Un nouvel attentat réactionnaire en France
Lors du feu d’artifice du 14 juillet à Nice, un fanatique a fauché avec un camion de location plusieurs centaines de spectateurs, français de toutes origines et nombreux étrangers, causant 84 morts et 202 blessés. L’EI-Daech a revendiqué l’attentat.
L’auteur de l’opération…menée à Nice en France est un soldat de l’Etat islamique. Il a exécuté l’opération en réponse aux appels lancés pour prendre pour cible les ressortissants des pays de la coalition qui combat l’EI.(EI, Communiqué, 16 juillet)
Comme la plupart des précédents terroristes, l’assassin de civils désarmés était un délinquant, auteur de vol, de violence routière, de violences répétées sur sa femme et ses enfants.
Considérer comme responsables de la politique d’un pays tous ses ressortissants est stupide et réactionnaire. Cette logique délirante du nationalisme n’est pas propre à l’EI-Daech, mais elle lui a servi à justifier des attentats contre des militants kurdes en Turquie, des artistes (Charlie Hebdo…), des Juifs (école de Toulouse, supermarché casher…), des homosexuels (Pulse d’Orlando), de simples voyageurs (train, avion…) ou des travailleurs coupables à leurs yeux de prendre des loisirs : musée, stade, salle de concert, boîte de nuit, café et restaurant, maintenant feu d’artifice…
Dans ces derniers cas, les victimes comptent forcément des descendants d’immigrés venus d’Afrique et d’Asie ainsi que des touristes et des migrants. Dans l’attentat de Nice, figurent parmi les assassinés 5 Algériens, 5 Italiens, 4 Tunisiens, 4 Marocains, 4 Kazakhs, 3 Suisses, 3 Américains, 2 Brésiliens, 2 Malgaches, 2 Polonais, 2 Russes, 2 Estoniens… Les plus nombreuses victimes du terrorismede l’EI-Daech demeurent, au plan ethnique, des Arabes et, au plan religieux, des musulmans… Par exemple, onze jours avant celui de Nice, l’attentat commis par l’EI le 3 juillet à Bagdad a causé à lui seul 250 morts et plus de 200 blessés.
Un mouvement tourné contre les peuples du Proche-Orient
La plupart des immigrés et de leurs descendants savent aussi que, là où les troupes de l’EI (qui comprennent des centaines de citoyens français) forment un État (dans une partie de la Syrie et de l’Irak), elles épurent la population en fonction de l’ethnie, de la religion, de l’orientation sexuelle… C’est plus facile que d’attaquer l’armée d’Israël. L’EI procurait du prestige et des avantages très matériels aux déclassés venus de l’étranger et elle promet en outre le paradis aux combattants et aux crétins fanatisés qui mènent des attentats-suicides.
L’islamisme politique est, comme les partis fascistes et xénophobes du type FN des pays impérialistes, le produit de la décomposition du capitalisme, de l’étranglement des pays dominés par les grandes puissances, des interventions militaires, des invasions et des occupations. L’islamisme politique se divise en deux pôles : celui qui veut conquérir le pouvoir en respectant les apparences démocratiques de l’État bourgeois, par des référendums, des élections, un parlement (Frères musulmans égyptiens, AKP turque, Ennahda tunisienne…) ; celui qui met ouvertement en cause toute démocratie comme étant un artifice occidental (monarchies du Golfe, djihadistes…). Toute cette mouvance politique est anticommuniste, intolérante, misogyne, homophobe.
Toutes ses composantes, sans aucune exception, ont été protégées, financées et armées par des Etats alliés de la France : Etats-Unis, Israël, Pakistan, Arabie saoudite, Qatar, Turquie… Le précurseur khomeyniste (chiite) et le djihadisme actuel (sunnite) ont besoin de l’islam pour tromper les masses par un anti-impérialisme de façade, mais ils sont en réalité une forme de fascisme adaptée au capitalisme de certains pays dominés : une base de déclassés et de petits bourgeois menacés par la ruine, dirigée par des aventuriers, orientée contre la révolution sociale (qui avait débuté en 1978 en Iran et en 2010 en Tunisie) et les libertés démocratiques, faisant de minorités (y compris les musulmans chiites dans le cas d’Al-Nosra et de l’EI) des boucs émissaires qu’il s’agit d’exterminer.
Par sa nature de classe, le panislamisme n’est pas capable de remettre en cause la propriété privée et d’en appeler au prolétariat des pays impérialistes. Cela le voue, en dernière analyse, à la même impuissance que le panarabisme des années 1950-1970. Tout aussi bourgeois et encore plus réactionnaire, il se révèle tout aussi incapable de vaincre les grandes puissances et Israël, de développer l’économie nationale et d’extirper les racines de l’impérialisme mondial. Le régime des ayatollahs, issu de la contre-révolution fasciste de 1979 en Iran, a abouti à la même faillite que Nasser, Bourguiba, le FLN, le Fatah, les deux Baas, Kadhafi… : pauvreté pour le plus grand nombre, enrichissement d’une petite couche capitaliste liée à l’État bourgeois, incapacité à créer une industrie nationale moderne, oppression des minorités nationales, démocratie fictive, défense forcenée du tyran sanguinaire Assad, concessions au « Grand Satan » (les Etats-Unis), etc.
La prétention qu’une superstition archaïque puisse déterminer la politique contemporaine, des règles de droit qui s’imposeraient à tous et le mode d’existence de tous les individus n’est pas propre à l’islam. Des fanatiques chrétiens ne s’en prennent-ils pas en France aux activités artistiques qui leur déplaisent ou n’assassinent-ils pas aux États-Unis des femmes qui veulent avorter et les médecins qui les aident ? Bush n’a-t-il pas envahi l’Irak en 2003 en prétendant remplir les desseins de son dieu ? Sarkozy n’a-t-il pas soutenu en 2006 que l’instituteur ne pouvait pas remplacer le curé ou le pasteur ?
La marche au militarisme et à l’État policier
La population française subit, à cause du rôle national et international de la bourgeoisie française, des attentats commis par une poignée de délinquants transformés en illuminés pour faire pression sur l’État français.
La réponse du gouvernement PS-PRG aux attentats (austérité pour les dépenses sociales, dépenses budgétaires généreuses pour l’appareil répressif ; toujours plus de discrimination et de pression policière envers les Arabes et les musulmans ; davantage d’opérations militaires en Irak, en Syrie et, secrètement, en Libye) ne peut que conforter les islamistes de tout poil.
Notre arsenal législatif a été considérablement renforcé… D’abord nous allons maintenir à un haut niveau l’opération Sentinelle, celle qui permet de mobiliser 10 000 militaires, en plus des gendarmes et des policiers. J’ai également décidé de faire appel à la réserve opérationnelle, c’est-à-dire à tous ceux qui à un moment ont été sous les drapeaux ou ont été dans les effectifs de la gendarmerie pour venir soulager les effectifs de policiers et de gendarmes. Enfin, j’ai décidé que l’état d’urgence qui devait prendre fin le 26 juillet serait prolongé de trois mois. Un projet de loi sera soumis au Parlement d’ici la semaine prochaine… Nous allons encore renforcer nos actions en Syrie comme en Irak. Nous continuerons à frapper ceux qui justement nous attaquent sur notre propre sol, dans leurs repaires.(François Hollande, Déclaration à la suite des événements de Nice, 15 juillet)
L’Assemblée nationale (à majorité PS) et le Sénat (à majorité LR) se sont entendus pour prolonger l’état d’urgence pour six mois. Auparavant, Juppé a devancé Sarkozy et l’a doublé sur sa droite. Les candidats à la candidature de LR rivalisent entre eux et avec la présidente du FN dans la démagogie et les restrictions aux libertés.
La présence systématique de l’armée dans les grandes villes (opération Sentinelle), le recrutement massif de militaires, de policiers et de gardiens de prison (approuvé par le PCF et le PdG) et les restrictions multiples aux libertés (le PS reprenant sur ce point le programme de LR et du FN) n’empêchent pas les attentats, mais ils constituent une menace pour les libertés démocratiques et pour le mouvement ouvrier. Le secret des sources des journalistes est menacé par un projet de loi, l’état d’urgence a déjà servi à interdire des manifestations d’écologistes et d’opposants à loi Hollande-Valls-El Khomri, des policiers se sentent tout permis lors des perquisitions et des manifestations…
Front unique ouvrier en défense des libertés
Les travailleurs et les jeunes, quelle que soit leur ethnie, leur religion ou leur absence de religion, doivent s’unir pour défendre les libertés démocratiques contre le gouvernement et les partis bourgeois. Ils doivent s’unir pour combattre les campagnes xénophobes et islamophobes des groupes fascistes et des partis comme LR ou le FN, combattre contre la chasse aux réfugiés, aux Roms organisée par le gouvernement PS-PRG. La division des rangs ouvriers selon la nationalité, la religion ou la couleur de peau n’a toujours servi que la bourgeoisie. C’est ce que fait le FN, c’est aussi ce que cherche à provoquer l’EI-Daech avec ses attentats.
Toutes les organisations de la classe ouvrière, partis et syndicats, doivent rompre avec l’union nationale, exiger la levée immédiate de l’état d’urgence, le respect des libertés démocratiques et la fin des opérations militaires de l’impérialisme français en Afrique et au Proche-Orient, l’accueil des réfugiés d’Irak et de Syrie.
Pour éradiquer le djihadisme comme le fascisme impérialiste, il faut rejeter le nationalisme, renouer avec l’internationalisme prolétarien, en finir avec le capitalisme en France et dans le monde entier. Il faut que les travailleuses, les travailleurs, les jeunes de tous les pays s’unissent dans une internationale ouvrière qui aura pour but de renverser la bourgeoisie française, les autres bourgeoisies impérialistes (occidentales et russe) et toutes les bourgeoisies du Moyen-Orient (islamistes et autres).
20 juillet 2016