Qu’il faille revenir sur ces questions théoriques est une nécessité, tant l’idéologie bourgeoise répandue par les réformistes et les staliniens, infestant le mouvement ouvrier, a introduit de confusion sur ces problèmes.
Alors que les trotskystes sont les seuls à caractériser les gouvernements de front populaire pour ce qu’ils sont : des gouvernements contrerévolutionnaires de collaboration de classes, ayant pour mission de défendre l’État bourgeois quand les masses posent le problème de leur propre pouvoir, il est de bon ton dans la « gauche », jusque dans les organisations se réclamant et usurpant l’étiquette du trotskysme, d’envisager ces questions sous l’angle d’un simple manque à gagner. Bien sûr, disent les révisionnistes, ce n’est pas un gouvernement ouvrier, mais c’est une alternative réformiste… Et finalement, ils laissent supposer que ces gouvernements auraient accordé hier les conquêtes sociales, et que demain, peut-être…
La confusion est si grande qu’il est légitime de revenir sur des notions qu’on croyait acquises depuis Marx et Engels, et que, au feu de la lutte, ont repris Lénine contre Kautsky, puis Trotsky à propos de la révolution en France et en Espagne en 1936.
Prétendre du front populaire qu’il ne s’agirait que d’une « alternative globale réformiste » sème la confusion. Même pour ce qui est de la période classique du développement du parlementarisme, le millerandisme et le bloc des gauches n’ont pas correspondu à une période de « croissance pacifique » de l’État démocratique bourgeois, de construction d’un « État populaire libre », qui n’a jamais existé. Ces formules désarment l’avant-garde du prolétariat par rapport à ses tâches, en masquant l’essentiel : les fronts populaires ne se constituent et ne viennent au pouvoir qu’à l’époque « des guerres et des révolutions », qu’avec la révolution prolétarienne elle-même, et contre elle. Ils sont l’expression de la contrerévolution.