Congrès orientation du SNESup-FSU, Angers, 3-5 juin 2025

Le congrès d’orientation du SNESup (un syndicat de métier affilié à la FSU, le principal des enseignants du supérieur) s’est tenu du 3 au 5 juin 2025 à Angers.

Une représentativité en déclin

Environ 92 000 travailleurs enseignent dans les établissements publics d’enseignement supérieur. Parmi eux, 55 000 sont titulaires du supérieur, 13 000 issus du secondaire et 24 000 sont contractuels. En outre, l’ESR emploie un halo d’environ 170 000 vacataires dont la plupart sont encore plus précaires (+30 % en 7 ans) que les contractuels. Une majorité des enseignants de l’enseignement supérieur se trouve hors statut de la fonction publique, privée de la protection juridique officielle.

Officiellement, le rôle du congrès est de discuter de l’orientation du syndicat et de renouveler sa direction. Quatre tendances présentaient une orientation :

  • Action syndicale (AS), l’étiquette de la direction de type NFP (U&A dans la FSU),
  • AGIR, une scission bureaucratique de la direction),
  • École émancipée (EE) qui cogère la FSU avec U&A,
  • Pour un syndicalisme de combat (PSC), la seule opposition lutte de classe.

1 564 syndiqués ont voté, soit un peu moins d’un tiers (32 %). 77,7 % d’entre eux ont voté en faveur du bilan, 5 % ont voté contre, le reste s’abstenant ou ne prenant pas part au vote. Les deux tendances qui se partagent l’essentiel des postes de direction sont restées majoritaires : 52,7 % des exprimés pour AS et 32,5 % pour ÉE. AGIR a obtenu 11 % et PSC a obtenu 4,2 %.

La plupart des délégués avec qui des discussions avaient été engagées lors de précédents congrès (notamment de Guadeloupe et de Martinique) sont absents. Les échanges les plus riches ont lieu avec les trois salariées du SNESup, pour certaines syndiquées à la CGT et traitées comme des larbins par les chefs du syndicat.

Un appareil de plus en plus cogestionnaire

Le congrès comporte 103 délégués, en diminution par rapport au congrès d’orientation précédent, élus par les sections (environ 50 représentées) qui ont voté préalablement sur le bilan de la direction et sur les motions d’orientation. Le congrès vise en réalité à valider la future direction et laisse peu de place au débat. En effet, Anne Roger, après six ans de collaboration avec les gouvernements nommés par Macron, laisse la place à Emmanuel de Lescure, qui va poursuive dans la même voie alors que la bourgeoisie française fait le choix du militarisme et de la réaction.

Les chefs du syndicat se plient aux exigences de la classe dominante en temps de réaction et de militarisme. Au moment, où Bayrou ne dispose pas d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale, le gouvernement s’appuie d’autant plus sur le « dialogue social » pour légitimer ses projets. Pendant le congrès, les chefs du SNESup ont répondu à l’appel : il ne s’agit même plus de prétendre agir à la fois « dans les conseils » et « dans les luttes » avec les collègues ; la priorité est à présent accordée aux conseils qui mettent en place toutes les « expérimentations » de privatisation, et à rendre le CNESER décisionnaire.

Le CNESER est une machine à faire passer les projets du gouvernement. À titre d’exemple, il y a quelques années, la modification de l’arrêté doctorat avait été négociée par les chefs syndicaux au CNESER. La discussion au CNESER avait directement empêché la mobilisation des travailleurs contre cette modification qui a entériné les doctorats de droit privé, la sélection à chaque année de la thèse, la mise en place d’un serment « d’intégrité »… Le projet a été adopté quelques mois après, avec quelques reformulations qui n’ont en rien changé le projet initial du gouvernement. Rendre le CNESER « décisionnaire », si cela devait arriver, ne servirait qu’à intégrer d’autant plus les syndicats à l’élaboration des projets de l’État contre les travailleurs et les étudiants et à empêcher toute mobilisation.

Pour s’associer à l’élaboration des plans d’austérité, il a fallu remiser toute référence aux mots d’ordre nationaux de bataille des travailleurs de l’ESR comme des étudiants. L’appel du congrès ne fait mention d’aucune exigence de retrait de tous les projets de privatisation locaux comme nationaux, d’aucun mot d’ordre contre le budget de guerre de Bayrou, d’aucune revendication pour les précaires. Pendant les débats, il n’était pas question d’exproprier l’enseignement supérieur privé mais seulement de l’encadrer. Pour les étudiants, le mot d’ordre d’abrogation des lois de sélection (Parcoursup, MonMaster) a été supprimé et remplacé par un mot d’ordre de remplacement des plateformes.

En février, les étudiants de Rennes 2 avaient dénoncé la cogestion et la mise en place de l’austérité par la présidence SNESup. Les chefs syndicaux les avaient reçus avec un service d’ordre. Pendant le congrès du SNESup, ils ont formalisé leur réponse, qui en substance signifie : nous allons cogérer et, pour cela, nous abandonnons tout combat contre l’austérité et contre la sélection.

Un appareil de moins en moins tolérant à la critique

La délégation Pour un syndicalisme de combat comportait trois délégués. Ils sont intervenus dans les séances plénières pour défendre une orientation lutte de classe contre le gouvernement Bayrou. Lors de la première séance plénière, la première intervention de la discussion a été faite par un délégué PSC en défense des précaires. Ces derniers sont très largement sous-représentés dans le syndicat, et complètement absents du congrès. Une seconde intervention a été faite par un autre délégué sur la nécessité de rompre avec la cogestion et de préparer le combat contre le gouvernement face à l’ensemble des plans de privatisation et d’austérité. La direction nationale du syndicat n’a pas jugé utile de répondre.

Au moment où Anne Roger faisait ces adieux comme secrétaire générale, elle a précisé que le rôle des tendances était d’exprimer des avis différents à condition qu’ils fassent la synthèse (comme au PS). C’est ce que les autres tendances font constamment.

La tendance PSC avait déposé trois motions :

  • Ni concertations ni cogestion, préparons la grève générale pour vaincre le gouvernement.
  • Contre le militarisme.
  • Pour le boycott des armes contre le génocide à Gaza.

[voir les trois dans Révolution communiste n° 68]. Alors que la direction nationale proposait d’abandonner le mot d’ordre d’abrogation des lois de sélection, le délégué PSC a demandé à ce que soit mis au vote « Abrogation de toutes les lois de sélection (Parcoursup, MonMaster, CSI…) ». Le bureau a alors refusé de prendre en compte l’amendement et a tout simplement interdit que la proposition soit mise au vote.

Les résultats des votes sur les textes de la tendance AS qui s’arroge le droit d’être la seule à en soumettre au congrès ont été les suivants :

  • thème 1 : 68 pour, 1 abstention, 3 contre ;
  • thème 2 : 72 pour, 6 abstentions, 3 contre ;
  • thème 3 : 75 pour, 1 abstention, 3 contre ;
  • appel du congrès : 60 pour, 4 abstentions, 2 contre (un délégué PSC avait dû partir).

Les tendances EE et AGIR ont voté pour ou se sont abstenues. Devant la base syndicale, elles disent s’opposer, mais, loin de la base, il s’agit, pour elles, de prétendre infléchir la ligne de la direction du SNESup, jamais de la remettre en cause.

PSC a été la seule tendance à voter contre. Ces résolutions servent à légitimer l’accompagnement systématique de la politique d’austérité et de privatisation du gouvernement, la marche à l’intégration du syndicat dans les conseils et au CNESER, de la participation de la FSU au COR, au CESE, etc… À l’inverse, PSC combat pour que les syndicats soient au service des travailleurs, indépendants de l’État bourgeois, pour être capables de défendre efficacement les travailleuses et les travailleurs contre les attaques gouvernementales.

Des finances opaques

Les délégués ont dû également voter le quitus financier, alors qu’à aucun moment les comptes n’ont été présentés.

Au moment du rapport financier, le représentant de la direction nationale a annoncé la réduction des « charges de personnel ». Concrètement, des camarades salariés n’ont pas été remplacés, ce qui signifie nécessairement que les tâches reposent maintenant sur ceux et celles encore présents. Les délégués PSC ont combattu les méthodes et le lexique du patronat employés par la direction. Ils ont exigé des explications face au congrès. Aucune réponse n’a été apportée. Deux délégués PSC ont décidé de ne pas prendre part au vote puisqu’aucun document n’a été présenté. Un délégué a décidé de ne pas séparer fond et forme et de condamner la politique patronale de la direction et a voté contre. Sans nos camarades salariés, le syndicat ne fonctionnerait tout simplement pas. Le vote du quitus a donc été 81 pour, 2 abstentions, 1 contre, 2 ne prennent pas part au vote.

Rompre avec tout gouvernement bourgeois et arracher les revendications !

Les élus PSC au sein de la commission administrative nationale du SNESup auront à coeur de

  • défendre les intérêts des travailleuses et des travailleurs de l’enseignement supérieur et de la recherche (en particulier des précaires),
  • faire du syndicat un outil à leur service, indépendant vis-à-vis du patronat et de l’État bourgeois,
  • oeuvrer à une seule confédération de tous les salariés, démocratique et lutte de classe, avec un seul syndicat par entreprise ou administration rassemblant tous les métiers.

14 juin 2025