Rapport international présenté à la 9e Conférence du GMI

La course au profit des entreprises capitalistes, la rivalité des États bourgeois empêchent de réduire l’émission de gaz à effet de serre et les déchets plastiques, entrainent l’humanité vers une nouvelle guerre mondiale. Derrière la montée du protectionnisme, la guerre en Ukraine et le génocide des Palestiniens, l’opposition entre les deux principaux impérialismes de la planète, les États-Unis et la Chine, se développe.

La marche à la catastrophe climatique

Le 5e rapport depuis 2019 publié le 22 septembre par le Stockholm Energy Institute (SEI), Climate Analytics et l’International Institute for Sustainable Development, constate qu’une vingtaine de pays représentant à eux seuls plus de 80 % de la production totale d’énergies fossiles prévoient de produire, d’ici à la fin de la décennie, 120 % de plus que le volume de combustibles fossiles nécessaire pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, et 77 % de plus que ce qui serait compatible avec un réchauffement de 2 °C. Les COP se succèdent, tous les scientifiques ne cessent d’alerter, mais le capitalisme au stade impérialiste est incapable de stopper la marche à la catastrophe climatique. Au contraire, il l’aggrave. Cette question est déjà une menace existentielle pour la vie de centaines de millions d’hommes. La survie de l’impérialisme implique inévitablement la barbarie aussi sur le plan environnemental et climatique.

Pour la résoudre, il n’y a pas d’autre alternative que d’en finir le plus vite possible avec le capitalisme, que les producteurs, c’est-à-dire les travailleurs, décident eux-mêmes de ce qu’il faut produire, comment et combien, pour respecter et les hommes et l’environnement. C’est une dimension essentielle du combat des communistes internationalistes. Il nous faut intégrer systématiquement ces questions dans nos analyses, notre propagande, les aborder en tant que communistes, en s’appuyant sur la science, sans céder un pouce au malthusianisme, à la décroissance… que propagent souvent les partis écologistes qui sont des partis bourgeois, qui préconisent d’une manière ou d’une autre l’aménagement du capitalisme pour essayer vainement de le rendre plus vert. Il nous faut dénoncer l’hypocrisie de la bourgeoisie qui prétend lutter en paroles contre le réchauffement climatique mais fait tout le contraire en actes. Nous devons ouvrir une perspective révolutionnaire notamment à tous ces jeunes qui s’indignent de cette situation et cherchent à agir.

Chine

La Chine a tenu les 31 aout et 1er septembre le sommet de Tianjin avec un vingtaine de dirigeants étrangers, Poutine, mais aussi Modi, douché par l’imposition de droits de douanes à 50 % décidés par Trump pour punir l’Inde d’importer du pétrole et du gaz russe. Ainsi Trump précipite l’Inde du côté chinois ! « Le dragon doit danser avec l’éléphant », a dit Xi.

Xi a déclaré lors de ce sommet :

La transformation qui va définir le siècle s’accélère en ce moment dans le monde, avec une nette augmentation des facteurs d’instabilité, d’incertitude et d’imprévisibilité.

L’impérialisme chinois prétend incarner au contraire un pôle de stabilité et d’échange en « unifiant les forces du Sud global ». L’impérialisme chinois poursuit la construction d’alliances commerciales dans le cadre de l’OCS, qui intègre maintenant l’Inde, le Pakistan, l’Iran, mais aussi des BRICS avec le Brésil par exemple et poursuit son offensive diplomatique et commerciale en Amérique latine et en Afrique.

Cela ne signifie pas que tous ces pays forment désormais un bloc solide autour de l’impérialisme chinois. Au sein de l’OCS, l’Inde et le Pakistan viennent une nouvelle fois de se faire la guerre. Mais face à l’agressivité de l’impérialisme américain, l’impérialisme chinois leur apparait comme un recours possible. L’Inde qui conserve un conflit frontalier avec la Chine n’est pas totalement alignée sur la Chine ni sur l’alliance Chine Russie, elle achète par exemple ses avions de combat à Dassault et n’a pas participé ensuite au défilé militaire du 3 septembre. Ce défilé, le plus important jamais réalisé en Chine, est un défi à l’impérialisme américain, avec la présentation d’armes dernier cri, notamment les missiles hypersoniques, qui affirme la puissance militaire de l’impérialisme chinois.

Plus est exacerbée et intense la concurrence économique, plus forte est la tendance des capitalistes à y joindre la pression militaire. (Lénine, juin 1915)

Un autre exemple significatif de la montée en puissance de l’impérialisme chinois est le refus récent par la Chine d’autoriser l’importation des puces informatiques américaines Nvidia, alors qu’elle le réclamait encore il y a peu. Pour éviter de livrer à la Chine les modèles les plus avancées de ces puces informatiques, l’impérialisme américain avait en effet imposé à Nvidia de produire des modèles moins performants destinés au marché chinois. La Chine estime désormais être capable de produire elle-même des puces équivalentes.

Mais cette puissance affichée est minée de l’intérieur par la crise de l’impérialisme chinois. Les allocations chômage ont augmenté de 27 % au 1er semestre 2025, la consommation intérieure baisse, malgré les mesures de relance, les investissements des entreprises ont baissé de 1,5 % au 1er semestre, de 12 % dans l’immobilier qui reste un secteur sinistré et évidemment les restrictions aux exportations et les droits de douanes affectent l’économie chinoise. La crise de surproduction est particulièrement évidente dans le secteur automobile, devenu un des fleurons du capitalisme chinois, avec une guerre des prix meurtrière entre les trop nombreux constructeurs, qui participe à la déflation en cours en Chine. Derrière les chiffres officiels, il y aurait selon le journal hongkongais HKEJ environ 30 millions de jeunes diplômés entre 2020 et 2024 qui restent sans emploi, d’après Ding Xueliang, professeur émérite de l’Université des sciences et technologies de Hong Kong. Mais ceux qui sont employés doivent faire face le plus souvent à une exploitation féroce, selon le système dit « 996 », soit un travail de 9 h du matin à 9 h du soir 6 jours par semaine. Devant l’aggravation de sa situation, le prolétariat chinois va nécessairement relever la tête à un moment ou un autre

Ukraine

La tentative de Trump de détacher Poutine de la Chine n’a pas marché. Trump a soutenu autant qu’il le pouvait l’impérialisme russe, mais il a échoué dans sa tentative d’obtenir un accord de paix sur le dos des Ukrainiens. Cet accord signifiait la capitulation sans conditions de l’Ukraine agressée. Désormais la guerre se durcit avec l’accentuation de la pression russe.

Ce sont désormais les impérialismes européens qui achètent des armes aux Etats-Unis pour les livrer ensuite à l’Ukraine. Cyniquement, Trump a posté un message le 23 septembre déclarant que « Avec du temps, de la patience et le soutien financier de l’Europe et en particulier de l’OTAN, les Ukrainiens étaient en mesure de retrouver leur pays dans sa forme originelle », qualifiant la Russie de « tigre de papier ».

Il est vrai que l’économie russe commence à montrer des signes de faiblesses. Les revenus tirés du pétrole et du gaz qui financent l’économie d’armement ont chuté de 23 % sur les neuf premiers mois de l’année 2025. La Banque centrale russe a imprimé des roubles pour financer les dépenses d’armement, provoquant une forte inflation. Pour tenter de juguler cette inflation, les taux directeurs de la Banque centrale ont été portés à 18 %. La phase de surrégime de l’économie, entrainée par les dépenses militaires qui représentent maintenant 40 % de la dépense publique, n’aura duré que moins de deux ans. C’est maintenant une période de stagflation qui s’ouvre, avec un appauvrissement de la population, sommée de payer pour la guerre de son impérialisme. Dans ces conditions, la répression des opposants à la guerre en Russie est quotidienne.

À cette étape, il faut récuser toute fausse symétrie entre la Russie et l’Ukraine, soutenir inconditionnellement le droit de l’Ukraine à se défendre tout en dénonçant le gouvernement bourgeois de Zelensky qui mène la guerre comme tout gouvernement bourgeois, en défense de ses capitalistes et contre son prolétariat, soutenir les courageux emprisonnés politiques opposants à guerre de leur propre impérialisme en Russie, dénoncer les manœuvres de l’OTAN et de l’UE.

États-Unis

Trump poursuit son offensive sur le plan intérieur pour assoir un pouvoir qui prend des traits de plus en plus fascisants, contre les libertés démocratiques, contre les universités, contre la science, contre la presse… et surtout contre les étrangers. Les descentes de la Garde nationale à Los Angeles, puis Washington commencent à dessiner un État policier. Les opérations de l’ICE contre les migrants, avec ou sans papiers ont des allures de rafles. L’utilisation du meurtre de Kirk pour rassembler une populace dans la chasse aux « communistes » s’apparente à des menées fascistes. Le mouvement Antifa vient d’être classé comme organisation terroriste le 22 septembre. En cherchant à museler toute opposition, la fraction de la bourgeoisie américaine au pouvoir cherche à domestiquer la classe ouvrière pour l’entrainer dans la préparation de la guerre avec la Chine. Devant 800 hauts gradés réunis sur la base militaire de Quantico le 30 septembre, Trump a invité les soldats américains à se servir des villes démocrates comme « terrain d’entrainement », promettant de les « remettre en ordre une par une », pendant que son ministre de la défense, qu’il vient de rebaptiser « ministre de la guerre », exhortait les troupes à retrouver « l’esprit guerrier ».

Le soutien au génocide de Gaza, le bombardement de l’Iran, les menaces militaires contre le Venezuela, les droits de douanes tous azimuts, le rejet de toutes normes pour limiter les émissions de gaz à effet de serre, sont le volet extérieur de cette offensive contre les libertés démocratiques en interne.

Le renchérissement des droits de douanes sur les importations commence à faire remonter l’inflation. La politique protectionniste de Trump ne redonnera pas une jeunesse à l’impérialisme américain, au contraire, même s’il est parvenu à imposer des droits de douanes plus ou moins importants à la plupart des impérialismes moins puissants, dont les impérialismes européens, et aux autres pays. Ces droits de douanes ne redonneront pas plus de force à l’impérialisme américain, et précipitent au contraire la survenue d’une crise économique mondiale et rapprochent des affrontements militaires inter impérialistes, notamment entre les Etats-Unis et la Chine.

Les questions de la défense des travailleurs (et étudiants) étrangers, de la rupture des syndicats avec les deux partis bourgeois et de la construction d’un parti ouvrier de masse sont posées.

Génocide à Gaza

La situation mondiale est également marquée par la poursuite du génocide des Palestiniens à Gaza avec le soutien complet de l’impérialisme américain, alors que la majorité des autres impérialismes prennent une distance prudente avec Israël devant l’ampleur des massacres. L’Allemagne a suspendu ses exportations à Israël d’armes pouvant servir à Gaza le 8 aout dernier. L’Espagne a fait de même le 8 septembre. Nombre d’impérialismes craignent que la poursuite de l’agression sioniste, non seulement en Palestine, mais à l’encontre du Liban, de la Syrie, de l’Iran, du Yémen, du Qatar, ne finisse par déstabiliser les régimes du Proche-Orient, en jetant leur population dans la rue malgré les interdictions de manifester. La reconnaissance d’un État palestinien relancée par la France est une tentative minable de diversion, tentant de ressusciter le mythe de la coexistence de deux États, pendant que les bombes pleuvent sur Gaza.

Le 29 septembre 2025, en présence du premier ministre israélien Netanyahou, le président américain Donald Trump a présenté un « plan de paix » en 20 points visant à « mettre fin à la guerre à Gaza ». Netanyahou l’a approuvé publiquement.

Dans une rare unanimité, aux côtés des fans jurés de l’idéologie MAGA, même des médias et des gouvernements capitalistes habituellement critiques envers Trump ont applaudi. Les partis réformistes (travaillistes, sociaux-démocrates ou « communistes »), les partis bourgeois libéraux (au sens de démocrates) ou écologistes se disent prudemment optimistes, parlent de « brèche ouverte », de « voix pour la paix », « un premier pas » …

Mais le plan Trump n’est pas une solution de paix. Il constitue la tentative :

  • d’écraser la résistance palestinienne,
  • de placer la question nationale sous un contrôle inter-impérialiste,
  • de transformer la bande de Gaza en un laboratoire de zones économiques spéciales capitalistes,
  • de stabiliser la domination coloniale d’Israël.

Il s’inscrit dans la continuité directe des faux « plans de paix » précédents (partition de l’ONU de 1948, accords d’Oslo de 1993, feuille de route de l’ONU de 2003, plan Kushner-Trump de 2020…), qui poursuivaient un seul objectif : la reconnaissance de la colonisation de la Palestine et le refus du droit à l’autodétermination du peuple palestinien.

Au demeurant, ce plan laisse toute latitude à Israël pour interrompre à tous moments le processus et reprendre sous n’importe quel prétexte la guerre d’extermination des Palestiniens de Gaza.

En France, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis…, la répression continue de s’abattre sur les militants qui défendent les droits des Palestiniens. Le massacre des Palestiniens est une défaite pour la classe ouvrière mondiale, dont la responsabilité première incombe aux partis réformistes, aux bureaucraties syndicales, qui ont refusé depuis deux ans d’organiser le boycott ouvrier des livraisons d’armes à Israël, qui ont mis le plus souvent sur le même plan l’État colon sioniste et le peuple palestinien victime et qui continuent de le faire en soutenant la « solution » à deux États. Pourtant des manifestations massives ont lieu en Espagne, en Italie, après celles en Grande-Bretagne, mais les partis ouvriers bourgeois et les bureaucrates syndicaux les maintiennent dans les illusions, sur le gouvernement espagnol, sur la « solution » à deux États.

Montée de la réaction

Le manifeste de la conférence du CoReP de Valence du 20 octobre 2024 affirmait :

Nationalisme et protectionnisme, xénophobie, et racisme, cléricalisme et fondamentalisme religieux, masculinisme et hostilité aux droits des femmes, haine des minorités (religieuses, ethniques, sexuelles), complotisme et obscurantisme antivaccin… sont les étendards de la réaction. Les partis bourgeois traditionnels deviennent de plus en plus réactionnaires, ils sont eux-mêmes concurrencés par l’émergence de partis fascisants, voire fascistes, ou bien nourrissent des courants fascisants en leur sein comme le Parti républicain américain.

Cette montée de la réaction sur tous les continents peut prendre et même combiner des formes différentes, mais c’est toujours le prolétariat qui est visé, et d’abord la fraction du prolétariat la plus opprimée parce qu’étrangère, dépourvue de droits, qui est désignée comme bouc émissaire et qui en fait les frais. À la xénophobie, au racisme, au nationalisme et au protectionnisme, opposons la liberté totale de circulation et d’installation pour tous les migrants, la suppression des frontières, l’internationalisme prolétarien et la construction du socialisme mondial ! C’est le combat des communistes internationalistes !

Force est de constater que cette tendance se renforce encore un peu plus, non seulement aux Etats-Unis, mais aussi en Europe, comme expression du pourrissement de l’impérialisme et faute d’une perspective ouvrière communiste. Être dans la rue n’est pas synonyme de progressisme, comme l’ont prouvé les mouvements fascistes des années 1920 et 1930, l’assaut fasciste à Washington en 2021, les protestations antivaccins en 2022, l’assaut fasciste à Brasilia en 2023, la manifestation contre les étrangers de plus de 100 000 personnes à Londres le 13 septembre à l’appel de fascistes.

Pas plus que le suffrage universel ne garantit la démocratie, en témoignent la victoire en juin du candidat du PiS à la présidentielle en Pologne en juin, le pogrome raciste en juillet contre les ouvriers agricoles marocains à Torre Pacheco, les résultats électoraux de l’AfD en Allemagne qui triple ses voix (15 %) dans la Ruhr, la progression des DS fascisants en Suède qui participent au gouvernement avec un parti bourgeois « démocratique », l’assise dont bénéficie Meloni en Italie, l’aggravation de la répression en Turquie avec la tentative de prise de contrôle par la force de l’autre grand parti bourgeois, le HDP, concurrent du parti d’Erdogan, l’AKP…

La montée du militarisme va de pair avec la restriction du droit à la contraception et à l’avortement. Chaque État impérialiste veut disposer de chair à canon.

Exproprier le capital avant qu’il ne soit trop tard

La montée de la réaction implique que la défense des libertés démocratiques et des droits des femmes, la protection des migrants, des minorités, mais aussi la démocratie syndicale, la préparation de la grève générale, l’intervention chez les conscrits, l’organisation de milices ouvrières ou d’opprimés sont nécessaires pour la révolution, pour le communisme.

La France connait une crise politique faute de majorité parlementaire. La Serbie, le Népal, la Côte d’Ivoire, la Turquie, le Maroc, Madagascar… sont secoués par des mouvement de masse. Sans direction révolutionnaire, ces mouvements s’attaquent aux gouvernements bourgeois corrompus, à leur police et leur armée, parviennent parfois à les renverser, mais remettent toujours au bout du compte le pouvoir à d’autres fractions de la bourgeoisie.

Si la mobilisation de toute catégorie d’exploités et d’opprimés est légitime, appeler à multiplier les luttes ne suffit jamais pour avancer vers le socialisme.

S’il est légitime pour un parti ouvrier de présenter des candidats et d’agir dans les organismes délibératifs, il faut rappeler que le parlement, y compris sous la forme d’une assemblée constituante, ne peut renverser le capitalisme. Il faut rappeler que la formation d’un gouvernement bourgeois ou la participation à un gouvernement bourgeois, dans le cadre du capitalisme national, sont des trahisons.

Il existe une classe sociale mondiale qui a le pouvoir de prendre la tête de tous les exploités, de tous les opprimés, qui a la capacité d’exproprier le grand capital et la grande propriété foncière, de renverser les états bourgeois et leurs frontières. Pour une solution progressiste, la perspective du gouvernement ouvrier (ou du gouvernement ouvrier et paysan), ainsi que celle de la fédération socialiste de la région, du continent, sont décisives. Il faut une internationale ouvrière révolutionnaire pour faire triompher ce combat.

11 octobre 2025