L’Union européenne a été conçue pour entuber les États-Unis. C’était l’objectif et ils y sont parvenus. (Trump, 26 février)
Le président des Etats-Unis a annoncé le 2 avril, proclamé « jour de libération », une avalanche de droits de douanes, au-delà d’un tarif de base de 10 % concernant la plupart des produits importés, touchant beaucoup plus sévèrement de nombreux pays ou zones, à l’exception notable de la Russie. Ainsi, la Chine est -elle taxée à 34 %, le Cambodge à 49 %, le Japon à 24 %, l’Inde à 26 %, etc. Les exportations européennes sont frappées à hauteur de 20 %, sauf pour la Grande-Bretagne qui bénéficie d’un traitement de faveur avec seulement 10 %. Déjà, la Chine vient d’instaurer par mesure de représailles 34 % de taxes sur les produits importés des États-Unis.
Le relèvement significatif des barrières protectionnistes a immédiatement entrainé, par crainte de la récession, un début de retrait des capitaux des principales places boursières, précipitant la chute des cours, pouvant déboucher à court terme sur un krach boursier. Pour les bourgeoisies européennes, le coup est rude. Ces taxes se juxtaposent avec celles déjà décidées de 25 % concernant l’acier et l’aluminium, les automobiles et leurs composants. En 2024, l’Allemagne a exporté pour 158 milliards d’euros en direction des États-Unis, qui avaient repris à la Chine la place de premier partenaire commercial, l’Italie pour 67 milliards, l’Irlande pour 52 milliards et la France pour 44 milliards.
La volonté assumée d’anéantir l’Union européenne

Ces droits de douanes vont entrainer une chute des exportations avec le renchérissement des produits, la perte de marchés, la réduction de la production, la fermeture de certains sites ou leur transfert aux États-Unis pour échapper aux taxes. La commissaire européenne Van der Leyen a beau promettre une réponse « ferme et proportionnée », la prudence reste de mise par crainte d’une escalade incontrôlée. D’autant que le secrétaire au Trésor américain a prévenu :
Ne répliquez pas. Détendez-vous, encaissez le coup, et attendez de voir comment la situation évolue. Car si vous ripostez, il y aura une escalade. (Scott Bessent, Fox News, 2 avril)
Théoriquement, les relations commerciales sont du domaine exclusif de la Commission européenne, mais chaque bourgeoisie œuvre pour obtenir pour son compte des exemptions ou au moins un adoucissement de la peine. De plus, les capitalistes sont des gens pragmatiques, pas guidés par le patriotisme que leurs représentants politiques inculquent aux exploités. Ceux qui détiennent Volkswagen, Stellantis ou Total Energie, par exemple, entendent bien préserver au maximum leurs intérêts aux États-Unis ou, du moins, limiter la casse. Volkswagen et Stellantis ont indiqué vouloir cesser ou diminuer provisoirement leur production destinée aux Etats-Unis dans leurs usines au Canada et au Mexique, également frappée de taxes, pour l’augmenter sur leurs sites aux États-Unis ou même y construire de nouvelles usines. Total Energie n’a aucunement l’intention de renoncer à ses investissements, déjà très conséquents aux États-Unis, pas plus que le transporteur maritime CMA CGM qui a annoncé en mars y investir pour 20 milliards de dollars. Macron peut bien appeler publiquement au « patriotisme économique », il a peu de chance d’être suivi aveuglément par les patrons. Mais cette guerre commerciale accélère inéluctablement, comme le président français, le futur chancelier allemand, le premier ministre britannique l’annoncent, les préparatifs de la guerre tout court.
Des chars russes demain sur les Champs-Élysées ?
Non seulement les bourgeoisies impérialistes de l’Union européenne sont écartées des négociations sur l’Ukraine, non seulement elles sont dans le viseur dans la guerre commerciale engagée par Trump, mais celui-ci les a également prévenues que l’appartenance à l’OTAN n’offrirait plus une garantie systématique de défense en cas d’agression. L’assistance militaire américaine dépendrait de la hauteur des contributions de chacun aux dépenses d’armement, que Trump a fixées à 5 % du PIB. Un monde s’écroule ! Les États bourgeois européens, même la Grande-Bretagne traditionnellement servile, ne voient désormais leur salut que dans le réarmement massif.

La justification de ces dépenses militaires serait la menace que ferait courir l’impérialisme russe. C’est, en l’état actuel, donner beaucoup plus de forces qu’il n’en a à l’impérialisme russe, même si sa pression est déjà bien réelle dans des États voisins comme la Géorgie, la Moldavie, les États baltes. En réalité, ce réarmement est le signe que la France et l’Allemagne sont poussées dans une impasse et craignent de perdre toute influence dans la lutte entre les impérialismes les plus puissants pour le repartage du monde. D’où l’acharnement du gouvernement Bayrou-Valls à négocier en Nouvelle-Calédonie (qui occupe une position stratégique en Océanie) et l’appui de Macron à la Jordanie comme au Liban malmené par Israël avec l’appui complet des États-Unis et son dépoussiérage de la « solution à deux États ».
Dieu pour tous et chacun pour soi !
Un plan de 800 milliards d’euros pour le réarmement a été lancé le 4 mars au niveau de l’UE. En réalité, seuls 150 milliards pourront être affectés sous forme de « prêts européens », les 650 autres ne sont que des autorisations d’endettement, au-delà des critères de Maastricht, données à chaque État national pour ses propres dépenses d’armement. L’Allemagne, 3e puissance économique mondiale, de loin l’impérialisme dominant en Europe, même si elle est en récession depuis le début 2023, a pris les mesures pour s’adapter à cette nouvelle situation. Le futur chancelier Merz a fait adopter le 18 mars, par les votes conjoints des députés CDU/CSU, SPD et Grunen (Verts kaki), un plan de 1 000 milliards d’euros pour le réarmement et l’économie, dont 500 consacrés à la rénovation des infrastructures, assorti de la levée, pour les dépenses militaires, des strictes règles constitutionnelles limitant l’endettement. Il prévoit de dépenser 100 milliards par an pour l’armement.

Mais tous les capitalismes européens ne sont pas logés à la même enseigne. Beaucoup sont plus endettés que l’Allemagne. Les dépenses militaires des 27 pays de l’UE étaient déjà sur une forte pente ascendante, augmentant de 31% entre 2021 et 2024, pour atteindre 326 milliards d’euros. Elles vont faire un nouveau bond, en exerçant une pression supplémentaire contre le prolétariat, à la fois économique et idéologique en rameutant les sirènes de la défense de la patrie. La Pologne y a déjà consacré 4,12 % de son PIB en 2024. La France annonce vouloir doubler son budget militaire, pour passer de 50 milliards à 100 milliards d’ici 2030.
La concurrence capitaliste pour fournir les forces de destruction de l’humanité
Qui va tirer profit de ces budgets militaires, les industries d’armement françaises, allemandes, italiennes… ou bien américaines ? En effet, si, ces cinq dernières années, les pays européens membres de l’OTAN ont plus que doublé leurs importations d’armes, 64 % proviennent des États-Unis. Il ne s’agit pas que d’une dépendance politique, mais aussi technologique. Changer de fournisseur d’avions de chasse n’est pas aussi facile que de changer de chemise ou même de chef de gouvernement. Derrière les sourires de façade et les appels à la constitution d’une défense européenne, les rivalités inter-impérialistes et luttes d’influence s’aiguisent, notamment entre l’impérialisme britannique, l’impérialisme français et l’impérialisme allemand. Réaliser une défense européenne unifiée impliquerait une Europe unifiée, ce qui est impossible en dehors des États-Unis socialistes d’Europe. C’est donc d’un renforcement des armées nationales qu’il s’agit et chaque bourgeoisie va tenter de réaliser l’union nationale patriotique autour de l’armée et de son budget.
Pour le prolétariat, l’union nationale avec sa bourgeoisie autour du militarisme n’est pas seulement un piège destiné à lui faire accepter des sacrifices pour remplir les poches des marchands d’armes, c’est aussi le poison du chauvinisme et du nationalisme pour dresser les peuples les uns contre les autres.
Front unique ouvrier contre le militarisme : Aucun accord, aucune alliance, aucun vote des organisations ouvrières pour les budgets militaires ! Manifestations unies des syndicats et des partis ouvriers contre les budgets militaristes !
Les bourgeoisies impérialistes se préparent à la guerre : Non à l’union nationale ! Sortie de l’OTAN ! Indépendance de la Kanaky ! Guerre contre notre bourgeoisie !