Après le succès du candidat Olivier Besancenot en 2002 (4,2 % des voix) et en 2007 (4,1 %) à la présidentielle, la direction de la LCR, depuis longtemps opposée au pouvoir ouvrier (abandon officiel de la dictature du prolétariat en 2003) a décidé de concéder plus encore à l’écologisme, au pseudo féminisme, à l’anarchisme, à l’antifascisme, etc, en se liquidant en 2009 dans un parti « large » dont le succès assuré permettrait en outre de capter ce qui restait du PCF. Mais, avec l’incapacité congénitale à ouvrir une issue prolétarienne, donc à se démarquer du Front de gauche (2009-2016), après le succès de Mélenchon à la présidentielle en 2012 (11,1 % alors que Philippe Poutou présenté par le NPA n’obtenait que 1,1 %), des centaines de militants l’ont quitté en plusieurs vagues pour Ensemble, le PdG ou le PCF qui soutiennent tous la campagne étatiste et nationaliste de Mélenchon.
Si LO est, pour le moment, unie par la subordination à la seule bureaucratie de la CGT, ce qui reste du NPA constitue un front assez distendu de militants qui répercutent la pression d’appareils syndicaux différents (SUD, CGT, FSU), de la petite-bourgeoisie (écologiste, antimondialiste, décroissante ou pacifiste…) ainsi qu’un champ où s’affrontent ou s’allient, outre l’appareil pabliste, des noyaux politiques d’origine hardyste, lambertiste, cliffiste, moréniste… dont certains sont dirigés par des centres internationaux distincts du « Secrétariat unifié de la quatrième internationale ».
Vu la nature de sa base, le NPA condamne la répression policière et l’état d’urgence mais sans avancer aucune perspective d’autodéfense ouvrière. Il suffit de « nous approprier l’espace public » (Nos vies, pas leurs profits, p. 39). Le vocabulaire de Poutou dans les réunions publiques témoigne de la distance prise avec le marxisme puisqu’il ne parle pas de lutte de classe, d’expropriation, de révolution, des États-Unis socialistes d’Europe, d’insurrection…
Le programme électoral fait des concessions à des formes colorées en vert de protectionnisme et d’obscurantisme : « contre les grands projets inutiles et néfastes » (p. 39) mais pour les écologistes et les anarchistes, tous les projets d’infrastructure sont inutiles et néfastes ; « souveraineté alimentaire » (Nos vies, pas leurs profits, p. 33), « circuits courts » (p. 33) alors que le progrès est d’échapper à l’étroitesse locale.
Au grand regret des réactionnaires, la bourgeoisie a enlevé à l’industrie sa base nationale. (Karl Marx, Manifeste du parti communiste, 1847)
Poutou puise, comme Mélenchon et Hamon, dans les valises d’économistes bourgeois (Keynes, Ostrom…) : distinguer entre les « biens communs » (p. 17) qui doivent être pris en charge par l’État bourgeois et les autres qui relèvent donc du marché ; faire passer implicitement l’étatisme bourgeois pour progressiste face au « néo-libéralisme » (p. 26, 32, 39) désigné comme responsable en lieu et place du capitalisme.
Au milieu d’un fatras réformiste, les programmes de LO et du NPA mentionnent parfois le socialisme, contrairement au PS, au PdG et au PCF. Mais comment parvenir au socialisme sans révolution et comment la révolution peut-elle triompher sans un parti de type bolchevik ? La brochure se contente de formules creuses à la Macron : « faire avancer les choses » ou « changer les choses » (Nos vies, pas leurs profits, p. 6, 40).
Le NPA attribue à Mélenchon la complaisance envers des partis ouvriers au service de la bourgeoisie comme Syriza (issu de la fusion d’une aile du stalinisme grec qui a joué plus d’une fois un rôle contre-révolutionnaire et de courants centristes). En réalité, le NPA rivalisait avec le PdG et le PCF dans l’opportunisme envers Tsipras jusqu’à ce qu’il accède au pouvoir et qu’il trahisse ouvertement, ce qui a conduit au désaveu tardif du PdG et du NPA. Mais le parti que veut bâtir Poutou ne pourra pas faire mieux que Syriza ou Podemos.
Nous avons besoin d’une nouvelle représentation des oppriméEs et des exploitéEs… Un parti capable de se battre pied à pied sur tous les terrains contre les représentants de la classe adverse, qui soit un outil dans nos luttes de tous les jours, pour les organiser, les coordonner mais aussi pour leur donner une résonance, une expression à l’échelle nationale et même internationale. (Nos vies, pas leurs profits, p. 43)
Les travailleurs n’ont pas besoin d’un parti qui se contente de « luttes », en pratique d’additionner les ZAD contre les aéroports ou les réserves d’eau au soutien aux « journées d’action » des bureaucraties syndicales corrompues qui ont fait passer la loi travail du gouvernement. Ils ont besoin d’un parti ouvrier révolutionnaire qui combatte le capital et ses agents pour préparer la prise du pouvoir par les travailleurs, condition de la transition au socialisme mondial.