Hong Kong sous la domination de l’impérialisme chinois
L’oppression nationale et l’existence de « monopoles » sont les caractéristiques d’un État impérialiste selon Lénine (1914) et Trotsky (1937). La Chine contemporaine abrite deux grandes bourses (Hong Kong et Shanghai), de nombreux groupes multinationaux qui investissent de plus en plus à l’étranger (tels DongFeng dans le capital du groupe français PSA Peugeot Citroën et Huapont Nutrichem qui vient d’entrer dans le capital du groupe argentin Albaugh LLC). La République « populaire » de Chine (RPC) maintient aussi par la force des peuples entiers et plusieurs territoires significatifs : Tibet, Xinjiang, Hong Kong. Elle est donc impérialiste.
La presqu’île de Hong Kong compte 7 millions d’habitants. Ancienne colonie anglaise, elle est devenue une mégapole industrielle, commerciale et boursière bien avant sa rétrocession en 1997 à la RPC.
Auparavant, elle avait déjà joué un rôle important dans le rétablissement du capitalisme en Chine par la bureaucratie stalinienne. Si l’économie chinoise était restée collective, le capital aurait été forcément exproprié à Hong Kong, comme l’avait prévu Trotsky en 1939 et comme l’expérience l’a vérifié en 1945, lorsque l’URSS a intégré les pays baltes, l’ouest de l’Ukraine et l’ouest de la Biélorussie.
L’État chinois a intégré sans problème l’enclave capitaliste de Hong Kong parce qu’il était devenu lui-même capitaliste après l’écrasement de la révolte de la jeunesse en 1989 et la décision du gouvernement chinois de rétablir le capitalisme en 1992 (tout en maintenant un parti unique pour éviter l’éclatement qu’avait connu l’URSS).
Les étudiants et les lycéens protestent contre une élection truquée par Pékin
Le 22 septembre, les étudiants ont entamé une grève massive dans toutes les universités de Hong Kong. Durant plus de six semaines, ils se sont opposés à la volonté du gouvernement chinois central de manipuler l’élection du gouverneur de la presqu’île.
Pour intégrer Hong Kong, l’État bourgeois du continent s’était engagé à maintenir des libertés démocratiques chères, à juste titre, à la population (qui comprenait nombre de réfugiés du continent, y compris d’anciens « gardes rouges » de la « Révolution culturelle » lancée puis réprimée violemment par Mao Zedong).
Néanmoins, l’élection prévue en 2017 du gouverneur de Hong Kong est une parodie puisque Pékin sélectionne les candidats par un « Comité électoral » dont la moitié est directement désignée par le gouvernement central et une autre partie est sous sa coupe. La plupart des candidats sont des capitalistes. Contre ce simulacre, la jeunesse s’est levée en masse, posant la question des droits démocratiques pour toute la Chine.
Face au mouvement de la jeunesse, le gouverneur en place Leung Chun-Ying a opté pour la répression, en lien avec le gouvernement Xi Jinping de Pékin. Le 26 septembre, les policiers ont attaqué le rassemblement des étudiants qui s’étaient installés devant les bâtiments du gouvernement du territoire.
Le dimanche 28 septembre, des dizaines de milliers de travailleurs rejoignirent les jeunes. Trois quartiers, dont le centre politique et économique de Hong Kong (appelé Central), se couvrent de tentes pour les occuper en permanence et tenter d’arracher le retrait de la décision dictée par Pékin. Comme les manifestants se protégeaient des bombes aérosols au poivre, des canons à eau et des gaz lacrymogènes de la police avec leurs parapluies, des journalistes l’ont appelé dès le 28 « révolution des parapluies ». La direction du mouvement l’a édulcoré en « mouvement des parapluies ».
Le groupe Facebook Hong Kong Democracy Now (démocratie à Hong Kong maintenant) s’est rebaptisé « Umbrella Movement » (mouvement des parapluies) : « Les médias étrangers ont appelé ce mouvement la “révolution des parapluies”. Ce n’est guère une révolution. “Mouvement des parapluies” est un nom plus approprié ». (L’Obs, 30 septembre 2014)
La direction pacifiste des étudiants sauve le gouverneur nommé par Pékin
Face à la répression policière, la Fédération des étudiants de Hong Kong et l’organisation lycéenne, au lieu d’organiser l’auto-défense des manifestations et des rassemblements, ont prêché aux manifestants la « non-violence » et la « désobéissance civique ».
Logiquement, la direction syndicale étudiante et celle des lycéens ont rejoint OCLP (Occuper Central avec amour et paix), un front bourgeois regroupant des prêtres, des capitalistes, des députés de partis bourgeois et des bureaucrates syndicaux. OCLP fait référence à Gandhi, le nationaliste bourgeois qui rejetait le progrès scientifique et technique et conseillait aux paysans et ouvriers de l’empire des Indes de se laisser massacrer par les troupes britanniques.
À notre époque, la bourgeoisie « démocratique » a peur de la révolution et se révèle partout incapable de se battre réellement pour les libertés. OCLP défend la propriété privée et se borne à demander un aménagement de la constitution pour Hong Kong. Il s’est donc opposé à la demande des libertés démocratiques pour toute la Chine.
L’occupation des quartiers était massive et populaire chaque fin de semaine, ce qui démontrait que de nombreux travailleurs étaient disponibles pour protéger les jeunes et se mobiliser. La convergence de la jeunesse scolarisée et du prolétariat de Hong Kong pouvait obtenir des élections libres, une victoire contre le gouverneur et le gouvernement central et ouvrir la voie à la révolution socialiste dans toute la Chine.
Mais le porte-parole de la Fédération des étudiants de Hong Kong, Alex Chow, refusa d’appeler les syndicats de travailleurs à la grève générale, s’adressant au contraire au gouverneur. La deuxième confédération syndicale (Confédération des syndicats de Hong Kong) fut contrainte à un geste de solidarité qu’elle borna à 24 heures de grève, la soupape de sécurité de toutes les bureaucraties syndicales dans le monde. Pendant ce temps, la bureaucratie de la principale organisation syndicale (Fédération des syndicats de Hong Kong), liée au gouvernement de Pékin, cautionnait la répression de la police bourgeoise contre les étudiants et les lycéens.
Ainsi divisés, faute d’organisation ouvrière révolutionnaire, sans assemblées et comités élus capables au fil de l’expérience de la lutte de changer la direction capitularde, la jeunesse et la classe ouvrière n’ont pas joint leurs forces et le mouvement est restée dans les mains des petits bourgeois et des bourgeois qui le conduisaient à l’impasse.
Le gouvernement central du Parti « communiste » chinois (PCC) et son homme de paille Leung avaient donc des marges de manœuvre. Comme le parti bourgeois Guomindang l’avait fait en 1927 contre les ouvriers de Shanghai, ils envoyèrent à partir du 3 octobre les « triades » (la mafia) contre les jeunes désarmés. Mais la direction OCLP du mouvement, qui craignait la révolution par-dessus tout, persista dans l’imbécile non-violence. Le 5 octobre, le syndicat étudiant accepta de discuter avec Leung alors que la police et les truands attaquaient les rassemblements étudiants. Le mouvement déclina. Le 10 novembre, la manifestation ne regroupa qu’un millier d’étudiants.
Xi Jinping, secrétaire général du parti bourgeois unique PCC depuis octobre 2012, a surmonté la menaçante révolte de la jeunesse à Hong Kong et y a rétabli l’ordre grâce à l’aide des partis bourgeois « démocratiques » locaux et des bureaucraties syndicales. Toutes les puissances impérialistes en sont soulagées, même ses rivales. Mais quand le relais sera pris par le prolétariat de Hong Kong et du continent, toute la réaction mondiale déchantera.