Nous appelons les syndicats des secteurs concernés à refuser de fabriquer des armes destinées à Israël, refuser de transporter des armes vers Israël, adopter des motions dans leur syndicat à cet effet, prendre des mesures contre les entreprises complices impliquées dans la mise en œuvre du siège brutal et illégal mené par Israël, faire pression sur les gouvernements pour qu’ils mettent un terme à tout commerce militaire avec Israël et, dans le cas des États-Unis, à son financement.
Cette demande est justifiée. La responsabilité de toute organisation ouvrière dans le monde est de prendre parti contre toute colonisation, de défendre tout peuple opprimé.
Un génocide est en cours à Gaza
« Aucun terroriste n’est à l’abri », a déclaré le premier ministre israélien le 7 janvier. Nous en connaissons pourtant un certain nombre, dont le chef de l’état-major israélien Halevi et Netanyahou lui-même.
En trois mois, le nombre de morts à Gaza est de 23 000 dont plus de 70 % sont des femmes et enfants. Il y a plus de 60 000 blessés. L’armée russe, en deux ans de guerre pour recoloniser l’Ukraine, a causé moins de victimes civiles (environ 10 000). Il faut s’attendre à retrouver de nombreux cadavres ensevelis par les bombes de l’armée israélienne. En plus des bombardements, les attaques terrestres contre les hôpitaux, les exécutions sommaires, les assassinats des salariés des organisations humanitaires, les tortures et humiliations sont tristement documentés.
Les destructions d’infrastructures sont massives : plus de 30 % des bâtiments sont touchés. La majorité des hôpitaux sont à l’arrêt par manque d’électricité, de carburant, de moyens quand ils ne sont pas pris pour cible. L’occupant en expulse parfois les malades les blessés et les soignants puis les bulldozeurs sionistes rasent ce qu’ils veulent, y compris des tentes avec des réfugiés dedans comme à l’hôpital Kamal-Adwan, à Beit Lahya dans le nord de Gaza (Le Monde, 20 décembre). Il n’y a que 13 hôpitaux sur 36 qui fonctionnent partiellement. Selon MSF, il n’y a plus que 10 soignants pour 500 patients et un tri morbide est imposé pour sauver quelques vies (Mediapart, 27 décembre).
L’armée sioniste terrorise, détruit, affame, assassine. Plus de 85 % des 2,3 millions de Gazaouis sont déplacés sans possibilité de fuir vers un autre pays. Selon les ONG encore sur place, plus de 80 % de la population est en insécurité alimentaire. Le blocage des vivres exigé par Israël est accepté par l’Égypte et les puissances impérialistes. Selon l’ONU, 117 camions sont passés à Rafah depuis le 21 octobre au lieu de 500 quotidiennement avant le 7 octobre. Le nombre croissant de maladies (trouble respiratoire, diarrhée, gale, impétigo, jaunisse) inquiète l’OMS qui redoute des pandémies majeures sans accès à l’eau potable, à la nourriture et aux soins.
À ce terrorisme à grande échelle à Gaza, il faut ajouter celui de la poursuite violente de la colonisation en Cisjordanie ainsi que les assassinats dans un pays étranger, le Liban, de responsables du Hamas et du Hezbollah.
Par une impudente inversion de l’histoire, Israël dit « se défendre » contre une « organisation terroriste », ce qui justifierait au passage la solidarité des « démocraties » occidentales. Cependant, un journal israélien révèle que le premier ministre Netanyahou aurait demandé au ministre des affaires stratégiques Ron Dermer des plans « pour réduire la population de la bande de Gaza à un minimum » (Israel Hayom, 30 novembre). Il s’agit de chasser la population arabe d’une partie supplémentaire de la Palestine et d’annexer celle-ci.
La bande de Gaza fait partie de la terre d’Israël… un jour viendra où nous y retournerons. (Orit Strock, ministre des missions nationales, 21 mars)
Nous combattons des animaux humains. (Yoav Gallant, ministre de la défense, 9 octobre)
Plutôt que d’envoyer de l’argent pour reconstruire Gaza, la communauté internationale peut participer à financer la réinstallation et aider les Gazaouis à construire leur nouvelle vie dans leurs nouveaux pays d’accueil. (Gila Gamliel, ministre du renseignement, 19 novembre)
Nous intensifierons les combats dans les jours à venir et ça sera une longue guerre qui n’est pas près de finir. (Benyamin Netanyahou, premier ministre, 25 décembre)
Pour avoir la sécurité, nous devons contrôler le territoire, et pour contrôler militairement le territoire sur le long terme, nous avons besoin d’une présence civile. Si nous agissons de manière stratégiquement correcte et encourageons l’émigration, s’il y a 100 000 ou 200 000 Arabes à Gaza et non pas 2 millions, tout sera complètement différent (Bezalel Smotrich, ministre des finances, 31 décembre)
Voilà qui explique l’assassinat systématique des journalistes palestiniens de Gaza, 79 au total, comme l’interdiction par l’armée sioniste des journalistes étrangers dans toute la bande de Gaza. La Cour suprême, présentée par certains comme la gardienne de la démocratie israélienne, vient de ratifier cette mesure.
Saisie par l’Association de la presse internationale représentant les journalistes travaillant pour des organes de presse internationaux qui couvrent Israël, la Cisjordanie et la bande de Gaza, la justice israélienne a opposé le risque qu’un tel accès « ne mette en péril les forces en action sur le terrain et la sécurité des soldats » (Times of Israel, 9 janvier).
La répression n’épargne pas les citoyens d’Israël.
Entre le 7 octobre et le 13 novembre, 251 citoyens palestiniens d’Israël ont été arrêtés, enquêtés ou ont reçu des avertissements. Parmi ces actions, 121 ont été déclenchées suite à des publications sur les réseaux sociaux. Cette escalade de répression à l’encontre des Palestiniens, conjuguée au climat général dans le pays, joue un rôle crucial dans la censure des critiques envers le gouvernement et l’attaque de l’armée israélienne à Gaza. Progressivement, cette répression s’étend également aux militants juifs de la gauche radicale, comme ce fut le cas pour Meir Bruchin, dont la seule action était de publier des récits et des photos des victimes palestiniennes à Gaza. (Nitzan Perelman, Yaani, 11 décembre)
La complicité des puissances impérialistes occidentales
Ce nettoyage ethnique serait impossible sans le soutien des parrains d’Israël que sont les Etats-Unis, la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, le Japon, l’Italie… En retour, Israël est un bras armé de l’ordre impérialiste contre les masses du Proche-Orient et les régimes récalcitrants (Égypte, Syrie, Libye et Irak hier, Syrie et Iran aujourd’hui). Biden a même empêché la demande par le Conseil de sécurité d’un cessez le feu. Comble du cynisme, le 22 décembre, le Conseil de sécurité autorise l’entrée « massive » de camions sans exiger de cessez-le-feu alors que l’armée sioniste attaque des convois humanitaires et des ambulances.
Entre 1946 et 2023, Israël reçoit au total 260 milliards des États-Unis (3,8 milliards de dollars par an ces derniers temps). Le 2 novembre, le congrès étasunien accepte une rallonge de 14,3 milliards demandée par Biden. Il s’agit en même temps d’une subvention aux groupes de l’armement (dont Boeing) puisque l’aide de l’État américain sert à acheter des armes américaines. Pour l’offensive contre Gaza, 244 avions et 20 navires américains ont livré 10 000 tonnes de matériel militaire (Times of Israel, 26 décembre). Il en va de même, à une échelle plus faible, avec l’Allemagne. L’Italie, la Grande-Bretagne et la France fournissent aussi des armes. Israël (9 millions d’habitants) est lui-même une puissance nucléaire grâce à l’aide de l’impérialisme français dans les années 1950 (90 ogives en 2023 selon le SIPRI), le 9e pays vendeur d’armes dans le monde et un fournisseur de logiciels d’espionnage des populations civiles qui rivalisent avec ceux de la Chine.
Sans ces aides et ces importations, Israël n’aurait pas de « dôme de fer » anti-roquettes, ni chars, ni drones ni canons, ni avions modernes. À cela, s’ajoutent les conseillers et le renseignement partagé ainsi que l’appui de 2 porte-avions américains et leurs 15 000 soldats, très bien escortés. D’autres navires et sous-marins militaires impérialistes (français, britanniques…) sont en mer Méditerranée, en mer Rouge et se coordonnent pour interdire tout soutien aux Palestiniens.
La plupart des gouvernements et des grands médias occidentaux mènent une campagne systématique pour discréditer tous ceux qui osent manifester le moindre soutien aux Palestiniens comme des antisémites (l’ancien chef Jeremy Corbyn du Parti travailliste en Grande-Bretagne, le chef Jean-Luc Mélenchon de LFI en France, l’universitaire Claudine Gay chassée de la présidence de l’université de Harvard aux États-Unis, la basketteuse Émilie Gomis éliminée du Comité olympique en France, etc.).
Dans les États à majorité arabe ou musulmane, les gouvernements bourgeois clament souvent leur solidarité avec les Palestiniens. Mais, derrière les proclamations, peut se cacher une participation à l’effort de guerre sioniste, rétribuée grassement à la bourgeoisie nationale. C’est le cas de la Turquie.
Les flux de marchandises comme l’acier et le pétrole, qui aliment pourtant la machine de guerre de Tel-Aviv, se poursuivent comme si de rien n’était… Depuis le début des frappes, le journaliste Metin Cihan a recensé 450 navires partis de Turquie vers Israël… L’entreprise Pamukkale Kablo, propriété de Mustafa Semerci, dirigeant fondateur du Parti de la grande union (BBP), une formation ultranationaliste d’extrême droite membre de la coalition gouvernementale, a continué à fournir des câbles. Le BBP s’était pourtant fait remarquer ces dernières semaines pour ses appels au boycott d’Israël et ses descentes musclées contre des cafés Starbucks, pris pour cible pour leur soutien supposé à Israël. (Le Monde, 28 décembre)
Pour un front unique ouvrier général contre la production et l’acheminement d’armes à Israël
Dans le monde entier, la sympathie des exploités et des opprimés va spontanément aux victimes de l’oppression, de la colonisation et du génocide. À l’inverse, les chefs du mouvement ouvrier inclinent vers la défense de l’ordre existant.
Les partis « réformistes » et les bureaucraties syndicales des puissances impérialistes mettent généralement sur le même plan Israël et les Palestiniens, avalisent la pseudo solution « des deux États » qui est celle de l’ONU depuis 1947, imposée par les États-Unis en 1993 au Fatah (ce qui a conduit à l’hégémonie actuelle du Hamas), prêchent scandaleusement le pacifisme aux Palestiniens et font diversion avec le refus des échanges culturels ou sportifs, le refus de consommer des produits israéliens.
Aux Etats-Unis, les directions de l’AFL-CIO et du SOC suivent le gouvernement Biden tout faisant taire les syndicats qui veulent boycotter l’armement d’Israël.
En Grande-Bretagne, sans appeler à manifester (il y a eu pourtant 400 000 personnes à Londres le 11 novembre), la direction confédérale du TUC mise sur « la paix » basée sur « deux États ». Le Parti travailliste dirigé par Starmer se tient sur la même ligne que le gouvernement du Parti conservateur et refuse même d’appeler à un cessez le feu.
En Allemagne, la direction de la DGB suit sa bourgeoisie rangée derrière Netanyahou. Le gouvernement SPD-FDP-Grünen fait voter à l’unanimité (avec l’AfD fascisante et DL, le modèle de LFI) le soutien à Israël tout en interdisant tout slogan antisioniste.
En France, le PS, les directions syndicales de FO, de l’UNSA et de la CFDT n’appellent même pas à protester contre le massacre. En plus de l’AFPS (où se trouvent le PCF et LFI), un collectif pacifiste regroupe les directions syndicales de la CGT, de la FSU, de Solidaires, de l’UNEF, ainsi que Participation et spiritualité musulmane (des islamistes qui ont assassiné des militants ouvriers au Maroc), le parti bourgeois EELV, avec LFI, le PCF, le NPA-AC, le PCOF, AL… Il fait pression sur Macron avec des manifestations les samedis qui se rangent derrière l’ONU qui a toujours reconnu Israël et avalisent la colonisation de la plus grande partie de la Palestine (seule la Cisjordanie serait occupée).
Nous demandons la libération des otages civils israéliens… Une paix juste et durable ne sera possible que dans le cadre de la reconnaissance des droits du peuple palestinien, et notamment de son droit à l’autodétermination. Elle implique l’arrêt de la colonisation et la fin de l’occupation israélienne, ainsi que le respect de l’ensemble des résolutions de l’ONU, y compris la résolution 194 qui prévoit le droit au retour des réfugiés. (Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, 12 décembre)
Les partis ouvriers bourgeois (PS, PCF, LFI) et leurs adjoints centristes s’inscrivent dans la politique internationale de leur État impérialiste.
Le Président de la République a affirmé une nouvelle fois l’attachement de la France à la sécurité d’Israël. Il a également rappelé que la libération de tous les otages est une priorité absolue pour la France… Il a rappelé l’impératif de protection des civils qui s’imposait à Israël et souligné l’urgence d’acheminer l’aide nécessaire à la population de Gaza, ainsi que la nécessité d’œuvrer à un cessez-le-feu durable… La seule solution viable d’un retour à la paix et à la sécurité pour tous. (Emmanuel Macron, Entretien téléphonique avec Benny Gantz, 2 janvier)
En Italie, la direction de la CGIL qui a invité Meloni à son congrès de mars dernier, se range derrière le gouvernement. Comme l’UIL et la CSIL, elle compte sur la « communauté internationale » (les États bourgeois, leur ONU) et non sur l’action internationale des travailleurs.
Malgré ces bureaucrates corrompus, des militants ouvriers, plusieurs syndicats se dressent déjà pour répondre à l’appel syndical palestinien. Le site Workers in Palestine rassemble 39 associations, sections, fédérations ouvrières et syndicales de 19 pays qui soutiennent l’appel. C’est un pas en avant.
Des syndicats de de dockers espagnols, italiens, grecs et turcs, de travailleurs belges du fret aérien s’opposent au transport d’armes.
Le collectif Labor for Palestine aux Etats-Unis rassemble les soutiens à l’appel et une tentative de blocage d’un navire d’armes a eu lieu à Oakland.
Au Canada, des syndicalistes se rassemblent devant les usines de production d’armement.
La coalition syndicale Workers for a Free Palestine en Grande-Bretagne est à l’origine de manifestations et de rassemblements devant des sites industriels militaires comme BAE ou Elbit.
En Inde, 12 fédérations syndicales du bâtiment s’opposent aux négociations pour envoyer 100 000 ouvriers remplacer les travailleurs palestiniens dont les permis ont été annulés par Israël.
Il faut une internationale ouvrière pour coordonner ces luttes et doter le prolétariat arabe et juif de la Palestine d’un programme commun. Dans tous les syndicats et dans les partis ouvriers, dans les manifestations et dans les comités de soutien à la Palestine, il faut adopter la position internationaliste prolétarienne :
Rupture de tous les syndicats et partis ouvriers avec les gouvernements soutenant Israël ! Ouverture des frontières aux réfugiés palestiniens !
Cessez le feu immédiat ! Retrait des troupes israéliennes de la bande de Gaza et de Cisjordanie ! Levée du blocus par Israël et l’Égypte de Gaza ! Libération de tous les prisonniers politiques palestiniens détenus et de Georges Abdallah en France ! Droit au retour des réfugiés !
Embargo sur la livraison de carburant et d’armes à Israël ! Retrait des flottes impérialistes envoyées au Proche-Orient ! Fermeture de toutes les bases militaires impérialistes de la région !
Pour une seule Palestine démocratique, multiethnique, bilingue et laïque ! Pour un gouvernement ouvrier et paysan en Palestine ! Pour une fédération socialiste du Proche Orient !
Une campagne internationale de masse peut arrêter le génocide, elle peut aider le prolétariat de la région à constituer des organisations ouvrières révolutionnaires capable de rassembler toutes les fractions de classe (arabe, juive, kurde, perse…) de la région.