La crise économique capitaliste cyclique s’annonçait déjà avant le coronavirus. À cette situation, s’est superposée la paralysie soudaine de l’économie chinoise, d’une importance capitale en raison de son rôle de deuxième puissance mondiale et de principal fournisseur des chaînes industrielles du monde entier. En outre, dans chaque pays où la maladie se développe, l’économie locale est paralysée à la fois par la propagation de la maladie et par les mesures socio-sanitaires nécessaires prises pour la contenir.
Les frontières sont fermées, le tourisme mondial s’effondre, les marchés boursiers dévissent… Dans tous les pays, des licenciements massifs sont annoncés, touchant des secteurs entiers : transport aérien et terrestre, automobile, tourisme, hôtellerie et restauration, divertissement, sport…
La crise sanitaire est survenue après des décennies de restriction budgétaire, de privatisation et de précarisation de l’emploi dans les systèmes de santé publique, là où ils existaient. De nombreux travailleurs n’ont pas de couverture médicale : des centaines de millions de mingongs (migrants de l’intérieur) en Chine, des dizaines de millions d’ouvriers et d’employés aux États-Unis, des milliards de salariés et d’indépendants, de paysans pauvres sur les cinq continents… Nulle part, il n’y a assez d’hôpitaux et de travailleurs de la santé. Il n’y a pas assez de moyens pour répondre aux besoins en médicaments et en matériel médical. La production de respirateurs artificiels et d’oxygène, si nécessaire pour les patients atteints de COVID-19, est insuffisante. La production et les prix de la plupart des médicaments sont soumis aux brevets détenus par les grandes entreprises pharmaceutiques…
La crise sanitaire se combine avec une crise économique que la bourgeoisie essaie de faire peser entièrement sur la population laborieuse. Ce genre de situation met en lumière les énormes contradictions qui caractérisent le capitalisme :
- Le moteur de la production capitaliste n’est pas la satisfaction des besoins humains avec le minimum de dommages à l’environnement. Le but du capital est la valorisation du capital (qui apparaît comme la recherche du profit). Cela facilite l’émergence de nouveaux virus face auxquels l’homme n’a aucune défense immunologique.
- La propriété privée des moyens de production et la concurrence inter-capitaliste rendent impossible une réponse rationnelle aux problèmes qui se posent à un système de production étendu et internationalisé.
- L’anarchie de la production capitaliste est incompatible avec la satisfaction des besoins urgents de la société, qui exigent planification et prévision.
- Le pouvoir de la bourgeoisie, fondé sur les États nationaux, ne peut faire face rapidement et efficacement à une pandémie qui ne connaît pas de frontières et qui exige pour être contenue une réponse mondiale coordonnée, fondée exclusivement sur des critères scientifiques et sur la solidarité humaine.
La réponse des Etats capitalistes est à l’opposé des besoins, elle met à nu leur nature d’instrument d’oppression d’une classe sur toutes les autres. Dans chaque pays, les mesures de protection et d’endiguement ne sont pas prises lorsque la défense de la santé publique nationale et internationale l’exige, mais quand il est devenu évident que le coût économique national de l’inertie devient plus élevé que celui des mesures.
En Chine, en Corée, en Iran, comme maintenant en Europe occidentale et aux États-Unis, nous avons vu des mesures manifestement nécessaires être retardées, tandis que le gouvernement calculait de quelle manière elles affecteraient les bénéfices actuels et futurs des entreprises nationales. Par exemple, au début de l’épidémie aux États-Unis, le gouvernement fédéral a refusé les tests de dépistage du virus COVID-19 importés et a préféré des tests produits nationalement qui ne fonctionnaient pas. En fin de compte, la débâcle économique ne peut être évitée, mais, par contre la maladie a bénéficié de quelques jours ou semaines précieux, selon les pays, pour se propager librement, multipliant ainsi sa dissémination.
L’un après l’autre, chaque État répand le nationalisme et exige une union sacrée entre les classes. La plupart déclarent des « états d’exception » qui donnent aux polices et à l’armée des pouvoirs pratiquement illimités sur la population. Ainsi, l’État bourgeois s’entraîne à la guerre civile et transforme les classes ouvrières en simple bétail à diriger et à contrôler pour qu’elles supportent, en silence, les souffrances que l’épidémie entraîne, l’effondrement des systèmes de santé publique, les dures mesures d’isolement et la débâcle économique qui se profile.
C’est tout ce que le système capitaliste peut offrir face à une situation catastrophique : le profit au prix de la souffrance publique, la répression et le contrôle social poussé à l’extrême.
Comme lors de chaque crise du capitalisme, les restrictions budgétaires des États disparaissent, remplacées par des cadeaux illimités aux groupes capitalistes. Certes, tant en Chine que dans les pays riches les plus touchés, la crainte explicite d’une explosion sociale oblige les gouvernements à adopter certaines mesures pour éviter la chute brutale dans la misère d’une partie importante de la population active (classe ouvrière et petite bourgeoisie). Mais tout cet argent, plus celui qu’ils donnent aux entreprises, sera plus que remboursé par les travailleurs dès que la crise sanitaire sera passée et que le rythme « normal » de production et d’exploitation reprendra. La paupérisation des masses par l’inflation ou pour leur faire payer la dette publique sera la continuation des épreuves.
Face à cette barbarie, les organisations qui prétendent défendre les travailleurs paralysent toute réponse. Les partis d’origine ouvrière et les syndicats resserrent les rangs autour des gouvernements et acceptent la militarisation du pouvoir, digne du temps de guerre. Cependant, la classe ouvrière ne doit pas accepter que l’ennemi de classe gère la crise contre elle. L’unité immédiate de toutes les organisations du mouvement ouvrier est nécessaire pour les revendications qui sont indispensables à la survie de la majorité :
- Expropriation sans indemnité de toutes les ressources privées nécessaires à la lutte contre la pandémie (santé privée, grandes chaînes hôtelières, usines, produits médicaux et pharmaceutiques…)
- Mise en place définitive d’une couverture médicale complète et gratuite pour tous les travailleurs du monde entier. Suppression des cotisations salariales. L’État et les employeurs ne doivent plus piller les caisses de sécurité sociale. Financement illimité des mesures de santé et de protection sociale par tous les postes budgétaires parasites des Etats, à commencer par les dépenses militaires et répressives, le financement des religions et de toutes les institutions archaïques (monarchie, sénat…).
- Nationalisation sans compensation de toutes les banques sous contrôle des travailleurs, afin de mettre toutes les ressources économiques à disposition pour les besoins sociaux.
- Interdiction de tout licenciement. Garantie de salaire à 100 % pendant toute la durée de la crise.
- Alimentation, santé et aide sociale garanties à toute la population qui en a besoin.
- Exemption de l’obligation d’aller travailler pour tous les parents ayant des enfants à la maison.
- Moratoire immédiat sur toutes les créances des familles de travailleurs (crédit immobilier, loyer, fournitures de base : eau, énergie, communications). Interdiction des expulsions de familles. Garantie de logement pour l’ensemble de la population.
- Collaboration internationale, sous le contrôle des travailleurs, pour la recherche, la distribution de matériel et de médicaments, etc. Organisation du contrôle par les travailleurs de la gestion de l’ensemble de la crise sanitaire (production nécessaire, santé, aide humanitaire aux populations à risque) avec des garanties de sécurité pour les personnes en bonne santé et les malades.
- Forces de répression et armée hors des villes. Auto-organisation des travailleurs et des voisins pour contrôler le respect des mesures nécessaires pour arrêter la pandémie.
La classe ouvrière doit répondre rapidement à la gravité de la situation. Mais nous devons également nous tourner vers l’avenir. Les éléments les plus conscients de la classe ouvrière doivent l’appeler à s’organiser pour devenir une classe dirigeante alternative, pour offrir à l’humanité un destin différent de la catastrophe permanente qu’est le système capitaliste pour la majorité de la population. Il n’y a pas d’autre choix : socialisme mondial ou barbarie.