La CGT est, devant la CFDT, la première centrale du syndicalisme français divisé, minoritaire chez les salariés et de plus en plus dépendant du financement par l’État bourgeois.
Historiquement, la CGT a été construite comme un syndicat révolutionnaire. Mais son appareil anarchiste est devenu une bureaucratie liée au capitalisme, à la bourgeoisie française et à son État voici un siècle. La direction Jouhaux a soutenu la guerre impérialiste de la France en 1914 [voir Révolution communiste n° 8]. Ensuite, la bureaucratie « réformiste » dirigée par Jouhaux a exclu les militants révolutionnaires regroupés dans et autour du Parti communiste quand il était révolutionnaire et s’inspirait de Lénine et de Trotsky. Quand le PCF a été stalinisé et est devenu lui aussi social-patriote, les deux fractions se sont réconciliées pour faire cesser la grève générale en 1936, pour reconstruire le capitalisme et l’État bourgeois en 1945. La guerre froide a conduit en 1947 à la scission délibérée de la minorité anticommuniste FO, laissant la majorité de la CGT aux mains du PCF.
L’affaire Lepaon, le précédent secrétaire général de la CGT, a dévoilé la corruption des bureaucraties syndicales [voir Révolution communiste n° 10]. Les privilèges des bureaucrates restent dérisoires à côté du train de vie des capitalistes mais ils sont significatifs par rapport à la vie quotidienne des exploités. Cette corruption explique pourquoi l’appareil de la CGT cogère les grandes entreprises, pourquoi il participe aux opérations « d’unité nationale », pourquoi il défend la police, pourquoi il se rend à toutes les convocations du gouvernement au service de la bourgeoisie française (y compris pour mettre au point le projet de loi travail). La corruption de la bureaucratie syndicale explique pourquoi Martinez et le congrès de la CGT refusent d’appeler à la grève générale contre le projet et contre le gouvernement Hollande-Valls-Macron.
Les bureaucrates se drapent dans la démocratie pour expliquer qu’ils ne peuvent pas « décréter » la grève générale, qui permettrait instantanément d’obtenir le retrait du projet, de vaincre le gouvernement. Mais ont-ils consulté la base pour se rendre à toutes les réunions qui ont préparé le projet de loi ? N’ont-ils pas décrété toutes les journées d’action, avec le soutien du PS, du PdG, du PCF, du NPA, de LO, du POID, du POI, d’AL, etc. ?
Le rapport d’activité – qui sanctionne le bilan de la direction confédérale depuis le précédent congrès de 2013 – a été adopté par seulement 68,7 % pour (31,3 % contre). L’équipe de Martinez a alors recouru à une entourloupe pour répondre au mécontentement de la base : des grèves éclatées site par site. Le congrès s’est terminé le 22 avril par une résolution emberlificotée qui, d’une part, envisage de reprendre les négociations du projet et, d’autre part, s’obstine à refuser d’appeler à la grève générale.
La CGT appelle toutes les organisations à amplifier la riposte, dès le 28 avril, par la grève interprofessionnelle et les manifestations pour obtenir dans un premier temps le retrait du projet de loi de casse du code du travail. D’ici le 28 avril, la poursuite de la construction de l’action implique la tenue d’assemblées générales dans les entreprises et les services publics pour que les salariés décident, sur la base de leurs revendications et dans l’unité, de la grève et de sa reconduction pour gagner retrait et ouverture de véritables négociations de progrès social.
La manœuvre de la bureaucratie syndicale a été opérée par toutes ses composantes : les fractions des partis sociaux-impérialistes (PCF, PdG, PS) mais aussi leurs adjoints que la presse présente abusivement comme des « trotskystes » (LO, POID, POI, NPA).
La tonalité du congrès de Marseille, conclu par cet appel regonflant, satisfait bien des militants qui pourront s’en emparer pour tenter de mobiliser leurs camarades de travail… À ce jour, malgré l’appel pour « décider de la reconduction de la grève », aucune nouvelle date de grève n’est proposée, après le 28 avril. Elle serait pourtant bien nécessaire, comme étape intermédiaire, pour entraîner de nouvelles couches de travailleurs dans le mouvement. (Lutte ouvrière, 27 avril 2016)
Les journées d’action et les grèves reconductibles ne préparent pas la grève générale mais l’empêchent. La grève générale, ce n’est pas la pression sur le gouvernement, ni la collaboration avec lui : c’est la mobilisation résolue de tous, ensemble, pour vaincre.
Pour gagner, pour empêcher les trahisons politiques et syndicales, pour combattre le « syndicalisme de proposition » et la collaboration de classe de toutes les bureaucraties syndicales, pour unifier le syndicalisme dans une CGT de lutte de classe avec droit de tendance, il faut regrouper les militants, les fractions et les organisations prolétariennes réellement révolutionnaires au sein d’une nouvelle internationale communiste, d’un parti ouvrier révolutionnaire.
18 mai 2016