Canada : grève des grutiers au Québec

TelegramWhatsappTwitter Facebook

Après l’attaque par le gouvernement de Philippe Couillard (Parti Libéral) de la grève des ouvriers du bâtiment du Québec en mai 2017 et la capitulation consécutive des directions syndicales, les grutiers québécois ont déclenché une grève le 18 juin dernier.

Elle a été déclarée « illégale », selon les standards de l’État bourgeois, car elle ne fut pas déclenchée après l’échéance de leur convention collective. Les travailleurs et les travailleuses du Québec, tout comme du reste du Canada, sont censés attendre l’autorisation de la classe dominante pour exercer un droit aussi élémentaire que celui de faire la grève pour défendre leurs intérêts face à des patrons de plus en plus voraces.

La sécurité était au cœur des revendications des grutiers, car la Commission de la construction du Québec, qui contrôle le secteur de la construction dans la province, a décidé de mettre en vigueur une nouvelle réglementation le 14 mai qui n’oblige plus à détenir un diplôme d’études professionnelles (DEP) pour opérer une grue. Le métier de grutier comporte des dangers, parfois mortels, et le fait d’alléger la qualification est une décision complètement irresponsable qui démontre le mépris total des capitalistes pour la santé et la sécurité au travail.

Le gouvernement provincial, les médias bourgeois et les patrons de la construction s’en sont donné à cœur joie pour dénigrer la vaillante lutte des grutiers. Le fait de débrayer « illégalement » au Québec est très risqué avec des possibilités d’amendes salées et de peines d’emprisonnement, comme c’est arrivé aux principaux dirigeants syndicaux lors de la grève générale de la fonction publique du Québec en 1972. La présidente de la CCQ, qui a été ministre du Travail sous le gouvernement du Parti Québécois de 1999 à 2001, a accusé les grutiers d’égoïsme.

Ils empêchent des gens de travailler. Ils empêchent que les chantiers se poursuivent comme prévu et allongent les inconvénients que les automobilistes peuvent vivre. Ils vont provoquer des coûts supplémentaires avec les impôts des Québécois. Il faut le faire. Ils sont au-dessus des lois eux autres. (Diane Lemieux, Québec Matin, 20 juin)

Une déclaration complètement démagogique et méprisante qui ne fait que montrer l’inquiétude de toute la représentation politique de la bourgeoisie face au défi que représentait la grève des grutiers.

Le Tribunal administratif du travail avait ordonné aux grutiers au travail le 21 juin sous peine de sanctions. Alors, les chefs des deux centrales qui regroupent les syndicats de grutiers, la FTQ-Construction et le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction, se sont empressés de sommer les grévistes de retourner au travail (1), ce qui a été obtenu le 25 juin. Les bureaucrates ont assurées les grutiers qu’ils soutenaient leurs revendications, mais qu’il faudrait utiliser « d’autres moyens » pour les défendre ! Une preuve supplémentaire du rôle traître des appareils syndicaux actuels qui cherchent par tous les moyens à défendre le système capitaliste malgré quelques déclarations creuses et symboliques pour duper les travailleurs et les travailleuses de base.

Depuis la fin de la grève, la Commission de la construction du Québec cherche par tous les moyens à noircir la lutte des grutiers en alléguant de menaces et d’une intimidation qui auraient été perpétrées par des militants syndicaux pour forcer la grève. Le 4 juillet, il y avait déjà 650 enquêtes menées par le CCQ. Le gouvernement fait toujours peser des menaces d’amendes sur le syndicat, pouvant aller jusqu’à 80 000$ par jour de grève « illégale ».

Le mouvement des grutiers québécois est un exemple à suivre pour l’ensemble de la classe ouvrière canadienne. La cause qu’ils défendent, au sujet de la santé et de la sécurité au travail, concerne tous les travailleurs et les travailleuses et n’a rien à voir avec un quelconque corporatisme contrairement aux accusations scandaleuses de Lemieux. La classe ouvrière au Québec et dans le reste du Canada doit se libérer du carcan des lois et réglementations bourgeoises qui entravent par tous les moyens possibles le droit de grève.

Le Collectif Révolution Permanente au Canada revendique l’abolition de toutes ces dispositions anti-ouvrières, comme premier pas vers l’intensification de la lutte de classes. Nous préconisons aussi la lutte contre les bureaucrates corrompus au sein des organisations syndicales et l’unification syndicale dans une confédération pancanadienne, démocratique et de lutte de classe. Pour cela, il faut créer un parti ouvrier révolutionnaire et internationaliste, seul véhicule permettant la victoire des luttes ouvrières et de la révolution socialiste pour en finir avec ce système basé sur la recherche du profit maximum et l’exploitation de la majorité par une infime minorité d’exploiteurs.

Montréal, 30 juillet 2018, Philippe Valois

(1) http://www.tvanouvelles.ca/2018/06/21/deux-centrales-demandent-le-retour-au-travail-des-grutiers