situent en tant que parti libéral bourgeois. Il se fait le porte-parole politique d’une partie importante de la bourgeoisie kurde et de toute sorte de libéraux de droite ou de gauche d’hier qui disent « ça ne suffit pas mais oui ». Nous considérons le HDP comme le représentant des revendications démocratique du peuple opprimé. Même si ce parti a un programme bourgeois, il s’agit d’un parti bâti sur la légitimité obtenue grâce à la lutte et à la résistance sur tous les plans de la vie par les paysans kurdes pauvres des montagnes et des travailleurs kurdes exilés dans les villes, car ils ne possédaient plus rien. Bien sûr, les revendications du peuple kurde en tant que nation opprimée sont des revendications démocratiques bourgeoises comme l’accès à l’égale citoyenneté ou l’éducation dans sa langue natale et il est naturel qu’elles soient exprimées par un parti bourgeois comme le HDP. Le fait que le mouvement politique kurde ait gagné le droit de participer aux élections législatives bourgeoises, et avant cela de négocier et de lutter a été obtenu en payant un lourd tribut. Avec cela, le HDP qui a gagné du soutien en raison de sa représentation politique du peuple kurde et pour avoir porté ses revendications démocratiques, a le mérite particulier de s’être opposé de façon efficace aux efforts d’institutionnalisation du système présidentiel du pouvoir Erdoğan/AKP et d’avoir payé un prix très élevé pour cela. Précisément sur ce point, nous faisons face à la réalité critique de la question qui créé une impasse pour la dictature de la bourgeoisie : la question nationale kurde et ses effets régionaux et mondiaux, la politisation du peuple kurde, le fait que même en voulant appliquer un programme compatible avec l’ordre le HDP ne soit pas accepté par la dictature bourgeoise dominante apparaissent. Si nous nous plaçons du point de vue des revendications du peuple opprimé, nous pouvons faire les déterminations suivantes sur le HDP : les communistes révolutionnaires doivent affirmer une volonté de soutien au HDP. Ce soutien ne signifie bien sûr pas un soutien à son programme ou à son blocus politique de la politique de gauche, mais un soutien en raison de la légitimité et la justesse des revendications démocratiques du peuple kurde.
PAS DE VOIX POUR LES RÉPARATEURS DE L’ORDRE !
NON À L’OPÉRATION DE BLANCHIMENT DE L’ORDRE !
NOUS ALLONS BÂTIR UN MONDE COMMUNISTE !