Malgré l’abstention massive, le nouveau président de la 5e République a obtenu une large majorité à l’Assemblée nationale avec 308 députés sur 577 pour son parti, LREM. Le gouvernement Macron-Philippe mène, tambour battant une politique dictée par les organisations patronales CPME et le Medef, l’état-major de l’armée et des grands groupes capitalistes français.
Courant juin, Macron a prolongé l’état d’urgence instauré par son prédécesseur et son gouvernement vient de présenter un projet de loi « antiterroriste » qui le rendrait permanent. Sa visite le 2 juillet à Bamako avait pour but de parrainer une nouvelle coalition militaire entre 5 pays du Sahel pour soutenir l’intervention militaire française. De leur côté, le Premier ministre Philippe et celui des comptes publics Darmarin, tous deux ex-LR, ont profité du rapport de la Cour des comptes pour annoncer le gel du point d’indice des travailleurs de la fonction publique et rétabli le jour de carence Sarkozy-Fillon. En plus de ces premiers coups, le gouvernement a présenté le 28 juin, par la voix de la ministre du Travail Pénicaud, ex-DG adjointe de Dassault et ex-DRH de Danone, un projet de loi dit d’ « habilitation législative » pour permettre au pouvoir exécutif d’édicter lui-même des lois : « Six réformes complémentaires seront ainsi menées dans les 18 prochains mois. Elles entreront en vigueur pour certaines dès la fin de l’été » (projet, p. 2). La première a pour but de rendre le code du travail encore plus favorable aux capitalistes.
Contre les protections juridiques des travailleurs qui subsistent, le projet de loi prévoit d’accentuer ce qu’avait commencé la loi El Khomri : « reconnaître et attribuer une place centrale à la négociation collective d’entreprise » (article 1). Évidemment, les travailleurs devraient se soumettre à tout accord local car le projet prévoit d’harmoniser et simplifier « les conditions de recours et, le cas échéant (…) le régime juridique de la rupture du contrat de travail en cas de refus par le salarié des modifications de son contrat issues d’un accord collectif. » (art. 1). La loi autoriserait l’odieux chantage du référendum en « facilitant le recours à la consultation des salariés pour valider un accord » (art. 1) et si cela ne suffit pas en « modifiant les modalités d’appréciation du caractère majoritaire des accords ainsi que le calendrier et les modalités de généralisation de ce caractère majoritaire » (art. 1).
Le projet de loi prévoit de restreindre la représentation du personnel en « fusionnant en une seule instance les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le CHSCT » (art. 2), instance dont le gouvernement Macron fixera les droits et devoirs ! D’ailleurs, ces représentants auront une récompense pour leur « engagement syndical… par la reconnaissance de celui-ci dans le déroulement de carrière et les compétences acquises en raison de cet engagement » (art. 2). Enfin, les directions syndicales FO, CGT, CFDT, UNSA, FSU, Solidaires… seront, selon le projet, financées par le patronat avec « la possibilité pour le salarié d’apporter des ressources financées en tout ou partie par l’employeur au syndicat de son choix » (art. 2).
Le gouvernement veut faciliter les licenciements : barèmes et plafonds en cas de licenciement, la limitation des recours judiciaires en cas de licenciement, la facilitation des conditions du licenciement pour l’employeur notamment en assouplissant le périmètre géographique, le secteur d’activité, les catégories professionnelles (article 3). Il veut aussi flexibiliser davantage le CDI en ouvrant la porte « aux contrats à durée indéterminée conclus pour la durée d’un chantier ou d’une opération » (art. 3).
Enfin, Philippe annonce le 8 juillet aux « partenaires sociaux » qu’il va substituer au « compte pénibilité » qui permet une retraite anticipée un « compte prévention » qui éliminera la manutention de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les risques chimiques.
Bien que Macron ait toujours annoncé ses intentions, les directions syndicales CGT, CFDT, CFTC, FO, UNSA ont toutes accepté de discuter du projet de précarisation. De mi-juin à mi-juillet, pas moins de 64 rencontres sont prévues ! Entretemps, le projet d’habilitation est paru mais toutes bavassent encore au ministère. Dans le rôle des bons élèves, Jean Claude Mailly de FO : « La concertation va dans le bon sens » (Le Monde, 29 juin) ou encore Laurent Berger de la CFDT : « Il y a une phase de concertation, j’espère qu’elle sera loyale. » (Le Parisien, 28 juin). Dans le rôle de l’élève inattentif, Philippe Martinez de la CGT : « On a besoin d’un gouvernement qui nous dise ce qu’il va faire » (France info, 3 juillet). Il croit se dédouaner de sa trahison en programmant une journée d’action le 12 septembre… Pourtant, le résultat de 14 journées d’action au printemps 2016 fut l’adoption de la loi El Khomri. Au lieu d’une initiative symbolique, il faut rompre immédiatement la concertation avec le gouvernement et préparer la grève générale jusqu’au retrait du projet de loi et de ses ordonnances !
Ni le Front social, ni la FI, le PCF, LO, le NPA ne se prononcent contre les « concertations » en cours. Dans les syndicats, sur les lieux de travail et d’études, il faut exiger la rupture immédiate de la négociation de l’attaque gouvernementale annoncée. Ainsi, la majorité des salariés pourra se dégager de la collaboration de classe où tentent de les enfermer Mailly, Berger, Martinez et compagnie. Il faut imposer les AG sur cette question, s’organiser au-delà des boutiques syndicales en comités de lutte et d’action pour obtenir le retrait du projet d’ordonnance et battre le gouvernement du capital.
8 juillet 2017