Le gouvernement franchit un pas supplémentaire
Le 14 juin, au moins 500 000 manifestants ont défilé à Paris, venus également de province, s’ajoutant aux manifestations dans de nombreuses villes. Malgré ce neuvième appel à une journée d’action (après les 9 mars, 31 mars, 9 avril, 28 avril, 12 mai, 17 mai, 19 mai, 26 mai) sans plus de perspective que les précédentes, ce sont encore d’imposants cortèges qui se sont rassemblés sur le mot d’ordre de retrait total de la loi El Khomri.
Cependant le gouvernement a immédiatement réaffirmé le soir même qu’il ne reculerait pas d’un pouce. Pourquoi le ferait-il ? Après la trahison ouverte de la CFDT, après le recul de la direction de l’UNEF contre un plat de lentilles, les directions syndicales CGT, FO, FSU et Solidaires ont déclenché des grèves reconductibles par secteurs, voire par sites, laissant les travailleurs s’épuiser dans des combats isolés, sans jamais ouvrir la perspective de la grève générale pour vaincre le gouvernement.
Ainsi les longues grèves des raffineries se sont arrêté les unes après les autres. Les chefs syndicaux des routiers ont reçu l’assurance que leur convention collective « serait » inchangée et ont immédiatement stoppé le mouvement ; un accord d’entreprise a été trouvé à la SNCF avec la participation de tous les élus syndicaux, y compris ceux qui, comme la CGT et SUD rail, prétendent s’y opposer ; les piquets devant les dépôts de carburant ont été dégagés par les CRS sans que jamais l’intersyndicale n’appelle la classe ouvrière à venir les défendre.
Le défilé dans la capitale était imposant, mais jamais il n’a débordé les directions syndicales au cri de « grève générale ». Aucune force politique significative se réclamant du socialisme n’y a défendu cette perspective. Pas un seul député PS « frondeur », ni le PdG ni le PCF, ni LO ni le NPA, ni aucun des POI ni AL, n’affrontent les chefs syndicaux pour imposer qu’ils appellent à la grève tous ensemble pour battre le gouvernement.
Non seulement le gouvernement n’a pas reculé, mais il a franchi un pas supplémentaire en utilisant, quel hasard, vraiment, le caillassage de l’Hôpital Necker par des casseurs, alliés objectifs du gouvernement, pour menacer d’interdire désormais les manifestations et sommer la CGT de faire la police dans ses rangs. En réalité le gouvernement sait parfaitement qui sont les casseurs. Ce qui l’inquiète, ce ne sont pas les casseurs qui bénéficient d’ailleurs d’une liberté d’action étonnante, ce sont les dockers qui le 14 juin ont affronté les CRS qui les empêchaient de passer.
Le 17 juin, Martinez de la CGT a rencontré la ministre du travail El Khomri. Malgré toutes les tentatives faites pour tenter de trouver un terrain de discussion par la délégation CGT qui a proposé, non plus le retrait pur et simple de la loi mais la discussion de chacun de ses articles, la ministre El Khomri n’a rien lâché, ce qui n’a pas empêché Martinez à la sortie de trouver l’entretien « constructif ». Mailly de FO, quant à lui, assure qu’il reste en contact permanent avec le gouvernement tout en affirmant que « si le dialogue social reprend, les manifestations s’arrêteront » (France info, 15 juin).
Seule la grève générale peut vaincre le gouvernement
Pour toute réponse à l’escalade du gouvernement après le 14 juin, Martinez et l’intersyndicale maintiennent de nouvelles journées d’action de 24 heures, les 23 et 28 juin et s’en remettent à la police de Valls pour assurer la sécurité des manifestants.
Le refus de la grève générale, les décisions des directions syndicales de grèves de 24 heures à répétition et de grèves reconductibles dispersées ont déjà abouti à la défaite en 2003 et en 2010. Pourtant l’issue de la bataille engagée par des millions de salariés, de chômeurs, d’étudiants et de lycéens pour le retrait du projet de loi Hollande-Valls-El Khomri n’est pas encore scellée. La faiblesse du gouvernement et le soutien massif du prolétariat au combat débuté en mars ont empêché Hollande et Valls d’interdire les manifestations.
L’échec du mouvement sur les retraites de 2010, avec les mêmes diversions qu’aujourd’hui, a fait reculer le mouvement ouvrier pendant plus de 5 ans, introduisant le découragement, permettant au parti fascisant de grossir. La bourgeoisie sait tout l’avantage qu’elle peut tirer d’une nouvelle défaite de la classe ouvrière, tous les nouveaux reculs qu’elle pourra imposer. Voila pourquoi Valls et Hollande menacent d’interdire les manifestations, pourquoi Sarkozy demande de poursuivre pénalement et civilement la CGT tenue pour responsable des casseurs.
Si la classe ouvrière et la jeunesse imposent aux directions actuelles la grève générale, le gouvernement capitulera probablement en rase campagne. Le temps presse. Dans les syndicats, dans les assemblées générales, les travailleuses, les travailleurs et les jeunes doivent imposer :
- grève générale jusqu’au retrait du projet de loi !
- élection de comités de grève et de coordinations locales, régionales et nationale pour que la base contrôle le mouvement !
- · autodéfense des occupations et des manifestations !
21 juin 2016