Le 16 mai, trois associations LGBTI ont déposé une plainte devant la Cour pénale internationale pour génocide contre Ramzan Kadyrov, président de la Tchétchénie qui fait partie de l’État russe.
Le journal russe Novaïa Gazeta (6 journalistes assassinés depuis 2000) a révélé, à partir des informations recueillies par des associations sur place, qu’au moins 100 personnes avaient été arrêtées pour homosexualité et 3 étaient mortes dans les 6 prisons secrètes. Ceux qui sont suspects d’homosexualité sont arrêtés et torturés pour donner d’autres noms. Les policiers incitent les familles à assassiner elles-mêmes leurs membres homosexuels pour « laver leur honneur ». Évidemment, une police qui procède ainsi envers une minorité sexuelle fait régner la terreur dans toute la population et le gouvernement qui la commande interdit toute organisation ouvrière et même toute opposition politique.
Le journal russe explique clairement qu’il s’agit d’une épuration planifiée par le pouvoir tchétchène et cite les noms de quelques responsables comme le président du Parlement tchétchène et le chef de la police d’Argoun. Kadyrov nie l’épuration en affirmant que dans son pays les homosexuels « n’existent pas », son porte parole va plus loin en précisant que « s’il y avait de telles personnes en Tchétchénie, les forces de l’ordre n’auraient aucun problème avec elles puisque leurs proches les auraient déjà envoyées dans des endroits d’où personne ne revient ». Kheda Saratova, à la tête du prétendu Conseil des droits de l’homme en Tchétchénie, relaie cet appel à la population : « Dans notre société tchétchène, toute personne qui respecte nos traditions et notre culture traquera ce type de personne sans avoir besoin de l’aide des autorités, et emploiera tous les moyens nécessaires pour que ce type de personne n’existe pas dans notre société. »
Même Alan Duncan, sous-ministre britannique aux Affaires étrangères, affirme avoir eu accès à des informations rapportant que le gouvernement tchétchène souhaitait éliminer tous les homosexuels du pays d’ici la fin mai, dans ce qu’ils nomment un « nettoyage préventif ».
Bien que peu médiatisés, ces événements ont forcé le Kremlin à ouvrir une enquête officielle, confiée à Moskalkova, déléguée pour les droits de l’homme de la Douma (parlement fédéral)… et homophobe notoire. Cette générale de police, qui fut nommée par Poutine en avril 2016 au moment où il réduisait drastiquement le peu de libertés démocratique dans le pays, a qualifié ces exactions de « rumeurs » véhiculées par des personnes à l’« orientation sexuelle non traditionnelle ».
En 2013, la Douma a voté une loi interdisant la « propagande homosexuelle » permettant au pouvoir d’interdire toute manifestation et de réprimer les associations LGBT. Les milieux conservateurs et l’Église orthodoxe trouvant cette loi trop timorée font pression pour une interdiction totale. Poutine, dont la police s’illustre régulièrement par la violence avec laquelle elle réprime les manifestations féministes et homosexuelles, soutient le tyran qu’il a placé à la tête de la Tchétchénie en 2007 et affirme que les accusations visant Kadyrov ne sont en rien confirmées. Le gouvernement russe explique n’avoir reçu aucune plainte officielle, alors que dans le même temps il réprime violemment les rassemblements de soutien à Moscou (le 11 mai) et à Saint-Pétersbourg (le 1er mai) et fait arrêter les manifestants. Les rafles, la torture, les exécutions dans des camps, l’appel à la population à prendre part aux exécutions sommaires, sont des méthodes identiques à celles de Daech que Poutine dit combattre en Syrie.
L’intolérance religieuse, la xénophobie, la misogynie et l’homophobie suintent du vieux monde. Partout, les organisations ouvrières doivent prendre position, défendre les libertés démocratiques, prendre la tête de la lutte contre les discriminations, pour unir les travailleurs et pour ouvrir la voie à une société où chacune et chacun pourra s’épanouir librement.
30 mai 2017